Colmar (dix-huit) : Zellenberg

8 juin 2025


Le marché du samedi s’installe place Saint-Joseph. La Police Municipale fait enlever une voiture qui gêne. Un gros nuage noir menace. Je petit-déjeune sur le muret puis juge bon de me mettre préventivement au sec sous l’abribus de la ligne F.
A la Gare je monte encore une fois dans le car Fluo terminus Ribeauvillé. Un couple de Japonais fait de même. La conductrice est fort gentille. Elle n’hésite pas à descendre pour montrer à deux autres Japonais où prendre le car pour Eguisheim et elle n’écoute pas la radio.
Il est huit heures quatorze lorsque je descends entre Riquewhir et Hunawhir à l’arrêt Route des Vins au pied de Zellenberg. Ce village a pour particularité d’être situé sur une colline à deux cent quatre-vingt-cinq mètres de hauteur.
Pour atteindre ce sommet, je trouve des raccourcis avec escaliers. Le dernier débouche au pied de l’église baroque de mil sept cent soixante. La place devant cet édifice religieux sert malheureusement à garer les voitures. A côté se trouve une des deux tours rondes de défense, vestiges du château détruit à la Révolution. Elle est coiffée d’un nid de cigognes,
Je prends la rue principale bordée de maisons de vigneron, rez-de-chaussée en pierre réservé à l’activité professionnelle et escalier montant à l’étage en pan de bois où se trouve le logis dans lequel on pénètre par une porte en plein cintre comportant une date ou un emblème. Certaines sont porteuses de végétation grimpante.
Au bout du village se trouve la seconde tour de défense et démarre un chemin aménagé. Je fais un peu du tour de Zellenberg pour avoir vue sur les lointains, notamment sur Riquewihr, mais Riquewihr de loin, ça ne ressemble à rien. Il faut y entrer pour être éberlué. Plus intéressante est la vue sur le Haut-Koenigsbourg et celle sur le ciel tourmenté.
Il tombe des gouttes depuis mon arrivée sans que ce soit gênant. Je reviens par une rue parallèle où se trouve l’Hôtel Restaurant du Schlossberg. « Kein Pipi-Room », est-il écrit sur une ardoise à la porte de l’établissement. Il n’y a pas de toilettes publiques à Zellenberg. Je fais pipi derrière l’église.
Redescendu par les escaliers, je remarque près d’une vigne un cerisier garni de fruits rouges. Un homme ça s’empêche, mais pas toujours (désolé Albert). Je grimpe sur le banc situé sous l’arbre, attrape une branche et empli ma poche droite.
C’est en crachant les noyaux que j’attends le car Fluo de neuf heures neuf pour Colmar et vois passer le petit car rouge Kutzig qui promène les touristes sur la Route des Vins pour vingt-neuf euros. La même conductrice est au volant du mien. Il contient une bande de natives à l’accent prononcé. Des quinquagénaires qui vont à la ville. « A Sélestat, ça va pas, dit l’une, je connais trop de monde. Colmar, c’est mieux, je connais personne. »
Un bus C me dépose près du Café Rapp. Le temps restant médiocre, je m’installe à l’intérieur et lis là jusqu’à ce qu’un groupe de quatorze arrive, dont une moitié de moutards qui se mettent à jouer aux cartes.
Comme je passe devant le Centre d’Art Contemporain André Malraux, je décide d’y entrer. On me voit arriver avec de l’espoir plein les yeux mais l’homme qui m’invite à regarder un film de six minutes déchante quand je lui dis que je n’aime pas ça. La jeune fille, pourtant mignonne, qui s’offre comme médiatrice n’a pas plus de succès. Une quantité de travaux d’élèves d’école d’art sont montrés. Rien ne m’intéresse, un petit tour et je m’en vais.
Je choisis de déjeuner au Stam près de l’église des Dominicains, à l’une des rares tables d’intérieur, d’un fleschnaka alsacien au bouillon de pot-au-feu pommes vapeur fondantes et salade verte. Une vieille Allemande se croit autorisée à venir prendre les couverts inutilisés de ma table. Je l’en empêche et elle file se rassoir sous les yeux embarrassés de sa fille ou belle-fille. Un couple fait pire dans le domaine du sans-gêne. Elle et lui demandent une table, vont aux toilettes puis s’évaporent. « Pipi caca et partis ! », constate la patronne. J’ai du mal à supporter les Allemands et ils représentent sept sur dix des touristes à Colmar. Ils viennent manger en Alsace parce que c’est moins cher que chez eux. Ce pourquoi les prix augmentent, atteignant ceux de la Côte d’Azur.
Mon frichti alsacien est nourrissant et la salade verte conséquente. J’ajoute néanmoins une tarte meringuée citron. Vingt et un euros quarante pour le tout.
                                                                          *
Le bizarre à Colmar, c’est le marché quotidien autour de la Collégiale et de l’église des Dominicains, des vendeurs de folichonneries pour pauvres, de bijoux de pacotille, de fringues et de sacs à cinq dix quinze euros. Comme à Fréjus Plage le dimanche.