Le Journal de Michel Perdrial

Le Journal de Michel Perdrial




Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.







Rss

30 novembre 2020


J’avance avec plaisir dans la lecture de la Correspondance de Ferdinando Galiani (abbé) et de Louise d’Epinay (marquise) publiée chez Desjonquières et arrive ce dimanche à la fin du quatrième tome, n’en retenant que peu à noter cependant.
D’abord cet échange sur l’immortalité :
On a beau faire le revêche, contre notre destinée, et la loi commune des êtres, nous mourons tous, et nos physionomies, et nos saillies, et nos portraits, et notre souvenir, et tout doit s’en aller. Quel délire, que celui des Romains, et des Grecs, que de faire tout pour l’immortalité. Cette prétendue immortalité n’est qu’un terrain disputé à l’oubli, mais bien faiblement disputé. Galiani à Mme d’Epinay, Naples, le dix-neuf juin mil sept cent soixante-treize
Ah que ce que vous dîtes sur l’immortalité est profond et vrai ! La seule chose qui puisse adoucir cette vérité sombre c’est que tous ceux qui nous aimons n’existeront pas plus que nous, et pourvu que nous vivions dans leur mémoire, cela suffit, au moins quant à moi. Mme d’Epinay à Galiani, le douze juillet mil sept cent soixante-treize
Puis cette explication imagée par l’abbé de l'illusoire libre arbitre de l’humanité :
Arrêtez-vous de grâce devant un rôtisseur, regardez un tournebroche. Voyez-vous ce magot en haut qui paraît avec une force, et une application étonnante s’employer à faire tourner la roue. Eh bien. C’est là l‘homme. Le contrepoids caché est le destin, et ce monde est un tournebroche. Nous croyons le faire aller, et c’est lui qui nous fait aller. Galiani à Mme d’Epinay, Naples, le huit juillet mil sept cent soixante-quatorze
Enfin, du même, cette délectable remarque :
Je viens de marier deux de mes trois nièces. La troisième étant bossue sera bien plus difficile à vendre. Galiani à Mme d’Epinay, Naples, le trois septembre mil sept cent soixante-quatorze
 

29 novembre 2020


Pour fêter le trentième jour du deuxième confinement notre Gouvernement allonge la laisse. Chacun(e) peut maintenant aller sans motif commercial pendant trois heures jusqu'à vingt kilomètres. Faut courir vite. Ou faire du vélo (comme on dit), ce qui n’est pas mon cas. Cette moindre restriction de liberté ne me concerne donc pas.
Pas davantage celle qui permet d’acheter tout et partout à compter de ce jour. Cette activité me déprimerait au-delà de l’inactivité des trente derniers jours. Ce qui n’est pas le cas de la masse. Dès onze heures, certaines rues rouennaises m’invitent à les éviter et à ne pas ressortir l’après-midi. C’est à la télé le soir que je vois la rue du Gros totalement engorgée par les masqué(e)s au coude à coude.
Autres images télévisuelles locales : celles de la manifestation contre la loi Sécurité Globale et les violences policières. On y voit les meilleurs alliés du Gouvernement en cortége de tête derrière la banderole « Tout flou Tout flammes ». Ces jeunes mâles de l’Armée Noire, qui ne bandent que lorsque ça brûle, n’étaient pas assez nombreux pour faire de réels dégâts. En revanche, à Paris, ils ont bien réussi leur coup en incendiant voiture moto kiosque et brasserie et en tabassant un Policier à terre. A l’issue, le Ministre Darmanin les a remerciés.
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Donc pour motif commercial on peut désormais sortir comme on veut, l’attestation de sortie dérogatoire reste cependant obligatoire car « Nous sommes la France » (comme dit notre Président).
 

