Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
17 juin 2025
Pas d’orage, de la pluie, et au matin de la fraîcheur quand je retrouve encore une fois le car Fluo terminus Le Bonhomme et son chauffeur à petit chapeau. Cette fois, je ne vais pas loin, Kientzheim, juste avant Kaysersberg, un village oublié du tourisme de masse. « Je vais vous arrêter devant le char », me dit-il. Le problème, c’est le retour. Aucun arrêt n’est clairement indiqué et si c’est un autre chauffeur, un nouveau, il risque de ne pas vous voir. Aussi me conseille-t-il de marcher jusqu’à KB Porte Basse (KB, le petit nom de Kaysersberg).
A l’arrivée, près du char « Renard » de la cinquième division blindée (témoin de la libération de Kaysersberg), je trouve une flèche qui indique le Chemin des Remparts contournant le village. Tout de suite, je reconnais l’endroit. Il est planté de cerisiers. Je me revois avec celle qui me tenait la main picorant dans les branches basses. « Cerises réservées aux habitants. Merci de ne pas casser les branches. » Je ne casse jamais une branche et je suis presque un habitant. Par ailleurs, ces cerises sont très nombreuses et les habitants semblent peu pressés de les récolter.
Du haut du rempart, une cigogne posée sur une patte observe ma cueillette. J’ai le temps de la photographier avant qu’elle ne s’envole. En contrebas, le long des remparts, c’est une succession de jardins de type ouvrier. Nul n’y travaille de bon matin.
Mon Tour des Remparts, avec nombreux arrêts cerises, terminé, je traverse Kientzheim par sa Grand’Rue. Je retiens le Lallakenig (le tireur de langue de la porte basse), la chapelle Saint-Régule-et-Saint-Félix qui mériterait que j’y entre pour voir ses ex-voto mais c’est fermé, l’église paroissiale dont j’oublie de faire le tour pour voir la danse macabre, le Musée du Vignoble et des Vins d’Alsace où je n’entrerais pour rien au monde, un oriel où flotte le drapeau ukrainien.
Il n’y a rien ici pour prendre un café et les hôtels restaurants sont chics et chers. Je m’inflige la marche jusqu’à KB sous une chaleur déjà revenue. J’arrive à l’arrêt Porte Basse avant le passage du neuf heures vingt-huit pour Colmar. Celui-ci est conduit par le même chauffeur à petit chapeau qui m’aurait vu si j’étais resté au bord de la route à Kientzheim. J’en descends à l’arrêt Théâtre. Comme c’est lundi, le Café Rapp et le Restaurant Meistermann sont fermés.
C’est à la terrasse de Dussourd que je bois un allongé puis lis Balzac La hausse des loyers à Paris a quelque chose d’effrayant tandis que passe la foule de tous les jours des touristes qui vont tous au même endroit. A la table voisine, il en est un qui ne peut pas prendre un café avec les autres car son smartphone lui apprend qu’une borne pour recharger sa voiture vient de se libérer et il faut qu’il y coure. Il y a aussi ceux qui se font guider par leur smartphone pour visiter la ville. « La Collégiale, c’est à cinquante mètres, on y va ».
Et c’est à la winstub Au Cygne que je déjeune. Son jardin d’été est désormais ouvert où je suis admis à midi bien que n’ayant pas réservé, un vaste jardin arboré qu’on ne peut deviner de la rue. Les tables sont suffisamment éloignées les unes des autres pour ne pas entendre les conversations d’autrui. C’est un endroit ignoré des touristes. Je ne l’aurais pas connu s’il n’était sur le chemin entre mon logis provisoire et la vieille ville. Il ne faudrait pas que Le Routard le découvre. De même qu’il ne faudrait pas qu’il découvre le chemin des cerises à Kientzheim. Au menu du jour, c’est potage et escalope à la crème frites haricots. J’ajoute un quart d’edelzwicker. A la table la plus proche, une femme fume tout en tripotant son smartphone. Elle secoue machinalement la cendre de sa cigarette qui tombe dans son sac à main ouvert posé sur le sol près de sa chaise. « En dessert, avec le menu, si jamais, c’est un cake à la pomme », me dit la serveuse. Je prends. Cela fera vingt et un euros trente, vin inclus.
A l’arrivée, près du char « Renard » de la cinquième division blindée (témoin de la libération de Kaysersberg), je trouve une flèche qui indique le Chemin des Remparts contournant le village. Tout de suite, je reconnais l’endroit. Il est planté de cerisiers. Je me revois avec celle qui me tenait la main picorant dans les branches basses. « Cerises réservées aux habitants. Merci de ne pas casser les branches. » Je ne casse jamais une branche et je suis presque un habitant. Par ailleurs, ces cerises sont très nombreuses et les habitants semblent peu pressés de les récolter.
Du haut du rempart, une cigogne posée sur une patte observe ma cueillette. J’ai le temps de la photographier avant qu’elle ne s’envole. En contrebas, le long des remparts, c’est une succession de jardins de type ouvrier. Nul n’y travaille de bon matin.
Mon Tour des Remparts, avec nombreux arrêts cerises, terminé, je traverse Kientzheim par sa Grand’Rue. Je retiens le Lallakenig (le tireur de langue de la porte basse), la chapelle Saint-Régule-et-Saint-Félix qui mériterait que j’y entre pour voir ses ex-voto mais c’est fermé, l’église paroissiale dont j’oublie de faire le tour pour voir la danse macabre, le Musée du Vignoble et des Vins d’Alsace où je n’entrerais pour rien au monde, un oriel où flotte le drapeau ukrainien.
Il n’y a rien ici pour prendre un café et les hôtels restaurants sont chics et chers. Je m’inflige la marche jusqu’à KB sous une chaleur déjà revenue. J’arrive à l’arrêt Porte Basse avant le passage du neuf heures vingt-huit pour Colmar. Celui-ci est conduit par le même chauffeur à petit chapeau qui m’aurait vu si j’étais resté au bord de la route à Kientzheim. J’en descends à l’arrêt Théâtre. Comme c’est lundi, le Café Rapp et le Restaurant Meistermann sont fermés.
C’est à la terrasse de Dussourd que je bois un allongé puis lis Balzac La hausse des loyers à Paris a quelque chose d’effrayant tandis que passe la foule de tous les jours des touristes qui vont tous au même endroit. A la table voisine, il en est un qui ne peut pas prendre un café avec les autres car son smartphone lui apprend qu’une borne pour recharger sa voiture vient de se libérer et il faut qu’il y coure. Il y a aussi ceux qui se font guider par leur smartphone pour visiter la ville. « La Collégiale, c’est à cinquante mètres, on y va ».
Et c’est à la winstub Au Cygne que je déjeune. Son jardin d’été est désormais ouvert où je suis admis à midi bien que n’ayant pas réservé, un vaste jardin arboré qu’on ne peut deviner de la rue. Les tables sont suffisamment éloignées les unes des autres pour ne pas entendre les conversations d’autrui. C’est un endroit ignoré des touristes. Je ne l’aurais pas connu s’il n’était sur le chemin entre mon logis provisoire et la vieille ville. Il ne faudrait pas que Le Routard le découvre. De même qu’il ne faudrait pas qu’il découvre le chemin des cerises à Kientzheim. Au menu du jour, c’est potage et escalope à la crème frites haricots. J’ajoute un quart d’edelzwicker. A la table la plus proche, une femme fume tout en tripotant son smartphone. Elle secoue machinalement la cendre de sa cigarette qui tombe dans son sac à main ouvert posé sur le sol près de sa chaise. « En dessert, avec le menu, si jamais, c’est un cake à la pomme », me dit la serveuse. Je prends. Cela fera vingt et un euros trente, vin inclus.
16 juin 2025
Une succession d’éclairs sans tonnerre côté montagne vers quatre heures trente du matin, l’orage est en embuscade mais rien ne se passe.
J’achète le pain au chocolat pas bien bon de la boulangerie Schwartz et le mange sur le banc de la halte ferroviaire Saint-Joseph. J’y prends le premier petit train Fluo pour Munster (sept heures trente-deux) dans lequel rentrent chez eux des paumés du petit matin.
