Le Journal de Michel Perdrial

Le Journal de Michel Perdrial




Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.







Rss

4 février 2016


Ce mardi soir, j’ai pour objectif de m’asseoir au plus près d’Alexandre Tharaud invité à jouer les Variations Goldberg à l’Opéra de Rouen. Pour ce faire et déjouer la concurrence, je me plante devant la porte de la salle, côté impair. Celle-ci ouverte, je peux m’asseoir sur la chaise de premier rang offrant la meilleure vue sur le clavier du piano Yamaha.
-Je savais bien que ce soir je devrais me battre avec vous, dis-je à celle qui arrive deuxième et s’installe à ma droite.
Elle ne se plaint pas, elle aussi bénéficie d’une très bonne place.
-On pourrait les revendre très cher, lui fais-je remarquer.
-Oh non, je ne pourrai jamais faire une chose pareille, se récrie-t-elle.
Bientôt, toutes les chaises avec vue sont occupées. Derrière nous, les trois niveaux de la salle s’emplissent. Le brouhaha s’accroît et devient considérable, inutile de se retourner pour savoir que c’est complet ce soir. Alexandre Tharaud a eu maintes fois l’occasion de se faire apprécier ici, notamment les trois années pendant lesquelles il était en résidence.
Un peu avant vingt heures, un couple se présente muni de billets donnant doit au placement libre sur les chaises mais toutes sont occupées. Au lieu de dénicher les deux resquilleurs, le placeur en chef fait installer deux sièges supplémentaires gâchant la vue à un autre couple qui n’ose protester.
Alexandre Tharaud apparaît, quarante-sept ans mais toujours jeune homme. Il s’assoit, se concentre et se lance dans l’aria. Les variations s’enchaînent, certaines lui donnant envie de chantonner silencieusement, d’autres le faisant sourire ou fermer les yeux, certaines attaquées rapidement, d’autres précédées d’un longue pause hélas troublée par des toux. Les doigts galopent ou se freinent, les mains se croisent parfois. Au bout d’une heure, c’est l’apaisement de la lente aria finale
Le triomphe est à l’issue. Alexandre Tharaud offre deux bonus que les connaisseurs auront reconnu, le second étant l’occasion de quelques prouesses techniques.
                                                            *
S’il est prouvé que le silence après Mozart est encore du Mozart, on ne peut dire ce soir que les silences entre deux variations soient de Bach car s’y engouffrent les nombreux catharreux (encore un concert participatif).
L’assurance avec laquelle s’expriment ces fâcheux me rappelle celle des obèses occupant deux sièges dans les bus américains.
                                                            *
Alexandre Tharaud aura pris une année sabbatique afin de s’approprier l’œuvre de Johann Sebastian Bach. « Je ne voulais pas l’enregistrer trop tôt. La maturité apporte un relief plus profond et me permet de mieux assumer qui je suis au piano, mes zones brumeuses, nuageuses, mes faiblesses aussi. Ce sont souvent les choses qui ne vont pas qui sont intéressantes, et que l’on a tendance à gommer lorsque l’on est jeune : les zones d’ombres, les tunnels, les petits trous, les fausses notes, qu’on n’entend pas forcément, mais qui permettent au disque d’être fluide et vivant, à défaut de chercher la perfection. » déclare-t-il dans le livret programme (entretien avec Vinciane Laumonier).
                                                           *
Contrairement à ce que je croyais, les travaux de la chapelle Corneille devenue auditorium sont terminés avant les concerts d’inauguration. Ils auront lieu cette fin de semaine. Je n’y serai pas, ce lieu à dorures exagérées et à grosse boule de trois tonnes pour améliorer l’acoustique ne me dit rien.
On y verra souvent le Poème Harmonique qui pour ses Saisons baroques appelle à la rescousse le cinéma, le cirque et la gastronomie, la musique ne se suffisant désormais plus à elle-même.
 

