Le Journal de Michel Perdrial
Le Journal de Michel Perdrial



Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.







Rss

Retour sur l’an vain

31 décembre 2020


Chez Book-Off, un employé enrhumé on ne peut plus français muni d’un masque de protection à la japonaise., m’étonnais-je le dix-sept janvier dernier sans faire le rapport avec le virus apparu en Chine dont on parlait depuis quelques semaines.
Ma première évocation de l’épidémie date du vingt-sept janvier lorsque je raconte ma journée de la veille passée à Dieppe :
Près de moi sont deux étudiantes. L’une écrit sur son ordinateur. L’autre lit le fil d’actualité de son mobile. « La France est le premier pays européen à être touché par le coronavirus ». A l’extérieur la campagne gît dans le brouillard.
Ce même jour, je citais le propos prémonitoire d’une autochtone au Tout Va Bien :
Trois femmes sexagénaires profitent de l’absence des maris « Y a la Foire aux Livres à la Paul Eluard, y sont là-bas ». Elles sont toutes gaies mais, remarque l’une, « Vous allez voir, on va moins rigoler avec le virus qui s’amène ».
Quatre jours plus tard, c’était le Nouvel An chinois et j’étais à Paris :
… grâce au métro Huit je suis à midi moins le quart au Péhemmu chinois de la rue du Faubourg Saint-Antoine.
-Bonne année du Rat, dis-je à la gentille serveuse.
-On espère qu’elle va être bonne, me répond-elle.
-Oui, cela commence mal, lui dis-je.
-Mais cela va s’arranger, conclut-elle.
Là, le propos de cette charmante fille, que depuis mars la pandémie m’a empêché de revoir, n’était guère prémonitoire.
De semaine en semaine, l’inquiétude monte, comme le montre cet extrait de ma journée à Paris mi-février :
Après m’être tenu à l’écart de nombreux tousseurs (l’air de ce BéO ne serait-il pas coronavicié ?) et avoir dépensé quelques euros, je rejoins Beaubourg à pied.
Et bientôt l’avenir s’annonce sombre :
Les rues ont leur aspect désert qui désole. Comme si la ville de Rouen était déjà confinée en raison de l’expansion du coronavirus, ainsi que le sont depuis hier des villes italiennes situées entre Milan et Venise. Que l’on impose ce genre de mesure en Chine n’a rien d’étonnant, mais qu’un pays, dit démocratique, empêche si rapidement la circulation de sa population sous peine d’amende et de prison, je ne m’y attendais pas.
Où en sera-t-on dans un mois, à la date que j’ai choisie pour une escapade dans le Sud, pas très loin de la frontière, billet et location déjà payés. Cette région sera-t-elle interdite ? Pire, serons-nous tous assignés à résidence ? écrivais-je le vingt-cinq février.
Pourtant, début mars on en rigole encore :
C’est sous le parapluie que je me rends chez mon dentiste ce lundi matin pour la visite bisannuelle. Je suis son premier rendez-vous. « Je ne vous serre pas la main, mais le cœur y est », me dit-il à l’arrivée. « Avec mes assistantes, on se salue avec les pieds », ajoute-t-il en me faisant une petite démonstration.
Enfin, arrive le cinq mars, la dernière fois où je vois celle avec qui je fête en retard mon anniversaire au Café L’Arsenal près de la Bastille :
Faisant fi de la prudence, nous nous embrassons.
La suite, ce sont les jours plombés, confinement, déconfinement, reconfinement.
                                                              *
On ne va pas le regretter l’an vain, l’an foiré comme l’appellent certains journalistes (mais Libération le disait déjà de deux mille treize).
Comment nommer celui qui vient ? Je propose l’an brouillé, vu qu’il n’y a aucune visibilité. Espérons qu’à sa fin, ce ne sera pas l’an merdé.