Las, à l’arrivée, il pleut. De quoi remettre en cause mon projet du jour : la montée au Col de la Schlucht. Rien est ouvert sur la place de l’Eglise et Côté Gare non plus, bien que du Grand Hôtel sortent des Japonais(e)s à grosses valises qui s’engouffrent dans un car de voyage. Je m’assois sous l’abri de la Gare et réfléchis à la suite. Soit ça se maintient et je prends le car Fluo de huit heures vingt-cinq qui ne circule que le ouiquennede, soit ça s’aggrave et je reste ici.
La chaleur est toujours pesante et la pluie peu importante quand je décide d’y aller. Le trajet ne prend que vingt-deux minutes. On passe par Stosswihr et Soultzeren. Ce ne sont que montées et virages. A mi-chemin, la pluie se transforme en averse diluvienne. Le couple de Néerlandais qui voulait aller au Grand Ballon revoit son plan et je me dis que je n’ai pas eu raison de faire ce que j’ai fait. Quoi qu’il en soit, il est trop tard. Je descends à l’arrêt Col de la Schlucht. A peine le pied dehors que je suis trempé. Des automobilistes amicaux me laissent traverser la route au plus vite. Je fonce au Tétras où je commande un allongé verre d’eau.
Au bout de vingt minutes, subitement, le temps change. Plus de pluie, le ciel devient à moitié bleu. Ça me permet de faire le tour de la station : un téléski, une chapelle contemporaine, trois lieux pour manger, l’Auberge de la Schlucht, la Crêperie Hôtel La Maison et le bistro/resto Le Tétras où l’allongé m’a coûté deux euros.
Le premier car de retour est à dix heures cinquante-deux. Y montent avec moi un jeune couple de marcheurs. Mon ticket est encore valable pour la descente sur Munster, laquelle est agréable, belle vue sur la montagne embrumée et sur les deux villages aux belles églises.
Il fait toujours trop chaud à Munster où chez Côté Gare, je commande ma pizza du dimanche. Cette fois, une Savoyarde (reblochon) à onze euros. Je l’accompagne d’un quart d’edelzwiker à cinq euros soixante-dix. Le car Macon Rugby stationne devant. Les costauds séjournent au Grand Hôtel et déjeunent dans une salle à part. Moi-même, je mange sous la pergola (comme dit la serveuse). Ce que j’aurais tendance à appeler une véranda. « Pour la Fête des Pères, faites mousser les bières locales », ai-je lu sur une vitrine. Une famille derrière moi la fête avec modération et des bières industrielles. Deux Gendarmes enlèvent leur gilet pare-balles et s’assoient en terrasse. « Je vous apporte un cendrier », leur dit la serveuse. Ce sont des habitués qui boivent de l’eau avec leur repas. La pizza est excellente, que je mets une heure à manger.
Une demi-heure de lecture de Lettres à Madame Hanska et je rentre avec le petit train Fluo de treize heures trente. Il fait toujours aussi chaud dans mon logis Air Bibi qui n’est pourtant pas sous les toits. Je ne cesse de me mettre de l’eau sur le visage. Pourvu qu’arrive dans les heures qui viennent un orage digne de ce nom.
*
Une pancarte annonce la résurrection prochaine de la défunte Gare de Munster sous la forme d’une Pâtisserie Salon de Thé.
J’achète le pain au chocolat pas bien bon de la boulangerie Schwartz et le mange sur le banc de la halte ferroviaire Saint-Joseph. J’y prends le premier petit train Fluo pour Munster (sept heures trente-deux) dans lequel rentrent chez eux des paumés du petit matin.
Las, à l’arrivée, il pleut. De quoi remettre en cause mon projet du jour : la montée au Col de la Schlucht. Rien est ouvert sur la place de l’Eglise et Côté Gare non plus, bien que du Grand Hôtel sortent des Japonais(e)s à grosses valises qui s’engouffrent dans un car de voyage. Je m’assois sous l’abri de la Gare et réfléchis à la suite. Soit ça se maintient et je prends le car Fluo de huit heures vingt-cinq qui ne circule que le ouiquennede, soit ça s’aggrave et je reste ici.
La chaleur est toujours pesante et la pluie peu importante quand je décide d’y aller. Le trajet ne prend que vingt-deux minutes. On passe par Stosswihr et Soultzeren. Ce ne sont que montées et virages. A mi-chemin, la pluie se transforme en averse diluvienne. Le couple de Néerlandais qui voulait aller au Grand Ballon revoit son plan et je me dis que je n’ai pas eu raison de faire ce que j’ai fait. Quoi qu’il en soit, il est trop tard. Je descends à l’arrêt Col de la Schlucht. A peine le pied dehors que je suis trempé. Des automobilistes amicaux me laissent traverser la route au plus vite. Je fonce au Tétras où je commande un allongé verre d’eau.
Au bout de vingt minutes, subitement, le temps change. Plus de pluie, le ciel devient à moitié bleu. Ça me permet de faire le tour de la station : un téléski, une chapelle contemporaine, trois lieux pour manger, l’Auberge de la Schlucht, la Crêperie Hôtel La Maison et le bistro/resto Le Tétras où l’allongé m’a coûté deux euros.
Le premier car de retour est à dix heures cinquante-deux. Y montent avec moi un jeune couple de marcheurs. Mon ticket est encore valable pour la descente sur Munster, laquelle est agréable, belle vue sur la montagne embrumée et sur les deux villages aux belles églises.
Il fait toujours trop chaud à Munster où chez Côté Gare, je commande ma pizza du dimanche. Cette fois, une Savoyarde (reblochon) à onze euros. Je l’accompagne d’un quart d’edelzwiker à cinq euros soixante-dix. Le car Macon Rugby stationne devant. Les costauds séjournent au Grand Hôtel et déjeunent dans une salle à part. Moi-même, je mange sous la pergola (comme dit la serveuse). Ce que j’aurais tendance à appeler une véranda. « Pour la Fête des Pères, faites mousser les bières locales », ai-je lu sur une vitrine. Une famille derrière moi la fête avec modération et des bières industrielles. Deux Gendarmes enlèvent leur gilet pare-balles et s’assoient en terrasse. « Je vous apporte un cendrier », leur dit la serveuse. Ce sont des habitués qui boivent de l’eau avec leur repas. La pizza est excellente, que je mets une heure à manger.
Une demi-heure de lecture de Lettres à Madame Hanska et je rentre avec le petit train Fluo de treize heures trente. Il fait toujours aussi chaud dans mon logis Air Bibi qui n’est pourtant pas sous les toits. Je ne cesse de me mettre de l’eau sur le visage. Pourvu qu’arrive dans les heures qui viennent un orage digne de ce nom.
*
Une pancarte annonce la résurrection prochaine de la défunte Gare de Munster sous la forme d’une Pâtisserie Salon de Thé.
15 juin 2025
« Défense d’introduire bicyclettes et vélomoteurs à l’intérieur du marché », est-il écrit sur un panneau à l’entrée du Marché Saint-Joseph. Cette formulation devenue désuète me réjouit. J’attends encore une fois le bus F pour rejoindre la Gare en vue d’une troisième incursion en Pays Welche. Après Orbey et Le Bonhomme, Lapoutroie, avec le même car Fluo.
Le bus F arrive avec « Service non commencé » sur sa girouette. Je le dis au néo barbu qui conduit. Il corrige sans un merci. La journée la plus chaude de la semaine, c’est aujourd’hui. Trente-six degrés annoncés en Alsace où les orages arriveront demain.
Ça discute entre chauffeurs de cars Fluo ce samedi matin, lesquels me saluent comme une personne connue. Celui au petit chapeau rentre chez lui. Celui qui conduit le sept heures quarante aujourd’hui est aussi serviable. Je lui dis que je veux descendre à l’arrêt Girardin en haut de Lapoutroie.
Ainsi en est-il, ce qui me permet de visiter cette commune pentue tout en longueur en descendant. Lapoutroie est un beau bourg de montagne. Pas de circulation de camions ici par bonheur. Je passe successivement devant des grilles Art Nouveau, un joli ruisseau, Le Musée des Eaux de Vie, la Médiathèque, l’église Sainte-Odile, la Mairie d’architecture contemporaine jouxtée des plus belles toilettes publiques (gratuites) que j’ai utilisées depuis mon arrivée en Alsace, une Gendarmerie fermée, l’Hôtel du Faudé ouvert.