28 novembre 2020


Pas plus malin que son Ministre Darmanin, Emmanuel Macron quand il écrit : « Les images que nous avons tous vues de l’agression de Michel Zecler sont inacceptables. »
On y entend que ce n’est pas l’agression qui pose problème mais les images qui en ont été faites. Supprimons les images et tout ira bien.
Justement, de nouvelles images sont diffusées ce vendredi par Loopsider, prises depuis les étages par un voisin. Elles montrent la fin de l’interpellation de cet homme pacifique devant de nombreux Policiers appelés en renfort par ses agresseurs. Aucun d’eux ne réagit quand la victime se prend une nouvelle série de coups de poing en plein visage. Tous devraient être poursuivis pour complicité passive ou au minimum pour non assistance à personne en danger.
                                                                *
Pour réellement assainir la Police (et la Gendarmerie), il n’y aurait qu’une solution : en exclure celles et ceux qui votent Le Pen.  Certes, cela ferait du monde.
 

27 novembre 2020


La grosse scène de concert aux enceintes qui dépotent installée sur le parvis de la Cathédrale près de la forêt de sapins a déjà disparu ce jeudi matin. Elle n’était destinée qu’à un rassemblement de commerçants venus faire masse sur le parvis avant d’obliger dès samedi leur clientèle à se tenir à distance. Il y avait aussi ceux qui ne pourront rouvrir, les cafetiers et les restaurateurs.
Le reproche que l’on fait aux restaurants d’être un lieu de contamination est sans doute justifié mais est-ce la faute des restaurateurs ? Contrairement à de nombreux cafetiers qui, je l’ai constaté cet été dans le Massif Central et cet automne en Bretagne, servaient le masque mal mis des clients qui ne respectaient pas la prudence, les restaurateurs eux sont carrés. Leur problème, c’est la clientèle, une partie de celle-ci, les tablées de collègues, les tablées d’amis, qui se côtoient sans masque pendant plus d’une heure collés l’un à l’autre.
Ecarter davantage les tables n’y changerait rien. C’est à leur table que les collègues ou les amis se partagent le Covid. La solution pour rouvrir les restaurants dès maintenant serait de les réserver aux personnes vivant ensemble (familles) ainsi qu’aux couples (cohabitant ou non) et aux isolés.
                                                                  *
Comme chacun sait, si seuls les Policiers votaient, Le Pen serait au pouvoir. Maintenant qu’ils ont pour Ministre de tutelle un quidam qui pourrait aussi bien être celui de l’élue de leur cœur, ils n’hésitent pas à se faire plaisir. Après ceux déchaînés contre les Sans Papiers et leurs soutiens l’autre soir place de la République, en voici trois traitant de sale nègre un producteur de musique qu’ils tabassent allègrement avant de prétendre que c’est lui l’agresseur (la vidéo surveillance a du bon finalement).
 

26 novembre 2020


A défaut de pouvoir me balader dans les bois (en aurais-je envie si j’y étais autorisé, ça m’étonnerait), je profite désormais, lors de ma promenade dérogatoire quotidienne de moins d’une heure, d’une traversée de la forêt de sapins du parvis de la Cathédrale, une vraie forêt car aux trois grands sapins en plastique s’est ajoutée une vingtaine de petits sapins en bois et aiguilles, des arbres morts comme dit le Maire de Bordeaux.
Cette nature en conserve ne se suffira pas à elle-même, je le crains. Ce mercredi matin, je la découvre jouxtée d’une grosse scène de concert aux enceintes qui dépotent, comme le montrent les essais de micro qu’on y fait.
Ici bientôt s’agglutinera une foule d’humains. Alors que dans les boutiques on n’en tolèrera qu’un pour huit mètres carré. Et pas plus de trente à la messe dans l’immense Cathédrale (mais on va revenir là-dessus car les évêques ne sont pas contents).
 

