Le Journal de Michel Perdrial
Le Journal de Michel Perdrial



Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.







Rss

Roadkill, exposition de Sylvain Wavrant à la Fabrique des Savoirs d’Elbeuf

24 janvier 2017


Si les deux jeunes femmes venues avec moi en Deux Chevaux à la Fabrique des Savoirs d’Elbeuf viennent d’abord pour le bâtiment et les collections permanentes qu’il abrite, je suis là avant tout pour découvrir Roadkill, la première exposition personnelle du disagneur taxidermiste Sylvain Wavrant, natif de Sologne, pour qui l’année deux mille seize fut celle du passage de la création d’accessoires de mode ou de théâtre (notamment pour le metteur en scène Thomas Jolly) à celle d’œuvres à montrer dans les galeries d’art. Avant de pouvoir entrer, il nous faut patienter un quart d’heure sur le trottoir dans la froidure. Le Musée, sis dans une partie de l'ancienne usine drapière Blin & Blin, n’ouvre qu’à quatorze heures.
A l’heure dite, la jeune femme de l’accueil nous ouvre la porte. Elle me délivre un billet gratuit qui donne droit de voir ce pour quoi je suis venu et les salles d’exposition permanente (une expo Hector Malot nécessiterait de débourser quatre euros mais comme je ne suis pas fou de l’écrivain de La Bouille, je m’en dispense).
Les installations de Sylvain Wavrant sont dans le long passage qui mène aux collections permanentes. Comme l’indique le titre de l’exposition, il s’est agi pour lui de créer sur le thème de l’accident de voiture dont sont victimes les animaux qu’il récupère dans les fossés.
C’est une suite d’œuvres à la beauté sombre, en noir et rouge et or, le rouge paillette matérialisant le sang mais donnant aussi un supplément d’âme glamour aux scènes tragiques et figées. Les titres et les descriptifs sont éloquents : Le Glas (corneille naturalisée, essuie-glaces), Partir à point (lapereau naturalisé, soufflet de levier de vitesse, paillettes), Le Manège enchanté (peau de blaireau, roue de voiture, paillettes, perles), Narcisse (pic naturalisé, rétroviseur, perles, strass Swarovski), Premières loges (pare-brise encadré, merle naturalisé), Roadkill (renard naturalisé, coffrage, bitume), Blaireau ! (blaireau naturalisé, pare-choc, broderie, perles et strass Swarovski), Refuge (pigeon naturalisé, ampoule et phare de voiture), Panier garni (blaireau naturalisé, pneu de voiture, paillettes, ballon rouge en forme de cœur), Tentative de survie (renard naturalisé, couverture de survie), Splash (corneille naturalisée, porte de voiture rouge, paillettes). Cette liste me plaît en elle-même par son côté de froid constat pouvant donner naissance à l’imagination. Une femme est là, venue avec cinq moutards d’âge maternel. L’un d’eux, à la vue de ces animaux soudés aux objets qui les ont tués, a une parole de commisération : « Pauvres trucs ».
Sur le mur du fond, en une série de photos signée Fred Margueron, Sylvain Wavrant se met en scène dans le rôle de l’animal pris dans les phares sur une route forestière et pour qui ça finit mal.
Tout cela me plaît beaucoup et je pense qu’il en serait de même si je ne connaissais pas personnellement l’artiste.
Guère intéressé par ce que proposent les expositions permanentes j’en fais quand même le tour, passant par l’archéologie locale, les tristes animaux empaillés et les machines à filature sur lesquelles ont souffert bien des ouvriers, dans des salles aux cloisons épaisses, basses de plafond, peu éclairées, où je me sens oppressé. Je vais m’aérer un petit moment au belvédère du cinquième étage (vue sur le cimetière, l’église et les autres bâtiments industriels reconvertis) puis retrouve mes deux compagnes de voyage.
Le retour à Rouen dans la Deux Chevaux de notre aimable chauffeur est sans histoire. Nul animal ne passe sous les roues de la petite voiture grise, ni ne vient s’écraser sur son pare-brise.
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Sur un mur de la Fabrique des Savoirs, un tableau à l’érotisme pompier : Sapho et Phaon. Point n’est dit qui l’a peint (ou alors je n’ai pas vu). Il est précisé que c’est un « Envoi de l’Etat » de mil huit cent quatre-vingt-douze.
                                                                   *
J’aime bien Sylvain, c'est le seul garçon que je connaisse qui me saute au cou quand on se croise dans la rue.