Un samedi d’automne à Dieppe

29 septembre 2014


Le ciel bleu à Rouen ce samedi matin me conduit à Dieppe où il est gris. Qu’importe, il y fait doux. Je prends un café verre d’eau sur le port au bar de l’Escale fréquenté par les gens d’ici. Mes voisins parlent de la Résistance, du colonel Rol-Tanguy.
Pour déjeuner, je choisis la terrasse en angle du New Haven, six tables de deux, d’où l’on voit bien les bateaux sur l’eau et les maisons du bord de mer côté église. Deux des serveurs ont l’air d’avoir été fabriqués outre-Manche tant ils ont l’allure et la couleur de cheveux que l’on attribue souvent aux habitants d’en face. J’opte pour le menu à dix-neuf euros cinquante : foie de lotte, gratin de la mer, neufchâtel fermier, creumebeule aux fruits rouges, avec un cruchon de vin blanc en supplément. Aucun risque d’être côtoyé par des enfants, mais je ne peux éviter le chien qui arrive avec deux hommes à qui il en tient lieu, une sorte d’intestin appelé bouledogue français. Sans doute mon regard en dit-il long car l’un me demande :
-Il va pas vous embêter le chien ?
-C’est à lui qu’il faut poser la question, lui réponds-je.
Il le couche le plus loin possible de moi. Les autres tables sont occupées par des couples de retraité(e)s. A l’intérieur les salles sont vite pleines, ce qui réjouit les serveurs : « Ça rattrape un peu la saison » « Tant mieux » « C’est ce qui faut ». Le soleil pointe un peu ses rayons.
Je passe dans le quartier du Pollet et y prends le café à la terrasse du Mieux Ici Qu’en Face, lisant Dommages collatéraux (l’héritage de John Fante) de Dan Fante (13e Note Editions), livre acheté au Rêve de l’Escalier, tout en observant la vie du port à marée haute, entrées et sorties des voiliers, pont qui pivote pour laisser passer un remorqueur.
Un peu après seize heures, je quitte le Pollet et en chemin vers ma voiture croise l’ami Deluxe. Il fait partie du jury du Festival de Film Canadien et pense que je suis là pour un film. Je le détrompe.
Il fait bien plus beau à Rouen quand j’y reviens mais je sais que ce samedi je m’y serais morfondu.
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New Haven, la seule ville anglaise que je connaisse, où j’ai passé une journée avec celle qui me tenait alors la main, après une traversée à tout petit prix en bateau depuis Dieppe à la fin août, une tentative désespérée de prolonger les vacances, d’ignorer la rentrée scolaire imminente.
Souvenir d’une ville déserte aux magasins fermés le dimanche, d’un peube uniquement fréquenté par des hommes, d’une plage lointaine atteinte après avoir marché dans une zone industrielle sur le déclin.