Au Sud, neuvième : La Grande-Motte

25 mai 2018


Pour se trouver au départ du car Cent Six qui emmène à La Grande-Motte, il faut se rendre à Place de France et c’est loin. J’achète donc mon premier ticket de tramouais (un euro soixante) et vais prendre à l’arrêt Gare Saint-Roch celui avec des oiseaux blancs sur fond bleu qui va de Mosson à Odysseum (ligne Un).
Après être passé par Antigone puis avoir vu le nouvel Hôtel de Ville bleu nuit, je descends à l’avant-dernière station en compagnie de toute une jeunesse étudiante et d’une sexagénaire qui m’indique où attendre le car de neuf heures trente. Sept petites Anglaises allant à la plage sont du voyage.
Trente-trois minutes plus tard, je descends à l’arrêt Grande Pyramide. Elle ne l’est que par rapport aux autres. Toutes sont typiques dans leurs lignes de l’esthétique des années Soixante-Dix. Cet ensemble de bâtiments ne me plaît ni ne me déplaît. Je trouve son unité ennuyeuse. Le seul immeuble qui la rompt partiellement est hideux, c’est le prétentieux Hôtel Mercure. A tout prendre, je préfère l’architecture foutraque de Palavas.
Ces édifices font face au port dont je fais le tour. Il y a là de luxueux navires à moteur ou à voiles. Cette richesse alignée est plus vulgaire que les boutiques pour pauvres autour du port de Palavas-les-Flots.
Quand j’arrive à la plage, j’ai une pensée particulière pour celle qui avant de me rencontrer passait une partie de l’été avec sa famille dans cette ville nouvelle de bord de mer. Au moins était-elle en vacances, mais pas heureuse.
Moi-même, je n’ai qu’une envie : ne pas m’attarder ici. Je refais le chemin portuaire dans l’autre sens, croisant de plus en plus de vélos. Arrivé au bout du quai nord, je m’installe le temps d’un café à une terrasse garnie de pelouse synthétique où est diffusée une musique tout autant synthétique.
A midi moins cinq, je m’installe à celle d’à côté, au café restaurant Le Poséidon. J’y commande le plat du jour à onze euros, un filet de cabillaud aux lentilles et crème au lard, et  un quart de chardonnay à quatre euros cinquante, puis signale au serveur que je suis un peu pressé, ayant à prendre un car à une heure moins le quart.
-Juste le temps de le cuire, me dit-il.
C’est avec dix minutes d’avance que je suis à l’arrêt Grande Pyramide. J’achète au chauffeur un billet jumelé « car et tram » à deux euros soixante, mais quand je veux le valider dans le tramouais le rouge s’allume. Fraudeur malgré moi, je juge préférable de descendre à l’arrêt d’avant la gare.
Content de retrouver Montpellier, je prends le café au Green Café en face d’un ébouriffant mur peint en trompe-l’œil. La ville en possède plusieurs. Celui-là est mon préféré.
Plus tard, au Café Riche, c’est devant un diabolo menthe que j’observe la comédie.
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Un homme à La Grande-Motte :
-Et demain matin, je m’en vais à La Baule.
Un masochiste sans doute.
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Une femme au même endroit et au téléphone :
-Non, je suis pas chez moi. Oui, je suis en France, bien sûr. Je suis sur le bateau. Je suis en arrêt. Je me repose quoi.
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Une autre au Green Café :
-Mon père, il s’est abêti. Avant, il était dans des associations, il s’intéressait à la politique. Mais depuis qu’il l’a rencontrée, comme elle est complètement abrutie…
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Il y a encore des grands-mères qui se font appeler Mémé :
-Mémé, elle a dit quoi ? Attention, hein !
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Un mur peint en trompe-l’œil ne rend rien en photo : il faut le voir pour le croire.
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Une contre-allée destinée aux bicyclistes comme à Saint-Nazaire et le piéton peut vaguer tranquillement au bord de la mer. L'aurait dû y penser Jean Balladur.