Arrivé à l’autre bout du pays, je remonte jusqu’à l’église au joli contraste entre la pierre rose du clocher et le vert jaune des murs latéraux. Non loin est la boulangerie Kieffer où se trouvent plus de femmes bavardes que de viennoiseries. J’obtiens le dernier pain au chocolat (un euro quarante). Je l’emporte un peu plus loin, près de l’église, en face de la Médiathèque, où un café est ouvert, un café qui cache son nom, fréquenté par des vieux d’ici. J’ai une table à l’ombre en terrasse où souffle un vent chaud, pour un café à seulement un euro cinquante. Les Pompiers partent en manœuvre. Un homme installe une pancarte fléchée pour le Repair Café. L’église est de celles qui sonnent l’heure deux fois pour qui n’a pas compris la première. Je reprends Balzac. Le premier décembre mil huit cent quarante-six, il est au plus bas. Madame Hanska vient de perdre leur futur enfant, Victor, à six mois de grossesse.
Ce café sans nom fait restaurant, bien que ce ne soit indiqué nulle part. La patronne affiche le menu du jour : entrée escalope milanaise dessert, treize euros. Je lui réserve une table pour tester son menu mystère puis je reprends la découverte du village malgré la température trop élevée. Je passe devant le fabricant de munster Dodin et une belle école maternelle bleue, puis entre dans l’église qui, de chaque côté du chœur, bénéficie d’une fresque de Maurice Denis narrant la vie de Sainte-Odile. Cette fresque est malheureusement peu visible faute d’éclairage. Plein de courage, je monte au cimetière par un chemin de bois pentu interdit à tout véhicule à roue. De ce cimetière, la vue est belle sur l’église. Redescendu sur le parvis, je fais une dernière photo : celle de bâtiments presque jumeaux, un blanc à gauche où se tient le café, qui s’appelle le Café Central bien que son nom ne soit pas affiché, et un ocre à droite où se pratique la vente des fromages Dodin (il y a un distributeur automatique quand c’est fermé).
Je mange à l’intérieur au Café Central. Au-dessus de ma table, une photo montre l’énorme crèche qu’on installe ici à Noël « A Lapoutroie découvrez la Crèche du Café Central. Ouvert tous les jours. » Je prends un quart d’edelzwicker. L’entrée, je la connais quand elle est posée devant moi : crudités melon charcuterie. En face de moi sont quatre hommes de la même famille et une jeune femme qui est l’amie de l’un d’eux. Chorte et débardeur, plantureuse, crumbienne, elle s’ennuie et a toujours les doigts dans la bouche. L’escalope milanaise est accompagnée de frites et salade. La patronne et le patron font la cuisine ensemble et le service ensemble, d’où une attente qui nuit aux nerfs de l’impatient que je suis. Mon dessert surprise arrive enfin : une mousse au chocolat.
Je règle au patron dix-huit euros cinquante, treize euros pour le repas, quatre euros pour le vin et un euro cinquante pour un café que je vais prendre sur la terrasse. Encore un établissement qui fermera dans quelques années lorsque viendra l’heure de la retraite, me dis-je.
Un arrêt de car Fluo est de l’autre côté devant l’église. J’attends qu’approche treize heures cinquante-quatre pour traverser. Je descends une nouvelle fois à l’arrêt Manufacture. A Colmar, la chaleur est accablante.
Le bus F arrive avec « Service non commencé » sur sa girouette. Je le dis au néo barbu qui conduit. Il corrige sans un merci. La journée la plus chaude de la semaine, c’est aujourd’hui. Trente-six degrés annoncés en Alsace où les orages arriveront demain.
Ça discute entre chauffeurs de cars Fluo ce samedi matin, lesquels me saluent comme une personne connue. Celui au petit chapeau rentre chez lui. Celui qui conduit le sept heures quarante aujourd’hui est aussi serviable. Je lui dis que je veux descendre à l’arrêt Girardin en haut de Lapoutroie.
Ainsi en est-il, ce qui me permet de visiter cette commune pentue tout en longueur en descendant. Lapoutroie est un beau bourg de montagne. Pas de circulation de camions ici par bonheur. Je passe successivement devant des grilles Art Nouveau, un joli ruisseau, Le Musée des Eaux de Vie, la Médiathèque, l’église Sainte-Odile, la Mairie d’architecture contemporaine jouxtée des plus belles toilettes publiques (gratuites) que j’ai utilisées depuis mon arrivée en Alsace, une Gendarmerie fermée, l’Hôtel du Faudé ouvert.
Arrivé à l’autre bout du pays, je remonte jusqu’à l’église au joli contraste entre la pierre rose du clocher et le vert jaune des murs latéraux. Non loin est la boulangerie Kieffer où se trouvent plus de femmes bavardes que de viennoiseries. J’obtiens le dernier pain au chocolat (un euro quarante). Je l’emporte un peu plus loin, près de l’église, en face de la Médiathèque, où un café est ouvert, un café qui cache son nom, fréquenté par des vieux d’ici. J’ai une table à l’ombre en terrasse où souffle un vent chaud, pour un café à seulement un euro cinquante. Les Pompiers partent en manœuvre. Un homme installe une pancarte fléchée pour le Repair Café. L’église est de celles qui sonnent l’heure deux fois pour qui n’a pas compris la première. Je reprends Balzac. Le premier décembre mil huit cent quarante-six, il est au plus bas. Madame Hanska vient de perdre leur futur enfant, Victor, à six mois de grossesse.
Ce café sans nom fait restaurant, bien que ce ne soit indiqué nulle part. La patronne affiche le menu du jour : entrée escalope milanaise dessert, treize euros. Je lui réserve une table pour tester son menu mystère puis je reprends la découverte du village malgré la température trop élevée. Je passe devant le fabricant de munster Dodin et une belle école maternelle bleue, puis entre dans l’église qui, de chaque côté du chœur, bénéficie d’une fresque de Maurice Denis narrant la vie de Sainte-Odile. Cette fresque est malheureusement peu visible faute d’éclairage. Plein de courage, je monte au cimetière par un chemin de bois pentu interdit à tout véhicule à roue. De ce cimetière, la vue est belle sur l’église. Redescendu sur le parvis, je fais une dernière photo : celle de bâtiments presque jumeaux, un blanc à gauche où se tient le café, qui s’appelle le Café Central bien que son nom ne soit pas affiché, et un ocre à droite où se pratique la vente des fromages Dodin (il y a un distributeur automatique quand c’est fermé).
Je mange à l’intérieur au Café Central. Au-dessus de ma table, une photo montre l’énorme crèche qu’on installe ici à Noël « A Lapoutroie découvrez la Crèche du Café Central. Ouvert tous les jours. » Je prends un quart d’edelzwicker. L’entrée, je la connais quand elle est posée devant moi : crudités melon charcuterie. En face de moi sont quatre hommes de la même famille et une jeune femme qui est l’amie de l’un d’eux. Chorte et débardeur, plantureuse, crumbienne, elle s’ennuie et a toujours les doigts dans la bouche. L’escalope milanaise est accompagnée de frites et salade. La patronne et le patron font la cuisine ensemble et le service ensemble, d’où une attente qui nuit aux nerfs de l’impatient que je suis. Mon dessert surprise arrive enfin : une mousse au chocolat.
Je règle au patron dix-huit euros cinquante, treize euros pour le repas, quatre euros pour le vin et un euro cinquante pour un café que je vais prendre sur la terrasse. Encore un établissement qui fermera dans quelques années lorsque viendra l’heure de la retraite, me dis-je.
Un arrêt de car Fluo est de l’autre côté devant l’église. J’attends qu’approche treize heures cinquante-quatre pour traverser. Je descends une nouvelle fois à l’arrêt Manufacture. A Colmar, la chaleur est accablante.
14 juin 2025
Le Bonhomme, c’est le moment de l’aller voir de près, lui que j’ai traversé hier au retour d’Orbey, même car Fluo, même chauffeur à petit chapeau.
