Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
23 août 2024
Dans le sous-sol du Book-Off de Saint-Martin, parmi les un euro, je mets la main sur deux curiosités. En un cahier sous pochette plastifiée Deux fantaisies fantastiques de Gérard de Nerval (éditions marguerite waknine). Illustré par Michel Barréteau L’arracheur d’heures de Saint-Pol-Roux (Passage Piétons). A quoi j’ajoute le tout petit Lettres à Tonton de Colette (Mille et une nuits).
Le métro m’emmène à Quatre Septembre. A sa sortie, le vendeur de fruits à la sauvette est de retour. Je bois un café au comptoir du Bistrot d’Edmond dans lequel il y a toujours davantage de serveurs que de clients.
Dans le troisième Book-Off La Salle de bain de Jean-Philippe Toussaint est classé au rayon Vie Familiale. Je trouve un peu plus loin parmi les romans à un euro celui de Ken Kesey Et quelquefois j’ai comme une grande idée, une publication de Monsieur Toussaint Louverture, gros et bel objet avec une couverture de Blexbolex, mais est-ce que je le lirai ? et un livre qui n’en est pas un, que je lirai, La Maison Maupassant de Patrick Wald Lasowski (Gallimard).
Au retour, c’est encore le bazar ferroviaire. Ce mercredi, le train de seize heures quarante pour Rouen et Le Havre, mis à quai tardivement, est ce que les navetteurs présents près de moi appellent « un train de merde », c’est-à-dire un ancien à sièges colorés dans lequel les réservations ne comptent plus.
J’y suis assis, il part à l’heure et, en cherchant un peu, on y trouve des toilettes en état de marche. C’est là que je termine Chez les fous d’Albert Londres.
*
Les mendiants sont de retour à Paris, peut-être plus nombreux qu’avant. La trêve, c’est quand c’est terminé les Jeux et pas encore commencé les Para Jeux. Les fous eux ne sont jamais partis.
Le métro m’emmène à Quatre Septembre. A sa sortie, le vendeur de fruits à la sauvette est de retour. Je bois un café au comptoir du Bistrot d’Edmond dans lequel il y a toujours davantage de serveurs que de clients.
Dans le troisième Book-Off La Salle de bain de Jean-Philippe Toussaint est classé au rayon Vie Familiale. Je trouve un peu plus loin parmi les romans à un euro celui de Ken Kesey Et quelquefois j’ai comme une grande idée, une publication de Monsieur Toussaint Louverture, gros et bel objet avec une couverture de Blexbolex, mais est-ce que je le lirai ? et un livre qui n’en est pas un, que je lirai, La Maison Maupassant de Patrick Wald Lasowski (Gallimard).
Au retour, c’est encore le bazar ferroviaire. Ce mercredi, le train de seize heures quarante pour Rouen et Le Havre, mis à quai tardivement, est ce que les navetteurs présents près de moi appellent « un train de merde », c’est-à-dire un ancien à sièges colorés dans lequel les réservations ne comptent plus.
J’y suis assis, il part à l’heure et, en cherchant un peu, on y trouve des toilettes en état de marche. C’est là que je termine Chez les fous d’Albert Londres.
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Les mendiants sont de retour à Paris, peut-être plus nombreux qu’avant. La trêve, c’est quand c’est terminé les Jeux et pas encore commencé les Para Jeux. Les fous eux ne sont jamais partis.
22 août 2024
La pagaille sur le borduquet à l’arrivée du sept heures vingt-trois ce mercredi, le train long ayant été remplacé par un train court suite aux problèmes de la veille (une caténaire arrachée et plus tard un arbre sur la voie). Je réussis à obtenir une place dans la voiture Trois. J’y ouvre Chez les fous d’Albert Londres Le fou est individualiste. Il ne s’occupe pas de son voisin. Il fait son geste, il pousse son cri en toute indépendance.
En métro je rejoins Ledru-Rollin pour un café au comptoir du Camélia. Au Marché d’Aligre, des deux vendeurs de livres, seul Emile est là. Ses ouvrages sont redescendus à deux euros, mais rien n’est pour moi.
Je marche jusqu’au banc proche de Re-Read et constate que le gérant de Cyclable arrive en scouteur électrique plutôt qu’à bicyclette. A l’ouverture, c’est la jolie vendeuse qui est de service à la bouquinerie. J’en explore les rayonnages sans mettre la main sur un morceau de choix. Je lui dirais bien qu’il ne fallait pas mettre La Pornographie de Witold Gombrowicz au rayon Erotisme mais je crains qu’elle ne me suspecte de louches intentions.
A onze heures je retrouve avec plaisir le Book-Off de Ledru-Rollin. Je n’y achète qu’un seul livre à un euro, mais prometteur, De l’Hexagone considéré comme un exotisme de Francis Navarre (Le Dilettante), un hymne au voyage de proximité dont je suis adepte, avec en épigraphe une citation d’un qui voyageait loin, Nicolas Bouvier, C’était une petite ville torride qui sentait la cannelle.
