Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
3 avril 2017
Ce vendredi après-midi trente et un mars est proposée à celles et ceux qui ont eu le privilège de recevoir un carton d’invitation une visite gratuite en avant-première de l’exposition Boisgeloup : l’atelier normand de Picasso au Musée des Beaux-Arts de Rouen (le vernissage et son buffet étant réservés aux officiel(le)s et à leurs invité(e)s en début de soirée).
Point de carton dans ma boîte à lettres cette fois, je ne sais pourquoi, mais j’ai pu en obtenir un à l’accueil la veille grâce à l’intercession d’une aimable employée qui a osé en réclamer un à l’un des membres du staff stressé. J’entre donc dans le bâtiment à deux heures quinze ayant été rejoint à sa porte par l’un que je connais. L’ayant croisé le matin même rue des Bons-Enfants, je lui ai proposé de profiter de mon invitation « valable pour deux personnes ».
Une fois à l’intérieur nous nous séparons. Pablo Picasso vivait au château du Boisgeloup, hameau de Gisors, quand il était marié avec Olga tout en ayant une histoire parallèle avec Marie-Thérèse « une jolie blonde de 17 ans éclatante de santé, cheveux au carré et profil droit » rencontrée à Paris près des Galeries Lafayette le huit janvier mil neuf cent vingt-six.
Les tableaux, les sculptures et les dessins ici montrés viennent essentiellement du Musée Picasso. Parmi ces derniers me retiennent la série des accouplements et celle du Minotaure, lequel devenu aveugle comme Œdipe est guidé par une petite fille dont les traits sont ceux de la jeune amante de l’artiste. Des documents sont en complément, dont cette lettre de Marie-Thérèse Walter (82 rue des Petits-Champs), datée du trente août mil neuf cent trente-deux, copiée par mes soins :
« Cher Monsieur Picasso
Serait-il possible que je viens faire les photographies un jour du commencement de la semaine prochaine ? J’aimerais tellement profiter du beau temps et faire une belle série d’instantanés. J’attends avec impatience un mot de vous. Bien sincèrement. »
Cette exposition intéressante est complétée par deux autres de moindre importance que je visite rapidement : Picasso : Sculptures Céramiques au dernier étage, surchauffé, du Musée de la Céramique (en redescendant vue d’ensemble sur le square Verdrel saccagé) et González/Picasso : une amitié de fer dans la partie centrale et une petite salle annexe du Musée de la Ferronnerie Le Secq des Tournelles. Cette dernière est organisée par le Centre Pompidou pour ses quarante ans, une occasion de sortir des réserves les sculptures métalliques de Julio González, ami de Picasso (s’il n’avait dû compter que sur son talent artistique, il ne serait sans doute plus exposé).
*
Il s’en faut de peu que Le Boisgeloup ne soit pas situé dans l’Eure. Aurait-il été cinq kilomètres plus loin, dans l’Oise, que le Musée des Beaux-Arts de Rouen n’aurait pas pu monter l’exposition consacrée aux œuvres que Picasso y fit quand il en habitait le château, car ici les évènements culturels doivent être normando-centrés selon le souhait des politicien(ne)s élu(e)s de droite comme de gauche.
C’est une déclinaison douce du « On est chez nous » des électrices et électeurs de la fille Le Pen.
*
Plongé dans la lecture du deuxième tome du Journal de Korneï Tchoukovski (Fayard) à la terrasse du Son du Cor ce jeudi en début d’après-midi, je profite du soleil en compagnie de pas mal d’autres dont une fille souvent cliente ici qui m’offre depuis deux ans un bonjour souriant où que l’on se croise, qu’elle soit seule ou en compagnie. Quand sa table passe à l’ombre, elle vient s’asseoir à côté de moi.
-Je me rapproche, c’est pour le soleil.
-Oui, je sais bien que ce n’est pas pour moi.
Quand elle fait une pause dans la correction de ses copies, j’ose lui adresser la parole. Elle me dit son goût particulier pour les oiseaux et la littérature mexicaine contemporaine, me cite le nom d’Ana Clavel. « Ce nom me dit quelque chose », lui dis-je mais ensuite j’ai un doute.
Rentré, j’explore ma bibliothèque et y trouve un livre signé Ana Clavel : Les Violettes sont les fleurs du désir publié chez Métaillé, qu’après avoir lu j’ai jugé suffisamment attachant pour le garder. En quatrième de couverture de ce roman « singulier et délicatement scandaleux », on évoque Cortázar, Nabokov et Bellmer.
*
Note de chevet à la manière de Sei Shōnagon.
Chose qui fait du bien quand on a atteint l’âge de la vieillesse :
Une fille jeune qui te tutoie d’emblée, avant même que tu aies fait de même avec elle : « Qu’est-ce que tu lis ? »
Point de carton dans ma boîte à lettres cette fois, je ne sais pourquoi, mais j’ai pu en obtenir un à l’accueil la veille grâce à l’intercession d’une aimable employée qui a osé en réclamer un à l’un des membres du staff stressé. J’entre donc dans le bâtiment à deux heures quinze ayant été rejoint à sa porte par l’un que je connais. L’ayant croisé le matin même rue des Bons-Enfants, je lui ai proposé de profiter de mon invitation « valable pour deux personnes ».
Une fois à l’intérieur nous nous séparons. Pablo Picasso vivait au château du Boisgeloup, hameau de Gisors, quand il était marié avec Olga tout en ayant une histoire parallèle avec Marie-Thérèse « une jolie blonde de 17 ans éclatante de santé, cheveux au carré et profil droit » rencontrée à Paris près des Galeries Lafayette le huit janvier mil neuf cent vingt-six.