25 novembre 2020


Prise de risque ce mardi matin, me voici dans l’Intermarché de la place Saint-Marc, la cafetière offerte pour mon anniversaire d’il y a plusieurs années par celle que je n’ai pu revoir à Paris depuis le début du premier confinement va bientôt me lâcher (conscient que ce sera sans doute le dernier cadeau d’anniversaire qui m’aura été fait, je l’ai fait durer au-delà du raisonnable) et je ne voulais pas aller la remplacer lorsque le commerce aura repris sa liberté. Je connais trop bien la population du quartier : incapable de respecter la moindre précaution.
Il en est ainsi dans les files qui stagnent devant les caisses. Le mètre entre deux clients se suivant est pure fiction, que ce soit dans celles des caisses à caissières ou dans celle des caisses automatiques. Autrefois, je privilégiais les premières. Désormais, je choisis les machines. Ma dépense réglée je suis bien aise de retrouver l’air libre, n’osant imaginer le désordre qui régnera dans ce supermarché dès que le rayon de jouets sera libéré des barrières qui en empêchent l’accès.
                                                                   *
Donc Macron le soir à la télévision. Jamais je n’aurais imaginé que celui pour lequel j’ai été obligé de voter me dirait quel jour je pourrai retourner au restaurant ou me balader pendant trois heures au lieu d’une.
Contrairement à ce que je pensais, il évoque la fin de deuxième confinement, ce sera le quinze décembre.
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Des « images choquantes », commente Darmanin, Ministre de l’Intérieur, Droitiste,  après l’intervention ultra violente de sa Police, place de la République, contre des manifestants pacifiques. Je t’explique Gérald, ce ne sont pas les images qui sont choquantes, ce sont les faits.
 

24 novembre 2020


Chacun(e) suppute ce lundi. Que dira Emmanuel Macron demain soir à la télé ? Seule certitude le confinement continuera, vaguement allégé.
Après avoir juré qu’il n’y en aurait pas un deuxième, puis l’avoir instauré, notre Président veut être sûr qu’il n’y en aura pas un troisième. Pour cela : ne jamais suspendre le deuxième.
Le déconfinement est maintenant qualifié d’échec ; son responsable, Jean Castex, « Monsieur Déconfinement », en ayant été récompensé par le poste de Premier Ministre.
On verra si on continue d’aller d’échec en échec. Après celui des masques, après celui des tests, se profile celui de la vaccination de masse. Un « Monsieur Vaccin » s’en occupera, qui finira Ministre.
Je propose qu’au fronton des bâtiments publics le triple mensonge « Liberté Egalité Fraternité » soit remplacé par le « Essayer. Rater. Essayer encore. Rater encore. Rater mieux » de Samuel Beckett.
                                                               *
Cette Ministre, Marlène Schiappa, qui prend du poids (au sens propre) depuis qu’elle dépend de Darmanin (accusé de ce qu’on sait).
 

23 novembre 2020


Un dimanche occupé à examiner les lettres reçues par mon frère Jacques décédé depuis si longtemps, afin de savoir si comme je le pense il y en a une de Jude Stéfan.
Non, ma mémoire m’a joué un tour (comme on dit).
En revanche, j’y trouve un mot d’Anouk Grinberg :
Cher Jacques,
Merci du fond du cœur de poser un si bon regard sur moi.
Soyez très heureux.
Amitiés.
Egalement Moulin à poèmes un calligramme de Pierre Albert-Birot qui déroulé donne ceci :
Cent poèmes en grain moulus très fin font un excellent pain pour le déjeuner du matin dans le train ou dans le bain avec ou sans  kaolin et ne coûte rien suffit d’avoir un moulin ce n’est pas malin et ça tourne bien à l’esprit de vin et même à la main
Albert-Birot étant mort en mil neuf cent soixante-sept, je doute qu’il s’agisse d’un original.
Enfin, le plus étonnant, cette lettre de Patricia Highsmith, dont je me souvenais, tapée à la machine avec une faute d’accord, accentuée à la main et datée du premier juillet mil neuf cent soixante-dix-neuf :
Cher M. Perdrial,
Je regrette que je n’ai pas « une autre chambre » (extra) chez moi, mais évidemment vous préférez être tout seul. Comme moi.
Il faut louer une petite chambre quelque part, n’est-ce pas ? C’est ce que j’ai fait à votre âge, même plus jeune, quand j’ai quitté la maison de mes parents.
Je vous souhaite, en tout cas, le meilleur…
En mil neuf cent soixante-dix-neuf, Frère Jacques avait vingt-six ans. Cela faisait bien longtemps qu’il avait quitté la maison des parents. J’ignore dans quelles circonstances lui vint l’envie d’aller s’installer au numéro vingt et un, rue de la Boissière, à Moncourt, commune de Grez-sur-Loing (Seine-et-Marne), d’être le Yann Andréa de Patricia Highsmith.
 

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