A midi moins le quart, je déjeune au Rallye d’un filet de hareng suivi d’un confit de canard pommes sautées et d’un café. Trois habituées de l’atelier textile y sont aussi. Elles commandent par téléphone, la serveuse pose leurs plats sur la table et cinq minutes après, elles arrivent pour manger en disant du mal des collègues.
Je n’en crois pas mes oreilles, le Book-Off de Saint-Martin diffuse Air Thé Aile Deux au lieu de Fip. Je demande pourquoi aux deux employées qui garnissent les rayons. C’est parce qu’à la réouverture, ça c’est branché automatiquement sur cette radio, mais on va remettre Fip. Cela fait déjà trois jours que c’est rouvert.
-Eh bien oui, faites le, leur dis-je, car ça c’est de la merde.
Elles me regardent d’un air offensé.
*
Je pense à cette fille qui mardi soir est venue me voir pour me demander mon numéro de téléphone. Je lui ai donné celui de mon fixe et lui ai dit qu’elle pouvait m’appeler même au milieu de la nuit. Ce n’est pas ce qu’on pourrait penser.
En métro je rejoins Ledru-Rollin pour un café au comptoir du Camélia. Au Marché d’Aligre, des deux vendeurs de livres, seul Emile est là. Ses ouvrages sont redescendus à deux euros, mais rien n’est pour moi.
Je marche jusqu’au banc proche de Re-Read et constate que le gérant de Cyclable arrive en scouteur électrique plutôt qu’à bicyclette. A l’ouverture, c’est la jolie vendeuse qui est de service à la bouquinerie. J’en explore les rayonnages sans mettre la main sur un morceau de choix. Je lui dirais bien qu’il ne fallait pas mettre La Pornographie de Witold Gombrowicz au rayon Erotisme mais je crains qu’elle ne me suspecte de louches intentions.
A onze heures je retrouve avec plaisir le Book-Off de Ledru-Rollin. Je n’y achète qu’un seul livre à un euro, mais prometteur, De l’Hexagone considéré comme un exotisme de Francis Navarre (Le Dilettante), un hymne au voyage de proximité dont je suis adepte, avec en épigraphe une citation d’un qui voyageait loin, Nicolas Bouvier, C’était une petite ville torride qui sentait la cannelle.
A midi moins le quart, je déjeune au Rallye d’un filet de hareng suivi d’un confit de canard pommes sautées et d’un café. Trois habituées de l’atelier textile y sont aussi. Elles commandent par téléphone, la serveuse pose leurs plats sur la table et cinq minutes après, elles arrivent pour manger en disant du mal des collègues.
Je n’en crois pas mes oreilles, le Book-Off de Saint-Martin diffuse Air Thé Aile Deux au lieu de Fip. Je demande pourquoi aux deux employées qui garnissent les rayons. C’est parce qu’à la réouverture, ça c’est branché automatiquement sur cette radio, mais on va remettre Fip. Cela fait déjà trois jours que c’est rouvert.
-Eh bien oui, faites le, leur dis-je, car ça c’est de la merde.
Elles me regardent d’un air offensé.
*
Je pense à cette fille qui mardi soir est venue me voir pour me demander mon numéro de téléphone. Je lui ai donné celui de mon fixe et lui ai dit qu’elle pouvait m’appeler même au milieu de la nuit. Ce n’est pas ce qu’on pourrait penser.
20 août 2024
Du bruit ce lundi dans la ruelle, il provient du numéro quatre où deux ouvriers poncent les grilles dans le but de les repeindre. Ils ne portent pas de masque ni de casque et ont sous les yeux, en rouge sur le muret, l’inscription « Le bruit tue ! » qui décore le quartier depuis l’autre nuit.
Au Son du Cor, la serveuse arbore un crop top suédois « Cheap Monday ». « Maudit lundi » ou « Putain de lundi », ai-je envie de traduire.
Il y aurait de quoi écrire davantage. Je préfère ne pas.
*
Toutes ces photos d’Alain Delon depuis dimanche, ressorties à l’occasion de sa mort. Très beau dans la vingtaine. Encore pas mal dans la trentaine. Ensuite, c’est rapidement cernes et boursouflure.
Au Son du Cor, la serveuse arbore un crop top suédois « Cheap Monday ». « Maudit lundi » ou « Putain de lundi », ai-je envie de traduire.
Il y aurait de quoi écrire davantage. Je préfère ne pas.
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Toutes ces photos d’Alain Delon depuis dimanche, ressorties à l’occasion de sa mort. Très beau dans la vingtaine. Encore pas mal dans la trentaine. Ensuite, c’est rapidement cernes et boursouflure.
