Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
2 août 2016
Derniers jours de soldes et je ne suis pas encore entré dans un magasin de vêtements alors que les miens, ceux qui me restent après l’abandon d’une partie de ma garde-robe à l’Hôtel Ibis Budget de Ciboure, sont obsolètes, usés, voire en lambeaux.
Je compte sur ce lundi pour faire le tour des magasins, mais c’est le jour que choisit ma boxe Internet pour m’envoyer un signal rouge de non fonctionnement, ce qui m’oblige à courir au café Le Molière avec mon ordinateur portatif. J’y trouve la tenancière au téléphone avec Orange. Sa boxe est dans le même état que la mienne. Reparti, je cherche un café qui ne soit ni en vacances, ni fermé le lundi, ni abonné à Orange et vais d’échec en échec. Le Bovary répond enfin à ces trois critères. J’y bois un café en tapotant sur mon clavier.
J’ai quand même le temps ensuite de passer par tous les magasins de vêtements pour messieurs de la rue du Gros sans trouver la veste noire qui me conviendrait. Il me reste Hache et Aime, place de la Cathédrale. On y vend une veste de djine noire dans le même genre que la mienne. Elle est ornée d’un trou neuf au niveau de l’épaule. A quoi bon l’acheter, la mienne est supérieure question trous.
Je me débrouille mieux l’après-midi quand je passe à la bouquinerie Les Mondes Magiques dont c’est la réouverture ce lundi sous l’autorité de Jérémy Dupuis. J’y trouve sans difficulté un livre à mon goût : les Œuvres complètes (romans, nouvelles, essais, correspondance) de Flannery O’Connor (Quarto/Gallimard), état neuf, huit euros au lieu de trente.
*
Le service Internet qui me manque : l’achat automatique de vêtements. Tu rentres ton budget, le nombre de sous-vêtements, chemises, pantalons, vestes et autres que tu veux recevoir par mois ou tous les deux mois, leurs caractéristiques, taille, couleur (noire pour moi), style, et hop tu reçois ça par colis. Bref, quelqu’un s’occuperait de ça à ta place.
*
A défaut, j’aimerais qu’existe une boutique qui ne vendrait que des vêtements noirs.
Je compte sur ce lundi pour faire le tour des magasins, mais c’est le jour que choisit ma boxe Internet pour m’envoyer un signal rouge de non fonctionnement, ce qui m’oblige à courir au café Le Molière avec mon ordinateur portatif. J’y trouve la tenancière au téléphone avec Orange. Sa boxe est dans le même état que la mienne. Reparti, je cherche un café qui ne soit ni en vacances, ni fermé le lundi, ni abonné à Orange et vais d’échec en échec. Le Bovary répond enfin à ces trois critères. J’y bois un café en tapotant sur mon clavier.
J’ai quand même le temps ensuite de passer par tous les magasins de vêtements pour messieurs de la rue du Gros sans trouver la veste noire qui me conviendrait. Il me reste Hache et Aime, place de la Cathédrale. On y vend une veste de djine noire dans le même genre que la mienne. Elle est ornée d’un trou neuf au niveau de l’épaule. A quoi bon l’acheter, la mienne est supérieure question trous.
Je me débrouille mieux l’après-midi quand je passe à la bouquinerie Les Mondes Magiques dont c’est la réouverture ce lundi sous l’autorité de Jérémy Dupuis. J’y trouve sans difficulté un livre à mon goût : les Œuvres complètes (romans, nouvelles, essais, correspondance) de Flannery O’Connor (Quarto/Gallimard), état neuf, huit euros au lieu de trente.
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Le service Internet qui me manque : l’achat automatique de vêtements. Tu rentres ton budget, le nombre de sous-vêtements, chemises, pantalons, vestes et autres que tu veux recevoir par mois ou tous les deux mois, leurs caractéristiques, taille, couleur (noire pour moi), style, et hop tu reçois ça par colis. Bref, quelqu’un s’occuperait de ça à ta place.
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A défaut, j’aimerais qu’existe une boutique qui ne vendrait que des vêtements noirs.