Les tableaux, les sculptures et les dessins ici montrés viennent essentiellement du Musée Picasso. Parmi ces derniers me retiennent la série des accouplements et celle du Minotaure, lequel devenu aveugle comme Œdipe est guidé par une petite fille dont les traits sont ceux de la jeune amante de l’artiste. Des documents sont en complément, dont cette lettre de Marie-Thérèse Walter (82 rue des Petits-Champs), datée du trente août mil neuf cent trente-deux, copiée par mes soins :
« Cher Monsieur Picasso
Serait-il possible que je viens faire les photographies un jour du commencement de la semaine prochaine ? J’aimerais tellement profiter du beau temps et faire une belle série d’instantanés. J’attends avec impatience un mot de vous. Bien sincèrement. »
Cette exposition intéressante est complétée par deux autres de moindre importance que je visite rapidement : Picasso : Sculptures Céramiques au dernier étage, surchauffé, du Musée de la Céramique (en redescendant vue d’ensemble sur le square Verdrel saccagé) et González/Picasso : une amitié de fer dans la partie centrale et une petite salle annexe du Musée de la Ferronnerie Le Secq des Tournelles. Cette dernière est organisée par le Centre Pompidou pour ses quarante ans, une occasion de sortir des réserves les sculptures métalliques de Julio González, ami de Picasso (s’il n’avait dû compter que sur son talent artistique, il ne serait sans doute plus exposé).
*
Il s’en faut de peu que Le Boisgeloup ne soit pas situé dans l’Eure. Aurait-il été cinq kilomètres plus loin, dans l’Oise, que le Musée des Beaux-Arts de Rouen n’aurait pas pu monter l’exposition consacrée aux œuvres que Picasso y fit quand il en habitait le château, car ici les évènements culturels doivent être normando-centrés selon le souhait des politicien(ne)s élu(e)s de droite comme de gauche.
C’est une déclinaison douce du « On est chez nous » des électrices et électeurs de la fille Le Pen.
*
Plongé dans la lecture du deuxième tome du Journal de Korneï Tchoukovski (Fayard) à la terrasse du Son du Cor ce jeudi en début d’après-midi, je profite du soleil en compagnie de pas mal d’autres dont une fille souvent cliente ici qui m’offre depuis deux ans un bonjour souriant où que l’on se croise, qu’elle soit seule ou en compagnie. Quand sa table passe à l’ombre, elle vient s’asseoir à côté de moi.
-Je me rapproche, c’est pour le soleil.
-Oui, je sais bien que ce n’est pas pour moi.
Quand elle fait une pause dans la correction de ses copies, j’ose lui adresser la parole. Elle me dit son goût particulier pour les oiseaux et la littérature mexicaine contemporaine, me cite le nom d’Ana Clavel. « Ce nom me dit quelque chose », lui dis-je mais ensuite j’ai un doute.
Rentré, j’explore ma bibliothèque et y trouve un livre signé Ana Clavel : Les Violettes sont les fleurs du désir publié chez Métaillé, qu’après avoir lu j’ai jugé suffisamment attachant pour le garder. En quatrième de couverture de ce roman « singulier et délicatement scandaleux », on évoque Cortázar, Nabokov et Bellmer.
*
Note de chevet à la manière de Sei Shōnagon.
Chose qui fait du bien quand on a atteint l’âge de la vieillesse :
Une fille jeune qui te tutoie d’emblée, avant même que tu aies fait de même avec elle : « Qu’est-ce que tu lis ? »
1er avril 2017
Dans le train qui me mène à Paris sous un ciel gris ce mercredi matin, je lis Ce qu’aimer veut dire de Mathieu Lindon, publié par Paul Otchakovsky-Laurens, ouvrage dans lequel le fils de l’éditeur évoque son père et surtout ses amitiés avec Michel Foucault et Hervé Guibert. Ce qu’il raconte me semble sans intérêt. De plus, c’est mal écrit. Je dirais même que ce n’est pas écrit. Exemple et pas des pires : Croyant aux récits de mon père, dont je pense tristement aujourd’hui qu’ils servaient aussi à modérer mon lien avec mon grand-père comme s’il y avait le moindre risque qu’il outrepasse celui avec mon père, j’avais toujours eu une réserve à l’égard de mon grand père, lui en voulant de ne pas avoir mieux soutenu mon père lorsqu’il en avait besoin.
Chez Book Off les rayonnages me réservent quelques bonnes prises, et j’en fais d’autres au marché d’Aligre. A midi, je déjeune rue Ledru-Rollin au Petit Bougnat dont le menu complet est à douze euros cinquante. J’opte pour la tomate au thon, la noix de basse côte grillée sauce basquaise purée maison et la tarte aux pommes. Le quart de morgon est à cinq cinquante. La clientèle est clairsemée, la patronne aimable, la cuisine suffisamment bonne, faite par une femme qui agite une cloche quand c’est prêt.
Il fait beau quand j’en sors. Aussi vais-je me balader au hasard dans les allées du Père Lachaise, photographiant les sépultures d’anciens illustres devenus oubliés ou presque oubliés et celle écrasante du célèbre Eugène Delacroix. Je prends aussi une photo d’un monument récent à la mémoire des deux cent vingt-huit victimes du vol Air France Rio de Janeiro Paris tombé en mer le premier juin deux mille neuf. Au détour d’une allée, je tombe (comme on dit), attristé, sur celle de Tignous, dessin et champignon. « Tu rêvais d'être libre et je te continue. » est-il écrit sur la pierre, citation de Paul Eluard.
-Tu y crois toi aux forces occultes ? demande un fossoyeur à un autre.
Je me perds. Une touriste arrivée depuis hier seulement m’apprend comment retrouver le métro. Celui-ci m’emmène à Quatre-Septembre. Le second Book-Off m’est autant favorable.
Devant Saint-Lazare cinq véhicules de la Gendarmerie Mobile stationnent derrière le panneau « Ici nous intervenons pour améliorer le confort de votre gare ». Je suis tenté d’en faire une photo mais renonce devant le regard peu amène d’un des Gendarmes, pas envie de me faire matraquer sur la musique de Vivaldi que diffusent les haut-parleurs. Certains de ces Gendarmes sont en faction là où devrait être mon train de retour. Il « sera mis à quai tardivement ».
Nous partons avec dix minutes de retard et arrivons à Rouen trente minutes après l’heure prévue, sans un mot d’explication, sans un mot d’excuse, sans même un seul mot du chef de bord.