3 janvier 2016


Fin des notes prises lors de ma lecture de la première partie des Carnets (Les années Jules et Jim, 1920-1921) d’Henri-Pierre Roché parue chez André Dimanche soixante-dix ans après les faits, dans lesquels l’auteur relate sa vie dissolue, cette liberté sexuelle suscitant parfois des ennuis lorsqu’elle s’épanouit dans la campagne allemande où une femme ne saurait être en pantalon :
Hohenschäftlarn, mardi vingt-trois août mil neuf cent vingt et un :
Thé tous ensemble et promenade à travers le village, Luk en homme, pantalon toile blanche, ce qui amène des interpellations et (demain) la visite du garde-champêtre qui lui annonce une amende pour outrage aux mœurs.
Hohenschäftlarn, vendredi vingt-six août mil neuf cent vingt et un :
Le soir je ne sais pas ce qu’elle invente avec sa gorge, mais le God y pénètre en totalité, y est à l’aise, sent encore de l’espace devant lui, y sp. comme un fou.
Hohenschäftlarn, mardi six septembre mil neuf cent vingt et un :
Un gendarme arrive, demande à parler à Hln. seule : c’est au sujet de son amende de vingt marks pour avoir promené dans le village en costume d’homme. –Elle redescend : le gendarme demande à me parler aussi. Franz m’accompagne : la petite servante qui était là il y a huit jours, a quitté la maison, sans explication. Elle a déclaré m’avoir vu nu dans le jardin, en allant soigner les poules.
Hohenschäftlarn, mardi vingt septembre mil neuf cent vingt et un :
Hln. me dit : « Franz s’ennuie. Je devrais le caresser ? » –Je lui dis : « Doucement, pas trop ». –Ils sont sur le balcon. Je suis dans la chambre. Hln. est assise sur Franz, son derrière sur son sexe à lui. Je la vois bouger. (…)
Promenade nous trois avant dîner, vers Irschenhausen –la femme qui nous insulte soudain terriblement, au bout du village, en patois. Nous ne comprenons presque rien à ce qu’elle dit. J’imagine que cela s’adresse à Hln. dont le maillot vert de football révèle la poitrine. Mais non. Le mot « étrangers » et « boîte à lait » revient dans ses paroles. Elle nous reproche de faire monter le prix du lait.
Berlin, dimanche seize octobre mil neuf cent vingt et un :
Einstein, rond, ressemblant beaucoup à Franz, au point que Franz a reçu une fois à Paris d’une petite cocotte une gifle destinée à Einstein. (…)
Retour par un train bondé, dans un wagon sans lumière. Cinq couples jeunes qui s’embrassent sans trêve, doucement, joliment. (…) Je remarque soudain qu’un des couples les plus enlacés est composé de deux jeunes filles blondes, qui jouent avec leurs cheveux, leurs lèvres, follement, ivrement, et avec une grande innocence.
Berlin, mercredi dix-neuf octobre mil neuf cent vingt et un (toujours obsédé par l’idée de faire un fils à Helen) :
Pourquoi Dieu m’aurait-il donné un sexe puissant et qui est la seule partie de mon corps que je trouve belle ?
Weimar, mercredi deux novembre mil neuf cent vingt et un :
Notre situation à trois, avec Franz, est déjà prévue et réglée par le code de mariage russe. Elle est naturelle, fréquente, pas compliquée.
Henri-Pierre Roché n’aura jamais d’enfant avec Helen Hessel, leur histoire prendra bientôt fin mais la seconde partie des Carnets (Les années Jules et Jim) n’a malheureusement pas été publiée à ce jour.
                                                         *
Henri-Pierre Roché a également inspiré L’homme qui aimait les femmes à François Truffaut, son rôle étant tenu par Charles Denner.
 

