Le Journal de Michel Perdrial
Le Journal de Michel Perdrial



Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.







Rss

Au vide grenier du Vaudreuil

16 août 2016


Quinze Août, Le Vaudreuil, ce lien m’est automatique et le lieu heureusement accessible grâce au train. Le premier est à sept heures douze. J’y voyage en compagnie d’un couple d’Anglais qui malgré la chaleur ont les jambes couvertes d’un plaid et d’un homme qui regarde des vidéos de barbus sur son téléphone.
De la gare de Val-de-Reuil au centre du Vaudreuil, c’est trois kilomètres à pied le long de l’Eure par un chemin de terre étroit où j’ai de bons souvenirs. Je n’y croise personne. Un abruti de chien dans le jardin d’une maison bourgeoise m’aboie dessus. C’est un plaisir de réveiller ses propriétaires si tôt un jour férié. Quand j’arrive au rond-point gardé par des vigiles ayant mis leur voiture en travers de la rue principale, je passe brutalement de la solitude au bain de foule.
Assez vite, je trouve le numéro dix de la collection des classiques de la littérature libertine publiée par Le Monde il y a quelques années, volume titré La Poésie Erotique, que je cherchais depuis longtemps. Il me manquait pour l’avoir complète et espérer la revendre.
D’autres livres me font signe ici et là, mais rien d’extraordinaire, cependant que le monde se fait de plus en plus compact. L’autre bout de la rue principale, plus vulnérable, est protégé par un énorme tracteur et sa remorque mis en travers.
J’explore ensuite les autres rues et le terrain herbeux où sont installés d’autres vendeuses et vendeurs. Ici, à la « Grande Foire à Tout du Vaudreuil », quand on dit quatre cents exposants, c’est quatre cents. « Tout ce qui était vendable, on l’a vendu il y a deux ans » constate l’un dont les affaires marchent peu.
« Tu sais, plus qu’une dizaine de jours et c’est la rentrée », annonce sadiquement une femme à sa fille. Exactement ce que je me disais chaque année, en ce lieu, à cette date, du temps que je faisais l’instituteur, époque lointaine désormais. Début juillet, j’ai fêté avec moi-même, discrètement, mes dix ans sans travail.
L’une, qui fait la vendeuse, n’en est pas là :
-J’ai bientôt vu tous mes élèves, je vais pouvoir faire cours à la fin de la matinée.
Une autre femme vend À la recherche de l’homme idéal. Je ne sais si elle l’a trouvé ou si elle renonce, comme celles qui se débarrassent de leurs méthodes pour maigrir.
Lorsque l’affluence devient comparable à celle de la rue du Gros un samedi après-midi, j’abandonne et refais le long chemin dans l’autre sens, chargé et un peu accablé par la chaleur.
C’est la première fois que je vois l’intérieur de la gare de Védéherre depuis qu’un architecte et un maître d’œuvre ayant fait leurs études chez les Jivaros l’ont réduite à peu de chose.
                                                            *
Lecture le soir dans un jardin où me tiennent compagnie deux merles picoreurs et un chat délaissé essayant parfois d’en choper un, des Lettres à Moune et au Toutounet de Colette (Des Femmes) :
Comment as-tu passé le 15 août ? Comme le 14, je pense, ou le 16. Nous aussi. Sauf que le Jardin a été un admirable désert toute la journée. (seize août mil neuf cent quarante et un)
Le Jardin de Colette est celui du Palais Royal.
                                                            *
Ai vendu à un gendarme la moitié des Mémoires du général et baron de Marbot.