*
Un homme au téléphone chez Book-Off : « Non, non, tu ne leur dis pas que tu avais bu. »
*
Un autre au marché d’Aligre : « Il voulait deux mille sept cents euros pour tout le stock. D’accord, c’est des Vuitton, mais fabriqués en Italie. »
*
Parmi les livres trouvés ce mercredi : Lettres à ses pairs de Colette (Flammarion), Fragments sur la vie mutilée de Jean-Michel Palmier (sens&tonka), Voyage dans les Pyrénées et en Corse de Gustave Flaubert (Albatros), Histoire de Marie de Brassaï (Actes Sud,), Le Chinois (Sexe, drogue et bain-marie) de Chantal Pelletier (Editions 1973/Roman-Cuisine) et aussi, trouvé au rayon « Témoignage » de Book-Off, L’art et la manière d’aborder son chef de service pour lui demander une augmentation de Georges Perec (Hachette Littératures), enfin L’Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche avec les illustrations d’Alexandre Alexeïeff (Editions des Syrtes) énorme ouvrage qui coûtait cinquante euros et que j’ai payé deux (certes un peu abîmé).
Chez Book Off les rayonnages me réservent quelques bonnes prises, et j’en fais d’autres au marché d’Aligre. A midi, je déjeune rue Ledru-Rollin au Petit Bougnat dont le menu complet est à douze euros cinquante. J’opte pour la tomate au thon, la noix de basse côte grillée sauce basquaise purée maison et la tarte aux pommes. Le quart de morgon est à cinq cinquante. La clientèle est clairsemée, la patronne aimable, la cuisine suffisamment bonne, faite par une femme qui agite une cloche quand c’est prêt.
Il fait beau quand j’en sors. Aussi vais-je me balader au hasard dans les allées du Père Lachaise, photographiant les sépultures d’anciens illustres devenus oubliés ou presque oubliés et celle écrasante du célèbre Eugène Delacroix. Je prends aussi une photo d’un monument récent à la mémoire des deux cent vingt-huit victimes du vol Air France Rio de Janeiro Paris tombé en mer le premier juin deux mille neuf. Au détour d’une allée, je tombe (comme on dit), attristé, sur celle de Tignous, dessin et champignon. « Tu rêvais d'être libre et je te continue. » est-il écrit sur la pierre, citation de Paul Eluard.
-Tu y crois toi aux forces occultes ? demande un fossoyeur à un autre.
Je me perds. Une touriste arrivée depuis hier seulement m’apprend comment retrouver le métro. Celui-ci m’emmène à Quatre-Septembre. Le second Book-Off m’est autant favorable.
Devant Saint-Lazare cinq véhicules de la Gendarmerie Mobile stationnent derrière le panneau « Ici nous intervenons pour améliorer le confort de votre gare ». Je suis tenté d’en faire une photo mais renonce devant le regard peu amène d’un des Gendarmes, pas envie de me faire matraquer sur la musique de Vivaldi que diffusent les haut-parleurs. Certains de ces Gendarmes sont en faction là où devrait être mon train de retour. Il « sera mis à quai tardivement ».
Nous partons avec dix minutes de retard et arrivons à Rouen trente minutes après l’heure prévue, sans un mot d’explication, sans un mot d’excuse, sans même un seul mot du chef de bord.
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Un homme au téléphone chez Book-Off : « Non, non, tu ne leur dis pas que tu avais bu. »
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Un autre au marché d’Aligre : « Il voulait deux mille sept cents euros pour tout le stock. D’accord, c’est des Vuitton, mais fabriqués en Italie. »
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Parmi les livres trouvés ce mercredi : Lettres à ses pairs de Colette (Flammarion), Fragments sur la vie mutilée de Jean-Michel Palmier (sens&tonka), Voyage dans les Pyrénées et en Corse de Gustave Flaubert (Albatros), Histoire de Marie de Brassaï (Actes Sud,), Le Chinois (Sexe, drogue et bain-marie) de Chantal Pelletier (Editions 1973/Roman-Cuisine) et aussi, trouvé au rayon « Témoignage » de Book-Off, L’art et la manière d’aborder son chef de service pour lui demander une augmentation de Georges Perec (Hachette Littératures), enfin L’Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche avec les illustrations d’Alexandre Alexeïeff (Editions des Syrtes) énorme ouvrage qui coûtait cinquante euros et que j’ai payé deux (certes un peu abîmé).
31 mars 2017
De la musique religieuse russe est au programme de l’Opéra de Rouen ce mardi soir. Cela a dû en effrayer certains encore plus que moi car l’affluence est faible. C’est pourtant le chœur accentus. J’ai une bonne place en corbeille, mais en trouve une meilleure en fond d’orchestre à la fermeture des portes. Sur fond noir, vêtus de noir et sous un éclairage étudié, les membres du chœur entrent en scène. Ils sont dirigés par Marc Korovitch, imposant personnage au souffle puissant. On entend sa respiration quand il se démène pour les extraits de la Liturgie de Saint Jean Chrysostome de Piotr Ilitch Tchaïkovski. Je ne m’intéresse pas au surtitrage et trouve que j’ai bien fait de venir.
Encore plus quand est donné L’Ange scellé, une cantate en neuf mouvements que composa Rodion Chtchedrine pour célébrer le millénaire de la conversion de la Russie au christianisme en mil neuf cent quatre-vingt-huit. Cette œuvre est chorégraphiée par Lars Scheibner qui fait entrer les choristes par la salle. Les cahiers de partition munis des deux antennes qui font loupiotes sont autant de papillons géants posés dans les mains des interprètes. Ceux-ci circulent et occupent différentes positions sur le plateau sous une lumière recherchée. Le chef fait des demi-tours sur le pupitre, toujours respirant fort. Une flûtiste, Mathilde Calderini, et une danseuse, Clarissa Gehring, sont de la partie. Cette dernière vêtue couleur chair enrichit de son talent la musique de Chtchedrine que je peux fort bien imaginer profane. Deux jeunes garçons de la Maîtrise des Hauts-de-Seine interviennent également.