2 février 2016


Poursuite de la narration, via mes notes prises lors de la lecture des Carnets d’Henri-Pierre Roché, de ses amours avec Helen Hessel. Cela ne va pas sans crises, plus ou moins violentes :
Munich, mardi dix mai mil neuf cent vingt et un :
Pour la réveiller au matin je dois la culbuter avec l’édredon sur le tapis –elle aime ça.
Berlin, jeudi douze mai mil neuf cent vingt et un :
Hier soir amour dans le noir : danger pour nous deux. Chacun peut imaginer que l’autre pense à un autre, s’amuse à comparer : en fait ce fut vrai, et nous en parlons doucement.
Saarow, mercredi dix-huit mai mil neuf cent vingt et un :
Hln. n’a pas voulu du grand lit à deux pour nous parce qu’elle y a couché avec Koch : coup et horreur renaissante pour moi –mais j’en ai fait bien autant. « C’était pour ta liberté », dit-elle.
Berlin, vendredi dix juin mil neuf cent vingt et un :
Hln. me dit : « J’ai couché avec Hule et aussi avec un étranger en mars dernier ». Je la jette brusquement en bas du lit. Elle y remonte, riant encore. (…) Mon immense désir de la frapper se déclenche. Je me dégage d’elle, à genoux sur le lit. Elle se dresse –je lui donne deux gifles, à pleine force, qui l’abattent, j’y sens son visage doux, et encore deux coups de poing sur les reins. –Elle appelle Fr. au secours. Il vient. Nous sommes immobiles maintenant, sans parler. Il repart. –Est-ce irréparable ? C’est ce que nous nous demandons. –Son visage gonflé, ses yeux qui pleurent ; - J’ai mal, sans pouvoir pleurer. –Nous nous blottissons, sans baisers, effrayés pour notre amour.
Paris, jeudi vingt-trois juin mil neuf cent vingt et un :
Elle dit : « Je ne voulais plus te voir, mais il n’y a que toi qui peux me consoler de la peine que tu me fais. »
Paris, mardi vingt-six juillet mil neuf cent vingt et un :
Je trouve lettres d’elle : elle est contente que j’aie rugi l’autre jour en revoyant l’écriture de Hulle, avec qui elle a couché –de même que je suis content qu’elle ait envie de déchirer mon Journal parce qu’il contient des caresses faites à sa sœur.
Paris, samedi trente juillet mil neuf cent vingt et un :
Brancusi qui voulait grimper aux arbres disperse une migraine à coups d’aspirine.
 

1er février 2016


Faux départ à l’Opéra de Rouen ce samedi soir pour l’OPUS 14 de Kader Attou que doit danser la Compagnie Accrorap, à peine la musique a-t-elle démarré dans le noir qu’elle cesse et la lumière revient. Cela provoque quelque agitation dans un public où l’on trouve toujours  des niais(e)s pour applaudir quand il y a un problème. De mémoire de ma voisine, ce spectacle qui ne veut pas démarrer est une première dans cette salle. Je confirme. Quand cela repart, c’est pour s’arrêter de même. Frédéric Roels, maître des lieux, quitte son fauteuil et des coulisses envoie un message de patience.
La troisième est la bonne. Pendant une heure dix, les quatorze hip-hopeurs et les deux hip-hopeuses à dominante ocre donnent à voir une danse urbaine ardente, évoluant en groupe entier ou partiel, ainsi qu’en duo ou solo, dans un décor végétal peint par Ludmila Volf. La musique originale à craquements de disque noir est de Régis Baillet. Electronique avec ajout de cordes, elle inclut une chanson traditionnelle arménienne et bénéficie pour la séquence finale de la voix de Caruso.
S’ensuivent de vigoureux applaudissements et des bravos. Des vieilles et vieux abonnés aux familles de spectacle tout public, tout le monde est conquis, semble-t-il, et moi itou. Kader Attou se joint à ses interprètes et les photographie sur fond de public rouennais.
En rentrant, je trouve au bout de la ruelle une demi-douzaine de branlotin(e)s écoutant de la musique d’aujourd’hui sortant d’un gros sac noir. On ne les verra jamais à l’Opéra de Rouen bien que le tarif de dernière minute à cinq euros le leur permettrait.
                                                             *
Kader Attou, à propos du peu de danseuses dans sa quatorzième chorégraphie : « j’aurais aimé en avoir plus, mais je ne fais pas d’auditions, toutes mes collaborations sont le fruit de rencontres. »
                                                             *
On est content au Théâtre de la Foudre (Centre Dramatique National de Haute Normandie) de la nouvelle porte des toilettes illustrée des pictogrammes « Homme » « Femme » « Transgenre » et « Handicapé ».
Nul ne semble s’apercevoir que ce correctement politique conforte la hiérarchie traditionnelle.
Cet endroit étant celui de tout le monde, il suffisait d’écrire « Toilettes » sur la porte pour que l’on sache que c’est ici.
 