1er août 2016
Les livres lus s’empilent sur mon bureau principal, celui d’en bas où je ne suis presque jamais, que j’ai pourtant déplacé récemment dans l’espoir que j’aurais davantage envie de m’y installer, livres dont je veux noter tel et tel passage relevé en cours de lecture sur mon carnet Muji. Il me faudrait une dactylographe bénévole (pourquoi une plutôt qu’un ?).
Je m’y mets quand même ce dimanche matin, pour noter un long extrait de ce que dit Felix Hartlaub dans son journal de guerre publié chez Solin/Actes Sud sous le titre Paris 1941, pages soixante-dix et onze, de Rouen bombardée qu’il observe d’en haut (peut-être depuis la côte Sainte-Catherine).
La ville, gris-violet, peu de rouge brique. Les églises aux couleurs de toiles d’araignées. Le cuivre vert du toit du chœur de la cathédrale. Saint-Ouen sonne de toutes ses cloches, le son semble provenir de la nef de l’église, ne monte pas. Les tours se tiennent là muettes, éteintes dans leur manteau de dentelles de pierre. La Fête-Dieu a été reportée à ce dimanche. La sonnerie des cloches s’arrête sans un écho, s’abat sur les toits les plus proches. Le gros bourdon de la cathédrale continue seul en de lentes volées, mais avec un son étouffé lui aussi, souterrain, et on ne sait de laquelle des deux tours. Le quartier anéanti entre la cathédrale et le fleuve ; vu de là-haut, il se resserre en un empan de coloris roussis. Les murs extérieurs des halles sont encore debout, sur un étage, répètent sur une longue étendue toujours le même carré de fenêtres vides. Des murs de vieilles maisons à colombages, des rayures couleur noisette serrées les unes contre les autres. Les quais, qui s’étendent jusque dans la zone de décombres, à nouveau jonchés de sable jaune après l’inondation, n’ont pas encore de profil cohérent. De noires figurines du dimanche se déplacent lentement en amont et en aval du fleuve.
Le pont, traversé par de nouvelles poutrelles rouge minium, tient à peine. Plus loin, en amont du fleuve, une étroite passerelle de secours pour les piétons, tordue elle aussi. Les entrepôts peu élevés qui se trouvent sur l’île paraissent avoir été enfoncés par le simple souffle ou par l’onde de choc des explosions, ils se sont affaissés sur eux-mêmes. Des toits qui pendent jusqu'au sol, recouverts de toutes leurs tuiles, tombés dans les bosquets de sureaux des jardins du rivage.
Felix Hartlaub, soldat allemand d’occupation, non nazi et francophile, affecté auprès d’une commission d’archives au Quai d’Orsay, écrivait bien. Son Paris 1941 est essentiellement descriptif des lieux où il se trouve. Les humains y sont peu évoqués. Et dans ce cas, il s’intéresse surtout à ses semblables, montrés à la façon cruelle des dessins de George Grosz.
Il aurait pu devenir un écrivain important si, en avril mil neuf cent quarante-cinq, envoyé dans l’infanterie, il n’avait été tué alors qu’il se rendait dans une caserne de Berlin-Spandau. Son corps n’a pas été retrouvé ou n’a pas été identifié.
Je m’y mets quand même ce dimanche matin, pour noter un long extrait de ce que dit Felix Hartlaub dans son journal de guerre publié chez Solin/Actes Sud sous le titre Paris 1941, pages soixante-dix et onze, de Rouen bombardée qu’il observe d’en haut (peut-être depuis la côte Sainte-Catherine).
La ville, gris-violet, peu de rouge brique. Les églises aux couleurs de toiles d’araignées. Le cuivre vert du toit du chœur de la cathédrale. Saint-Ouen sonne de toutes ses cloches, le son semble provenir de la nef de l’église, ne monte pas. Les tours se tiennent là muettes, éteintes dans leur manteau de dentelles de pierre. La Fête-Dieu a été reportée à ce dimanche. La sonnerie des cloches s’arrête sans un écho, s’abat sur les toits les plus proches. Le gros bourdon de la cathédrale continue seul en de lentes volées, mais avec un son étouffé lui aussi, souterrain, et on ne sait de laquelle des deux tours. Le quartier anéanti entre la cathédrale et le fleuve ; vu de là-haut, il se resserre en un empan de coloris roussis. Les murs extérieurs des halles sont encore debout, sur un étage, répètent sur une longue étendue toujours le même carré de fenêtres vides. Des murs de vieilles maisons à colombages, des rayures couleur noisette serrées les unes contre les autres. Les quais, qui s’étendent jusque dans la zone de décombres, à nouveau jonchés de sable jaune après l’inondation, n’ont pas encore de profil cohérent. De noires figurines du dimanche se déplacent lentement en amont et en aval du fleuve.
