Pourquoi se gêner, ou la vie du quartier

18 juillet 2016


En milieu de semaine dernière, un je ne sais qui dépose nuitamment un tas de choses dont il se débarrasse sous le porche de la copropriété. Au petit matin, celles qui n’ont pas envie d’avoir ça sous les yeux les transportent dans la ruelle à l’aide d’un diable. Il y a là un vieil évier métallique, deux meubles de rangement abîmés, une télé à écran plat, un seau ayant servi à bricoler. A l’autre bout de la ruelle, venu d’ailleurs, stagne déjà un vieux canapé clic clac déglingué et l’égout est bouché depuis le dernier orage..
La nuit suivante sont ajoutés au tas sous ma fenêtre une paire de chaussures, un matelas d’une personne et une vieille glacière cradingue mais la télé et l’un des meubles sont récupérés par un nécessiteux. Disparaissent ensuite le vieil évier et l’autre meuble. A l’autre bout, des sacs poubelles jouxtent désormais le canapé.
Dans le même temps, les graffitis sur les murs et le sol sont de plus en plus nombreux. Ceux dégradant la porte d’entrée de la copropriété sont là depuis des mois, peut-être une année. Aucun(e) des copropriétaires résidant(e)s n’a jugé bon de demander au service municipal concerné de venir les effacer (les locataires ne sont pas autorisés à faire cette démarche).
Bref, la venelle où j’habite n’a jamais été aussi sale, un objet d’édification pour les visiteurs estivaux. Quand on y verra prospérer les rats le fantasme de la « rue du Moyen-Age » des guides touristiques sera devenu réalité.
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Ce samedi matin, à six heures, alors que je me lève, j’ai l’oreille alertée par un bruit de conversation avinée sous ma fenêtre. Deux jeunes couples essaient d’entrer dans l’immeuble d’en face. Ils n’ont pas le code de la barrière métallique ou l’ont oublié. L’un des hommes la secoue violemment, sans effet. Il se recule et d’un grand coup de pied l’oblige à s’ouvrir.
Qui sont-ils ? Des invités d’un des habitants ? Des vacanciers sous-locataires ? Des cambrioleurs ? Dois-je appeler la Police ? Avant que je m’y décide, et aucune lumière ne s’étant allumée dans l’un des appartements qui semblent tous désertés par leurs habitant(e)s en titre, les deux femmes et l’un des hommes, porteur d’un sac poubelle, ressortent. « Allez François dépêche-toi, on y va. » L’autre les rejoint et ils disparaissent, la barrière restant ouverte.
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« Moka, non ! » « Moka, viens-là ! » Tel est le texte un peu répétitif du jeune couple de voisins nouvellement à chien lorsqu’elle et lui sortent dans le jardin avec leur animal en cours de dressage.
Faut pas se moquer de Moka. L’aurait pu s’appeler Clafoutis, Tiramisu ou Apfelstrudel.