Survivre à Rouen au mois de novembre

26 novembre 2019


En ce mois de novembre pluvieux, la première moitié de l’après-midi, je la passe au Faute de Mieux ou au Café des Chiens ou au Café de la Ville (les noms ont été changés, comme écrivent les journalistes de faits divers).
Dans mon voisinage, il est parfois question de « parc naturologique » où l’on aime se ressourcer ou d’ »écriture incursive » à laquelle on ne comprend rien. On évoque des épisodes de sa petite vie : « C’est quelqu’un que j’ai connu autrefois dans mes sorties nocturnes. J’ai eu moi aussi ma grande époque. », « C’étaient des gosses qui mettaient des pétards dans les boîtes à lettres. Moi, j’appelle ça des délinquants. », « Oui elle est de la bourgeoisie, mais aussi de la campagne quand même. », « Ah mais moi je m’amuse pas avec ta sœur, je m’amuse pas avec elle, elle a été qu’une fois chez moi. » On raconte des anecdotes, dont certaines trop belles pour être vraies : « Une fois, quand je travaillais à la Fnac, y avait un étudiant qui devait acheter Le Rouge et le Noir et il me dit : « Par contre, je vais prendre que Le Rouge parce que j’ai pas beaucoup d’argent. » On dit aussi du mal d’un qui aime les livres : « Chez lui, c’est même plus une maison, c’est une librairie » (avec un immense mépris dans la voix).
Quand la nuit s’apprête à tomber, je suis capable de rentrer chez moi.
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Une prof, rue Saint-Romain :
-Vous voyez là-bas, c’est l’Historial Jeanne d’Arc. A votre avis, on peut y voir quoi ?
Un élève, prudent :
-Un tas de choses.
Moi-même, in petto :
Un tas de choses, peut-être, mais pas de tas de cendres.