Exposition Marcel Duchamp la peinture, même au Centre Pompidou

9 octobre 2014


Rouen a le pavé mouillé ce mercredi alors que la nuit s’achève. Au carrefour de la rue Saint-Nicolas avec celle de la Croix-de-Fer stationne une voiture de la Police Nationale qui évoque un drame possible. J’atteins la gare sans ennuis et sans une goutte de pluie sur la tête, mais celle-ci remet ça alors que le train file (si l’on peut dire) dans la campagne normande en direction de Paris. Quoi de plus sinistre que ce jour qui se lève difficilement et trempé. Sur la vitre m’apparaît une image hideuse de mains déformées et grossies, des mains d’étrangleur. Ce sont les miennes, inoccupées. Je n’ai pas avec moi de livre à lire.
Des livres, j’en trouve à l’accoutumée au Book-Off de la Bastille, dont Mœurs étranges au pensionnat de jeunes filles que le poète anglais Philip Larkin écrivit sous le pseudonyme féminin de Brunette Coleman (Anatolia/Le Rocher). La pluie ne cessant, j’entre déjeuner à côté, au Péhemmu chinois Le Rallye, où l’on me sert mon plat de prédilection : une cuisse de canard confite avec des pommes rissolées. Je l’accompagne d’un quart de côtes-du-rhône et la déguste en regardant les pauvres perdre leur peu d’argent aux jeux de hasard.
Le métro m’emmène au Centre Pompidou. Ma carte d’adhérent me donnant la possibilité de voir tout ce qu’on y expose, je prends la chenille jusqu’au sixième où est montrée l’œuvre peinte de l’inventeur de l’art moderne (comme disent certains) sous le titre étudié de Marcel Duchamp la peinture, même. Sans cette entrée gratuite, je n’y aurais pas mis l’œil.
Nulle attente pour pénétrer dans les salles d’exposition où je m’attends à croiser le Rouennais en salopette rose. Il n’y est pas. La majeure partie du public semble composée d’institutrices venues s’instruire en groupe. Quant à la peinture de Marcel, si l’on excepte Nu descendant un escalier, j’ai la confirmation qu’elle est globalement mauvaise, soumise à toutes les influences, tout au plus un marchepied pour passer aux choses sérieuses représentées ici par Le Grand Verre. On connaît la suite, elle est visible à Philadelphie.
Je suis néanmoins content d’être passé là car j’y vois pour la première fois la Femme disséquée de la nuque au sacrum de Jacques Fabien Gautier d’Agoty, dite L’Ange anatomique, dont je ne connaissais que la reproduction sur l’édition de poche Dix/Dix-Huit des Larmes d’Eros de Georges Bataille.