Au vide grenier de la Fac de Lettres de Mont-Saint-Aignan

9 septembre 2019


Ce samedi matin, après la pluie de la nuit, j’attends à l’arrêt République le bus Té Un de sept heures treize. Il est remarquablement à l’heure. J’en descends à l’arrêt Campus, tout comme deux dames à caddies. Je les suis jusqu'au parquigne de la Fac de Lettres où s’étale le vide grenier annuel.
L’une des premières personnes que je croise fut une très belle jeune fille, il y a plus de vingt ans, vers laquelle se tournaient les regards masculins au café Les Floralies que je fréquentais quand je venais à Rouen le mercredi. Devenue prof et mère, son visage s’est rapidement ridé, de plus en plus ridé. Aujourd’hui, j’ai l’impression qu’elle parle toute seule.
Il fut un temps où je trouvais ici des livres dignes de l’Université. Ce n’est plus le cas. Au moins ai-je la chance d’être devant un stand au moment où le vendeur, que je connais de vue, y dépose des livres à un euro. Leur prix m’aide à en acheter quatre avant qu’arrive la concurrence. Plus loin, j’achète pour un euro cinquante, publiés chez Buchet Chastel, période couverture orange, deux romans de Mongo Beti qui fut prof de lettres à Rouen au Lycée Corneille pendant presque trente ans et est bien oublié.
-Vous vous y connaissez en contrefaçon ? me demande la femme près de laquelle j’attends le Té Un du retour.
Elle a acheté une écharpe Chanel et commence à le regretter. Et des bijoux qu’elle m’assure ne pas revendre : « Je les mets puis quand j’en ai assez je les donne à des amies ». Je la crois à moitié tandis qu’elle sort de son sac une loupe oculaire pour examiner une boucle d’oreille. C’est bien une Swarovski. Je ne suis pas mécontent qu’elle aille s’asseoir à l’autre bout du bus quand nous grimpons dans celui-ci.
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Ce samedi est également celui du retour des Gilets Jaunes et des Céhéresses. Les premiers (la plupart sans uniforme), émoustillés d’avoir réussi à entrer dans la rue du Gros Horloge et à casser les vitrines de quelques banques sur fond de poubelles enflammées, ont vu leurs ardeurs calmées par les lacrymogènes des seconds.
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Ces partisans de la violence de rue, scandant « Anti anti capitaliste », soutiennent ce qui se passe à Hong-Kong où pourtant il s’agit de défendre le capitalisme contre le communisme dévoyé des Chinois.