Je descends au terminus à l’arrêt Eglise ce vendredi qui devrait être la journée la plus chaude de la semaine. Même dans cette montagne, je la sens la chaleur alors qu’il n’est que neuf heures. Des panneaux indiquent une randonnée en boucle de deux heures. Je ne m’y lance pas. Je me contente de visiter le village : église, naïve grotte mariale, Mairie, restaurant fermé, café fermé. Cela dans le bruit de la traversée incessante du Bonhomme par de gros camions, traversée causée par la présence, plus haut, du col auquel la commune a donné son nom. Ce col du Bonhomme qu’un jour j’ai franchi dans la neige sans pneus spéciaux avec Twinnie, ma petite voiture rouge.
Il reste un café ouvert heureusement, nommé La Schlitte. Je prends place à une table à l’ombre de sa terrasse. Mon café bu, j’ouvre Balzac. Ta sœur vient de m’envoyer un coussin qui lui ressemble. Il est impossible de faire quelque chose de plus provincial, de plus bête, de moins distingué, de plus sot, de plus portière que cela. Je suis seul à cette terrasse, comme j’étais seul hier à celle de l’Hôtel des Bruyères à Orbey.
Il y a plus haut un Hôtel de la Poste mais je ne vois pas la Poste. « Il n’y a plus de Poste ici ? » demandé-je à la dame de La Schlitte lorsque je lui paie mes deux euros. « Il n’y a plus rien dans nos p’tits villages », me répond-elle. « Même à Orbey, tout va fermer », dit-elle à la jeune femme avec qui elle fait des comptes. Elle cite un certain nombre de commerces dont Au Petit Gourmet où j’étais hier, la dame va prendre sa retraite. Faute de Poste, c’est dans une boîte jaune que je glisse la carte pour celle qui a son anniversaire le seize juin, pas sûr qu’elle la reçoive le jour voulu.
L’Hôtel de la Poste est un vaste établissement avec spa. Un homme est à l’accueil à qui je demande quel sera le menu du jour et puis un café à deux euros en attendant qu’il soit l’heure du déjeuner. Puis-je le prendre en terrasse ? C’est possible mais comme il est seul, il faut que je l’y porte moi-même. Cette terrasse est derrière l’Hôtel dans un jardin où coule un ruisseau. On y entend beaucoup moins les camions et il souffle un petit vent bienvenu.
A midi, le repas est servi sous la véranda. Au menu du jour, pour seize euros cinquante : jambon melon, cordon bleu maison gratin ratatouille et petit fraisier. Une mise en bouche est offerte, même si comme moi on ne boit que de l’eau de la carafe, une petite terrine de poisson et riz. Cinq ou six couples déjeunent sous le régime de la box coffret cadeau. « C’est agréable, ce bruit de l’eau », dit tous les quarts d’heure à son mari celle qui est derrière moi. A part cela, silence total entre eux.
Mon repas réglé, je remonte jusqu’à l’église. Le Bonhomme ignore les bancs. Je n’ai à ma disposition que celui de l’abri où j’attends, seul, le car Fluo pour Colmar de treize heures quarante-cinq.
Ce car est gratuit car le chauffeur n’a plus de tickets à remplir et d’un modèle récent avec climatisation. Le choc thermique est intense lorsque j’en descends à l’arrêt Manufacture. Je n’ai pas le courage de marcher jusqu’à mon logis. Je traverse la rue pour attendre le premier bus F.
*
Sur la route du Bonhomme, un couple de marcheurs, gros sacs à dos et bâtons. Un deux trois, souffrons.
Je descends au terminus à l’arrêt Eglise ce vendredi qui devrait être la journée la plus chaude de la semaine. Même dans cette montagne, je la sens la chaleur alors qu’il n’est que neuf heures. Des panneaux indiquent une randonnée en boucle de deux heures. Je ne m’y lance pas. Je me contente de visiter le village : église, naïve grotte mariale, Mairie, restaurant fermé, café fermé. Cela dans le bruit de la traversée incessante du Bonhomme par de gros camions, traversée causée par la présence, plus haut, du col auquel la commune a donné son nom. Ce col du Bonhomme qu’un jour j’ai franchi dans la neige sans pneus spéciaux avec Twinnie, ma petite voiture rouge.
Il reste un café ouvert heureusement, nommé La Schlitte. Je prends place à une table à l’ombre de sa terrasse. Mon café bu, j’ouvre Balzac. Ta sœur vient de m’envoyer un coussin qui lui ressemble. Il est impossible de faire quelque chose de plus provincial, de plus bête, de moins distingué, de plus sot, de plus portière que cela. Je suis seul à cette terrasse, comme j’étais seul hier à celle de l’Hôtel des Bruyères à Orbey.
Il y a plus haut un Hôtel de la Poste mais je ne vois pas la Poste. « Il n’y a plus de Poste ici ? » demandé-je à la dame de La Schlitte lorsque je lui paie mes deux euros. « Il n’y a plus rien dans nos p’tits villages », me répond-elle. « Même à Orbey, tout va fermer », dit-elle à la jeune femme avec qui elle fait des comptes. Elle cite un certain nombre de commerces dont Au Petit Gourmet où j’étais hier, la dame va prendre sa retraite. Faute de Poste, c’est dans une boîte jaune que je glisse la carte pour celle qui a son anniversaire le seize juin, pas sûr qu’elle la reçoive le jour voulu.
L’Hôtel de la Poste est un vaste établissement avec spa. Un homme est à l’accueil à qui je demande quel sera le menu du jour et puis un café à deux euros en attendant qu’il soit l’heure du déjeuner. Puis-je le prendre en terrasse ? C’est possible mais comme il est seul, il faut que je l’y porte moi-même. Cette terrasse est derrière l’Hôtel dans un jardin où coule un ruisseau. On y entend beaucoup moins les camions et il souffle un petit vent bienvenu.
A midi, le repas est servi sous la véranda. Au menu du jour, pour seize euros cinquante : jambon melon, cordon bleu maison gratin ratatouille et petit fraisier. Une mise en bouche est offerte, même si comme moi on ne boit que de l’eau de la carafe, une petite terrine de poisson et riz. Cinq ou six couples déjeunent sous le régime de la box coffret cadeau. « C’est agréable, ce bruit de l’eau », dit tous les quarts d’heure à son mari celle qui est derrière moi. A part cela, silence total entre eux.
Mon repas réglé, je remonte jusqu’à l’église. Le Bonhomme ignore les bancs. Je n’ai à ma disposition que celui de l’abri où j’attends, seul, le car Fluo pour Colmar de treize heures quarante-cinq.
Ce car est gratuit car le chauffeur n’a plus de tickets à remplir et d’un modèle récent avec climatisation. Le choc thermique est intense lorsque j’en descends à l’arrêt Manufacture. Je n’ai pas le courage de marcher jusqu’à mon logis. Je traverse la rue pour attendre le premier bus F.
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Sur la route du Bonhomme, un couple de marcheurs, gros sacs à dos et bâtons. Un deux trois, souffrons.
13 juin 2025
Je quitte la Route du Vin pour le Pays Welche ce jeudi matin, la plaine pour la petite montagne, direction Orbey avec le même car Fluo numéro Treize terminus Le Bonhomme. « Il faut descendre aux Pompiers », me dit le chauffeur.
Je descends donc à l’arrêt Centre de Secours et traverse un petit parc où coule la Weiss et où se trouvent les ruines de la glacière de la famille Lefébure. J’arrive dans la rue principale que je monte d’abord sur la droite, m’arrêtant devant des maisons typiques de la montagne et de gros hôtels tout aussi typiques de la montagne, parfois définitivement fermés. Arrivé au bout, je rebrousse, passe devant la Mairie et aboutit de l’autre côté, où ça remonte. L’église Saint-Urbain est là, près de laquelle chante un coq. Celui du clocher reste muet.
A proximité est indiqué le Chemin des Ecoliers. Il débute par un raidillon en béton. Ensuite, c’est un large, plat et agréable sentier ombragé par la forêt. Il se termine au point où j’aurais de toute façon eu envie de faire demi-tour. Au loin dépasse de la montagne la Tour du Faudé en haut de laquelle je ne grimperai pas. Le Lac Blanc, le Lac Noir, que j’ai atteints autrefois, sont eux aussi hors de portée pour moi désormais.
