Au guichet de la Gare de Colmar, j’achète pour cinq euros vingt, un aller pour Munster et un retour jusqu’à la halte ferroviaire Saint-Joseph à côté de mon logis Air Bibi. Le petit train Fluo qui passe au bout de ma rue va vers la montagne vosgienne en remontant ce qu’on appelle la Grande Vallée (par opposition à la Petite Vallée). Aussi a-t-il pour surnom le Tégévé (Train de la Grande Vallée). Son terminus est Metzeral, peu après Munster. Deux rames font l’aller retour toute la journée sur la voie unique se croisant en Gare de Turckheim grâce à une dérivation.
Je prends le sept heures quarante-sept dans lequel montent beaucoup de lycéen(ne)s à valises. Le lundi est le jour des pensionnaires. Beaucoup descendent à Ingersheim Cité Scolaire, un lycée au milieu des vignes. D’autres descendent après Turckheim (où l’on détruit une usine) à Saint-Gilles en pleine nature. Encore quelques arrêts et c’est Munster.
Arrivé sur la place du Marché, je demande à des gars de la ville où trouver une boulangerie. La boulangère me vend un pain au chocolat énorme à un euro vingt puis me dit que, comme c’est lundi, rien est ouvert dans le pays pour boire un café. Je mange donc cette viennoiserie sur un banc près de la petite église catholique.
Je fais ensuite le tour de la ville reconstruite après la Première Guerre Mondiale en m’aidant des panneaux qui signalent les curiosités. Je passe voir l’Hôtel de Ville Renaissance avec son aigle à deux têtes (l’emblème des Habsbourg), l’ancien Palais Abbatial (l’aile restante), le peu qu’il reste de l’ancien Cloître (« Interdiction de grimper sur les ruines de l’ancienne abbaye »), l’imposant Temple protestant derrière la Fontaine du Lion, la Grand-Rue et ses belles demeures.
J’ai vu ce qu’il y avait à voir avant même qu’on me donne le plan du bourg à l’Office de Tourisme qui n’ouvre qu’à neuf heures trente. L’hôtesse me confirme ce que je craignais : aucune ferme-auberge du coin n’est accessible à moins de deux heures de marche en grimpant (à moins d’avoir une voiture bien sûr).
Dans un coin de l’aile restante de l’ancien Palais Abbatial, le salon de thé L’Abbaye d’Anny ouvre à dix heures. J’attends ce moment sur un banc à proximité d’un mat à nid de cigognes (« Ne pas stationner sous le nid, chutes de branches possible »). Des cigognes, il y en a partout sur les toits de Munster, et ça claque du bec pour effrayer les pigeons. On trouve, place du Marché, l’Hôtel des Cigognes et la Pharmacie des Cigognes.
L’Abbaye d’Anny est dans une salle semi-enterrée, un brin sombre. Derrière moi sont deux femmes sur le déclin et à la seule table haute un vieux qui déprime devant son verre de blanc. Derrière le comptoir, la patronne essaie de dialoguer avec Alexa tandis que son mari s’active aux fourneaux. Le pénible, c’est la musique, un de ces chanteurs de guimauve contemporaine, qui chantent avec le nez, et qu’on écoute en banlieue mais ailleurs aussi. Après avoir bu mon rallongé à un euro quatre-vingt-dix, je renonce à ouvrir Balzac.
Près de la Gare est un parc où il est agréable de lire, même si je me pèle un peu. J’ai été optimiste pour me rendre en Alsace fin mai sans emporter un pull. Fin décembre mil huit cent quarante-cinq, Honoré de Balzac se dévergonde. Lundi vingt-deux : J’ai fait la partie d’aller prendre du hachich, avec Gautier à l’hôtel Pimodan ce soir. Mardi vingt-trois : J’ai résisté au hachich et je n’ai pas éprouvé tous les phénomènes ; mon cerveau est si fort, qu’il fallait une dose plus forte que celle que j’ai prise. Néanmoins, j’ai entendu des voix célestes, et j’ai vu des peintures divines.
A côté est le Grand Hôtel et son restaurant Côté Gare dont le menu du jour est à vingt euros : terrine à la mirabelle et ses crudités, onglet de veau sauce forestière frites et légumes, coupe de fraises Melba. J’ajoute un quart d’edelzwiker à cinq euros soixante. C’est chic et vieillot. Au mur figure un historique du tramouais qui reliait Munster au col de la Schlucht et qui aurait bien fait mon affaire. Mangent ici des employés de la Senecefe, deux ou trois clients de l’hôtel, un père et sa fille qui arbore un crop top on ne peut plus hardi, et vers treize heures, le patron de l’hôtel et sa famille. Cela fait peu de clientèle pour un si grand établissement.
