Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
21 novembre 2025
En ce jour de pluie, je me replonge dans le Journal de Julie Manet au moment de son séjour avec sa mère Berthe Morisot, quand elle avait quinze ans, à Roche Plate devant laquelle je passais chaque jour en octobre dernier. Lors de ce séjour, la jeune Julie put entrer dans la chapelle de Saint-Marc à Tréveneuc. Intéressant aussi ce qu’elle dit l’année précédente de « Monsieur Monet » à Giverny et les suivantes du Mont-Saint-Michel et de « Monsieur Degas » à Paris.
Lundi trente octobre mil huit cent quatre-vingt-treize : Parties ce matin de bonne heure pour Giverny. Pluie toute la journée. Monsieur Monet nous a montré ses cathédrales. Il y en a vingt-six, elles sont magnifiques, quelques-unes toutes violettes, d’autres blanches, jaunes, avec un ciel bleu, roses avec un ciel un peu vert, puis une dans le brouillard, deux ou trois dans l’ombre au bas et éclairées des rayons du soleil sur les tours. Ces cathédrales, admirablement dessinées, sont faites par masses, et cependant on y découvre chaque détail, elles sont tellement dans l’air. Cela me semble si difficile de ne pas dessiner tous les détails.
Ces tableaux de Monsieur Monet donnent une bonne leçon de peinture.
Mercredi huit août mil huit cent quatre-vingt-quatorze : Nous partons aujourd’hui pour la Bretagne par le train de 8 heures du soir, nous descendrons à Saint-Brieuc pour aller à Portrieux.
Jeudi neuf août mil huit cent quatre-vingt-quatorze : La route de Saint-Brieuc à Portrieux est assez longue, on traverse des espèces de petites montagnes, d’une très jolie forme, il y a beaucoup de routes en pente, partout sur la route on voit des femmes avec des châles et de grands bonnets qui ont l’air d’ailes, puis en charrette des religieuses tout en blanc, cela est fort pittoresque.
Dimanche dix-neuf août mil huit cent quatre-vingt-quatorze : A Saint-Marc, il se trouve quelque chose vraiment de très touchant et très triste : c’est une chapelle élevée à la mémoire des marins bretons ayant péri en mer. Tous leurs noms sont inscrits près de l’autel, oh ! comme il y en a, cette mer terrible en a tant englouti, je la croyais moins cruelle.
Samedi trois août mil huit cent quatre-vingt-quinze : Nous prenons un déjeuner fade avec cette omelette jaune de la mère Poulard et ensuite nous visitons l’abbaye en troupeau comme des moutons.
Mercredi quatre mars mil huit cent quatre-vingt-seize : Nous trouvons Monsieur Degas tout seul accrochant des dessins dans la salle du fond. Il répète constamment qu’il ne s’occupe pas du public, ces gens qui se promènent avec des yeux tout ronds et regardent la peinture ou plutôt la regardent sans la voir en disant : « C’est beau, c’est très beau ».
Lundi trente octobre mil huit cent quatre-vingt-treize : Parties ce matin de bonne heure pour Giverny. Pluie toute la journée. Monsieur Monet nous a montré ses cathédrales. Il y en a vingt-six, elles sont magnifiques, quelques-unes toutes violettes, d’autres blanches, jaunes, avec un ciel bleu, roses avec un ciel un peu vert, puis une dans le brouillard, deux ou trois dans l’ombre au bas et éclairées des rayons du soleil sur les tours. Ces cathédrales, admirablement dessinées, sont faites par masses, et cependant on y découvre chaque détail, elles sont tellement dans l’air. Cela me semble si difficile de ne pas dessiner tous les détails.
Ces tableaux de Monsieur Monet donnent une bonne leçon de peinture.
Mercredi huit août mil huit cent quatre-vingt-quatorze : Nous partons aujourd’hui pour la Bretagne par le train de 8 heures du soir, nous descendrons à Saint-Brieuc pour aller à Portrieux.
Jeudi neuf août mil huit cent quatre-vingt-quatorze : La route de Saint-Brieuc à Portrieux est assez longue, on traverse des espèces de petites montagnes, d’une très jolie forme, il y a beaucoup de routes en pente, partout sur la route on voit des femmes avec des châles et de grands bonnets qui ont l’air d’ailes, puis en charrette des religieuses tout en blanc, cela est fort pittoresque.
Dimanche dix-neuf août mil huit cent quatre-vingt-quatorze : A Saint-Marc, il se trouve quelque chose vraiment de très touchant et très triste : c’est une chapelle élevée à la mémoire des marins bretons ayant péri en mer. Tous leurs noms sont inscrits près de l’autel, oh ! comme il y en a, cette mer terrible en a tant englouti, je la croyais moins cruelle.
Samedi trois août mil huit cent quatre-vingt-quinze : Nous prenons un déjeuner fade avec cette omelette jaune de la mère Poulard et ensuite nous visitons l’abbaye en troupeau comme des moutons.
Mercredi quatre mars mil huit cent quatre-vingt-seize : Nous trouvons Monsieur Degas tout seul accrochant des dessins dans la salle du fond. Il répète constamment qu’il ne s’occupe pas du public, ces gens qui se promènent avec des yeux tout ronds et regardent la peinture ou plutôt la regardent sans la voir en disant : « C’est beau, c’est très beau ».
