Ouf ! ça y est ! Après des semaines de disette, le Mail arrive dans nos boîtes ! On n'y croyait plus, on a failli liquider le Bureau. Il est là, le voici: le premier Mail du Mercredi de début août. (Je l'ai écrit moi-même pour gagner du temps).


Le Mail du Mercredi
Bonjour à tous, c'est moi Éléonore,

Question piercing, je suppose que vous n'êtes pas tous au fait des nouveautés. On ne vous chatouillera pas trop sur le sujet. MAIS. quand vous étiez enfant, vous, les filles, vous avez peut-être eu droit au perçage de vos deux oreilles ? Vous vous souvenez peut-être que ça faisait mal, que ça saignait que ça grattait ? Mais vous souvenez-vous du prix que ça coûtait ? Ah. L'argent, toujours l'argent, vous me direz. Oui, mais quand même. Moi, j'aurais misé sur 50 francs... Dans les 7, 8 euros les deux oreilles percées. Eh bien, non. Attendez que je vous raconte l'histoire:
Le week end dernier, je rentre de vacances dans l'Est de la France. J'habite Brest, comme vous sans doute. Envie de me faire percer les oreilles. Enfin, UNE oreille. Donc je vais au centre Coat Ar Gueven et je monte au 1er à Histoire d'Or. Là, les deux femmes, une blonde qui se cache parce qu'elle va finir son service, l'autre brune, qui s'occupe d'un client. La blonde m'informe que ça va me coûter 14 euros pour une fichue paire de prothèses moches, même pas beaucoup de choix dans les couleurs, c'est acier ou c'est doré, la coccinelle c'est 22 euros, le chou-fleur 30, le rubis 44. Bon. Je respire un bon coup, merci beaucoup, au revoir, je vais chez Claire's juste à côté. 14 euros 90. Ok... c'est une blague ? Non, c'est une pochette, le "pack piercing", et que je te tutoie "tu veux repartir avec 2 piercings d'oreille et emmener ton désinfectant le spray Minnie et un sachet de mouchoirs en papier ? N'ai pas peur, ça fait un peu mal mais tout le monde est là chez Claire's pour te raconter des petites histoires qui te feront oublier ton premier Piercing." Ok, je sors, les deux prothèses acier premier prix sont en rupture de stock de toute façon. Je descends la rue Jean Jaurès pour aller me faire percer ailleurs, et là je tombe devant une "vraie" bijouterie, pas une chaîne, pas une franchise, pas un hangar, une vraie bijouterie. Avec le bijoutier. Le bijoutier, l'air très inquiet me salue du regard et court partout: à sa gauche, un couple de vieux assis qui attend son bijou commandé plus tôt. À sa droite, une nana type condamnée à mort qui attend son sort assise sur une chaise moins confortable (=commande moins chère). Moi, debout, en nage (il fait très chaud et la perspective de rentrer bredouille les lobes intacts commence à me stresser). Le bijoutier envoie la dose de salamalèques aux deux vieux, et que je te prenne des nouvelles des enfants, et que je te promette de faire de mon mieux pour préparer l'autre bague très vite, d'ailleurs il la laisse bien en vue sur l'établi. Ils s'en vont, un petit paquet un petit sachet, le vieux range son larfeuille dans sa banane sécurisée de ceinture, et c'est au tour de la condamnée de se lever et de récupérer ("désolé, je suis tout seul, les deux enfants ont la varicelle c'est pas de chance, voilà les 2 piles boutons, ça nous fera 5000 euros tout rond merci beaucoup, encore désolé, au revoir.").
Ça y est, c'est à moi. "Oui? vous désirez?" "Je voudrais connaître vos tarifs pour percer les oreilles." Grand sourire (ouf je vais pouvoir me reposer et boire un grand verre d'eau): "Ah désolé, non, nous ne faisons plus cela. Allez voir chez Claire's ou bien mieux encore, les perceurs et tatoueurs derrière la rue de Lyon, là vous allez trouver, nous on ne fait plus, d'ailleurs le pistolet n'est plus réglementaire, c'est complètement différent maintenant, on ne fait plus, non non non, pas du tout." Interloquée, je sors dans la chaleur et poursuis mon chemin (eh oui, une Forêt ne baisse jamais les bras, non). Et là, un peu plus bas, juste après Jacadi, une fraîcheur de vivre me tombe sur le coin du nez. Une marche, un sourire, une femme adorable, une bijouterie. "Bonjour, pour percer les oreilles, c'est?... "Oui ! Bien sûr ! un instant, oh la la il fait chaud, installez-vous." Et la dame me dévisse un tabouret, sort le stylo, le pack pro perçage d'oreilles comme avant, et me perce. 9 euros l'oreille, 18 euros la paire, impeccable, le pistolet à l'ancienne, le sourire, la clim. Ça fait du bien d'être bien percée !

Et tout ça c'est chez Carat Ctère, en bas de la rue Jean Jaurès, tout près de la mairie. Eh oui ! Bon mercredi à tous,

Éléonore







Contributeurs
Eleonore Forêt
Loïc Boyer
Charber (de son vrai nom Charlotte Béranger), née en 1975 à Ploudalmézeau, est prof de yoga et de méditation à Ibiza. Charber habite une yourte, elle a débuté un commerce en ligne de vêtements en macramé de chanvre après avoir arrêté le speed et la coke ("trop de bad vibes"). Elle fume toujours pas mal de beuh et prend des shrooms mais "c'est naturel". Yes I!

Pierre Hexum a 19 ans. Il est professeur de gym à Sacramento. Il collabore avec Eléonore au blog L'Imprimante, dans la rubrique Le Mail du Mercredi, depuis les années 80.

Eléonore Forêt, bientôt 37 ans, toujours tête de linotte, ne tire aucune leçon des enseignements de la vie. Dessine, dort, nage, mange à Brest depuis mai 2013.