19 août 2024
Ce dimanche, Jours de Fête propose Masacrade sur le parvis de la Cathédrale, « une tragi-comédie sur fond de voltige suicidaire » de la Compagnie Marcel et ses drôles de femmes, « sept actes de trapèze mini-volant, une voix off, trois interprètes, un tapis gonflable, vingt-cinq costumes et un régisseur pyromane ». « Masacrade c’est avant tout un combat entre l'absurde et la logique. Ou comment trouver le sens de la mort pour donner un sens à la vie. Ou encore, comment trouver un sens à la vie en s’entraînant à mourir avant de mourir. » Cela en quarante-cinq minutes.
Voilà qui me donne envie de sortir.
J’arrive à dix-huit heures cinquante-cinq et me place derrière le dernier rang des assis. Dès que la Cathédrale a sonné les trois coups, ça commence. On passe à coups d’acrobaties trapézistes de l’anatomie humaine à The Cold Song via Shakespeare pour aboutir à Not Today. C’est virtuose et humoristique.
A l’issue, Marcel et ses deux drôles de femmes sont toujours vivants. De même que les spectateurs, dont moi-même. La mort ? Pas aujourd’hui.
*
Quand même, ce dix-huit août, mille six cents et quelques Français ont quitté la vie, dont Alain Delon.
*
Parmi les vivants, les touristes. Il n’en manque pas dans le quartier où je vis. Ils encombrent la rue Saint-Romain, la rue Saint-Nicolas et encore plus la ruelle entre les deux.
Un touriste : « Oh, another church ! »
Une touriste : « On se croirait dans un film du Moyen Age. »
Une enfant de touristes découvrant la flèche de la Cathédrale : « Oh, la Tour Eiffel ! »
*
Dans cette ruelle, apparue dans la nuit de samedi à dimanche, en plusieurs exemplaires, et même sur le mur d’une maison de la rue Saint-Nicolas, une inscription à la peinture rouge : « Le bruit tue ! ».
Voilà qui me donne envie de sortir.
J’arrive à dix-huit heures cinquante-cinq et me place derrière le dernier rang des assis. Dès que la Cathédrale a sonné les trois coups, ça commence. On passe à coups d’acrobaties trapézistes de l’anatomie humaine à The Cold Song via Shakespeare pour aboutir à Not Today. C’est virtuose et humoristique.
A l’issue, Marcel et ses deux drôles de femmes sont toujours vivants. De même que les spectateurs, dont moi-même. La mort ? Pas aujourd’hui.
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Quand même, ce dix-huit août, mille six cents et quelques Français ont quitté la vie, dont Alain Delon.
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Parmi les vivants, les touristes. Il n’en manque pas dans le quartier où je vis. Ils encombrent la rue Saint-Romain, la rue Saint-Nicolas et encore plus la ruelle entre les deux.
Un touriste : « Oh, another church ! »
Une touriste : « On se croirait dans un film du Moyen Age. »
Une enfant de touristes découvrant la flèche de la Cathédrale : « Oh, la Tour Eiffel ! »
*
Dans cette ruelle, apparue dans la nuit de samedi à dimanche, en plusieurs exemplaires, et même sur le mur d’une maison de la rue Saint-Nicolas, une inscription à la peinture rouge : « Le bruit tue ! ».
15 août 2024
Vacances obligent, peu de monde dans le train de sept heures vingt-trois ce mercredi. J’y ouvre Vagabondages littéraires dans Paris de Jean-Paul Caracalla, dont la préface contient ceci : « On ne vit qu’à Paris, et l’on végète ailleurs. » Louis Gresset (1709-1777), auteur malicieux et professeur de collège, a dû se morfondre à Moulins, à Tours, et à Rouen, lorsque, professeur, il y enseignait pour confesser pareil aveu … Ce livre s’intéresse à des écrivains ayant vécu dans la capitale en changeant plusieurs fois d’adresse.
Deux Book-Off sur trois étant encore fermés, je prends comme la semaine dernière le bus Vingt-Sept en direction du Quartier Latin où j’arrive à neuf heures. J’ai le temps d’aller faire un tour au Jardin du Luxembourg. Il est fort paisible. Des touristes font des photos. Des municipaux arrosent les fleurs. Je lis (Châteaubriand, Balzac) jusqu’à ce qu’il soit l’heure de Gibert Joseph.
Parmi les livres de trottoir je trouve à un euro le bien plus haut que large Dix années à Malmaison de Jean Ajalbert (Réunion des Musées Nationaux) et au premier étage Journal de Lewis Carroll en poche Titres (Christian Bourgois) à quatre euros cinquante.
A la caisse, les trois employé(e)s lisent en attendant le client que je suis. La deuxième est une jolie fille à qui j’irais bien présenter mes livres, mais impossible, le premier est un Noir aux cheveux jaunes. Pas envie de me faire taxer de sexisme, racisme et homophobie, c’est à lui que je règle les achats.
