L’Enlèvement au sérail à l’Opéra de Rouen

11 avril 2018


Ce dimanche après-midi, j’ai une place centrée au cinquième rang du premier balcon de l’Opéra de Rouen pour L’Enlèvement au sérail de Wolfgang Amadeus Mozart, opéra singspiel (chanté parlé) dont je ne connais que l’ouverture. Le livret est dû à Johann Gottlieb Stephanie.
A la baguette, c’est le sympathique et chevronné Antony Hermus dont je peux apercevoir la tête et la gestuelle tout en ayant vue sur l’ensemble du plateau et le surtitrage en français. Emmanuelle Cordoliani, la metteuse en scène, a transporté l’action d’un palais turc du dix-huitième siècle à un cabaret de la Belle Epoque nommé Le Sérail. Constance et sa servante Blonde y sont retenues par Selim Bassa et son âme damnée Osmin. Leurs amoureux respectifs, Belmonte et Pedrillo, cherchent à les délivrer et y parviendront grâce à la magnanimité du geôlier.
« Trois heures vingt avec entracte, ça a intérêt à être bien », s’inquiétait l’un de mes voisins de derrière. Ça l’est. La musique, le décor, la mise en scène, le jeu et le chant, tout me va. Les solistes sont pour partie les lauréats deux mille dix-sept du Concours International de Chant de Clermont-Ferrand. Comme souvent, j’apprécie surtout les chanteuses, deux sopranos talentueuses : Katharine Dain qui interprète Constance et Pauline Texier qui interprète Blonde, perruque bleue et tenue sexy. Je ne dois pas être le seul que cette petite soubrette fasse rêver. Les dames du public n’ont pas à se plaindre avec Stéphane Mercoyrol qui tient le rôle parlé de Selim, voix mâle et sensuelle, physique à l’avenant. Le discret murmure approbateur qui suit l’enlèvement de sa chemise me donne à penser que plus d’une serait ravie d’être sa prisonnière.
Un peu d’humour, un peu de gravité, le recours ponctuel aux marionnettes, au mime et aux ombres chinoises, un propos féministe qui pourrait bien avoir été modernisé dans la partie parlée, cet Enlèvement au sérail assure un véritable triomphe aux chanteurs, comédiens et musiciens, ainsi qu’au maestro, et à Mozart.
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La réplique de la fille aux cheveux bleus à la question : « Et Blonde, qui va l’emmener ? » : « On n’emmène pas Blonde. Elle s’en va toute seule. »
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Et dans la bouche de Selim, de quoi cogiter un moment : « Puisque dans ce monde tout est néant, suppose que tu n’existes pas et sois libre. »
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Quand on consulte Internet, on ne trouve rien sur Stéphane Mercoyrol, hormis qu’il a joué dans quelques films, dont La Vie d’Adèle. Et son adresse et numéro de téléphone à Paris (cela dit au cas où l’une).
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Le correcteur automatique d’orthographe me dit « plus d’une seraient ». Je vérifie et suis conforté dans mon « plus d’une serait ». Quand même, c’est étrange ce plus d’un, c’est-à-dire au moins deux, suivi d’un verbe au singulier. Tout aussi étrange, moins de deux, c’est-à-dire un ou zéro, suivi d’un verbe au pluriel.
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Plus d’un est venu et moins de deux sont partis, combien en reste-t-il ?