20 novembre 2025
À pied jusqu’au Square Verdrel puis, la pluie de retour, je saute dans le bus Effe Sept gratuit ce mercredi pour cause de Foire Saint-Romain pour atteindre la Gare sans me mouiller. Dans la voiture Trois du sept heures vingt-deux pour Paris, je lis Une enfance de château de Lord Berners, compositeur d’avant-garde admiré par Stravinski, peintre et auteur de quatre volumes de souvenirs. Ce premier, consacré à son éducation anglaise et à ses premiers émois homosexuels, est le seul traduit en français. À l’extérieur, ça pleut.
Bondés, les métros Trois et Huit qui m’emmènent à Ledru-Rollin. À la sortie, une vague éclaircie m’incite à rejoindre le Marché d’Aligre. Emile n’y est pas. Amine oui, avec des nouveautés, mais rien pour moi. Au Camélia, c’est assis que je bois le café car il me faut attendre un moment avant qu’il soit onze heures. Ma lecture du jour ne me déçoit pas heureusement.
Au Book-Off de Ledru-Rollin, ma récolte de livres à un euro est modeste : Les Arcs de Saint-Pierre de Gil Jouanard (Editions du Laquet) et Lettres à la Bien-aimée et autres poèmes de Thierry Metz (Poésie Gallimard). J’y ajoute Hymnes à la haine de Dorothy Parker (Phébus libretto) que je destine à celui avec qui j’ai rendez-vous à midi, midi et quart, chez Au Diable des Lombards.
Je choisis une table tranquille sur le côté et l’ami d’Orléans me rejoint dans les temps. Il m’explique la raison de sa présence dans la capitale. On l’attend à Bologne où il donnera une conférence sur l’œuvre de Nicole Claveloux exposée au Festival A occhi aperti (Les yeux ouverts). Il doit prendre un avion en fin d’après-midi et aucun train dans la journée entre Orléans et Paris. Entrée plat pour moi et plat dessert pour lui. Nous discutons de nos vies respectives.
À l’issue de ce repas, bien que cela le charge un peu, mais je ne savais pas qu’il prenait l’avion, je lui donne Hymnes à la haine de Dorothy Parker ainsi que, trouvé autrefois chez Book-Off, Chier dans le cassetin aux apostrophes de David Alliot (Horay) qui recense six cents mots de l’argot des métiers du livre. À quoi j’ajoute des livres pour enfants qui j’espère lui seront utiles, certains anciens et étrangers, prélevés au fil des mois dans les boîtes à livres rouennaises.
Nous nous séparons rue Saint-Martin, lui allant visiter des galeries d’art dans le Marais, moi descendant au sous-sol du Book-Off à la recherche de livres à un euro. Je mets dans mon panier Soliloque du prisonnier de Charles Maurras (L’Herne) et, comme antidote, Chez les Weil (André et Simone) de Sylvie Weil (Phébus libretto). Après avoir hésité, j’ajoute C’est encore moi qui vous écris de Marie Billetdoux (J’ai Lu), deux gros volumes de mil quatre cents quatre-vingt-deux pages en coffret qui contiennent tous les écrits qui ont jalonné sa vie entre mil neuf cent soixante-huit et deux mille huit, sa correspondance, son journal intime, ses documents administratifs et des articles de presse. Je les lirai peut-être. Je me souviens comme elle était jolie au temps de son premier roman quand elle s’appelait Raphaële et était reçue à Apostrophes par Bernard Pivot.
*
Comme les événements dans les romans de Henry James, elle était toujours « sur le point d’arriver. » (Lord Berners Une enfance de château)
*
Parmi les compositions de Lord Berners : les Trois petites marches funèbres « pour un homme d’Etat » « pour un canari » « pour une tante à héritage » (mil neuf cent seize).
*
Dans sa propriété, Faringdon House, près d’Oxford, il fit construire une tour de quarante-trois mètres de haut au pied de laquelle il mit un écriteau : « Members of the Public committing suicide from this tower do so at their own risk ».
Bondés, les métros Trois et Huit qui m’emmènent à Ledru-Rollin. À la sortie, une vague éclaircie m’incite à rejoindre le Marché d’Aligre. Emile n’y est pas. Amine oui, avec des nouveautés, mais rien pour moi. Au Camélia, c’est assis que je bois le café car il me faut attendre un moment avant qu’il soit onze heures. Ma lecture du jour ne me déçoit pas heureusement.
Au Book-Off de Ledru-Rollin, ma récolte de livres à un euro est modeste : Les Arcs de Saint-Pierre de Gil Jouanard (Editions du Laquet) et Lettres à la Bien-aimée et autres poèmes de Thierry Metz (Poésie Gallimard). J’y ajoute Hymnes à la haine de Dorothy Parker (Phébus libretto) que je destine à celui avec qui j’ai rendez-vous à midi, midi et quart, chez Au Diable des Lombards.
Je choisis une table tranquille sur le côté et l’ami d’Orléans me rejoint dans les temps. Il m’explique la raison de sa présence dans la capitale. On l’attend à Bologne où il donnera une conférence sur l’œuvre de Nicole Claveloux exposée au Festival A occhi aperti (Les yeux ouverts). Il doit prendre un avion en fin d’après-midi et aucun train dans la journée entre Orléans et Paris. Entrée plat pour moi et plat dessert pour lui. Nous discutons de nos vies respectives.