Je fais un court passage chez Boulinier où trop de livres sont sales et certains à des prix non raisonnables puis continue à descendre le boulevard Saint-Michel. Je franchis la Seine, remonte un petit bout du boulevard de Sébastopol, tourne à gauche vers le Boulinier des Halles. Même constat, beaucoup de saleté et certains ouvrages à un prix exagéré. Les livres de science-fiction à couverture argentée ou cuivrée de la collection Ailleurs et Demain de Robert Laffont y sont tous à vingt-cinq euros.
Il n’est qu’onze heures quinze. Je vais lire au pied de la Fontaine des Innocents récemment restaurée (Hugo, Flaubert) et à midi, je retrouve Au Diable des Lombards pour un onglet de bœuf frites salade et une tarte Tatin. Des touristes sont en terrasse et moi à l’intérieur sous les pales qui tournent, doutant de la fraîcheur des frites.
Descendu sous terre je ressors à Pyramides et rejoins pédestrement le seul Book-Off ouvert par le passage Choiseul dans lequel la chaleur des derniers jours stagne. Je ne trouve pour me plaire à un euro que Poser nue de Nancy Huston avec Guy Oberson aux Editions du Chemin de Fer et l’Omnibus L’Os à Moelle de Pierre Dac.
Le Royal Bourse Opéra prenant sa semaine de congé, je me contente du Bistrot d’Edmond pour un café verre d’eau assis. On n’a plus les Jeux à la maison, mais je suis toujours le seul client à l’intérieur. J’y continue mon exploration vagabonde et littéraire dans Paris (Daudet, Proust, Fargue) que je termine dans le train de seize heures quarante (Cendrars, les Américains, Simenon).
*
Content de pouvoir retrouver la semaine prochaine mon circuit habituel.
Deux Book-Off sur trois étant encore fermés, je prends comme la semaine dernière le bus Vingt-Sept en direction du Quartier Latin où j’arrive à neuf heures. J’ai le temps d’aller faire un tour au Jardin du Luxembourg. Il est fort paisible. Des touristes font des photos. Des municipaux arrosent les fleurs. Je lis (Châteaubriand, Balzac) jusqu’à ce qu’il soit l’heure de Gibert Joseph.
Parmi les livres de trottoir je trouve à un euro le bien plus haut que large Dix années à Malmaison de Jean Ajalbert (Réunion des Musées Nationaux) et au premier étage Journal de Lewis Carroll en poche Titres (Christian Bourgois) à quatre euros cinquante.
A la caisse, les trois employé(e)s lisent en attendant le client que je suis. La deuxième est une jolie fille à qui j’irais bien présenter mes livres, mais impossible, le premier est un Noir aux cheveux jaunes. Pas envie de me faire taxer de sexisme, racisme et homophobie, c’est à lui que je règle les achats.
Je fais un court passage chez Boulinier où trop de livres sont sales et certains à des prix non raisonnables puis continue à descendre le boulevard Saint-Michel. Je franchis la Seine, remonte un petit bout du boulevard de Sébastopol, tourne à gauche vers le Boulinier des Halles. Même constat, beaucoup de saleté et certains ouvrages à un prix exagéré. Les livres de science-fiction à couverture argentée ou cuivrée de la collection Ailleurs et Demain de Robert Laffont y sont tous à vingt-cinq euros.
Il n’est qu’onze heures quinze. Je vais lire au pied de la Fontaine des Innocents récemment restaurée (Hugo, Flaubert) et à midi, je retrouve Au Diable des Lombards pour un onglet de bœuf frites salade et une tarte Tatin. Des touristes sont en terrasse et moi à l’intérieur sous les pales qui tournent, doutant de la fraîcheur des frites.
Descendu sous terre je ressors à Pyramides et rejoins pédestrement le seul Book-Off ouvert par le passage Choiseul dans lequel la chaleur des derniers jours stagne. Je ne trouve pour me plaire à un euro que Poser nue de Nancy Huston avec Guy Oberson aux Editions du Chemin de Fer et l’Omnibus L’Os à Moelle de Pierre Dac.
Le Royal Bourse Opéra prenant sa semaine de congé, je me contente du Bistrot d’Edmond pour un café verre d’eau assis. On n’a plus les Jeux à la maison, mais je suis toujours le seul client à l’intérieur. J’y continue mon exploration vagabonde et littéraire dans Paris (Daudet, Proust, Fargue) que je termine dans le train de seize heures quarante (Cendrars, les Américains, Simenon).
*
Content de pouvoir retrouver la semaine prochaine mon circuit habituel.
13 août 2024
Le dimanche c'est fermé, la ville se stoppe
Sauf La Cascade pour tes clopes
Si tu cherches y'a toujours un épicier d'ouvert
On a tous fini quatre heures du mat' à la Croix d'Pierre
C’est ce que j’entends ce dimanche au Son du Cor, une chanson interprétée par une sorte de Renaud du début, le Renaud d’avant la catastrophe. Ça s’appelle Bienvenue à Rouen. Ça ne manque pas d’humour, ni de réalisme.