De longs applaudissements saluent les interprétations. Le massif Marc Korovitch serre contre lui et embrasse copieusement Mathilde Calderini et Clarissa Gehring. Je repars de l’Opéra plus content que je n’aurais cru pouvoir l’être.
*
Le chorégraphe Lars Scheibner travaille en frilance, de même que le chef Marc Korovitch, apprends-je du livret programme.
*
Etudiantes au Son du Cor. L’une a lu une affiche à la Cité Universitaire, où était écrit « La clé de votre appartement est dans votre vote ».
-Ça veut dire que si tu vas voter, ils le savent, et que t’as plus de chance d’obtenir un appart parce que t’es un bon citoyen, dit-elle aux autres.
Un peu étonnées, elles ne trouvent cependant rien à redire à cette interprétation.
*
Collégiennes allemandes dans ma ruelle. Elles me demandent son nom dans un français presque parfait et de l’inscrire sur leur questionnaire, puis elles estiment sa largeur.
Il y a donc au moins un professeur allemand n’hésitant pas à laisser ses élèves se débrouiller seules afin qu’elles fassent encore des progrès, y compris lorsque leur chemin doit passer par ce que la plupart des touristes qualifient de coupe-gorge.
*
Preuve est faite qu’on peut oublier un livre sur un automate de la Poste de la Champmeslé et le retrouver posé à côté un quart d’heure plus tard.
Encore plus quand est donné L’Ange scellé, une cantate en neuf mouvements que composa Rodion Chtchedrine pour célébrer le millénaire de la conversion de la Russie au christianisme en mil neuf cent quatre-vingt-huit. Cette œuvre est chorégraphiée par Lars Scheibner qui fait entrer les choristes par la salle. Les cahiers de partition munis des deux antennes qui font loupiotes sont autant de papillons géants posés dans les mains des interprètes. Ceux-ci circulent et occupent différentes positions sur le plateau sous une lumière recherchée. Le chef fait des demi-tours sur le pupitre, toujours respirant fort. Une flûtiste, Mathilde Calderini, et une danseuse, Clarissa Gehring, sont de la partie. Cette dernière vêtue couleur chair enrichit de son talent la musique de Chtchedrine que je peux fort bien imaginer profane. Deux jeunes garçons de la Maîtrise des Hauts-de-Seine interviennent également.
De longs applaudissements saluent les interprétations. Le massif Marc Korovitch serre contre lui et embrasse copieusement Mathilde Calderini et Clarissa Gehring. Je repars de l’Opéra plus content que je n’aurais cru pouvoir l’être.
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Le chorégraphe Lars Scheibner travaille en frilance, de même que le chef Marc Korovitch, apprends-je du livret programme.
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Etudiantes au Son du Cor. L’une a lu une affiche à la Cité Universitaire, où était écrit « La clé de votre appartement est dans votre vote ».
-Ça veut dire que si tu vas voter, ils le savent, et que t’as plus de chance d’obtenir un appart parce que t’es un bon citoyen, dit-elle aux autres.
Un peu étonnées, elles ne trouvent cependant rien à redire à cette interprétation.
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Collégiennes allemandes dans ma ruelle. Elles me demandent son nom dans un français presque parfait et de l’inscrire sur leur questionnaire, puis elles estiment sa largeur.
Il y a donc au moins un professeur allemand n’hésitant pas à laisser ses élèves se débrouiller seules afin qu’elles fassent encore des progrès, y compris lorsque leur chemin doit passer par ce que la plupart des touristes qualifient de coupe-gorge.
*
Preuve est faite qu’on peut oublier un livre sur un automate de la Poste de la Champmeslé et le retrouver posé à côté un quart d’heure plus tard.
30 mars 2017
Je suis, ce lundi un peu avant vingt heures, sur le parvis de la Cathédrale de Rouen. Un spectacle gratuit « poétique et féerique » y est promis par les Passeurs de Lumières à l’occasion du Salon International du Tourisme au Parc Expo.
« Rouen capitale mondiale du tourisme », claironne l’affichette de Paris Normandie près de laquelle j’attends. J’y côtoie des responsables de Comités Régionaux. Ils parlent de management, ont des têtes à voter pour Macron. Celui de la Bourgogne regrette l’absence de terrasses de café face à la Cathédrale. Il y a foule de curieux, des militaires armés et des policiers du même genre.
A l’heure dite arrivent six chevaux en tissu blancs gonflés d’air dont les jambes arrière sont celles d’un humain. Ils sont éclairés de l’intérieur. Une sorte de Monsieur Loyal à plume les accompagne. Des jeunes filles habillées en noir l’éclaire avec des petits projecteurs manuels. Le hic, c’est qu’il fait grand jour. À croire que lorsque a été fixée l’heure du spectacle, le passage à celle d’été n’a pas été pris en compte. Les fumigènes qu’un homme allume font flop.
Et les chevaux, que font-ils ? Ils dansent sur des musiques variées. Ça va un moment mais là ça dure beaucoup trop longtemps.
A la fin, ces chevaux cabrés comme ceux de Marly se dégonflent. Leurs porteurs saluent, le tissu en boule sur le ventre.
Suit un concert de cuivres par des musiciens installés aux fenêtres de l’étage de l’Office de Tourisme. Ils sont dirigés par un chef à lunettes depuis le parvis, C’est mauvais. Je me crois à la messe de la Saint-Hubert.
C’est fini ? s’interroge le peuple. Eh oui ! On reste sur sa faim.
Un couple de touristes me demande ce qu’il y a de bien à voir à Rouen. Je les envoie vers la rue du Gros et la place du Vieux où sont accrochées de jolies loupiotes destinées à éblouir les invités du salon touristique international. Celles, rococo, de la rue Saint-Romain ressemblent à des décorations de Noël qu’on aurait oublié d’ôter.
*
Poétique et féerique ? Je dirais plutôt pathétique et rachitique
*
A la terrasse du Sacre, deux trentenaires joueurs de jacquet :
-Tu vas voter ?
-Non, et toi ?