À l’issue de ce repas, bien que cela le charge un peu, mais je ne savais pas qu’il prenait l’avion, je lui donne Hymnes à la haine de Dorothy Parker ainsi que, trouvé autrefois chez Book-Off, Chier dans le cassetin aux apostrophes de David Alliot (Horay) qui recense six cents mots de l’argot des métiers du livre. À quoi j’ajoute des livres pour enfants qui j’espère lui seront utiles, certains anciens et étrangers, prélevés au fil des mois dans les boîtes à livres rouennaises.
Nous nous séparons rue Saint-Martin, lui allant visiter des galeries d’art dans le Marais, moi descendant au sous-sol du Book-Off à la recherche de livres à un euro. Je mets dans mon panier Soliloque du prisonnier de Charles Maurras (L’Herne) et, comme antidote, Chez les Weil (André et Simone) de Sylvie Weil (Phébus libretto). Après avoir hésité, j’ajoute C’est encore moi qui vous écris de Marie Billetdoux (J’ai Lu), deux gros volumes de mil quatre cents quatre-vingt-deux pages en coffret qui contiennent tous les écrits qui ont jalonné sa vie entre mil neuf cent soixante-huit et deux mille huit, sa correspondance, son journal intime, ses documents administratifs et des articles de presse. Je les lirai peut-être. Je me souviens comme elle était jolie au temps de son premier roman quand elle s’appelait Raphaële et était reçue à Apostrophes par Bernard Pivot.
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Comme les événements dans les romans de Henry James, elle était toujours « sur le point d’arriver. » (Lord Berners Une enfance de château)
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Parmi les compositions de Lord Berners : les Trois petites marches funèbres « pour un homme d’Etat » « pour un canari » « pour une tante à héritage » (mil neuf cent seize).
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Dans sa propriété, Faringdon House, près d’Oxford, il fit construire une tour de quarante-trois mètres de haut au pied de laquelle il mit un écriteau : « Members of the Public committing suicide from this tower do so at their own risk ».
18 novembre 2025
Ce mardi est le jour de mon bilan annuel chez le médecin traitant. De bon matin, je traverse la ville de Rouen et monte vers le Boulingrin où j’arrive un peu essoufflé mais bien moins qu’au temps où je souffrais des suites d’un possible Covid.
J’ai rendez-vous à huit heures quarante-cinq. Je suis donc seul dans la salle d’attente quand il vient me chercher. Il commence par m’ausculter. Mon cœur bat un peu vite. Ma tension est plus élevée que les années précédentes tout en restant dans la norme. Bizarrement, je pèse quatre kilos de moins que les précédentes années. « J'ai pourtant mangé au restaurant tous les jours en septembre et octobre », lui dis-je. Nous faisons ensuite le point sur ce qui ne va pas chez moi. À commencer par mon envie d’uriner trop souvent, contre laquelle il me renouvelle mon traitement. Puis ma possible allergie à Cosidim et son générique qui me rend les paupières irritées contre laquelle il me donne un traitement pour six mois en me disant de voir ça avec l’ophtalmo. Il me prescrit une nouvelle fois la prise de sang nécessaire pour surveiller le cholestérol et le risque de diabète. Il me fait une ordonnance pour les semelles orthopédiques que je dois porter mais dont je me dispense depuis l’été dernier après qu’elles m’ont abîmé les pieds dans mes nouvelles chaussures quand j’étais à Saint-Raphaël et à Colmar. Je lui parle de la tache que j’aurais sur la tête, dont personne ne m’avait averti jusqu’à ce que ma coiffeuse l’été dernier ne me l’indique en précisant qu’elle lui semblait s’être agrandie. « Ce n’est rien, me dit-il, c’est bénin mais avec l’âge cela va se voir de plus en plus. » Nous faisons également le point sur mes vaccinations et il m’apprend que je n’ai pas besoin d’un rappel contre le tétanos. Mon carnet de vaccination n’était pas rempli correctement, il le corrige. Prochain rappel en deux mille trente-deux. « Il faut pouvoir rester en vie jusqu’à cette date », lui dis-je. Il me répond qu’il n’en doute pas.
Je m’apprête à lui donner ma Carte Vitale mais il m’indique qu’il ne peut pas l’utiliser. Il fait partie des médecins qui se sont fait pirater et le problème n’est toujours pas résolu. Il me donne donc une feuille de soin à l’ancienne que je vais devoir envoyer à Mayenne, l’unique adresse désormais de la Mutuelle Générale de l’Education Nationale.
*
Cette Mutuelle Générale de l’Education Nationale qui m’envoie un tas de courriers pour que je m’inscrive sur Ameli. Ce que je tente finalement, mais impossible. Ma Carte Vitale est trop ancienne, elle ne dispose pas d’un numéro de série. Il faut dire qu’elle date de mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, l’année de mon arrivée à Rouen.