En revenant vers le centre, j’entre dans la boulangerie Weber où j’achète un croissant (un euro trente) à une très jolie vendeuse. Un peu plus loin, face à la Mairie, une terrasse à l’ombre me fait signe, celle de l’Hôtel des Bruyères. Son café est à deux euros. J’y lis Balzac Et malheureusement je sens d’affreuses douleurs au diaphragme évidemment causées par le café.
A Orbey, j’ai campé au moins une semaine avec celle qui me tenait la main, dans un des hameaux éloignés du centre. Un « Chemin des Ecoliers » menait à une ferme-auberge. Je me souviens comme les tourtes étaient bonnes. Je n’y aurai pas droit cette fois et l’Hôtel des Bruyères ne fait pas à manger ce midi. La patronne m’indique Au Petit Gourmet en face de la Poste. La terrasse est au premier étage, parfaitement à l’ombre. Le menu du jour propose pour douze euros : charcuterie crudités, suprême de volaille spätzlis légumes et tarte au fromage. Le quart d’edelzwicker est à quatre euros vingt. Cela servi par une très gentille dame. Mangent ici des ouvriers (dont l’un dort sur la table), des retraités, deux couples, deux femmes à chien, un homme seul (comme moi). A la table du coin, Mario avec sa casquette Motul n’est pas là pour manger. Il en est à son troisième Picon bière. « Ma mère, tu sais ce qu’elle disait ? Un veau qui tête, il mange pas. »
Seize euros vingt en tout, voilà un prix raisonnable. Je remercie la gentille patronne lorsque je paie et lui dis que c’était très bien. « Service ! », me répond-elle, façon ici qu’ont certains de dire « Merci ! »
J’ai le temps d’une courte pause lecture au Parc avant le car Fluo pour Colmar de treize heures vingt-sept que je prends à l’arrêt Mairie. J’en descends à l’arrêt Pfeffel, proche de l’église Saint-Joseph, et marche jusqu’à mon logis Air Bibi sous une chaleur plus sensible que là-haut dans la montagne.
*
Une bénédiction que d’avoir à côté de mon Air Bibi la boulangerie Eric Colle qui ouvre à six heures du matin et un arrêt de bus F pour rejoindre la Gare sans me fatiguer, même si je ne peux l’atteindre avant sept heures vingt-neuf. Ce jeudi matin, tandis que j’attends ce bus, une femme avec valise et sac à dos court vers la Gare. Elle y sera avant moi mais ratera peut-être quand même son train. Ce qu’elle aurait dû faire au lieu de courir : monter dans le petit train de Metzeral qui s’arrête ici à sept heures et qui doit arriver sous peu, mais impossible de le lui dire.
*
Vu du car, une boulangerie nommée L’Enfariné, dont le slogan est « Un ami qui vous veut du pain ».
Je descends donc à l’arrêt Centre de Secours et traverse un petit parc où coule la Weiss et où se trouvent les ruines de la glacière de la famille Lefébure. J’arrive dans la rue principale que je monte d’abord sur la droite, m’arrêtant devant des maisons typiques de la montagne et de gros hôtels tout aussi typiques de la montagne, parfois définitivement fermés. Arrivé au bout, je rebrousse, passe devant la Mairie et aboutit de l’autre côté, où ça remonte. L’église Saint-Urbain est là, près de laquelle chante un coq. Celui du clocher reste muet.
A proximité est indiqué le Chemin des Ecoliers. Il débute par un raidillon en béton. Ensuite, c’est un large, plat et agréable sentier ombragé par la forêt. Il se termine au point où j’aurais de toute façon eu envie de faire demi-tour. Au loin dépasse de la montagne la Tour du Faudé en haut de laquelle je ne grimperai pas. Le Lac Blanc, le Lac Noir, que j’ai atteints autrefois, sont eux aussi hors de portée pour moi désormais.
En revenant vers le centre, j’entre dans la boulangerie Weber où j’achète un croissant (un euro trente) à une très jolie vendeuse. Un peu plus loin, face à la Mairie, une terrasse à l’ombre me fait signe, celle de l’Hôtel des Bruyères. Son café est à deux euros. J’y lis Balzac Et malheureusement je sens d’affreuses douleurs au diaphragme évidemment causées par le café.
A Orbey, j’ai campé au moins une semaine avec celle qui me tenait la main, dans un des hameaux éloignés du centre. Un « Chemin des Ecoliers » menait à une ferme-auberge. Je me souviens comme les tourtes étaient bonnes. Je n’y aurai pas droit cette fois et l’Hôtel des Bruyères ne fait pas à manger ce midi. La patronne m’indique Au Petit Gourmet en face de la Poste. La terrasse est au premier étage, parfaitement à l’ombre. Le menu du jour propose pour douze euros : charcuterie crudités, suprême de volaille spätzlis légumes et tarte au fromage. Le quart d’edelzwicker est à quatre euros vingt. Cela servi par une très gentille dame. Mangent ici des ouvriers (dont l’un dort sur la table), des retraités, deux couples, deux femmes à chien, un homme seul (comme moi). A la table du coin, Mario avec sa casquette Motul n’est pas là pour manger. Il en est à son troisième Picon bière. « Ma mère, tu sais ce qu’elle disait ? Un veau qui tête, il mange pas. »
Seize euros vingt en tout, voilà un prix raisonnable. Je remercie la gentille patronne lorsque je paie et lui dis que c’était très bien. « Service ! », me répond-elle, façon ici qu’ont certains de dire « Merci ! »
J’ai le temps d’une courte pause lecture au Parc avant le car Fluo pour Colmar de treize heures vingt-sept que je prends à l’arrêt Mairie. J’en descends à l’arrêt Pfeffel, proche de l’église Saint-Joseph, et marche jusqu’à mon logis Air Bibi sous une chaleur plus sensible que là-haut dans la montagne.
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Une bénédiction que d’avoir à côté de mon Air Bibi la boulangerie Eric Colle qui ouvre à six heures du matin et un arrêt de bus F pour rejoindre la Gare sans me fatiguer, même si je ne peux l’atteindre avant sept heures vingt-neuf. Ce jeudi matin, tandis que j’attends ce bus, une femme avec valise et sac à dos court vers la Gare. Elle y sera avant moi mais ratera peut-être quand même son train. Ce qu’elle aurait dû faire au lieu de courir : monter dans le petit train de Metzeral qui s’arrête ici à sept heures et qui doit arriver sous peu, mais impossible de le lui dire.
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Vu du car, une boulangerie nommée L’Enfariné, dont le slogan est « Un ami qui vous veut du pain ».
12 juin 2025
Dans le car Fluo de sept heures quarante terminus Le Bonhomme, je demande ce mercredi à descendre peu après Ingersheim à l’arrêt Auberge du Florimont à Katzenthal. Le chauffeur me laisse devant le restaurant après avoir fait une marche arrière dans un chemin de terre.
Je marche un bon kilomètre le long des vignes avec en ligne de mire l’église blanche au haut clocher et, sur une hauteur derrière le village, les ruines du Château de Wineck, le seul en Alsace à être entouré de vignes (on se singularise comme on peut).
J’atteins le centre du bourg, passe devant l’église et son nid de cigognes, une fontaine, une chapelle et, à la sortie, une flèche à droite m’indique le château. On y accède par une petite route pentue qui le prend par derrière. C’est moins éprouvant pour mes pieds que des marches d’escalier.
Arrivé à ce château, je lis sur sa porte close qu’on ne peut y entrer que le dimanche après-midi. Voilà qui m’évite la tentation du donjon, une tour carrée au sommet de laquelle claquent les drapeaux. Il souffle un petit vent qui a tôt fait de me rafraîchir.
Je m’assois sur un banc de pierre. L’arbre au-dessus de ma tête n’est malheureusement pas un cerisier mais un noyer. Dans les vignes alentour le bruit des tracteurs des vignerons me rappelle que je ne suis pas seul. En bas l’église sonne neuf heures. Je me lève. Au bout de la route, au loin, j’aperçois l’Auberge du Florimont.