Sur le parvis de la Gare est installée une cabane à livres. Avant de rentrer avec le treize heures dix-neuf, j’y prélève La bonne fortune de monsieur Ma de Qiu Xiaolong (Liana Levi piccolo), ce qui n’alourdira pas ma valise.
*
Un achat qui se révèle utile, celui de la carte « France : Voyage en train » de chez Cartotrain.
Je prends le sept heures quarante-sept dans lequel montent beaucoup de lycéen(ne)s à valises. Le lundi est le jour des pensionnaires. Beaucoup descendent à Ingersheim Cité Scolaire, un lycée au milieu des vignes. D’autres descendent après Turckheim (où l’on détruit une usine) à Saint-Gilles en pleine nature. Encore quelques arrêts et c’est Munster.
Arrivé sur la place du Marché, je demande à des gars de la ville où trouver une boulangerie. La boulangère me vend un pain au chocolat énorme à un euro vingt puis me dit que, comme c’est lundi, rien est ouvert dans le pays pour boire un café. Je mange donc cette viennoiserie sur un banc près de la petite église catholique.
Je fais ensuite le tour de la ville reconstruite après la Première Guerre Mondiale en m’aidant des panneaux qui signalent les curiosités. Je passe voir l’Hôtel de Ville Renaissance avec son aigle à deux têtes (l’emblème des Habsbourg), l’ancien Palais Abbatial (l’aile restante), le peu qu’il reste de l’ancien Cloître (« Interdiction de grimper sur les ruines de l’ancienne abbaye »), l’imposant Temple protestant derrière la Fontaine du Lion, la Grand-Rue et ses belles demeures.
J’ai vu ce qu’il y avait à voir avant même qu’on me donne le plan du bourg à l’Office de Tourisme qui n’ouvre qu’à neuf heures trente. L’hôtesse me confirme ce que je craignais : aucune ferme-auberge du coin n’est accessible à moins de deux heures de marche en grimpant (à moins d’avoir une voiture bien sûr).
Dans un coin de l’aile restante de l’ancien Palais Abbatial, le salon de thé L’Abbaye d’Anny ouvre à dix heures. J’attends ce moment sur un banc à proximité d’un mat à nid de cigognes (« Ne pas stationner sous le nid, chutes de branches possible »). Des cigognes, il y en a partout sur les toits de Munster, et ça claque du bec pour effrayer les pigeons. On trouve, place du Marché, l’Hôtel des Cigognes et la Pharmacie des Cigognes.
L’Abbaye d’Anny est dans une salle semi-enterrée, un brin sombre. Derrière moi sont deux femmes sur le déclin et à la seule table haute un vieux qui déprime devant son verre de blanc. Derrière le comptoir, la patronne essaie de dialoguer avec Alexa tandis que son mari s’active aux fourneaux. Le pénible, c’est la musique, un de ces chanteurs de guimauve contemporaine, qui chantent avec le nez, et qu’on écoute en banlieue mais ailleurs aussi. Après avoir bu mon rallongé à un euro quatre-vingt-dix, je renonce à ouvrir Balzac.
Près de la Gare est un parc où il est agréable de lire, même si je me pèle un peu. J’ai été optimiste pour me rendre en Alsace fin mai sans emporter un pull. Fin décembre mil huit cent quarante-cinq, Honoré de Balzac se dévergonde. Lundi vingt-deux : J’ai fait la partie d’aller prendre du hachich, avec Gautier à l’hôtel Pimodan ce soir. Mardi vingt-trois : J’ai résisté au hachich et je n’ai pas éprouvé tous les phénomènes ; mon cerveau est si fort, qu’il fallait une dose plus forte que celle que j’ai prise. Néanmoins, j’ai entendu des voix célestes, et j’ai vu des peintures divines.
A côté est le Grand Hôtel et son restaurant Côté Gare dont le menu du jour est à vingt euros : terrine à la mirabelle et ses crudités, onglet de veau sauce forestière frites et légumes, coupe de fraises Melba. J’ajoute un quart d’edelzwiker à cinq euros soixante. C’est chic et vieillot. Au mur figure un historique du tramouais qui reliait Munster au col de la Schlucht et qui aurait bien fait mon affaire. Mangent ici des employés de la Senecefe, deux ou trois clients de l’hôtel, un père et sa fille qui arbore un crop top on ne peut plus hardi, et vers treize heures, le patron de l’hôtel et sa famille. Cela fait peu de clientèle pour un si grand établissement.
Sur le parvis de la Gare est installée une cabane à livres. Avant de rentrer avec le treize heures dix-neuf, j’y prélève La bonne fortune de monsieur Ma de Qiu Xiaolong (Liana Levi piccolo), ce qui n’alourdira pas ma valise.
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Un achat qui se révèle utile, celui de la carte « France : Voyage en train » de chez Cartotrain.