Le Journal de Michel Perdrial
Le Journal de Michel Perdrial



Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.







Rss

A la Dumez party de l’année nouvelle

4 janvier 2016


Un train peuplé de familles à valises m’emmène à Paris ce dimanche matin où quelque part dans le onzième arrondissement, Philippe Dumez invite les lectrices et lecteurs de Ramble Tamble, son journal hebdomadaire distribué par mail chaque lundi matin, à une party dans laquelle un bronche sera suivi d’un test à l’aveuglette. Une première a eu lieu il y a une semaine, qui m’a donné envie. J’ai hésité cependant. « Si toutefois tu penses que je peux avoir ma place parmi les autres invité(e)s », lui ai-je écrit. « Mais oui, tu es évidemment le bienvenu Michel. », m’a-t-il répondu.
J’ai beau traîner un peu en chemin, j’arrive quand même le premier, porteur de deux neufchâtels ixe ixe aile achetés au marché la veille. Ils rejoignent sur la table du salon un tas de bonnes choses à manger préparées par l’hôte et sa fille et des bouteilles de toute nature.
Bientôt les coups de sonnette se succèdent. Chacun se présente :
-Albin.
-Michel.
-Albin Michel, parfait.
Je discute un moment avec cet Albin de la façon dont a évolué notre façon d’écouter la musique, ce qu’on a perdu, ce qu’on a gagné. Il m’apprend qu’il existe un matériel que l’on branche sur sa chaîne hi fi pour y écouter par ouifi ce qu’offre par exemple Spotify. Lui n’écoute plus la musique qu’ainsi, bien que ce ne soit pas une bonne chose pour les artistes et qu’il en fasse partie. Il m’explique que ce que gagnent les chanteurs lors des concerts ne peut remplacer ce qu’ils ont perdu par la disparition du disque. Plus tard, en apprenant son nom, je constate qu’il est bien placé pour le savoir
Tout en dégustant la cuisine de la maison, je fais connaissance avec Milan puis avec Paul. Milan vient de lire une biographie de Baudelaire dont je viens de lire la correspondance, on parle un moment de ce personnage puis de Flaubert qu’il connaît bien avant de se trouver un goût commun pour Philippe Muray qui lui a fait voir d’un autre œil son passé de gauchiste. Paul est le dernier spécimen étudié par l’ami Dumez pour son blog Les Ecumeurs où il interroge des consommateurs effrénés de concerts sur leur addiction. Il me dit que l’expérience lui a été un peu difficile et que lire ce qu’il a dit ainsi que se voir en photo ne lui est pas agréable. Je l’assure que c’est intéressant même pour quelqu’un comme moi qui ne connais pas grand-chose sur le sujet.
De temps à autre je remplis mon verre de crémant d’Alsace. Je craignais que les deux gros neufchâtels soient insuffisants, je constate qu’il n’en sera rien.
-Oh, des fromages en forme de cœur, s’exclame Melissa avec un accent australien qui ajoute à son charme. J’adore le concept, mais je ne peux pas en manger, je suis allergique, ça me tuerait.
A un moment, la puissance invitante, que certain(e)s appellent comme moi par son prénom de pseudonyme et d’autres par le véritable, réclame l’attention. Il nous lit un texte de Philippe Manœuvre évoquant, dans une scène sexuellement imagée, le Lemmy de Motörhead récemment décédé (rien sur Michel Delpech, l’autre chanteur mort de la semaine) puis il lance le test à l’aveuglette qu’attendent avec impatience certains des présents. Il s’agit de reconnaître à l’écoute du dernier morceau de cent albums le nom des artistes. Nous voici toutes et tous assis en demi-cercle. Les spécialistes se livrent à un combat de spécialistes, voulant éviter la grande honte de ne pas trouver le nom de celui dont ils sont fan(atique)s. Les autres, moins impliqué(e)s, tirent quand même leur épingle du jeu (comme on dit). Melissa se révèle imbattable en classique catégorie baroque. Je marque mes deux petits points grâce à Manset et Bashung (en anglais). Le maître de cérémonie, resté seul à proximité de la table à agapes, ne cesse d’y picorer entre deux morceaux de musique. Un supplément de Vélib’ sera nécessaire cette semaine.
Je sors de cette expérience un peu sonné, c’était une première, et m’en remets en faisant connaissance avec Sophie qui s’avère être une amie des amis de Stockholm, lesquels par l’intermédiaire de son téléphone m’ont envoyé un message de sympathie. Elle nous photographie tous les deux et envoie l’image en Suède. C’était aussi mon premier selfie.
Certain(e)s sont déjà parti(e)s, je fais de même quand se profile le second test à l’aveuglette. Un train peuplé d’étudiant(e)s à valises me ramène à Rouen vers vingt et une heures.
                                                              *
A propos de la fanitude, ce récent échange.
Moi : « Bien qu’elle en touche beaucoup, je n’en ai jamais été atteint, et c’est peut-être une tare. »
L’ami de Stockholm : « Tu fais bien de ne pas être « fan », c’est souvent épuisant ! »
                                                              *
Autrefois, en remerciement d’un bon moment passé là où on était invité, on envoyait une lettre de château. Je la remplace ce lundi matin par un mail de château, y incluant l’Inventaire 66 de Michel Delpech, l’ami Dumez étant friand de listes.