Je regagne le village par une variante qui sillonne entre les vignes. Presque arrivé aux premières maisons, je vois monter vers moi un de ces étroits tracteurs de vigneron. Il transporte une cuve jaune et est conduit par un homme porteur d’une combinaison intégrale et d’un masque respiratoire de protection contre les produits chimiques. Il entre dans la vigne juste devant moi. « Passez, me dit l’homme invisible, parce que je vais sulfater. » Je ne le jurerais pas mais dans sa voix j’ai cru entendre un accent africain. Ce qui serait dans la logique des choses.
J’achète un croissant à la framboise (un euro soixante-dix) dans une sorte de magasin de subsistance dont les rayons sont quasiment vides. Je demande à la vendeuse s’il y aurait quelque part un endroit où boire un café. « Ici vous n’avez rien ! » ne répond-t-elle catégoriquement. En bas de la tour du clocher de l’église, une porte donne dans le cimetière. J’y trouve un banc approprié à la lecture. Mon croissant terminé, j’ouvre Lettres à Madame Hanska. Les cigognes claquent du bec et des lézards courent en silence.
A onze heures moins le quart, je lève le camp et descends la route qui va à l’Auberge du Florimont. C’est ouvert. L’aimable patronne me donne une table non réservée en terrasse et me sert un café verre d’eau à deux euros dix. Je reprends ma lecture en attendant midi. Je suis ombragé par un cerisier chargé de fruits bien rouges. C’est comme si j’étais assis sous mon dessert. Pendant ce temps, cette dame déjeune avec le cuisinier.
« Vous ne les récoltez pas vos cerises ? » lui demandé-je quand elle vient prendre ma commande. « Si, on va le faire, vous pouvez en manger si vous voulez. » « Je n’oserai pas ». Le menu du jour est à dix-huit euros cinquante : avocat vinaigrette, poitrine de sanglier farcie frites et petits légumes et dessert. J’ajoute un quart de pinot blanc à cinq euros. Cette nourriture n’est pas extraordinaire et est accompagnée d’une sorte de pain décongelé. Encore un restaurant qui vaut plus pour l’endroit que par ce qu’on y mange. Il est fréquenté par quelques ouvriers et beaucoup de vieux qui se connaissent tous.
Des retraités, cinq hommes et sept femmes, occupent la longue table voisine. Ils sont là pour décider ensemble de leur prochain voyage en commun. Châteaux de la Loire ou Saint-Malo ? La discussion tourne autour de l’argent. Si tu mets tous les mois, tu n’as rien à mettre au bout. Ce sont les femmes qui délibèrent (sauf une, complètement amortie). Les hommes ne pipent mot. « Ou alors la Côte d’Opale ? » « Ça, c’est une très bonne idée », dit l’une. « Si vous faites ça, moi je viens pas » dit une autre. Ils n’en sont qu’à l’apéro.
Le dessert, c’est du mendiant fait maison. J’y trouve les cerises en conserve de l’arbre au dessus de moi. Je dis à la gentille patronne que c’était bien. C’est vrai pour son dessert et pour l’accueil.
J’attends le car Fluo de treize heures vingt pour Colmar devant une petite plaque bleue où est écrit Bus en me demandant si je suis au bon endroit car ce n’est pas la signalisation habituelle. Le chauffeur me le confirme. Il fallait l’attendre au carrefour de la grand route (où il n’y rien non plus). Ce n’est pas grave, je suis à l’intérieur.
Je descends à Manufacture devant Intermarché pour quelques courses suivies d’une longue attente du bus F.
*
Près du cimetière de Katzenthal, un vigneron signale que son caveau est ouvert.
*
Pas vu la queue d’un chat à Katzenthal.
Je marche un bon kilomètre le long des vignes avec en ligne de mire l’église blanche au haut clocher et, sur une hauteur derrière le village, les ruines du Château de Wineck, le seul en Alsace à être entouré de vignes (on se singularise comme on peut).
J’atteins le centre du bourg, passe devant l’église et son nid de cigognes, une fontaine, une chapelle et, à la sortie, une flèche à droite m’indique le château. On y accède par une petite route pentue qui le prend par derrière. C’est moins éprouvant pour mes pieds que des marches d’escalier.
Arrivé à ce château, je lis sur sa porte close qu’on ne peut y entrer que le dimanche après-midi. Voilà qui m’évite la tentation du donjon, une tour carrée au sommet de laquelle claquent les drapeaux. Il souffle un petit vent qui a tôt fait de me rafraîchir.
Je m’assois sur un banc de pierre. L’arbre au-dessus de ma tête n’est malheureusement pas un cerisier mais un noyer. Dans les vignes alentour le bruit des tracteurs des vignerons me rappelle que je ne suis pas seul. En bas l’église sonne neuf heures. Je me lève. Au bout de la route, au loin, j’aperçois l’Auberge du Florimont.
Je regagne le village par une variante qui sillonne entre les vignes. Presque arrivé aux premières maisons, je vois monter vers moi un de ces étroits tracteurs de vigneron. Il transporte une cuve jaune et est conduit par un homme porteur d’une combinaison intégrale et d’un masque respiratoire de protection contre les produits chimiques. Il entre dans la vigne juste devant moi. « Passez, me dit l’homme invisible, parce que je vais sulfater. » Je ne le jurerais pas mais dans sa voix j’ai cru entendre un accent africain. Ce qui serait dans la logique des choses.
J’achète un croissant à la framboise (un euro soixante-dix) dans une sorte de magasin de subsistance dont les rayons sont quasiment vides. Je demande à la vendeuse s’il y aurait quelque part un endroit où boire un café. « Ici vous n’avez rien ! » ne répond-t-elle catégoriquement. En bas de la tour du clocher de l’église, une porte donne dans le cimetière. J’y trouve un banc approprié à la lecture. Mon croissant terminé, j’ouvre Lettres à Madame Hanska. Les cigognes claquent du bec et des lézards courent en silence.
A onze heures moins le quart, je lève le camp et descends la route qui va à l’Auberge du Florimont. C’est ouvert. L’aimable patronne me donne une table non réservée en terrasse et me sert un café verre d’eau à deux euros dix. Je reprends ma lecture en attendant midi. Je suis ombragé par un cerisier chargé de fruits bien rouges. C’est comme si j’étais assis sous mon dessert. Pendant ce temps, cette dame déjeune avec le cuisinier.
« Vous ne les récoltez pas vos cerises ? » lui demandé-je quand elle vient prendre ma commande. « Si, on va le faire, vous pouvez en manger si vous voulez. » « Je n’oserai pas ». Le menu du jour est à dix-huit euros cinquante : avocat vinaigrette, poitrine de sanglier farcie frites et petits légumes et dessert. J’ajoute un quart de pinot blanc à cinq euros. Cette nourriture n’est pas extraordinaire et est accompagnée d’une sorte de pain décongelé. Encore un restaurant qui vaut plus pour l’endroit que par ce qu’on y mange. Il est fréquenté par quelques ouvriers et beaucoup de vieux qui se connaissent tous.
Des retraités, cinq hommes et sept femmes, occupent la longue table voisine. Ils sont là pour décider ensemble de leur prochain voyage en commun. Châteaux de la Loire ou Saint-Malo ? La discussion tourne autour de l’argent. Si tu mets tous les mois, tu n’as rien à mettre au bout. Ce sont les femmes qui délibèrent (sauf une, complètement amortie). Les hommes ne pipent mot. « Ou alors la Côte d’Opale ? » « Ça, c’est une très bonne idée », dit l’une. « Si vous faites ça, moi je viens pas » dit une autre. Ils n’en sont qu’à l’apéro.
Le dessert, c’est du mendiant fait maison. J’y trouve les cerises en conserve de l’arbre au dessus de moi. Je dis à la gentille patronne que c’était bien. C’est vrai pour son dessert et pour l’accueil.
J’attends le car Fluo de treize heures vingt pour Colmar devant une petite plaque bleue où est écrit Bus en me demandant si je suis au bon endroit car ce n’est pas la signalisation habituelle. Le chauffeur me le confirme. Il fallait l’attendre au carrefour de la grand route (où il n’y rien non plus). Ce n’est pas grave, je suis à l’intérieur.
Je descends à Manufacture devant Intermarché pour quelques courses suivies d’une longue attente du bus F.
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Près du cimetière de Katzenthal, un vigneron signale que son caveau est ouvert.