-Je ne crois pas.
« Rouen capitale mondiale du tourisme », claironne l’affichette de Paris Normandie près de laquelle j’attends. J’y côtoie des responsables de Comités Régionaux. Ils parlent de management, ont des têtes à voter pour Macron. Celui de la Bourgogne regrette l’absence de terrasses de café face à la Cathédrale. Il y a foule de curieux, des militaires armés et des policiers du même genre.
A l’heure dite arrivent six chevaux en tissu blancs gonflés d’air dont les jambes arrière sont celles d’un humain. Ils sont éclairés de l’intérieur. Une sorte de Monsieur Loyal à plume les accompagne. Des jeunes filles habillées en noir l’éclaire avec des petits projecteurs manuels. Le hic, c’est qu’il fait grand jour. À croire que lorsque a été fixée l’heure du spectacle, le passage à celle d’été n’a pas été pris en compte. Les fumigènes qu’un homme allume font flop.
Et les chevaux, que font-ils ? Ils dansent sur des musiques variées. Ça va un moment mais là ça dure beaucoup trop longtemps.
A la fin, ces chevaux cabrés comme ceux de Marly se dégonflent. Leurs porteurs saluent, le tissu en boule sur le ventre.
Suit un concert de cuivres par des musiciens installés aux fenêtres de l’étage de l’Office de Tourisme. Ils sont dirigés par un chef à lunettes depuis le parvis, C’est mauvais. Je me crois à la messe de la Saint-Hubert.
C’est fini ? s’interroge le peuple. Eh oui ! On reste sur sa faim.
Un couple de touristes me demande ce qu’il y a de bien à voir à Rouen. Je les envoie vers la rue du Gros et la place du Vieux où sont accrochées de jolies loupiotes destinées à éblouir les invités du salon touristique international. Celles, rococo, de la rue Saint-Romain ressemblent à des décorations de Noël qu’on aurait oublié d’ôter.
*
Poétique et féerique ? Je dirais plutôt pathétique et rachitique
*
A la terrasse du Sacre, deux trentenaires joueurs de jacquet :
-Tu vas voter ?
-Non, et toi ?
-Je ne crois pas.
29 mars 2017
Jamais entendu parler de cet Avishai Cohen qui est l’invité de Rouen Jazz Action ce dimanche à dix-huit heures à l’Opéra de Rouen où j’ai place au premier rang de la corbeille côté pair. J’apprends qu’à vingt-deux ans, il partit à l’aventure à New York. Il jouait dans des bars et parfois dans la rue jusqu’à ce qu’il se fasse remarquer par Chick Corea.
Michel Jules, président de l’association depuis quarante-cinq ans, dit son mot. Il indique que la formation Avishai Cohen’s Jazz Free est inédite et que les morceaux joués ce soir feront prochainement l’objet d’un enregistrement.
La jolie Yael Shapira commence seule avec son violoncelle acoustique augmenté par l’électronique. Elle est rejointe par Itamar Doari aux percussions et clochettes, par Elyasaf Bishari au oud et à la basse et par Avishai Cohen à la contrebasse et au clavier. Tous les quatre chantent.
Je suis vite conquis par cette musique grouveuse et par ce que chacun(e) fait de son instrument en solo ou en complicité. Le trio violoncelle oud contrebasse est particulièrement plaisant. Le répertoire est métissé, puisant parfois dans la musique libanaise ou dans la salsa. Avishai Cohen ne sait dire en français que. « Ça va ? ». Bien sûr que ça va. Pour le reste, il nous parle en anglais. Je comprends quand même qu’avec la musique on peut faire la paix avec n’importe qui. C’est un triomphe pour le quatuor dont je savoure les rappels. Lorsque Yael Shapira traverse la scène dans sa longue robe noire en emportant son violoncelle, on sait que c’est malheureusement fini.
*
Quand j’ai appris que l’Opéra s’ouvrait au jazz, je n’ai pas sauté de joie. J’ai eu tort.
*
« Jazz métisse », est-il écrit plusieurs fois sur le livret programme. Jazz métissé ou jazz métis ?
Michel Jules, président de l’association depuis quarante-cinq ans, dit son mot. Il indique que la formation Avishai Cohen’s Jazz Free est inédite et que les morceaux joués ce soir feront prochainement l’objet d’un enregistrement.
La jolie Yael Shapira commence seule avec son violoncelle acoustique augmenté par l’électronique. Elle est rejointe par Itamar Doari aux percussions et clochettes, par Elyasaf Bishari au oud et à la basse et par Avishai Cohen à la contrebasse et au clavier. Tous les quatre chantent.
Je suis vite conquis par cette musique grouveuse et par ce que chacun(e) fait de son instrument en solo ou en complicité. Le trio violoncelle oud contrebasse est particulièrement plaisant. Le répertoire est métissé, puisant parfois dans la musique libanaise ou dans la salsa. Avishai Cohen ne sait dire en français que. « Ça va ? ». Bien sûr que ça va. Pour le reste, il nous parle en anglais. Je comprends quand même qu’avec la musique on peut faire la paix avec n’importe qui. C’est un triomphe pour le quatuor dont je savoure les rappels. Lorsque Yael Shapira traverse la scène dans sa longue robe noire en emportant son violoncelle, on sait que c’est malheureusement fini.
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Quand j’ai appris que l’Opéra s’ouvrait au jazz, je n’ai pas sauté de joie. J’ai eu tort.
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« Jazz métisse », est-il écrit plusieurs fois sur le livret programme. Jazz métissé ou jazz métis ?
28 mars 2017
Mon premier vide grenier de l’année est rouennais. Il est petit, se tient au pied de la Cathédrale, place de la Calende, laquelle est balayée par un vent froid à l’heure où j’y arrive, dès que le jour est levé. Il possède une excroissance rue du Bac où pour la fourrière les affaires reprennent. Même les voitures ne gênant pas l’installation des vendeuses et vendeurs sont emportées.
