A Paris avec avocats notaires huissiers greffiers

11 décembre 2014


Ce mercredi avant de prendre le train de huit heures sept pour Paris, j’entends au Journal de France Culture qu’une manifestation d’avocats doit avoir lieu entre la Bastille et l’Opéra. Il s’agit de protester contre une loi du Ministre Macron, mais comme ce dernier n’a pas l’air de savoir ce qu’il veut, le représentant des avocats ne peut plus dire précisément l’objet du mécontentent.
-Dans ce cas, pourquoi ne pas annuler la manifestation ? demande le journaliste.
-On n’arrête pas comme ça des milliers d’avocats venus de toute la France.
De la Bastille à l’Opéra, c’est aussi mon parcours. Cependant, je ne trouve pas trace d’eux lorsque après le Book-Off de Ledru-Rollin, le bus Quatre-Vingt-Six m’emmène au Quartier Latin. Je le quitte à Cluny en même temps qu’un sale môme qui tape sur la tête d’une passagère avant de descendre et qu’une nymphette peinant à mettre sur ses épaules un violoncelle aussi grand qu’elle.
Après un traditionnel déjeuner rue de la Harpe à l’Oie Qui Fume, je vais à pied jusqu’au Centre Pompidou pour y boire un café de la cafetière à La Mezzanine. La ruée espérée pour Koons n’est pas au rendez-vous. Aucune annonce n’est nécessaire pour indiquer la durée de l’attente. Il va bientôt falloir engager une chorale pour dire à Jeff qu’il n’est pas tout seul.
Sorti de là, je tente le bus Vingt-Et-Un, mais celui-ci, comme d’autres, n’arrive pas. « Manifestation », indique l’affichage. Je me rabats sur le métro. Autour de l’Opéra seuls les piétons passent. La situation est la même à ma sortie du Book-Off de Quatre-Septembre. Les milliers d’avocats sont accompagnés de notaires, d’huissiers et de greffiers. La nuit va tomber. C’est l’heure, annonce la sono, pour la province de rejoindre les bus et de rentrer chez elle. Je croise le «Barreau d’Angers en colère » dans sa tenue de travail, marchant d’un bon pas derrière la banderole. Un autre groupe suit de près un porteur de drapeau tricolore à la façon des touristes qui craignent de perdre leur guide. Dans le caniveau gît un drapeau de Heffo. Les Céhéresses sont pépères dans leurs camions rue Auber, papotant ou jouant à des jeux vidéo. Autour c’est un foutoir de première, bus et voitures bloqués claque-sonnant à tout va. Ce désordre s’étend jusqu’à la gare Saint-Lazare.
Dans le train du retour, je lis en diagonale Anquetil tout seul de Paul Fournel (Le Seuil) que je destine à l’un que je connais (s’il en veut), encore un livre bénéficiant d’un envoi de l’auteur à l’une qui n’aura pas souhaité le garder : « Pour Christine, ce portrait du grand JACQUES par le petit paul. Et la bise cycliste de Paul. ».
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Parmi les autres livres boucofiés : La vie à en mourir (Lettres de fusillés 1941-1944) (Taillandier), Le Club des suicidaires de Stevenson (Arthaud), Le Crépuscule des pensées de Cioran (Biblio Essais), Discours sur le Fils-de-Pute d’Alberto Pimenta (L’insomniaque). Lorsque je tape le titre de ce dernier sur PriceMinister m’est suggéré comme lien commercial : « Des femmes cherchent des hommes pour des rencontres ».
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Dans le train de l’aller quatre femmes quinquagénaires montées à Val-de-Reuil et n’y habitant sûrement pas :
-J’ai essayé de lire Modiano mais c’est spécial.
-Spécial comment ?
-On sait pas très bien où il veut en venir.
-Mais il a eu des prix, il me semble ?
-Oui, le Nobel.
-Ils ont des prix mais c’est pas des gens comme nous qui les choisissent.
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« Avocat ? Notaire ? Charcutier ? », plaisanterie coutumière de frère Jacques, qui travaillait aux renseignements de France Télécom, quand on lui demandait le numéro de Maître Untel.