J’ai rendez-vous à huit heures quarante-cinq. Je suis donc seul dans la salle d’attente quand il vient me chercher. Il commence par m’ausculter. Mon cœur bat un peu vite. Ma tension est plus élevée que les années précédentes tout en restant dans la norme. Bizarrement, je pèse quatre kilos de moins que les précédentes années. « J'ai pourtant mangé au restaurant tous les jours en septembre et octobre », lui dis-je. Nous faisons ensuite le point sur ce qui ne va pas chez moi. À commencer par mon envie d’uriner trop souvent, contre laquelle il me renouvelle mon traitement. Puis ma possible allergie à Cosidim et son générique qui me rend les paupières irritées contre laquelle il me donne un traitement pour six mois en me disant de voir ça avec l’ophtalmo. Il me prescrit une nouvelle fois la prise de sang nécessaire pour surveiller le cholestérol et le risque de diabète. Il me fait une ordonnance pour les semelles orthopédiques que je dois porter mais dont je me dispense depuis l’été dernier après qu’elles m’ont abîmé les pieds dans mes nouvelles chaussures quand j’étais à Saint-Raphaël et à Colmar. Je lui parle de la tache que j’aurais sur la tête, dont personne ne m’avait averti jusqu’à ce que ma coiffeuse l’été dernier ne me l’indique en précisant qu’elle lui semblait s’être agrandie. « Ce n’est rien, me dit-il, c’est bénin mais avec l’âge cela va se voir de plus en plus. » Nous faisons également le point sur mes vaccinations et il m’apprend que je n’ai pas besoin d’un rappel contre le tétanos. Mon carnet de vaccination n’était pas rempli correctement, il le corrige. Prochain rappel en deux mille trente-deux. « Il faut pouvoir rester en vie jusqu’à cette date », lui dis-je. Il me répond qu’il n’en doute pas.
Je m’apprête à lui donner ma Carte Vitale mais il m’indique qu’il ne peut pas l’utiliser. Il fait partie des médecins qui se sont fait pirater et le problème n’est toujours pas résolu. Il me donne donc une feuille de soin à l’ancienne que je vais devoir envoyer à Mayenne, l’unique adresse désormais de la Mutuelle Générale de l’Education Nationale.
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Cette Mutuelle Générale de l’Education Nationale qui m’envoie un tas de courriers pour que je m’inscrive sur Ameli. Ce que je tente finalement, mais impossible. Ma Carte Vitale est trop ancienne, elle ne dispose pas d’un numéro de série. Il faut dire qu’elle date de mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, l’année de mon arrivée à Rouen.
14 novembre 2025
L’exposition hommage à Clovis Trouille organisé par la Galerie Arts Factory à l'occasion du cinquantième anniversaire de la mort de celui-ci se termine le quinze novembre. Il est temps d’y aller, me suis-je dit à Paris ce mercredi, car j’aime cet artiste qui se désignait voyant, voyou et voyeur, qui fut un temps associé au mouvement surréaliste (qualifié de grand maître du tout est permis par André Breton) et qui s’en éloigna rapidement préférant n'adhérer qu'à lui-même.
Mon sac confié à l’homme de l’accueil, je passe de l’étage au sous-sol où quinze artistes revisitent son œuvre entre détournements, réappropriations et relectures. Ce sont Gilles Berquet, Stéphane Blanquet, Pakito Bolino, Marie-Pierre Brunel, Coco, Foolz, Gérard Lattier, Mïrka Lugosi, Maya McCallum, Stu Mead, Moolinex, Jean-Luc Navette, Tom de Pékin, Amandine Urruty et Anne Van Der Linden.
L’ensemble est complété par des documents d'archives, des reproductions et des éditions limitées. Une place particulière est accordée au peintre Gérard Lattier, aujourd'hui âgé de quatre-vingt-sept ans, qui entretint au cours des années soixante une correspondance avec Clovis Trouille.
Beaucoup des œuvres présentées sont vendues. Une qui ne l’est pas me plaît bien, le grand tableau d’Anne Van Der Linden Un p’tit air de Mona Lisa. Elle l’a cette femme près de qui un homme nu se branle sous le regard baveux d’un chien tandis qu’à l’arrière-plan une innocente cueille la pomme.
*
Souvenir de l’exposition Clovis Trouille que je vis un mercredi, bien accompagné, au Musée de Picardie à Amiens. C’était en août deux mille quatorze.
Mon sac confié à l’homme de l’accueil, je passe de l’étage au sous-sol où quinze artistes revisitent son œuvre entre détournements, réappropriations et relectures. Ce sont Gilles Berquet, Stéphane Blanquet, Pakito Bolino, Marie-Pierre Brunel, Coco, Foolz, Gérard Lattier, Mïrka Lugosi, Maya McCallum, Stu Mead, Moolinex, Jean-Luc Navette, Tom de Pékin, Amandine Urruty et Anne Van Der Linden.
L’ensemble est complété par des documents d'archives, des reproductions et des éditions limitées. Une place particulière est accordée au peintre Gérard Lattier, aujourd'hui âgé de quatre-vingt-sept ans, qui entretint au cours des années soixante une correspondance avec Clovis Trouille.
Beaucoup des œuvres présentées sont vendues. Une qui ne l’est pas me plaît bien, le grand tableau d’Anne Van Der Linden Un p’tit air de Mona Lisa. Elle l’a cette femme près de qui un homme nu se branle sous le regard baveux d’un chien tandis qu’à l’arrière-plan une innocente cueille la pomme.
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Souvenir de l’exposition Clovis Trouille que je vis un mercredi, bien accompagné, au Musée de Picardie à Amiens. C’était en août deux mille quatorze.
