Le Journal de Michel Perdrial
Le Journal de Michel Perdrial



Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.







Rss

Irruption de l’homme au casque blanc chez Guidoline

5 juin 2015


Il entre dans le Guidoline Café comme en terrain conquis, son casque blanc autour du cou, dit bonjour à la responsable du bar comme s’il la connaissait, pose ses multiples sacs, enlève ses nombreux manteaux, se tourne vers moi qui suis occupé, ce mardi après-midi, à tapoter sur mon ordinateur des extraits des Lettres au Castor et à quelques autres de Jean-Paul Sartre :
-Vous êtes philosophe ?
-Non.
-Universitaire alors ?
-Non plus.
Il passe dans l’atelier où l’on bichonne les vélos, se renseigne pour en acheter un destiné à sa fille. Celui qu’on lui propose est à réparer, quinze euros.
Il repasse dans le café, demande à laisser ses affaires, déclare qu’il va aller chanter pour gagner les quinze euros, revient cinq minutes plus tard.
-Vous voulez m’acheter un poème un euro ? demande-t-il à la responsable du bar qui décline.
-Et vous monsieur ?
-Non merci.
-Je m’en doutais.
Il va en proposer à cinquante centimes à l’atelier où l’on n’a pas envie de lâcher la clé à molette pour la poésie.
-Bah tant pis, ronchonne-t-il en revenant dans le café, ma petite fille, elle aura pas de vélo, c’est que des sans-cœur.
Il remet tous ses manteaux, récupère tous ses sacs :
-De toute façon, moi le vélo, je m’en branle, y a que les tapettes qui en font, des mecs avec des collants et des petites chaussures.
Il fait une photo, dit qu’il va aller consulter son avocat, puis sort par l’atelier :
-Au revoir, les tapettes.
-On dit les pédales, lui fait remarquer l’un des responsables du lieu.
                                                                *
J’ai tout de suite su à quoi m’en tenir avec cet hurluberlu pour l’avoir déjà vu à l’œuvre quatre jours plus tôt. Lors des concerts Rush du Cent Six, il a rendu nerveux certains vigiles.
Avant celui de Sourdure dans l’aître Saint-Maclou, j’étais prés du musicien électro-auvergnat lorsqu’il est apparu, casque blanc sur les oreilles, bouquet de fleurs blanches à la main, s’adressant à l’artiste en ces termes:
-On m’a dit qu’il fallait payer quatre mille euros à la Maison des Artistes et qu’après on était artiste, c’est vrai ?
-Je sais pas, lui a répondu le garçon à caquette jaune, moi je suis inscrit nulle part.
-Comment tu fais alors ?
-J’ai plusieurs activités.
L’hurluberlu a alors sorti son carnet et un stylo.
-Tu peux me donner ton adresse mail. Je donne des cours de méditation zen, c’est trois mille euros, mais pour toi ce sera gratuit.