Parmi les rares endroits ouverts le dimanche à Rouen, il y a donc Le Son du Cor. Certains bars sont cités dans cette chanson, il n’en fait pas partie. J’y poursuis la lecture de l’énorme Correspondance des routes croisées de Nicolas Bouvier et Thierry Vernet.
J’en suis à la moitié et je n’en saute pas une ligne, même celles où Thierry Vernet emploie le mot chiotte pour désigner une voiture. On y est allé en chiotte. Je déteste ce terme, même quand il est employé pour désigner les toilettes.
Je ne sais pas qui a eu l’idée de l’employer pour désigner une voiture. Là, on est dans les années Cinquante mais ça se disait encore dans les années Soixante-Dix. Je me souviens que certains de mes condisciples de l’Ecole Normale l’utilisaient : « On y va avec quelle chiotte ? » Heureusement, c’est terminé.
Le soir venu, comme je dois rassembler des livres vendus et les mettre dans un carton, je regarde à la télé le début de la cérémonie de clôture des Jeux Olympiques. Des tas de sportifs qui sont heureux d’être contents et se filment contents d’être heureux. Leur joie est artificielle, construite, auto-entretenue. Des dizaines de milliers de spectateurs fanatisés les entourent. Ils sont persuadés qu’ils assistent à un énorme évènement. Quand descend au bout d’une corde une sorte de libellule dorée, je coupe.
Au moins, lors de la cérémonie d’ouverture améliorée par la pluie, laquelle était aussi le triomphe du kitsch. il y avait quelques bons moments. Certains ont été surpris. Pas moi qui ai côtoyé Thomas Jolly à l’époque de l’Ubi. J’y buvais quotidiennement le café au bar et il y avait ses bureaux. Je connaissais son univers.
*
Bienvenue à Rouen
Y’en a pour tous les goûts même les mauvais
Que du bon temps même si l’temps est tout l’temps mauvais
On s’ennuie souvent on s’en lasse jamais
Bienvenue à Rouen est une chanson qui a deux ans, ai-je appris en rentrant. Elle ne m’avait pas encore atteint. Son auteur et interprète s’appelle Andrei.
*
Tom Cruise, scientologue botoxé, est lui aussi descendu du ciel accroché à un câble ce dimanche soir puis il a filé avec le drapeau olympique en moto (il fait de la moto debout). Kitchissime.
*
Dans les années Cinquante, je le lis dans une lettre de Thierry Vernet, on disait une sèche pour une cigarette. C’était encore le cas dans les années Soixante-Dix. Jamais plus je n’entends ça.
Sauf La Cascade pour tes clopes
Si tu cherches y'a toujours un épicier d'ouvert
On a tous fini quatre heures du mat' à la Croix d'Pierre
C’est ce que j’entends ce dimanche au Son du Cor, une chanson interprétée par une sorte de Renaud du début, le Renaud d’avant la catastrophe. Ça s’appelle Bienvenue à Rouen. Ça ne manque pas d’humour, ni de réalisme.
Parmi les rares endroits ouverts le dimanche à Rouen, il y a donc Le Son du Cor. Certains bars sont cités dans cette chanson, il n’en fait pas partie. J’y poursuis la lecture de l’énorme Correspondance des routes croisées de Nicolas Bouvier et Thierry Vernet.
J’en suis à la moitié et je n’en saute pas une ligne, même celles où Thierry Vernet emploie le mot chiotte pour désigner une voiture. On y est allé en chiotte. Je déteste ce terme, même quand il est employé pour désigner les toilettes.
Je ne sais pas qui a eu l’idée de l’employer pour désigner une voiture. Là, on est dans les années Cinquante mais ça se disait encore dans les années Soixante-Dix. Je me souviens que certains de mes condisciples de l’Ecole Normale l’utilisaient : « On y va avec quelle chiotte ? » Heureusement, c’est terminé.
Le soir venu, comme je dois rassembler des livres vendus et les mettre dans un carton, je regarde à la télé le début de la cérémonie de clôture des Jeux Olympiques. Des tas de sportifs qui sont heureux d’être contents et se filment contents d’être heureux. Leur joie est artificielle, construite, auto-entretenue. Des dizaines de milliers de spectateurs fanatisés les entourent. Ils sont persuadés qu’ils assistent à un énorme évènement. Quand descend au bout d’une corde une sorte de libellule dorée, je coupe.
Au moins, lors de la cérémonie d’ouverture améliorée par la pluie, laquelle était aussi le triomphe du kitsch. il y avait quelques bons moments. Certains ont été surpris. Pas moi qui ai côtoyé Thomas Jolly à l’époque de l’Ubi. J’y buvais quotidiennement le café au bar et il y avait ses bureaux. Je connaissais son univers.