13 novembre 2025
Faute de tarif adapté dans mon habituel, j’innove ce mercredi en prenant le train Nomad de huit heures pour Paris et en voyageant à l’étage, arrivée prévue dans la capitale à neuf heures vingt. J’y lis Blesse, ronce noire de Claude Louis-Combet. Ma voisine d’outre couloir, qui porte une perruque pour masquer la calvitie due à un traitement anticancer, lit la Déclaration des Droits de la Femme et de la Citoyenne d’Olympe de Gouges. La Députée, Socialiste, voyage en première pour aller voter la suspension de la réforme des retraites.
Un ciel bleu accompagne l’arrivée à Paris. Le bus Vingt-Neuf part dès que je suis assis. Une jeune bourgeoise veut descendre à Victoires. Elle ne sait pas prendre le bus, dit-elle au chauffeur. « Ça sera annoncé », lui dit-il. Bien qu’elle n’ait pas sonné, il s’arrête. Elle descend par la porte avant sans un mot. « Même pas au revoir », constate-t-il.
Je reste peu au Marché d’Aligre où Emile essaie de se débarrasser de ses vieilleries en vendant un euro le livre. Au Camélia, où je bois un café au comptoir, l’habituelle vieille petite dilapide sa retraite dans les jeux à perdre. « Ah ! ils ont raison quand ils disent qu’on ne gagne jamais », soliloque-t-elle. Je lis dans Le Parisien comment les spectateurs de la Cinémathèque ont été dévorés par des punaises de lit en présence de Sigourney Weaver (ce n’est pas une défèque niouze russe).
A onze heures moins cinq, je suis devant chez Tonton Lulu où j’ai rendez-vous avec l’un à qui j’ai vendu trois livres pour la mirifique somme de huit euros. La transaction effectuée, direction Book-Off où je ne dépense qu’un euro pour Parce que la nuit de Chloé Thomas (Bibliothèque Rivages).
De là non loin au Rallye où je commande mon sempiternel hareng pomme à l’huile, confit de canard pommes sautées et café. Sorti de ce Péhemmu chinois, je remonte la rue de Charonne jusqu’à Arts Factory. La visite de l’exposition en cours terminée, je rejoins l’arrêt de bus du Soixante-Seize en face du Rallye. Un arrive dans lequel je monte pour rejoindre l’Hôtel de Ville.
On entend toujours le bruit des travaux de la future boulangerie au sous-sol du Book-Off de Saint-Martin, moins fort heureusement. Parmi les livres à un euro, je trouve d’abord Portrait d’une femme romanesque Jean Voilier de Célia Bertin (Editions de Fallois) puis, perdu dans les romans, Vider les lieux d’Olivier Rolin (Gallimard) au moment même où sur Fip Jane Birkin chante Encore lui, une chanson mauvais genre signé malsain Gainsbourg, comme le nommait David McNeil. Ma dernière lecture de lit est précisément le journal de Jane Birkin, Post-scriptum. Un journal on ne peut plus intime où l’on en apprend beaucoup sur elle-même, sur les hommes qui ont partagé sa vie, Serge Gainsbourg, Jacques Doillon et Olivier Rolin et sur ses filles, Kate, Charlotte et Lou. Quand la première se suicide, elle cesse d’écrire.
L’Importun m’accueille encore une fois pour un café verre d’eau lecture. J’achève Blesse, ronce noire de Claude Louis-Combet, un récit inspiré par l’histoire de Georg Trakl et de sa sœur et qui se terminera donc mal. Il ne tenait qu’à elle de s’arrêter sur le chemin, elle le ferait bientôt, de se retourner vers son frère, d’ouvrir sa robe et de dire, ainsi qu’elle l’avait écrit : Prends, je t’appartiens, prends cette sœur qui t’es réservée, et blesse, blesse-moi, ronce noire.
*
Sur le trottoir de la rue de Charonne, une cabane en carton sur laquelle est inscrit : « Abri de SDF. Merci de ne pas uriner. »
Un ciel bleu accompagne l’arrivée à Paris. Le bus Vingt-Neuf part dès que je suis assis. Une jeune bourgeoise veut descendre à Victoires. Elle ne sait pas prendre le bus, dit-elle au chauffeur. « Ça sera annoncé », lui dit-il. Bien qu’elle n’ait pas sonné, il s’arrête. Elle descend par la porte avant sans un mot. « Même pas au revoir », constate-t-il.
Je reste peu au Marché d’Aligre où Emile essaie de se débarrasser de ses vieilleries en vendant un euro le livre. Au Camélia, où je bois un café au comptoir, l’habituelle vieille petite dilapide sa retraite dans les jeux à perdre. « Ah ! ils ont raison quand ils disent qu’on ne gagne jamais », soliloque-t-elle. Je lis dans Le Parisien comment les spectateurs de la Cinémathèque ont été dévorés par des punaises de lit en présence de Sigourney Weaver (ce n’est pas une défèque niouze russe).
A onze heures moins cinq, je suis devant chez Tonton Lulu où j’ai rendez-vous avec l’un à qui j’ai vendu trois livres pour la mirifique somme de huit euros. La transaction effectuée, direction Book-Off où je ne dépense qu’un euro pour Parce que la nuit de Chloé Thomas (Bibliothèque Rivages).
