Un mercredi parisien à trois Book-Off

27 novembre 2025


Tous les trains vers Paris bloqués hier matin par un arbre tombé. Ce mercredi, je croise les doigts pour qu’aucun incident ne se produise. Dans la voiture Trois du sept heures vingt-deux, des collègues (comme ils disent) sont en chemin vers je ne sais quelle réunion professionnelle. Elles et eux font preuve d’un dynamisme soûlant. Je lis Chez les Weil (André et Simone) de Sylvie Weil, fille du mathématicien du groupe Bourbaki et nièce de la philosophe morte peu après sa naissance.
Tout se passe bien côté train. Je chope un bus Vingt-Neuf sur le départ et observe Paris. Rue du Grenier-Saint-Lazare, un restaurant chinois a pour nom Chez Mamie. Je descends à Bastille, du mauvais côté, car la conductrice qui « dévie le Marais » refuse de s’arrêter avant.
Après passage au Marché d’Aligre (pas d’achat), je passe chez Mona Lisait (pas d’achat) puis, au comptoir du Camélia, attends l’ouverture de Book-Off. Je n’y achète à un euro que deux livres de la collection L’un et l’autre de Gallimard : Long séjour de Jean-Noël Pancrazi et Florentiana de Thierry Laget. Ce dernier bénéficie d’un envoi de l’auteur : « Madame Christiane Baroche, ce guide « sentimental » de quelques collines. Cordialement. Thierry Laget. » (Christiane Baroche est morte à Paris en juillet deux mille vingt-quatre.)
Direction Châtelet où chez Au Diable des Lombards je retrouve ma table de solitaire pour un croustillant d’effiloché de bœuf et un civet de sanglier purée maison.
Au sous-sol du Book-Off de Saint-Martin, peu de livres à un euro sont pour moi : Proust au Majestic de Richard Davenport-Hones (Grasset) et Climats de France de Marie Richeux (Sabine Wespieser).
Je me décide à rejoindre le troisième Book-Off, celui de Quatre-Septembre, snobé depuis un moment, pour voir si ce sera mieux. Las, quand j’arrive sur le quai du métro Onze j’apprends qu’il est à l’arrêt, reprise du trafic dans une heure. Je rejoins la ligne Une, descends à Concorde, prends la ligne Huit et ressors place de l’Opéra, lequel Opéra a disparu derrière une bâche publicitaire. Je termine pédestrement et encore une fois je suis déçu, n’achetant à un euro que Mémoires de M. Goldoni pour servir à l’histoire de sa vie et à celle de son théâtre (Le Temps retrouvé / Mercure de France).
Je prends un café au comptoir du Bistrot d’Edmond où je ne fais plus figure d’habitué puis le métro Trois ressuscité me ramène à Saint-Lazare. Dans le seize heures quarante du retour, je retrouve Sylvie Weil racontant combien il était pesant d’être le sosie d’une tante adulée.
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C’est à Rouen dans une cellule de la prison Bonne Nouvelle, au début de mil neuf cent quarante, qu’André Weil résolut le problème de Riemann. Il y était enfermé pour refus de porter l’uniforme. C’est ce que m’a appris dans sa préface Michèle Audin qui vient de mourir.
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J’aurais donné beaucoup pour les avoir vus Évelyne et Simone, les deux femmes d’André (sa femme et sa sœur allant le visiter en prison). Le tableau qu’elles présentaient, marchant dans les rues de Rouen, devait être assez remarquable : l’une avec sa jupe informe, ses souliers d’homme et son béret, l’autre avec de jolis pull-overs qu’elle tricotait elle-même, un ravissant chapeau, du rouge à lèvres… (Sylvie Weil, Chez les Weil)