Au vide grenier du Vaudreuil encore une fois

16 août 2019


Malgré le risque de « rares averses », je traverse une ville de Rouen déserte ce quinze août afin de prendre, muni d’un billet à deux euros quatre-vingts, le train de sept heures douze pour Paris.
Je suis le seul à descendre à la gare de Val-de-Reuil et ne croise personne sur le sentier qui suit la rivière d’Eure jusqu’au Vaudreuil où, comme d’habitude, c’est vide grenier. Ce sentier est mal entretenu, envahi par des graminées. J’enjambe quelque arbres chus lors d’une récente tempête ainsi qu’un poteau de téléphone dont les fils ne sont qu’à un mètre de l’eau. Huit heures sonnent à l’église du village. Il me faut encore un quart d’heure de marche pour arriver au rond-point où commence le déballage. Jamais ce trajet ne m’a paru aussi long.
Le ciel étant fort couvert, je fais le tour sans tarder. Il est plus court cette année car nul n’est installé sur le terrain de foute pour des raisons techniques. Je ne trouve à acheter que quatre livres et c’est parce qu’on me les propose à cinquante centimes.
Dépité, je prends un café à un euro vingt à la terrasse du  Bar des Sports en compagnie d’un échantillon représentatif d’Eurois : « Bon bah, on va faire not’ p’tit tour et puis on va rentrer » « Tu décolles, Anatole ? ».
Comme mon train de retour n’est qu’à onze heures vingt-huit, je refais le circuit et trouve dans la foule des éventuels acheteurs ma sœur et mon beau-frère. Je leur demande s’ils peuvent me conduire à la gare. Ils m’invitent à prendre un café chez eux d’abord.
Avant de quitter Le Vaudreuil pour aller dans un autre village du coin, nous faisons un petit circuit souvenir : le bâtiment qui abritait l’entreprise de menuiserie de Grand-Oncle Fernand, l’immeuble qu’il avait construit pour en louer les appartements, la maison de la rue Bellot où je le vois encore arriver dans son Idée Dix-Neuf orange claque-sonnant vigoureusement Grand-Tante Suzanne pour qu’elle vienne lui ouvrir le portail.
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Sans doute est-ce la dernière fois que je vais au vide grenier du Vaudreuil. Trop d’effort physique pour un rendement quasi nul.
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En début d’après-midi, les « rares averses » se succèdent, dont l’auvent du Son du Cor me protège. Un peu moins le sont ceux qui déjeunent sous les parasols de la crêperie d’en face. La terrasse de celle-ci a repris tout son espace après les chutes de pierres qui l’avait amputée. A considérer la corniche au-dessous de laquelle mangent certains, je croise les doigts pour qu’il ne leur tombe pas sur la tête autre chose que des gouttes d’eau.