De là non loin au Rallye où je commande mon sempiternel hareng pomme à l’huile, confit de canard pommes sautées et café. Sorti de ce Péhemmu chinois, je remonte la rue de Charonne jusqu’à Arts Factory. La visite de l’exposition en cours terminée, je rejoins l’arrêt de bus du Soixante-Seize en face du Rallye. Un arrive dans lequel je monte pour rejoindre l’Hôtel de Ville.
On entend toujours le bruit des travaux de la future boulangerie au sous-sol du Book-Off de Saint-Martin, moins fort heureusement. Parmi les livres à un euro, je trouve d’abord Portrait d’une femme romanesque Jean Voilier de Célia Bertin (Editions de Fallois) puis, perdu dans les romans, Vider les lieux d’Olivier Rolin (Gallimard) au moment même où sur Fip Jane Birkin chante Encore lui, une chanson mauvais genre signé malsain Gainsbourg, comme le nommait David McNeil. Ma dernière lecture de lit est précisément le journal de Jane Birkin, Post-scriptum. Un journal on ne peut plus intime où l’on en apprend beaucoup sur elle-même, sur les hommes qui ont partagé sa vie, Serge Gainsbourg, Jacques Doillon et Olivier Rolin et sur ses filles, Kate, Charlotte et Lou. Quand la première se suicide, elle cesse d’écrire.
L’Importun m’accueille encore une fois pour un café verre d’eau lecture. J’achève Blesse, ronce noire de Claude Louis-Combet, un récit inspiré par l’histoire de Georg Trakl et de sa sœur et qui se terminera donc mal. Il ne tenait qu’à elle de s’arrêter sur le chemin, elle le ferait bientôt, de se retourner vers son frère, d’ouvrir sa robe et de dire, ainsi qu’elle l’avait écrit : Prends, je t’appartiens, prends cette sœur qui t’es réservée, et blesse, blesse-moi, ronce noire.
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Sur le trottoir de la rue de Charonne, une cabane en carton sur laquelle est inscrit : « Abri de SDF. Merci de ne pas uriner. »
11 novembre 2025
Me revoici ce lundi matin à la pharmacie Anton et Willem afin d’être repiqué deux fois. La pharmacienne qui s’occupe de moi est la même. Un tas de formalités à remplir via l’ordinateur puis nous sommes tous les deux dans le réduit du bas de l’escalier où je lui présente successivement mes épaules. La droite pour la vaccination sans effet secondaire, celle contre les pneumocoques avec le Prevenar 20. La gauche, sur laquelle je ne dors pas, pour la vaccination qui peut être suivie d’un peu de douleur, celle contre le zona avec le nouveau vaccin Shingrix qui serait efficace à plus de quatre-vingt-dix-sept pour cent.
Le virus du zona est celui de la varicelle, cette maladie que, comme beaucoup, j’ai eu enfant. Après la guérison, le virus de cette varicelle « reste quiescent dans les ganglions nerveux », explique Ouiquipédia et peut resurgir pour donner un zona d’autant plus facilement que l’on est vieux. Je découvre le mot quiescent, lequel signifie « qui n’est pas en action, au repos ».
Je n’en ai pas terminé avec les piqûres en haut des bras car la vaccination contre le zona nécessite une seconde injection dans trois mois et à cette date il sera également nécessaire de me faire une nouvelle injection du vaccin contre le tétanos. Rendez-vous est donc pris pour peu avant l’anniversaire de ma naissance. « Est-ce que je prévois des bougies ? » me demande la pharmacienne.
*
A propos d’anniversaire, ce onze novembre deux mille vingt-cinq est celui de mon Journal : dix-neuf ans.
Le virus du zona est celui de la varicelle, cette maladie que, comme beaucoup, j’ai eu enfant. Après la guérison, le virus de cette varicelle « reste quiescent dans les ganglions nerveux », explique Ouiquipédia et peut resurgir pour donner un zona d’autant plus facilement que l’on est vieux. Je découvre le mot quiescent, lequel signifie « qui n’est pas en action, au repos ».
Je n’en ai pas terminé avec les piqûres en haut des bras car la vaccination contre le zona nécessite une seconde injection dans trois mois et à cette date il sera également nécessaire de me faire une nouvelle injection du vaccin contre le tétanos. Rendez-vous est donc pris pour peu avant l’anniversaire de ma naissance. « Est-ce que je prévois des bougies ? » me demande la pharmacienne.
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A propos d’anniversaire, ce onze novembre deux mille vingt-cinq est celui de mon Journal : dix-neuf ans.
10 novembre 2025
Un café lecture le samedi matin à Sotteville-lès-Rouen au Rocher de Cancale, c’est le moment de reprendre cette agréable habitude d’automne hiver. Comme j’ai un courrier à poster rue de la Jeanne, c’est avec le métro que je rejoins la banlieue. Une femme y parle fort au téléphone avec une semblable et tout le monde en profite via le haut-parleur. On est heureux d’apprendre que sa correspondante va passer l’aspi.
Peu de monde au Rocher de Cancale. La patronne, Martine, me serre la main comme autrefois et le serveur m’apporte mon café et mon verre d’eau. La p’tite serveuse gentille et naïve n’est plus là. Il y a eu bisbille. Elle est partie (ou s’est fait renvoyer), ai-je entendu un jour d’été où je déjeunais ici avec une ancienne collègue, elle aussi à la retraite.