30 janvier 2016


Suite de l’histoire à trois de Franz Hessel, Helen Hessel et Henri-Pierre Roché, racontée en léger différé par ce dernier et publiée par André Dimanche :
Munich, lundi vingt et un février mil neuf cent vingt et un :
J’arrive à Alte Wien où ils doivent déjeuner. J’entre. Je les aperçois. Envie de courir à eux. Je dois donner d’abord tranquillement mon pardessus au vestiaire. –Fr. qui m’apporte sa femme, que j’aime, qui m’aime. –Hln. qui m’apporte son mari, que j’aime, qui m’aime.
Uttwil, vendredi vingt-cinq février mil neuf cent vingt et un :
Mais que ferons-nous de l’enfant, ni elle ni moi ne voulant rester auprès de lui ?
Munich, jeudi vingt-quatre mars mil neuf cent vingt et un :
Elle est dans mes bras, elle parle. La bombe éclate, sec et formidable : elle a fait l’amour avec Hubert, elle a peut-être un enfant de lui dans le ventre.
Hohenschäftlarn, jeudi sept avril mil neuf cent vingt et un :
Epaisse couche de neige : elle s’y est roulée nue ce matin –secouant les avalanches des arbres.
Hohenschäftlarn, dimanche dix avril mil neuf cent vingt et un :
Sp. in her mouth. Fr. vient nous rejoindre –presque malgré lui, peu à peu, nous le forçons à être nu avec nous dans la boîte du balcon de bois –Hln. le caresse –je tourne d’abord le dos –je souhaite qu’elle le rende heureux, qu’elle le fasse sp. lui aussi –elle le caresse avec ses pieds –il proteste –elle s’étend sur lui, je la dévore de baisers par derrière, sa croupe, sa p.f. –je regarde le p.h. de Fr. dressé, pas orgueilleux –Hln. s’assied sur lui et le caresse avec l’extérieur de p.f. –Fr. sp. Nous le félicitons –nous rions tous.
Hohenschäftlarn, mardi douze avril mil neuf cent vingt et un :
69. –La plus parfaite étreinte que nous ayons jamais eue : sa tête serrée entre mes jambes, mes pieds sous sa nuque, p.h. jusqu’au fond de sa gorge, moi humant et balayant p.f. de ma langue jusqu’au fond, nous un seul bloc de chair glorieux, illuminé, encore pendant tout notre sommeil et notre matin.
Hohenschäftlarn, mardi dix-neuf avril mil neuf cent vingt et un :
Elle me fait presque sp. avec sa bouche devant Fr. –Cela lui est de plus en plus naturel d’aimer l’un de nous devant l’autre.
                                                           *
Rappel lexical : sp. pour spend (orgasme), p.h.= petit homme (bite) dit aussi The God, p.f.= petite femme (chatte) d’où k.p.h. ou k.p.f. pour kiss p.h. ou kiss p.f. et t.p.h. ou t.p.f. pour touch p.h. ou touch p.f.
                                                           *
Vendredi dernier, un passage par la Maison Pinel, épicerie fine et produits du terroir, non pour un achat de bouche, mais pour y retirer le Cahier de L’Herne brutalement titré Roché que je me suis offert sans débourser grâce à mes Super Points Rakuten engrangés sur Price Minister. Avant moi, un homme retirait un colis. Après moi, une femme vient chercher le sien. Cette activité d’appoint semble amener plus de Rouennais(e)s dans la boutique que l’activité principale.
                                                           *
Trois cent vingt-cinq pages grand format à lire. En couverture : la photo d’Henri-Pierre Roché vieux, pipe en bouche, pie sur la tête.
 