Je ne me donne pas grand chance de trouver des livres à mon goût, mais j’ai tort. J’aperçois sur le sol un beau livre consacré à George Grosz. Il s’agit du catalogue de l’exposition Berlino-New York qui lui eu lieu en deux mille sept à la Villa Médicis.
Celui qui le vend a un accent que je n’arrive pas à préciser. Il m’en demande quinze euros.
-J’ai été en résidence là-bas, vous ne trouverez pas ça à L’Armitière, me dit-il pour justifier son prix.
J’objecte que le texte est en italien. Son prix tombe à huit euros. J’ajoute à ce catalogue, celui de l’exposition Gilles Aillaud – Evasioni ayant eu lieu au même endroit la même année. Celui-là est bilingue français/italien.
-Vous ne trouverez pas ça non plus à L’Armitière.
-Dix euros pour les deux, ça pourrait aller ?
Le sympathique vendeur acquiesce, me serre la main pour sceller notre accord et m’offre même un livre de poche en cadeau. Je lui demande quel pays l’a envoyé à la Villa Médicis
-Le Chili, me répond-il.
-Et vous faites quoi ?
-De la peinture.
Il n’a pas exposé ici, n’a même pas d’atelier. Il ne veut pas être sous la coupe de la ville ou de la métropole. Je n’en saurais pas davantage.
Un peu plus loin, je trouve un vendeur turc que je connais. Un jour, il m’avait invité chez lui en banlieue pour voir ses nombreux livres à vendre. Il ne put venir au rendez-vous donné place Saint-Marc. Ultérieurement, alors qu’il avait déballé ses livres dans un vide grenier, je vis que c’était de la daube. J’avais évité un déplacement inutile. Dans son bric-à-brac, j’aperçois un carton de ramettes de papier bleu. C’est deux euros pièce. J’en obtiens trois pour cinq euros.
Voilà qui commence bien, me dis-je, lourdement chargé.
*
Ce dimanche matin, une équipe d’artistes techniciens installe des suspensions lumineuses rococo rue Saint-Romain à l’aide d’engins à nacelle télescopique. Ce sont Les Passeurs de Lumière qui donneront un spectacle gratuit sur le parvis de la Cathédrale lundi soir. La lumière rouge du bout de la ruelle n’est peut-être pas sans rapport avec ça.
*
Au Son du Cor, plus moyen de ne payer son café qu’en partant. Le nouvel apprenti serveur, vêtu et coiffé comme il faut l’être à son âge et communiquant avec le bar à l’aide d’un boîtier électronique afin d’économiser sa mémoire, en exige le prix dès qu’il l’apporte en terrasse. J’ai horreur de ça.
Je lui donne un billet de dix euros pour l’obliger à aller chercher la monnaie. C’est ma façon de me venger.
Je ne me donne pas grand chance de trouver des livres à mon goût, mais j’ai tort. J’aperçois sur le sol un beau livre consacré à George Grosz. Il s’agit du catalogue de l’exposition Berlino-New York qui lui eu lieu en deux mille sept à la Villa Médicis.
Celui qui le vend a un accent que je n’arrive pas à préciser. Il m’en demande quinze euros.
-J’ai été en résidence là-bas, vous ne trouverez pas ça à L’Armitière, me dit-il pour justifier son prix.
J’objecte que le texte est en italien. Son prix tombe à huit euros. J’ajoute à ce catalogue, celui de l’exposition Gilles Aillaud – Evasioni ayant eu lieu au même endroit la même année. Celui-là est bilingue français/italien.
-Vous ne trouverez pas ça non plus à L’Armitière.
-Dix euros pour les deux, ça pourrait aller ?
Le sympathique vendeur acquiesce, me serre la main pour sceller notre accord et m’offre même un livre de poche en cadeau. Je lui demande quel pays l’a envoyé à la Villa Médicis
-Le Chili, me répond-il.
-Et vous faites quoi ?
-De la peinture.
Il n’a pas exposé ici, n’a même pas d’atelier. Il ne veut pas être sous la coupe de la ville ou de la métropole. Je n’en saurais pas davantage.
Un peu plus loin, je trouve un vendeur turc que je connais. Un jour, il m’avait invité chez lui en banlieue pour voir ses nombreux livres à vendre. Il ne put venir au rendez-vous donné place Saint-Marc. Ultérieurement, alors qu’il avait déballé ses livres dans un vide grenier, je vis que c’était de la daube. J’avais évité un déplacement inutile. Dans son bric-à-brac, j’aperçois un carton de ramettes de papier bleu. C’est deux euros pièce. J’en obtiens trois pour cinq euros.
Voilà qui commence bien, me dis-je, lourdement chargé.
*
Ce dimanche matin, une équipe d’artistes techniciens installe des suspensions lumineuses rococo rue Saint-Romain à l’aide d’engins à nacelle télescopique. Ce sont Les Passeurs de Lumière qui donneront un spectacle gratuit sur le parvis de la Cathédrale lundi soir. La lumière rouge du bout de la ruelle n’est peut-être pas sans rapport avec ça.
*
Au Son du Cor, plus moyen de ne payer son café qu’en partant. Le nouvel apprenti serveur, vêtu et coiffé comme il faut l’être à son âge et communiquant avec le bar à l’aide d’un boîtier électronique afin d’économiser sa mémoire, en exige le prix dès qu’il l’apporte en terrasse. J’ai horreur de ça.
Je lui donne un billet de dix euros pour l’obliger à aller chercher la monnaie. C’est ma façon de me venger.
27 mars 2017
Ce jeudi, à l’Opéra de Rouen, pour le nouveau concert dirigé par Antony Hermus, ce n’est qu’au dernier moment que je peux avoir une meilleure place que celle qui m’était promise, un strapontin en haut du deuxième balcon. « J’ai une chaise qui s’est libérée en loge sept », m’apprend l’aimable guichetière lorsque j’arrive, à dix-neuf heures.