Martine parle d’une jeune femme de trente-cinq ans qui est morte d’un avécé la nuit à côté de son mari. « En plus, elle était jolie. » « Remarque, elle aurait été moche, c’est pareil. » Je lis Dominique Aury d’Angie David à ma table préférée près du radiateur. Cette biographie de l’auteure d’Histoire d’O et maîtresse de Jean Paulhan est bien construite. J’en suis à la page deux cent quarante-deux sur cinq cent cinquante et un. Premier travail de critique régulier, dans une publication d’extrême droite, ce qui d’ailleurs ne la gêne pas du tout. Ses articles portent sur les grandes expositions de l’année 1937… Dans la clientèle on dit du bien du facteur qui apporte un recommandé. « Il est gentil, ce p’tit facteur-là. » « Il est posé. » « Oui, il est posé. »
Être posé ou prendre la pose. Une mariée en blanc choisit la seconde option quand, sorti du Rocher, je passe devant l’Hôtel de Ville. Une vieille femme à foulard qui attend le Effe Sept sur un banc se lève pour voir ça. Ce bus me dépose à cent mètres de chez moi où j’arrive pour le concert de carillon hebdomadaire. Il commence par L’Auvergnat.
*
Un avantage de mon nouvel ordinateur, c’est que je peux y dicter ce que j’ai écrit sur mon petit carnet Hema. Plus besoin de faire jouer l’intermédiaire à mon smartphone. Moins d’erreurs qu’avec celui-ci dans le texte mais un excès de pudeur. Chaque mot explicite est remplacé par une suite d’étoiles. Un petit plus : le texte de cette dictée est doté de majuscules accentuées (ce qui fera plaisir à l’ami d’Orléans).
Premier problème avec ce nouvel appareil : parfois quand je le mets en route, l’écran refuse d’afficher les lettres que je tape sur le clavier. Jusqu’à présent, j’ai pu remédier à ce souci en le redémarrant.
Peu de monde au Rocher de Cancale. La patronne, Martine, me serre la main comme autrefois et le serveur m’apporte mon café et mon verre d’eau. La p’tite serveuse gentille et naïve n’est plus là. Il y a eu bisbille. Elle est partie (ou s’est fait renvoyer), ai-je entendu un jour d’été où je déjeunais ici avec une ancienne collègue, elle aussi à la retraite.
Martine parle d’une jeune femme de trente-cinq ans qui est morte d’un avécé la nuit à côté de son mari. « En plus, elle était jolie. » « Remarque, elle aurait été moche, c’est pareil. » Je lis Dominique Aury d’Angie David à ma table préférée près du radiateur. Cette biographie de l’auteure d’Histoire d’O et maîtresse de Jean Paulhan est bien construite. J’en suis à la page deux cent quarante-deux sur cinq cent cinquante et un. Premier travail de critique régulier, dans une publication d’extrême droite, ce qui d’ailleurs ne la gêne pas du tout. Ses articles portent sur les grandes expositions de l’année 1937… Dans la clientèle on dit du bien du facteur qui apporte un recommandé. « Il est gentil, ce p’tit facteur-là. » « Il est posé. » « Oui, il est posé. »
Être posé ou prendre la pose. Une mariée en blanc choisit la seconde option quand, sorti du Rocher, je passe devant l’Hôtel de Ville. Une vieille femme à foulard qui attend le Effe Sept sur un banc se lève pour voir ça. Ce bus me dépose à cent mètres de chez moi où j’arrive pour le concert de carillon hebdomadaire. Il commence par L’Auvergnat.
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Un avantage de mon nouvel ordinateur, c’est que je peux y dicter ce que j’ai écrit sur mon petit carnet Hema. Plus besoin de faire jouer l’intermédiaire à mon smartphone. Moins d’erreurs qu’avec celui-ci dans le texte mais un excès de pudeur. Chaque mot explicite est remplacé par une suite d’étoiles. Un petit plus : le texte de cette dictée est doté de majuscules accentuées (ce qui fera plaisir à l’ami d’Orléans).
Premier problème avec ce nouvel appareil : parfois quand je le mets en route, l’écran refuse d’afficher les lettres que je tape sur le clavier. Jusqu’à présent, j’ai pu remédier à ce souci en le redémarrant.
