Confiné (deux) dix

9 novembre 2020


L’homme a désir d’être seul / Que très entouré d’autres hommes écrit Georges Perros dans Une vie ordinaire. C’est mon cas. Raison pour laquelle le premier confinement pendant lequel je pouvais lire dans le jardin alors qu’y vaquaient les habitant(e)s de la quinzaine d’appartements occupés me fut plus facile que le deuxième pendant lequel je suis incapable de lire en journée dans mon appartement
Je ne lis que le soir dans mon lit. Au bout de dix jours, je suis toujours dans le premier volume de la Correspondance entre Ferdinando Galiani (abbé) et Louise d’Epinay (marquise), plus intéressé par les lettres d’icelui que d’icelle.
De lui, cette fine analyse de l’éducation :
Ainsi qu’on fasse apprendre ou le latin, ou le grec, ou le français à un enfant ce n’est pas l’utilité de la chose qui intéresse. C’est qu’il faut qu’il s’accoutume à faire la volonté d’autrui (et s’ennuyer) et à être battu par un être né son égal (et souffrir). Lorsqu’il est accoutumé à cela, il est dressé, il est social ; il va dans le monde, il respecte les magistrats, les ministres, les rois (et ne s’en plaint pas). Il exerce les fonctions de sa charge et il est à son bureau, ou à l’audience, ou au corps de garde, ou dans l’œil de bœuf, et baille et reste là, et gagne sa vie. S’il ne fait pas cela il n’est bon à rien dans l’ordre social. Donc l’éducation n’est que l’élaguement des talents naturels, pour donner place aux devoirs sociaux. L’éducation doit amputer et élaguer des talents, si elle ne le fait pas, vous avez le poète, l’improvisateur, le brave, le peintre, le plaisant, l’original, qui amuse, et meurt de faim ne pouvant se placer plus dans aucune niche de celles qui existent dans l’ordre social. Ferdinando Galiani à Louise d’Epinay, Naples, le quatre août mil sept cent soixante-dix
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Deux autres extraits :
Enfin j’adore M. de Sartine, je lui ai mille obligations et je voudrais lui en avoir encore davantage. Il ne dépend que de lui que je retourne à Paris. Il n’a qu’à me faire inspecteur de police, et me donner le département des demoiselles. Je vole, je cours, j’abandonne tout. Ferdinando Galiani à Louise d’Epinay, Naples, le trente juin mil sept cent soixante-dix
Attendons les paiements de Merlin, et dites toujours entre vos dents lorsqu’il viendra chez vous « Puisses-tu pisser comme tu paies goutte à goutte. » Cela vous soulagera. Il n’y a rien de tel que de jurer. Ferdinando Galiani à Louise d’Epinay, Naples, le premier septembre mil sept cent soixante-dix