*
Bienvenue à Rouen
Y’en a pour tous les goûts même les mauvais
Que du bon temps même si l’temps est tout l’temps mauvais
On s’ennuie souvent on s’en lasse jamais
Bienvenue à Rouen est une chanson qui a deux ans, ai-je appris en rentrant. Elle ne m’avait pas encore atteint. Son auteur et interprète s’appelle Andrei.
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Tom Cruise, scientologue botoxé, est lui aussi descendu du ciel accroché à un câble ce dimanche soir puis il a filé avec le drapeau olympique en moto (il fait de la moto debout). Kitchissime.
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Dans les années Cinquante, je le lis dans une lettre de Thierry Vernet, on disait une sèche pour une cigarette. C’était encore le cas dans les années Soixante-Dix. Jamais plus je n’entends ça.
12 août 2024
Par ce samedi matin ensoleillé mais point trop chaud, je monte dans un bus Teor, en descends à Théâtre des Arts, prends le métro jusqu’au terminus Georges Braque, vois arriver un bus Vingt-Sept et y grimpe.
Ce bus de périphérie n’annonce pas ses arrêts. Je demande au chauffeur de me faire descendre à Porte des Tourelles (commune de Petit-Couronne). Ce n’est pas tout près.
Une fois sur place, impossible de savoir où se trouve ce qui était la « maison des champs » de Pierre Corneille. Personne dehors, bien qu’il soit plus de dix heures. La Médiathèque est fermée. La Mairie est fermée. Pas de commerces dans le coin. Un homme arrive, qui n’est pas d’ici, me dit-il. Néanmoins, il cherche sur son smartphone. Il trouve que c’est à deux cents mètres, près du jardin aquatique. Je m’en rapproche et ne vois rien.
J’entre dans ce jardin désert, finis par apercevoir une jeune mère à qui je demande. Elle vient d’arriver dans cette ville, me dit-elle. Elle me montre une autre femme plus loin avec son chien, laquelle me dit de ressortir et d’aller à droite. Une abrutie qui me met sur le mauvais chemin, m’apprend une charmante vieille interrogée au bout de plusieurs centaines de mètres. C’est en revenant sur mes pas, après le jardin.
Enfin je suis devant le beau manoir où je ne suis jamais venu. J’en fais une première photo. Sur la porte en bois, un petit écriteau « Entrée ». Je tourne la poignée et me voici chez l’écrivain, où il fait sombre évidemment.
La guichetière me donne un ticket gratuit. Je lui dis que ce serait une bonne initiative de la part de la Mairie de Petit-Couronne de poser des pancartes indiquant la bâtisse. C’est à la Métropole, me répond-elle.
Je ne suis pas étonné de me trouver seul dans cette maison qu’acheta le père de Pierre Corneille, « une masure ainsi bastie d'une maison manante, grange, estables et fournil » et que revendit le fils aîné de celui-ci. Elle était entourée de vingt-quatre hectares de prairies, labours et bois-taillis. Il en reste peu.
Craignant sans doute que je fasse des bêtises, la gardienne me suit pas à pas dans les deux petites pièces de l’étage. Le mobilier est plus ou moins d’époque mais pas d’origine. Des portraits de Corneille par des inconnus sont accrochés aux murs. On ne visite que la moitié de ce manoir.
Redescendu, j’en fais le tour. « Toilettes » est-il écrit sur la porte d’un petit bâtiment. C’est fermé. Qu’à cela ne tienne, je fais pipi dans ce qui reste du jardin de Pierre Corneille. Lequel a dû faire de même souventes fois.
Au fond de ce bout de jardin est un four à pain. Une dernière photo du manoir vu par l’arrière et je retourne à l’arrêt de bus. Un Effe Six arrive peu après, plus rapide que le Vingt-Sept pour me ramener à Georges Braque où un métro part dans cinq minutes. Je suis chez moi pour le début du concert hebdomadaire de carillon.
*
Je n’ai pas ouvert un livre de Pierre Corneille depuis la fin de ma scolarité. Jamais aimé ça, l’honneur, le devoir, le sacrifice.
Ce bus de périphérie n’annonce pas ses arrêts. Je demande au chauffeur de me faire descendre à Porte des Tourelles (commune de Petit-Couronne). Ce n’est pas tout près.
Une fois sur place, impossible de savoir où se trouve ce qui était la « maison des champs » de Pierre Corneille. Personne dehors, bien qu’il soit plus de dix heures. La Médiathèque est fermée. La Mairie est fermée. Pas de commerces dans le coin. Un homme arrive, qui n’est pas d’ici, me dit-il. Néanmoins, il cherche sur son smartphone. Il trouve que c’est à deux cents mètres, près du jardin aquatique. Je m’en rapproche et ne vois rien.