8 novembre 2025
Sorti du Diable, direction le Book-Off de Saint-Martin. Je descends au sous-sol. On y écoute toujours Fip mais on ne l’entend pas. Un affreux bruit de marteau-piqueur en est la cause. « Qu’est-ce que c’est ? », demandé-je à la malheureuse employée qui trie les livres. Elle m’apprend que le salon de coiffure d’à côté, entre Book-Off et Passage du Désir, va devenir une boulangerie. « C’est comme ça depuis ce matin, je n’en peux plus. »
Cela m’oblige à bâcler ma recherche de livres à un euro dans les rayons Art, Histoire, Voyage, Témoignage, à me concentrer sur le rayon Littérature. Il est généreux avec moi : Le Bouquin des citations de Claude Gagnaire (Robert Laffont), Du terroir à la Terre (Robert Mallet : recteur, écrivain, mondialiste) de Jacques Lardoux (La Part Commune), Leïlah Mahi 1932 de Didier Blonde (Gallimard), Judith de François-Bernard Michel (Actes Sud), Préambule à une déclaration mondiale de guerre à l’ordre d’Alain Turgeon (La Fosse aux Ours) et Idiotie de Pierre Guyotat (Grasset). On entend moins le vacarme dans la salle Romans à un euro où se cachent toujours des ouvrages qui n’en sont pas du tout ou pas vraiment. J’y prélève Troisième Personne de Valérie Mréjen (Pol) et A Milena de Franz Kafka (Nous), une nouvelle traduction des lettres à Milena publiées pour la première fois dans leur intégralité et leur véritable chronologie. Last but not least (comme on dit outre-Manche), je trouve exposé en bas de l’escalier, au prix de huit euros, le numéro Sept du Manifeste Incertain de Frédéric Pajak (Editions Noir sur Blanc) consacré à Emilie Dickinson et Marina Tsvetaïeva.
Mon sac étant déjà lourd, je renonce du troisième Book-Off et retourne à Sainte Opportune pour un café lecture à L’Opportun. Jean Cocteau est à Hong Kong mais se sent ailleurs, à un endroit qui m’est cher : Un vapeur, pareil à ceux qui desservent la Seyne, Saint-Mandrier, les Sablettes, Tamaris (même âge et même style) nous dépose à un quai qui ressemble aux débarcadères de Toulon…
Mes deux euros cinquante payés, je rejoins Saint-Lazare avec le métro Quatorze pour le retour à Rouen dans la voiture Cinq du seize heures quarante. Durant le trajet, je termine le récit de voyage de Cocteau tandis que le soleil se couche joliment. Un livre que je ne garderai pas.
A Sotteville, alors que je me trouve déjà avec les navetteurs sur la plateforme afin de descendre au plus vite, notre train « s’arrête inopinément ». La cheffe de bord annonce que le précédent en est la cause, qui n’arrive pas à avancer. Mes voisins discutent. Il y a celle qui travaille à Bercy et doit regagner Forges-les-Eaux avec sa voiture. Il y a celui qui est tailleur de pierre et doit prendre le train pour Dieppe. Dix minutes plus tard, nous repartons mais, annonce la cheffe de bord, pour la correspondance avec Dieppe, c’est fichu. « C’est toi qui as gagné le gros lot », disent les autres au tailleur de pierre qui n’en est guère ému.
Cela m’oblige à bâcler ma recherche de livres à un euro dans les rayons Art, Histoire, Voyage, Témoignage, à me concentrer sur le rayon Littérature. Il est généreux avec moi : Le Bouquin des citations de Claude Gagnaire (Robert Laffont), Du terroir à la Terre (Robert Mallet : recteur, écrivain, mondialiste) de Jacques Lardoux (La Part Commune), Leïlah Mahi 1932 de Didier Blonde (Gallimard), Judith de François-Bernard Michel (Actes Sud), Préambule à une déclaration mondiale de guerre à l’ordre d’Alain Turgeon (La Fosse aux Ours) et Idiotie de Pierre Guyotat (Grasset). On entend moins le vacarme dans la salle Romans à un euro où se cachent toujours des ouvrages qui n’en sont pas du tout ou pas vraiment. J’y prélève Troisième Personne de Valérie Mréjen (Pol) et A Milena de Franz Kafka (Nous), une nouvelle traduction des lettres à Milena publiées pour la première fois dans leur intégralité et leur véritable chronologie. Last but not least (comme on dit outre-Manche), je trouve exposé en bas de l’escalier, au prix de huit euros, le numéro Sept du Manifeste Incertain de Frédéric Pajak (Editions Noir sur Blanc) consacré à Emilie Dickinson et Marina Tsvetaïeva.
Mon sac étant déjà lourd, je renonce du troisième Book-Off et retourne à Sainte Opportune pour un café lecture à L’Opportun. Jean Cocteau est à Hong Kong mais se sent ailleurs, à un endroit qui m’est cher : Un vapeur, pareil à ceux qui desservent la Seyne, Saint-Mandrier, les Sablettes, Tamaris (même âge et même style) nous dépose à un quai qui ressemble aux débarcadères de Toulon…
Mes deux euros cinquante payés, je rejoins Saint-Lazare avec le métro Quatorze pour le retour à Rouen dans la voiture Cinq du seize heures quarante. Durant le trajet, je termine le récit de voyage de Cocteau tandis que le soleil se couche joliment. Un livre que je ne garderai pas.
A Sotteville, alors que je me trouve déjà avec les navetteurs sur la plateforme afin de descendre au plus vite, notre train « s’arrête inopinément ». La cheffe de bord annonce que le précédent en est la cause, qui n’arrive pas à avancer. Mes voisins discutent. Il y a celle qui travaille à Bercy et doit regagner Forges-les-Eaux avec sa voiture. Il y a celui qui est tailleur de pierre et doit prendre le train pour Dieppe. Dix minutes plus tard, nous repartons mais, annonce la cheffe de bord, pour la correspondance avec Dieppe, c’est fichu. « C’est toi qui as gagné le gros lot », disent les autres au tailleur de pierre qui n’en est guère ému.
© 2014 Michel Perdrial - Design: Bureau l’Imprimante