S’il y a foule pour ce concert, c’est qu’il fête les dix ans d’intervention de musicien(ne)s de l’Opéra volontaires à l’Hôpital dont l’initiative, toute personnelle, revient à la violoniste Elena Pease. Des officiel(le)s sont donc de sortie, dont Fourneyron (Valérie), Députée, Socialiste, qui se tient en haut des marches du foyer avec le maître des lieux. Elle n’est pas seule sur le coup, car Bures (Jean-François), Droitiste, qui souhaite la remplacer prochainement, n’est qu’une marche plus bas. En avant concert, deux autres artistes intervenant au Céhachu, Virginie Trompat (chant) et Olivier Hue (oud), interprètent l’oriental Vox felicitas.
Je suis le premier dans la loge sept, ce qui me permet de choisir ma chaise, près de l’équipe technique qui occupe la loge voisine. Trois femmes seules s’installent à ma gauche, un homme derrière.
C’est d’abord le Concerto Dumbarton Oaks d’Igor Stravinsky puis la Symphonie numéro vingt-neuf en la majeur de Wolfgang Amadeus Mozart.
A l’entracte, sortant de la loge, j’ai la surprise de voir deux jambes pendantes, celles d’un danseur de la troupe de Sylvain Groud qui intervient aussi à l’Hôpital. Ce téméraire est suspendu au garde-corps du premier balcon. D’autres danseuses et danseurs évoluent au milieu de la foule assoiffée. Cela se termine par Le Tourbillon de Rezvani.
Nous ne sommes plus que quatre dans la loge à la reprise. L’une des femmes a disparu. Du côté des officiels, il y a aussi des manques mais je ne veux dénoncer personne.
Antony Hermus revient pour Introduction and Allegro d’Edward Elgar puis la Symphonie numéro cent deux en si bémol majeur de Joseph Haydn.
Ce programme ne me plaît que modérément. La magie de l’autre jour ne se reproduit pas, bien qu’Antony Hermus ne ménage pas sa peine. A l’issue, il fait faire aux musicien(ne)s un double salut penché. « Quel clown ! », commente l’homme de derrière.
Il pleut à fond à la sortie. Venu sans parapluie, je suis complètement saucé avant d’être à la maison.
*
J’ai récemment trouvé la tête de Jean-François Bures en photo dans ma boîte à lettres sur laquelle il est pourtant écrit de ne pas mettre de publicité. Son tract a virevolté jusqu’au fond de la poubelle collective.
*
Qui donc a eu l’idée d’installer une lampe rouge allumée nuit et jour à l’entrée de la venelle côté rue Saint-Romain ? On va la croire habitée par des femmes de petite vertu.
S’il y a foule pour ce concert, c’est qu’il fête les dix ans d’intervention de musicien(ne)s de l’Opéra volontaires à l’Hôpital dont l’initiative, toute personnelle, revient à la violoniste Elena Pease. Des officiel(le)s sont donc de sortie, dont Fourneyron (Valérie), Députée, Socialiste, qui se tient en haut des marches du foyer avec le maître des lieux. Elle n’est pas seule sur le coup, car Bures (Jean-François), Droitiste, qui souhaite la remplacer prochainement, n’est qu’une marche plus bas. En avant concert, deux autres artistes intervenant au Céhachu, Virginie Trompat (chant) et Olivier Hue (oud), interprètent l’oriental Vox felicitas.
Je suis le premier dans la loge sept, ce qui me permet de choisir ma chaise, près de l’équipe technique qui occupe la loge voisine. Trois femmes seules s’installent à ma gauche, un homme derrière.
C’est d’abord le Concerto Dumbarton Oaks d’Igor Stravinsky puis la Symphonie numéro vingt-neuf en la majeur de Wolfgang Amadeus Mozart.
A l’entracte, sortant de la loge, j’ai la surprise de voir deux jambes pendantes, celles d’un danseur de la troupe de Sylvain Groud qui intervient aussi à l’Hôpital. Ce téméraire est suspendu au garde-corps du premier balcon. D’autres danseuses et danseurs évoluent au milieu de la foule assoiffée. Cela se termine par Le Tourbillon de Rezvani.
Nous ne sommes plus que quatre dans la loge à la reprise. L’une des femmes a disparu. Du côté des officiels, il y a aussi des manques mais je ne veux dénoncer personne.
Antony Hermus revient pour Introduction and Allegro d’Edward Elgar puis la Symphonie numéro cent deux en si bémol majeur de Joseph Haydn.
Ce programme ne me plaît que modérément. La magie de l’autre jour ne se reproduit pas, bien qu’Antony Hermus ne ménage pas sa peine. A l’issue, il fait faire aux musicien(ne)s un double salut penché. « Quel clown ! », commente l’homme de derrière.
Il pleut à fond à la sortie. Venu sans parapluie, je suis complètement saucé avant d’être à la maison.
*
J’ai récemment trouvé la tête de Jean-François Bures en photo dans ma boîte à lettres sur laquelle il est pourtant écrit de ne pas mettre de publicité. Son tract a virevolté jusqu’au fond de la poubelle collective.
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Qui donc a eu l’idée d’installer une lampe rouge allumée nuit et jour à l’entrée de la venelle côté rue Saint-Romain ? On va la croire habitée par des femmes de petite vertu.
25 mars 2017
Après avoir montré mes livres au vigile du Centre Pompidou, je laisse mes sacs au vestiaire puis descends au sous-sol afin d’y voir La fabrique d’exils, l’exposition consacrée à Josef Koudelka.
Josef Koudelka photographia l’invasion soviétique de son pays la Tchécoslovaquie en mil neuf cent soixante-huit. Ses photos furent alors publiées anonymement à l’Ouest (comme on disait). Ce sont elles qui ouvrent cette exposition qui s’intéresse ensuite aux photos prises en exil, Koudelka ayant fui la Tchécoslovaquie en soixante-dix (on ne saura donc rien de celles prises dans son pays avant soixante-huit).
Pendant la décennie soixante-dix quatre-vingt, Koudelka habite à Londres puis à Paris pendant l’hiver et le reste du temps il vagabonde sur les routes d’Europe avec son appareil photo et un sac de couchage passant souvent la nuit dehors.