J’entre dans ce jardin désert, finis par apercevoir une jeune mère à qui je demande. Elle vient d’arriver dans cette ville, me dit-elle. Elle me montre une autre femme plus loin avec son chien, laquelle me dit de ressortir et d’aller à droite. Une abrutie qui me met sur le mauvais chemin, m’apprend une charmante vieille interrogée au bout de plusieurs centaines de mètres. C’est en revenant sur mes pas, après le jardin.
Enfin je suis devant le beau manoir où je ne suis jamais venu. J’en fais une première photo. Sur la porte en bois, un petit écriteau « Entrée ». Je tourne la poignée et me voici chez l’écrivain, où il fait sombre évidemment.
La guichetière me donne un ticket gratuit. Je lui dis que ce serait une bonne initiative de la part de la Mairie de Petit-Couronne de poser des pancartes indiquant la bâtisse. C’est à la Métropole, me répond-elle.
Je ne suis pas étonné de me trouver seul dans cette maison qu’acheta le père de Pierre Corneille, « une masure ainsi bastie d'une maison manante, grange, estables et fournil » et que revendit le fils aîné de celui-ci. Elle était entourée de vingt-quatre hectares de prairies, labours et bois-taillis. Il en reste peu.
Craignant sans doute que je fasse des bêtises, la gardienne me suit pas à pas dans les deux petites pièces de l’étage. Le mobilier est plus ou moins d’époque mais pas d’origine. Des portraits de Corneille par des inconnus sont accrochés aux murs. On ne visite que la moitié de ce manoir.
Redescendu, j’en fais le tour. « Toilettes » est-il écrit sur la porte d’un petit bâtiment. C’est fermé. Qu’à cela ne tienne, je fais pipi dans ce qui reste du jardin de Pierre Corneille. Lequel a dû faire de même souventes fois.
Au fond de ce bout de jardin est un four à pain. Une dernière photo du manoir vu par l’arrière et je retourne à l’arrêt de bus. Un Effe Six arrive peu après, plus rapide que le Vingt-Sept pour me ramener à Georges Braque où un métro part dans cinq minutes. Je suis chez moi pour le début du concert hebdomadaire de carillon.
*
Je n’ai pas ouvert un livre de Pierre Corneille depuis la fin de ma scolarité. Jamais aimé ça, l’honneur, le devoir, le sacrifice.
9 août 2024
Je déjeune au restaurant Chez Kelly, rue de la Harpe. Une maison chinoise qui avait autrefois un nom fleurant le terroir français. Je la fréquentais avant que les librairies Book-Off me détournent du Quartier Latin. Il faut qu’il y en ait deux sur trois fermées pour que j’y revienne. Rien ne semble avoir changé à l’intérieur mais plus de salle au sous-sol.
Je commande le menu à bas prix, beignets de calamar, cuisse de poulet rôtie, mousse au chocolat. L’autre client, un habitué, mange avec sa serviette en papier rose glissée dans sa chemise. La patronne se plaint du peu de monde. Elle ne sait pas si elle aura droit à un dédommagement. Ici, c’est la zone rouge. Un employé tente de harponner qui passe dans la rue, sans succès. A l’issue, je paye douze euros quatre-vingts. Ça ne vaut pas plus.
Un peu de lecture dans le Jardin de Cluny où les touristes qui ne mangent pas dans les restaurants déjeunent sur des bancs en se battant contre les pigeons, puis d’un coup de bus Vingt-Sept, je rejoins le Bistrot d’Edmond vers quatorze heures.
Trois clients seulement déjeunent dans la salle, dont l’un qui se plaint des escargots qu’on lui a servis. Cinq ou six serveurs sont là et pourtant je dois attendre un moment mon café comptoir. Tous sont démotivés.
Pas plus de monde que d’habitude au Book-Off de Quatre Septembre, le seul à ne pas être en « congé d’été ». Je ne trouve à un euro que Lettres d’amour et d’affaires au Margrave Charles de Br. de Catherine, Comtesse de Salmour, Marquise de Balbian (Buchet Chastel). Monté à l’étage où sont les livres d’art à deux euros, je mets la main sur une curiosité, Le destin tragique d’Odette Léger et de son mari Robert de François Bouton (Le Bec en l’Air). Ce titre et les photos m’en donnent envie.
Comme la semaine dernière, et pour la même raison, mon train est une heure plus tard qu’à l’accoutumée. N’ayant pas envie de retrouver l’ambiance morose du Bistrot d’Edmond, je marche jusqu’au Royal Bourse Opéra, où il m’arrivait de déjeuner autrefois. J’ai le choix de la table, je suis le seul client. Une jeune blonde au corps de liane me sert un café verre d’eau à seulement deux euros.