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Pas vu la queue d’un chat à Katzenthal.
11 juin 2025
Changement de car Fluo ce mardi. A la Gare de Colmar, je monte dans le Treize de sept heures quarante, terminus Le Bonhomme, et demande à son aimable chauffeur quel arrêt est le mieux pour Kaysersberg. « Rocade Verte, me dit-il, je vous ferai signe. » Derrière moi un jeune homme se fait redresser par sa copine : « J’ai bien le droit de m’habiller comme je veux, on voit pas mes seins, on voit pas ma chatte, et toi tu te permets de mater n’importe quelle fille dans la rue en minijupe qu’on voit sa culotte. »
Il est huit heures quinze quand je descends à Rocade Verte. De cet arrêt, je suis vite à l’Hôtel de Ville près duquel est une ouverture donnant sur les vignes. C’est le point de départ d’une succession de rudes escaliers qui mènent aux ruines du château du douzième siècle. Je m’y engage hardiment en me tenant à la rampe. Arrivé au pied du donjon, l’un des plus anciens d’Alsace, je me tâte. Y grimper ou non ? Je décide que oui et attaque les deux cent vingt-quatre marches.
Quand je suis là-haut, j’ai belle vue sur les vignobles et sur le bourg, notamment son église Sainte-Croix. En redescendant le colimaçon, je croise un couple qui monte avec le chien. La descente des escaliers est éprouvante pour mes pieds. Arrivé en bas, je m’écroule sur un banc à l’ombre. L’église sonne neuf heures. Je sue et je n’aime pas ça.
Un peu remis, je parcours la rue principale bordée de superbes maisons, certaines à pignons jumelés. Je passe devant la Fontaine de l’Empereur Constantin et arrive au Pont Fortifié qui enjambe la Weiss et où on a une vue splendide. C’est là que Kaysersberg rappelle qu’il a été élu Village Préféré des Français.
Je poursuis jusqu’à Chez Roger Hassenforder. Roger n’est plus, son restaurant continue. C’est le seul endroit ouvert à cette heure. J’y prends un café en terrasse (deux euros vingt). Je me souviens bien de Roger Hassenforder, la forte tête du Tour de France (auquel je m’intéressais enfant). Au mur du couloir qui mène aux toilettes est un affichage d’articles de journaux relatant ses Tours de France. Sur l’un, une photo de Roger, allongé sur le dos, la tête entre les mains, avec en titre : « Hassenforder, meilleur comédien du Tour ».
Une courte balade dans les rues secondaires, fort belles, puis je regagne la Mairie. Je m’assois sur un banc en face des vignobles et des ruines du Château et lis Balzac. Toutes les démarches faites pour avoir de l’argent ont été couronnées d’un insuccès complet. Je constate que la plupart de celles et ceux qui vont au Château font un détour par les vignes, s’évitant les marches.
Je fus heureux à Kaysersberg lorsque j’y vins bien accompagné. Je me souviens de la visite guidée à laquelle participait comme poil à gratter Roger Siffer qui fut l’Alan Stivell alsacien dans les années Soixante-Dix. Quelques jours plus tard, nous allions le voir en concert, à Obernai je crois, un concert où on payait sa place avec une bouteille de vin. Il y en avait des centaines devant la scène. C’était un concert foutraque où, outre Roger, étaient programmés un tas d’artistes locaux, une ancienne Miss France et Cookie Dingler. Cookie entretenait la flamme. « Allez, les filles ! » et le public féminin en chœur : Etre une femme libérée, tu sais c’est pas si facile. La fille du car Fluo montre que les choses avancent lentement.
A midi, je déjeune au Kaisers’Bier (ah ah ah) d’un burgueur alsacien (donc au munster) sans frites et sans salade à treize euros et d’une tarte aux myrtilles à six euros en terrasse sous la treille puis je rentre avec le car Fluo de treize heures une.
*
Ici est né le grand-cousin de Jean-Paul Sartre, Albert Schweitzer, qui le promenait quand il était petit.
Il est huit heures quinze quand je descends à Rocade Verte. De cet arrêt, je suis vite à l’Hôtel de Ville près duquel est une ouverture donnant sur les vignes. C’est le point de départ d’une succession de rudes escaliers qui mènent aux ruines du château du douzième siècle. Je m’y engage hardiment en me tenant à la rampe. Arrivé au pied du donjon, l’un des plus anciens d’Alsace, je me tâte. Y grimper ou non ? Je décide que oui et attaque les deux cent vingt-quatre marches.
Quand je suis là-haut, j’ai belle vue sur les vignobles et sur le bourg, notamment son église Sainte-Croix. En redescendant le colimaçon, je croise un couple qui monte avec le chien. La descente des escaliers est éprouvante pour mes pieds. Arrivé en bas, je m’écroule sur un banc à l’ombre. L’église sonne neuf heures. Je sue et je n’aime pas ça.
Un peu remis, je parcours la rue principale bordée de superbes maisons, certaines à pignons jumelés. Je passe devant la Fontaine de l’Empereur Constantin et arrive au Pont Fortifié qui enjambe la Weiss et où on a une vue splendide. C’est là que Kaysersberg rappelle qu’il a été élu Village Préféré des Français.
Je poursuis jusqu’à Chez Roger Hassenforder. Roger n’est plus, son restaurant continue. C’est le seul endroit ouvert à cette heure. J’y prends un café en terrasse (deux euros vingt). Je me souviens bien de Roger Hassenforder, la forte tête du Tour de France (auquel je m’intéressais enfant). Au mur du couloir qui mène aux toilettes est un affichage d’articles de journaux relatant ses Tours de France. Sur l’un, une photo de Roger, allongé sur le dos, la tête entre les mains, avec en titre : « Hassenforder, meilleur comédien du Tour ».
Une courte balade dans les rues secondaires, fort belles, puis je regagne la Mairie. Je m’assois sur un banc en face des vignobles et des ruines du Château et lis Balzac. Toutes les démarches faites pour avoir de l’argent ont été couronnées d’un insuccès complet. Je constate que la plupart de celles et ceux qui vont au Château font un détour par les vignes, s’évitant les marches.
Je fus heureux à Kaysersberg lorsque j’y vins bien accompagné. Je me souviens de la visite guidée à laquelle participait comme poil à gratter Roger Siffer qui fut l’Alan Stivell alsacien dans les années Soixante-Dix. Quelques jours plus tard, nous allions le voir en concert, à Obernai je crois, un concert où on payait sa place avec une bouteille de vin. Il y en avait des centaines devant la scène. C’était un concert foutraque où, outre Roger, étaient programmés un tas d’artistes locaux, une ancienne Miss France et Cookie Dingler. Cookie entretenait la flamme. « Allez, les filles ! » et le public féminin en chœur : Etre une femme libérée, tu sais c’est pas si facile. La fille du car Fluo montre que les choses avancent lentement.
A midi, je déjeune au Kaisers’Bier (ah ah ah) d’un burgueur alsacien (donc au munster) sans frites et sans salade à treize euros et d’une tarte aux myrtilles à six euros en terrasse sous la treille puis je rentre avec le car Fluo de treize heures une.
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Ici est né le grand-cousin de Jean-Paul Sartre, Albert Schweitzer, qui le promenait quand il était petit.
10 juin 2025
Un lundi comme un dimanche sans bus F et un lundi de ciel tout bleu. J’attends le petit train Fluo terminus Metzeral de sept heures trente-deux et en descends à Turckheim. L’unique boulangerie est fermée. Je me procure chez Saveurs et Terroir deux croissants décongelés et un allongé transparent pour cinq euros quarante.
Je ne pouvais effectuer l’estomac vide la boucle dans le vignoble appelée le Sentier du Dragon (rapport à une légende locale). « Bonnes chaussures, gourde et couvre-chef conseillés ». De petites flèches ornées d’un dragon indiquent le chemin. Il débute à l’Office du Tourisme. On sort par la porte du Brand, on traverse la route et c’est tout de suite un escalier qui vous met dans le vignoble avec vue plaisante sur les cultures. Ça grimpe mais le chemin est suffisamment varié pour que ce ne soit pas trop pénible. Bientôt Turckheim est en contrebas dont dépassent le clocher de l’église et la cheminée de l’usine que l’on détruit pour construire un lotissement. Au loin sont visibles Wintzenheim et Colmar.