29 janvier 2016


Un piano occupe un coin de qu’il est convenu d’appeler le foyer à l’Opéra de Rouen, en fait le bar. Derrière le comptoir des jeunes gens s’activent, désormais porteurs d’un tablier de cafetier d’antan de couleur rouge. Cela sied aussi bien aux garçons qu’aux filles, avec juste ce qu’il faut de ridicule. Le piano est cerné d’un cordon rouge, pas question de s’y asseoir et d’en faire l’instrument d’un concert participatif, nous ne sommes pas dans une gare ferroviaire.
Le concert de ce jeudi soir est consacré à des musiques écrites pour le cinéma ou utilisées par lui. Leo Hussain, au micro, se félicite de son initiative et annonce que l’ordre indiqué sur le livret programme sera bouleversé. Toutes les places sont occupées, j’ai la mienne au balcon, surplombant l’Orchestre uniquement composé de cordes.
J’ignore jusqu’au nom de certains des films concernés, et parmi ceux qui me disent quelque chose j’en ai peu vu et il y a longtemps, mais je constate à l’audition de la Suite « Holberg » d’Edward Grieg qu’il y a là un gisement pour illustrer de futurs films ennuyeux. Mon intérêt ne s’éveille pas davantage avec la Suite tirée du film « There will be blood » de Jonny Grenwoood (le guitariste de Radiohead), hormis dans le passage où les instruments sont bousculés par une utilisation peu académique.
Après l’entracte, le Divertimento pour cordes de Wolfgang Amadeus Mozart, pour lequel Leo Hussain est au clavecin, ne contribue pas à me ranimer, encore de la musique à deux de tension, sauf le mouvement final joué presto. L’Adagio pour cordes de Samuel Barber ne m’inspire qu’un mauvais jeu de mot. Pour finir, c’est la Suite tirées des films Jose Torres, Black Rain, Face of Another, compositions signées Toru Takemitsu, qui n’ennuient tout autant et dont l’ultime morceau est réutilisable dans n’importe quel film comportant une scène de thé dansant.
A en juger par le volume et la durée des applaudissements, je suis porté à croire que je suis le seul à avoir trouvé le temps long.
                                                                *
Italie : curieuse idée de construire des caissons pour cacher les statues de femmes nues qui auraient effarouché le barbu d’Iran, il aurait été plus simple de les vêtir d’un tchador.
                                                                *
« Il n’y a plus tellement d’endroits où on peut aller » (commerçants rouennais s’interrogeant sur un futur lieu de vacances d’hiver au chaud soleil des pays du sud).
 

28 janvier 2016


Parapluie indispensable pour aller à l’Opéra de Rouen ce mercredi soir où c’est musique de chambre. Je prends un livret programme au guichet mais ne l’ouvre pas avant d’être assis en corbeille côté cour où je bénéficie d’une place sans voisin à droite ni à gauche. Sur la couverture figure une photo de la jolie harpiste Anaïs Gaudemard qui lui donne un faux air de Sophie Marceau. Son instrument arrive sur scène avec l’aide d’un diable.
C’est d’abord une version pour flûte, harpe, violon, alto et violoncelle du Prélude à L’Après-midi d’un faune de Claude Debussy. L’arrangeur, Philippe Tailleux, est là pour recevoir sa part d’applaudissements. Suit la Légende d’après Les Elfes de Leconte de Lisle pour harpe, une composition datant du début du vingtième siècle signée Henriette Renié, harpiste qui donna des cours à Harpo Marx. Anaïs Gaudemard, seule en scène et sans partition, montre pendant dix minutes que la harpe n’est pas un instrument pour musique sirupeuse. Elle est très applaudie puis revient en compagnie du violoncelliste Florent Audibert et du flûtiste Jean-Christophe Falala pour Deux pièces en trio pour flûte, violoncelle et harpe, une œuvre de mil neuf cent vingt-cinq du compositeur belge Joseph Jongen, autre bonne découverte.
Jean-Christophe Falala prend alors la parole pour rappeler que c’est aujourd’hui l’anniversaire de Mozart, ce qui nous veut en bonus, joué par lui-même « et Anaïs », l’Andante en ut pour flûte à bec et harpe.
Après l’entracte, plus de harpe mais un piano où devait s’asseoir, selon le programme de la saison, le maestro Leo Hussain, mais, bien qu’il ne doive pas être loin, devant diriger le concert de demain jeudi, c’est Christian Erbslöh qui s’y colle. Le Quintette pour piano et cordes en fa mineur de César Franck, œuvre nerveuse, me sied tout à fait.
Rentrant sous le parapluie, je me dis que je tire souvent davantage de plaisir des concerts de musique de chambre que des concerts symphoniques.
                                                                                *
Suite à la formation du premier gouvernement d’Hollande Président, je me souviens avoir écrit que la mauvaise nouvelle, c’était Valls au Ministère de l’Intérieur, et la bonne nouvelle, Taubira au Ministère de la Justice.
Le mauvais l’emportant logiquement sur le bon, l’un a pris du galon depuis un moment, l’autre a pris la porte ce mercredi (au grand contentement du rassemblement de la Droite et de l’Extrême Droite).
                                                                               *
Suis-je le seul à trouver que Valls s’habille de plus en plus comme un dignitaire franquiste ?
 