Je termine là Un dimanche à la montagne dont la première phrase est Par un beau dimanche de guerre froide, j’ai mis le feu au grand chalet d’Axel César Springer en haut d’une montagne suisse. Cet incendie, l'auteur ne l’a pas commis seul. Sa copine de l’époque l’accompagnait, plus déterminée que lui. Elle est morte quand, trente ans plus tard, il publie cette histoire. Au moment de l’action, elle et lui croyaient que Springer était un ancien nazi. Plus tard, il a su que ce n’était pas le cas, raison pour laquelle il a présenté des excuses à la veuve. Vers la fin de son livre, Daniel de Roulet écrit ceci : Très peu de temps après notre fameux dimanche à la montagne, nous deux, mon amie et moi, avons cessé de nous voir. Etonnant : une brouille d’abord, ensuite on laisse traîner, on ne s’explique pas, et, à la fin, on se perd de vue.
« Pour le hockey, c’est voie Treize. » Ainsi suis-je accueilli ce mercredi après-midi en haut des escaliers mécaniques de la Gare Saint-Lazare. Un peu plus loin, trois gendarmes essaient de se dépatouiller d’un dingo anglophone qui se met à genoux devant eux et leur tend les bras en les suppliant de lui passer les menottes.
Dans le train du retour, je lis et regarde Le destin tragique d’Odette Léger et de son mari Robert de François Bouton, une sorte de roman photo documentaire narrant cinquante ans de la vie d’un coiffeur de Montceau-les-Mines et de sa femme, photographiés, souvent à leur insu, par le voisin d’en face. C’est triste et drôle.
Je commande le menu à bas prix, beignets de calamar, cuisse de poulet rôtie, mousse au chocolat. L’autre client, un habitué, mange avec sa serviette en papier rose glissée dans sa chemise. La patronne se plaint du peu de monde. Elle ne sait pas si elle aura droit à un dédommagement. Ici, c’est la zone rouge. Un employé tente de harponner qui passe dans la rue, sans succès. A l’issue, je paye douze euros quatre-vingts. Ça ne vaut pas plus.
Un peu de lecture dans le Jardin de Cluny où les touristes qui ne mangent pas dans les restaurants déjeunent sur des bancs en se battant contre les pigeons, puis d’un coup de bus Vingt-Sept, je rejoins le Bistrot d’Edmond vers quatorze heures.
Trois clients seulement déjeunent dans la salle, dont l’un qui se plaint des escargots qu’on lui a servis. Cinq ou six serveurs sont là et pourtant je dois attendre un moment mon café comptoir. Tous sont démotivés.
Pas plus de monde que d’habitude au Book-Off de Quatre Septembre, le seul à ne pas être en « congé d’été ». Je ne trouve à un euro que Lettres d’amour et d’affaires au Margrave Charles de Br. de Catherine, Comtesse de Salmour, Marquise de Balbian (Buchet Chastel). Monté à l’étage où sont les livres d’art à deux euros, je mets la main sur une curiosité, Le destin tragique d’Odette Léger et de son mari Robert de François Bouton (Le Bec en l’Air). Ce titre et les photos m’en donnent envie.
Comme la semaine dernière, et pour la même raison, mon train est une heure plus tard qu’à l’accoutumée. N’ayant pas envie de retrouver l’ambiance morose du Bistrot d’Edmond, je marche jusqu’au Royal Bourse Opéra, où il m’arrivait de déjeuner autrefois. J’ai le choix de la table, je suis le seul client. Une jeune blonde au corps de liane me sert un café verre d’eau à seulement deux euros.
Je termine là Un dimanche à la montagne dont la première phrase est Par un beau dimanche de guerre froide, j’ai mis le feu au grand chalet d’Axel César Springer en haut d’une montagne suisse. Cet incendie, l'auteur ne l’a pas commis seul. Sa copine de l’époque l’accompagnait, plus déterminée que lui. Elle est morte quand, trente ans plus tard, il publie cette histoire. Au moment de l’action, elle et lui croyaient que Springer était un ancien nazi. Plus tard, il a su que ce n’était pas le cas, raison pour laquelle il a présenté des excuses à la veuve. Vers la fin de son livre, Daniel de Roulet écrit ceci : Très peu de temps après notre fameux dimanche à la montagne, nous deux, mon amie et moi, avons cessé de nous voir. Etonnant : une brouille d’abord, ensuite on laisse traîner, on ne s’explique pas, et, à la fin, on se perd de vue.
« Pour le hockey, c’est voie Treize. » Ainsi suis-je accueilli ce mercredi après-midi en haut des escaliers mécaniques de la Gare Saint-Lazare. Un peu plus loin, trois gendarmes essaient de se dépatouiller d’un dingo anglophone qui se met à genoux devant eux et leur tend les bras en les suppliant de lui passer les menottes.
Dans le train du retour, je lis et regarde Le destin tragique d’Odette Léger et de son mari Robert de François Bouton, une sorte de roman photo documentaire narrant cinquante ans de la vie d’un coiffeur de Montceau-les-Mines et de sa femme, photographiés, souvent à leur insu, par le voisin d’en face. C’est triste et drôle.
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