A une croisée de chemins m’apparaît un cerisier bien chargé. Une butte permet d’atteindre les basses branches. Je remplis ma poche droite et quand je redescends découvre un homme à trente mètres qui attache un pied de vigne. « J’ai pris quelques cerises en passant, lui dis-je. C’est grave ou pas ? » « Elles sont pas à moi », me répond-il. Lui aussi a un cerisier mais toutes ses cerises ont été mangées par les corbeaux. Il ne sait pas à qui sont celles-ci, ni si elles sont récoltées. C’est étrange qu’un vigneron ne sache pas qui est son voisin.
Juste après, on a une belle vue sur le village de Niedermorschwihr dont l’église possède l’unique clocher vrillé d’Alsace. C’est ensuite le retour. J’ai les pieds bien claqués quand je retrouve l’église. Trois kilomètres cinq, c’est le maximum que je puisse faire.
Il est neuf heures et demie. C’est pile le moment où le Restaurant de la Tour ouvre. Je suis son premier client pour un café en terrasse. Un car des croisières Viking.com charge le groupe 55 H. « Il peut aller sur l’eau, le bus ? » demande un moutard à son père. « Ah non » « Mais si, il y a un bateau dessus ». Le sourire de la Porte de France, c’est son cadran solaire. « Dans tous les hôtels, y a des départs ce matin, déplore le patron. On a le beau temps, c’est con. » Un défilé de voitures anciennes très anciennes lui redonne le sourire. Une voiture de sport passe sous la Tour et en guise de claque-sonnage pousse un hennissement. Je réserve une table pour midi.
Je fais une petite balade le long du rempart avec retour par la rue principale. Il y a des visiteurs mais peu. Chaque heure se mêlent les carillonnages de l’église et de la Mairie. Je trouve un banc au soleil près de l’Office du Tourisme, face à l’Abreuvoir (restaurant) et Au Plaisir du Veilleur (souvenirs). Au-dessus de ce dernier, un appartement en duplex est occupé par des Chinoises qui me font coucou par leurs fenêtres.
A midi, j’opte pour le saucisson en brioche salade, un quart d’edelzwicker et une part de tarte aux myrtilles. Un couple d’homos à casquettes à l’envers sympathise avec un couple d’hétéros genre garagiste et sa femme, leur point commun : un petit chien. Les casquettes à l’envers, je ne sais pas pourquoi ça m’insupporte autant. « Table deux mille », me dit la serveuse quand je vais payer. Cela fait vingt-huit euros trente pour peu de nourriture, mais la terrasse est agréable et le personnel aimable.
Je trouve un banc pour lire au soleil devant la Mairie dans un jardin où un merlou chante et deux femmes lisent déjà. La plus proche Thilliez, l’autre je ne sais pas. Balzac a encore une fois des ennuis : J’ai failli brûler comme le roi Stanislas cette nuit. En éteignant mes bougies, mon paletot en basin a pris feu, et j’ai des papiers autour de moi à un pied d’épaisseur. Le feu a pris sur moi avec une telle rapidité que j’ai eu ma chemise roussie…
Je quitte le centre de ce paisible bourg pour rejoindre, de l’autre côté de la Fecht, la Gare désaffectée afin de prendre le petit train Fluo de treize heures quarante-quatre pour Colmar qui s’arrête à Saint-Joseph.
*
Là où il y a des bicyclistes en maillot, il y a de la montée. Le « dénivelé positif », cette fixation des sportifs. Plus il est élevé, plus ils sont contents et fiers.
*
Balzac à propos d’une horloge : Ces deux chineurs l’ont eue pour 50 fr. Cela montre que le mot chineur n’est pas récent. Un mot dont j’ai horreur et que je n’emploie jamais.
Je ne pouvais effectuer l’estomac vide la boucle dans le vignoble appelée le Sentier du Dragon (rapport à une légende locale). « Bonnes chaussures, gourde et couvre-chef conseillés ». De petites flèches ornées d’un dragon indiquent le chemin. Il débute à l’Office du Tourisme. On sort par la porte du Brand, on traverse la route et c’est tout de suite un escalier qui vous met dans le vignoble avec vue plaisante sur les cultures. Ça grimpe mais le chemin est suffisamment varié pour que ce ne soit pas trop pénible. Bientôt Turckheim est en contrebas dont dépassent le clocher de l’église et la cheminée de l’usine que l’on détruit pour construire un lotissement. Au loin sont visibles Wintzenheim et Colmar.
A une croisée de chemins m’apparaît un cerisier bien chargé. Une butte permet d’atteindre les basses branches. Je remplis ma poche droite et quand je redescends découvre un homme à trente mètres qui attache un pied de vigne. « J’ai pris quelques cerises en passant, lui dis-je. C’est grave ou pas ? » « Elles sont pas à moi », me répond-il. Lui aussi a un cerisier mais toutes ses cerises ont été mangées par les corbeaux. Il ne sait pas à qui sont celles-ci, ni si elles sont récoltées. C’est étrange qu’un vigneron ne sache pas qui est son voisin.
Juste après, on a une belle vue sur le village de Niedermorschwihr dont l’église possède l’unique clocher vrillé d’Alsace. C’est ensuite le retour. J’ai les pieds bien claqués quand je retrouve l’église. Trois kilomètres cinq, c’est le maximum que je puisse faire.
Il est neuf heures et demie. C’est pile le moment où le Restaurant de la Tour ouvre. Je suis son premier client pour un café en terrasse. Un car des croisières Viking.com charge le groupe 55 H. « Il peut aller sur l’eau, le bus ? » demande un moutard à son père. « Ah non » « Mais si, il y a un bateau dessus ». Le sourire de la Porte de France, c’est son cadran solaire. « Dans tous les hôtels, y a des départs ce matin, déplore le patron. On a le beau temps, c’est con. » Un défilé de voitures anciennes très anciennes lui redonne le sourire. Une voiture de sport passe sous la Tour et en guise de claque-sonnage pousse un hennissement. Je réserve une table pour midi.
Je fais une petite balade le long du rempart avec retour par la rue principale. Il y a des visiteurs mais peu. Chaque heure se mêlent les carillonnages de l’église et de la Mairie. Je trouve un banc au soleil près de l’Office du Tourisme, face à l’Abreuvoir (restaurant) et Au Plaisir du Veilleur (souvenirs). Au-dessus de ce dernier, un appartement en duplex est occupé par des Chinoises qui me font coucou par leurs fenêtres.
A midi, j’opte pour le saucisson en brioche salade, un quart d’edelzwicker et une part de tarte aux myrtilles. Un couple d’homos à casquettes à l’envers sympathise avec un couple d’hétéros genre garagiste et sa femme, leur point commun : un petit chien. Les casquettes à l’envers, je ne sais pas pourquoi ça m’insupporte autant. « Table deux mille », me dit la serveuse quand je vais payer. Cela fait vingt-huit euros trente pour peu de nourriture, mais la terrasse est agréable et le personnel aimable.
Je trouve un banc pour lire au soleil devant la Mairie dans un jardin où un merlou chante et deux femmes lisent déjà. La plus proche Thilliez, l’autre je ne sais pas. Balzac a encore une fois des ennuis : J’ai failli brûler comme le roi Stanislas cette nuit. En éteignant mes bougies, mon paletot en basin a pris feu, et j’ai des papiers autour de moi à un pied d’épaisseur. Le feu a pris sur moi avec une telle rapidité que j’ai eu ma chemise roussie…
Je quitte le centre de ce paisible bourg pour rejoindre, de l’autre côté de la Fecht, la Gare désaffectée afin de prendre le petit train Fluo de treize heures quarante-quatre pour Colmar qui s’arrête à Saint-Joseph.
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Là où il y a des bicyclistes en maillot, il y a de la montée. Le « dénivelé positif », cette fixation des sportifs. Plus il est élevé, plus ils sont contents et fiers.
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Balzac à propos d’une horloge : Ces deux chineurs l’ont eue pour 50 fr. Cela montre que le mot chineur n’est pas récent. Un mot dont j’ai horreur et que je n’emploie jamais.
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