27 janvier 2016


Ce lundi vers huit heures vingt, je ressors de ma visite annuelle chez l’ophtalmologiste une ordonnance en main. Héritier des tares familiales, une tension oculaire trop élevée me met en risque de glaucome. Désormais, et pour la vie, ce sera une goutte dans chaque œil chaque soir. J’ai bien conscience d’avoir coché une nouvelle case de la liste des ennuis liés à la vieillesse, ce qui me déprime tout en m’incitant à galoper tant qu’il est encore temps.
Cette semaine, pour cause de concert mercredi à l’Opéra de Rouen, je suis dans le train de Paris le mardi, jour de grève des enseignants, des taxis et d’autres encore. Prudemment, j’évite les déplacements motorisés en surface, n’usant que du métro et le complétant par la marche. Après passage au Book-Off de la Bastille et au marché d’Aligre, je renoue avec Chez Céleste pour le déjeuner, optant pour un hareng pommes à l’huile et une copieuse souris d’agneau.
L’après-midi, je passe un long temps dans l’autre Book-Off car on y solde les grands formats. Tout livre à étiquette bleue ou rouge marqué cinq ou trois euros est à un euro. C’est un peu comme jouer à la loterie, un livre t’intéresse, tu le tires vers toi : zut, une étiquette grise. Néanmoins, on gagne plus souvent qu’avec la Française des Jeux. Aussi, c’est bien chargé que je rejoins la gare Saint-Lazare afin d’y prendre le train de dix-sept heures vingt-cinq pour Rouen.
A peine suis-je installé côté couloir comme à mon habitude qu’un fâcheux me demande d’accéder à la place côté fenêtre alors qu’il y a de nombreuses places libres ailleurs. Ce type pue le vieux tabac et occupe trop d’espace. Je ramasse tous mes sacs et le fuis pour reprendre tranquillement ma lecture de Proust et Céleste de Christian Péchenard (La Table Ronde) dont j’ai déjà lu et fort apprécié Proust à Cabourg (Quai Voltaire).
                                                                *
Parmi les livres rapportés de la capitale : Monsieur, la biographie de Jacques Chessex (Grasset), Le tourbillon de la vie, entretiens de Serge Rezvani avec Michel Martin-Roland (Ecriture), Sombres nuées, le récit autobiographique du temps de la révolution culturelle de Yang Jiang (Christian Bourgois), Blanche Meyer et Jean Giono, récit de la relation extraconjugale de l’écrivain par Annick Stevenson (Actes Sud), New York est une fête de Michel Bulteau (Minos/ La Différence) et Roger Blin, court récit de la mort dudit par Hermine Karagheuz (Séguier Archimbaud).
                                                               *
Egalement Sugar babies de Roland Jaccard avec des photographies d'écolières japonaises en uniforme de Romain Slocombe (Zulma), un exemplaire dédicacé par le premier à Jean-Christophe Brochier : « A consommer avec modération ! Très affectueusement». Le dédicataire a pris le conseil au pied de la lettre (comme on dit).
                                                              *
Paris, conseil de rue : « Si tu veux voir à quel point l’air est pollué, prends ton caca de nez. Le mange pas, hein ! Regarde-le. Tu verras qu’il est tout noir. »
                                                              *
Magasin Le Printemps : encore trois semaines pour en sortir avec une tête de « solde suprême ».
 

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