Le Journal de Michel Perdrial
Le Journal de Michel Perdrial



Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.







Rss

Les Variations Goldberg par Alexandre Tharaud à l’Opéra de Rouen

4 février 2016


Ce mardi soir, j’ai pour objectif de m’asseoir au plus près d’Alexandre Tharaud invité à jouer les Variations Goldberg à l’Opéra de Rouen. Pour ce faire et déjouer la concurrence, je me plante devant la porte de la salle, côté impair. Celle-ci ouverte, je peux m’asseoir sur la chaise de premier rang offrant la meilleure vue sur le clavier du piano Yamaha.
-Je savais bien que ce soir je devrais me battre avec vous, dis-je à celle qui arrive deuxième et s’installe à ma droite.
Elle ne se plaint pas, elle aussi bénéficie d’une très bonne place.
-On pourrait les revendre très cher, lui fais-je remarquer.
-Oh non, je ne pourrai jamais faire une chose pareille, se récrie-t-elle.
Bientôt, toutes les chaises avec vue sont occupées. Derrière nous, les trois niveaux de la salle s’emplissent. Le brouhaha s’accroît et devient considérable, inutile de se retourner pour savoir que c’est complet ce soir. Alexandre Tharaud a eu maintes fois l’occasion de se faire apprécier ici, notamment les trois années pendant lesquelles il était en résidence.
Un peu avant vingt heures, un couple se présente muni de billets donnant doit au placement libre sur les chaises mais toutes sont occupées. Au lieu de dénicher les deux resquilleurs, le placeur en chef fait installer deux sièges supplémentaires gâchant la vue à un autre couple qui n’ose protester.
Alexandre Tharaud apparaît, quarante-sept ans mais toujours jeune homme. Il s’assoit, se concentre et se lance dans l’aria. Les variations s’enchaînent, certaines lui donnant envie de chantonner silencieusement, d’autres le faisant sourire ou fermer les yeux, certaines attaquées rapidement, d’autres précédées d’un longue pause hélas troublée par des toux. Les doigts galopent ou se freinent, les mains se croisent parfois. Au bout d’une heure, c’est l’apaisement de la lente aria finale
Le triomphe est à l’issue. Alexandre Tharaud offre deux bonus que les connaisseurs auront reconnu, le second étant l’occasion de quelques prouesses techniques.
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S’il est prouvé que le silence après Mozart est encore du Mozart, on ne peut dire ce soir que les silences entre deux variations soient de Bach car s’y engouffrent les nombreux catharreux (encore un concert participatif).
L’assurance avec laquelle s’expriment ces fâcheux me rappelle celle des obèses occupant deux sièges dans les bus américains.
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Alexandre Tharaud aura pris une année sabbatique afin de s’approprier l’œuvre de Johann Sebastian Bach. « Je ne voulais pas l’enregistrer trop tôt. La maturité apporte un relief plus profond et me permet de mieux assumer qui je suis au piano, mes zones brumeuses, nuageuses, mes faiblesses aussi. Ce sont souvent les choses qui ne vont pas qui sont intéressantes, et que l’on a tendance à gommer lorsque l’on est jeune : les zones d’ombres, les tunnels, les petits trous, les fausses notes, qu’on n’entend pas forcément, mais qui permettent au disque d’être fluide et vivant, à défaut de chercher la perfection. » déclare-t-il dans le livret programme (entretien avec Vinciane Laumonier).
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Contrairement à ce que je croyais, les travaux de la chapelle Corneille devenue auditorium sont terminés avant les concerts d’inauguration. Ils auront lieu cette fin de semaine. Je n’y serai pas, ce lieu à dorures exagérées et à grosse boule de trois tonnes pour améliorer l’acoustique ne me dit rien.
On y verra souvent le Poème Harmonique qui pour ses Saisons baroques appelle à la rescousse le cinéma, le cirque et la gastronomie, la musique ne se suffisant désormais plus à elle-même.