Parmi les images montrées, toutes sans titre, simplement désignées par le pays où elles furent prises, j’ai mes trois préférées. L’une est connue, montrant, en France, un ange à bicyclette près d’un attelage à deux chevaux. Les deux autres sont celle d’une mariée gitane à froufrous au regard effrayé en amazone sur la croupe d’un cheval (Espagne) et celle d’une impasse où sont en action quatre pisseurs à chapeau ou à casquette d’un certain âge (Irlande).
Quelques propos de l’artiste inscrits sur les murs méritent que j’en fasse copie :
« Etre un exilé exige de repartir à zéro. C’est une chance qui m’était donnée. »
« C’est en quittant la Tchécoslovaquie que j’ai découvert le monde. Je ne voulais pas avoir ce que les gens appellent un « chez soi ». Je ne voulais pas avoir à revenir nulle part, je devais être là où j’étais, et si je ne trouvais plus rien à photographier, il était temps de partir ailleurs. »
« Je savais que je n’avais pas besoin de grand-chose pour vivre et photographier –juste de quoi manger et une bonne nuit de sommeil. Ma règle était : Ne t’inquiète pas de savoir où tu vas dormir ; jusqu’à présent, tu as toujours dormi quelque part et tu dormiras à nouveau ce soir. »
Les autoportraits de Koudelka à son réveil après les nuits passées dehors sont ici visibles mais hélas en petit format.
Je vais ensuite au premier niveau voir en quoi consiste l’exposition Imprimer le monde. Elle se penche sur les imprimantes en trois dimensions et présente une sélection d’objets obtenus par ce moyen, dont des mochetés. Une visite de groupe s’emploie à me faire fuir, la guide s’adressant à son public avec un micro, nouveauté fâcheuse.
Je ne reste pas davantage enfermé au Centre Pompidou. Après être passé par Boulinier et Gilda sans rien y acheter, j’emprunte la ligne Quatorze pour me rapprocher du Book-Off de Quatre-Septembre.
Un train sans histoire me ramène à Rouen où le pavé est sérieusement mouillé. C’est le moment d’ouvrir mon parapluie.
*
Dans ce train de retour, deux voyageuses qui s’installent à l’étage « pour voir le paysage ».
*
Contrôlé dans le train de l’aller, je le suis également dans celui du retour. L’être dans l’un et l’autre le même jour est rarissime. Dans le métro parisien, le contrôle n’est pas fréquent. Quand ça m’arrive, c’est à Opéra plutôt qu’ailleurs. Dans le bus parisien, je n’ai jamais vu de contrôleurs, mais tout le monde montant par l’avant, le chauffeur sait qui n’est pas en règle et envoie un message sonore en boucle tançant le fraudeur. Cela dissuade.
Josef Koudelka photographia l’invasion soviétique de son pays la Tchécoslovaquie en mil neuf cent soixante-huit. Ses photos furent alors publiées anonymement à l’Ouest (comme on disait). Ce sont elles qui ouvrent cette exposition qui s’intéresse ensuite aux photos prises en exil, Koudelka ayant fui la Tchécoslovaquie en soixante-dix (on ne saura donc rien de celles prises dans son pays avant soixante-huit).
Pendant la décennie soixante-dix quatre-vingt, Koudelka habite à Londres puis à Paris pendant l’hiver et le reste du temps il vagabonde sur les routes d’Europe avec son appareil photo et un sac de couchage passant souvent la nuit dehors.
Parmi les images montrées, toutes sans titre, simplement désignées par le pays où elles furent prises, j’ai mes trois préférées. L’une est connue, montrant, en France, un ange à bicyclette près d’un attelage à deux chevaux. Les deux autres sont celle d’une mariée gitane à froufrous au regard effrayé en amazone sur la croupe d’un cheval (Espagne) et celle d’une impasse où sont en action quatre pisseurs à chapeau ou à casquette d’un certain âge (Irlande).
Quelques propos de l’artiste inscrits sur les murs méritent que j’en fasse copie :
« Etre un exilé exige de repartir à zéro. C’est une chance qui m’était donnée. »
« C’est en quittant la Tchécoslovaquie que j’ai découvert le monde. Je ne voulais pas avoir ce que les gens appellent un « chez soi ». Je ne voulais pas avoir à revenir nulle part, je devais être là où j’étais, et si je ne trouvais plus rien à photographier, il était temps de partir ailleurs. »
« Je savais que je n’avais pas besoin de grand-chose pour vivre et photographier –juste de quoi manger et une bonne nuit de sommeil. Ma règle était : Ne t’inquiète pas de savoir où tu vas dormir ; jusqu’à présent, tu as toujours dormi quelque part et tu dormiras à nouveau ce soir. »
Les autoportraits de Koudelka à son réveil après les nuits passées dehors sont ici visibles mais hélas en petit format.
Je vais ensuite au premier niveau voir en quoi consiste l’exposition Imprimer le monde. Elle se penche sur les imprimantes en trois dimensions et présente une sélection d’objets obtenus par ce moyen, dont des mochetés. Une visite de groupe s’emploie à me faire fuir, la guide s’adressant à son public avec un micro, nouveauté fâcheuse.
Je ne reste pas davantage enfermé au Centre Pompidou. Après être passé par Boulinier et Gilda sans rien y acheter, j’emprunte la ligne Quatorze pour me rapprocher du Book-Off de Quatre-Septembre.
Un train sans histoire me ramène à Rouen où le pavé est sérieusement mouillé. C’est le moment d’ouvrir mon parapluie.
*
Dans ce train de retour, deux voyageuses qui s’installent à l’étage « pour voir le paysage ».
*
Contrôlé dans le train de l’aller, je le suis également dans celui du retour. L’être dans l’un et l’autre le même jour est rarissime. Dans le métro parisien, le contrôle n’est pas fréquent. Quand ça m’arrive, c’est à Opéra plutôt qu’ailleurs. Dans le bus parisien, je n’ai jamais vu de contrôleurs, mais tout le monde montant par l’avant, le chauffeur sait qui n’est pas en règle et envoie un message sonore en boucle tançant le fraudeur. Cela dissuade.
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