Le Journal de Michel Perdrial
Le Journal de Michel Perdrial



Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.







Rss

Concert Berg Ravel Butterworth Vaugham Williams à l’Opéra de Rouen

21 octobre 2016


Du piano jeudi soir à l’Opéra de Rouen où j’ai place sur l’une des chaises de la fosse d’orchestre, et joué de la main gauche, je suis donc le premier à entrer dans la salle à l’ouverture des portes et choisis la meilleure, en bout de première rangée, côté jardin.
J’ai le temps d’étudier le programme, bâti pour le centenaire de la bataille de la Somme par le maestro Leo Hussain, avant que l’Orchestre au grand complet entre en scène suivi de celui-ci, chemise flottante sur pantalon.
Qu’est donc ce premier morceau que nous applaudissons avant que le chef prenne le micro pour nous parler des trois extraits du Wozzeck d’Alban Berg qui suivront ? Il ne figure pas sur le livret programme.
Frances Pappas, mezzo-soprano, est de la partie pour les fragments de cet opéra nourri de l’expérience guerrière du compositeur au sein de l’armée autrichienne puis place est faite pour le piano.
Nicholas Angelich, ancien enfant virtuose, s’y installe et cherche quoi faire de sa main droite, posée le plus souvent sur son genou, pendant l’exécution du Concerto pour la main gauche que composa Maurice Ravel pour l’amputé de guerre autrichien Paul Wittgenstein. De ma place en or, je ne perds pas de vue sa main active.
Moult applaudissements nous valent un bonus des deux mains que je suis incapable de reconnaître.
Pendant l’entracte, je vais voir les lithographies et eaux-fortes de Steinlen, prêtées par le collectionneur Patrick Rosada, qui sont exposées derrière le vendeur de cédés du pianiste. Ces dessins de mil neuf cent seize, scènes de la vie militaire lors de la Grande Guerre, me font songer un peu plus à grand-père Jules.
Une spectatrice achète un disque de Nicholas (comme l’appelle le vendeur) et veut savoir s’il pourra le lui dédicacer en fin de soirée.
-Impossible, il a un concert demain soir à Lucerne, il prend le train dans cinq minutes, crois-je entendre.
A la reprise, Leo Hussain, vêtu cette fois costard cravate, fait son mea culpa. Il a oublié de nous dire que, suite à un changement de programme, le premier morceau joué était celui que nous aurions dû entendre maintenant : A Shropshire lad, rhapsodie pour orchestre complet de l’anglais George Butterworth, mort au front le cinq août mil neuf cent seize à Pozières dans la Somme, son corps n’ayant jamais été retrouvé. Dommage que cette audition prématurée ait plus ou moins escamoté sa rhapsodie.
Il n’en est rien pour la Pastoral Symphony de Ralph Vaugham Williams que le maestro nous présente en détail, une composition inspirée par les horreurs de la bataille de la Somme qu’a connues le compositeur anglais engagé comme ambulancier depuis mil neuf cent quatorze.
L’exécution des quatre mouvements, à laquelle participe Frances Pappas depuis la coulisse, est émouvante pour beaucoup, comme l’indique, malgré quelques toux, la qualité du silence de l’auditoire. Ma vieille voisine sort un mouchoir en papier de son sac et essuie une larme.
                                                                        *
Cette symphonie n’a rien de pastorale, nous a dit le chef, avouant ne pas comprendre pourquoi Vaugham Williams a choisi un tel titre.
Leo Hussain n’a pas l’air de connaître cette figure de style qu’est l’antiphrase.