Le pont, traversé par de nouvelles poutrelles rouge minium, tient à peine. Plus loin, en amont du fleuve, une étroite passerelle de secours pour les piétons, tordue elle aussi. Les entrepôts peu élevés qui se trouvent sur l’île paraissent avoir été enfoncés par le simple souffle ou par l’onde de choc des explosions, ils se sont affaissés sur eux-mêmes. Des toits qui pendent jusqu'au sol, recouverts de toutes leurs tuiles, tombés dans les bosquets de sureaux des jardins du rivage.
Felix Hartlaub, soldat allemand d’occupation, non nazi et francophile, affecté auprès d’une commission d’archives au Quai d’Orsay, écrivait bien. Son Paris 1941 est essentiellement descriptif des lieux où il se trouve. Les humains y sont peu évoqués. Et dans ce cas, il s’intéresse surtout à ses semblables, montrés à la façon cruelle des dessins de George Grosz.
Il aurait pu devenir un écrivain important si, en avril mil neuf cent quarante-cinq, envoyé dans l’infanterie, il n’avait été tué alors qu’il se rendait dans une caserne de Berlin-Spandau. Son corps n’a pas été retrouvé ou n’a pas été identifié.
29 juillet 2016
Ne connaissant de Saint-Etienne-du-Rouvray que sa salle de concert Le Rive Gauche et son parc à vide grenier Henri Barbusse, je téléphone ce mardi matin à la Mairie afin de savoir comment rejoindre le parc omnisports Gagarine où à dix-huit heures aura lieu la cérémonie d’hommage à Jacques Hamel, le prêtre assassiné. Il faut prendre le Effe Trois, me dit-on, mais avec le périmètre de sécurité, il risque d’être détourné.
L’ouverture des portes du parc étant prévue pour dix-sept heures, je choisis le bus de seize heures que j’attends au coin du pont Corneille. « Je suis le dernier à aller au parc Gagarine », me dit le chauffeur. Après, les bus seront détournés par le boulevard Industriel, loin de tout.
C’est la deuxième station mais les places assises sont déjà toutes occupées par un centre de loisirs. Je fais donc tout le voyage debout dans ce bus bientôt surchargé, non pas par des personnes allant au même endroit que moi mais par des usagers habituels dont plusieurs femmes à poussette.
Je m’en extrais à Gagarine et contourne le parc qui est cerné par les Céhéresses et des Policiers aux armes imposantes. A l’une des portes d’entrée du public, une dame me montre la rue qui me permettra à l’issue de rejoindre le lointain métro.
Ce sont les vigiles d’Universal Security, habitués des concerts, qui sont chargés du palpage, et ils le font jusqu’aux chaussettes. La scène est aussi celle des gros concerts en plein air. S’y trouvent des rangées de chaises, un micro et le portrait de Jacques Hamel sur un chevalet. Plutôt que de m’approcher, je choisis de rester en arrière contre un platane avec vue sur l’ensemble du site, dont la plate-forme où sont installées les caméras des télés. D’autres porteuses ou porteurs de caméras et micros se baladent dans la foule des arrivants, fondant sur l’une ou sur l’un, avec une petite préférence pour qui semble musulman.
Celle qui finit par m’aborder n’a ni caméra ni micro, mais un carnet et un stylo. Cette jeune personne travaille pour le site de la télé publique, si je comprends bien. Je lui dis que je n’ai rien d’original à lui dire mais que je veux bien lui parler quand même. Il lui faut mon prénom et mon âge. Je réponds à ses questions puis c’est elle qui me raconte ce qu’elle ressent. Elle était à Nice et là-bas l’atmosphère est irrespirable, rien à voir avec ici où des personnes de toutes les origines sont réunies paisiblement. Cela va lui faire du bien d’écrire sur cet hommage.
-En ce moment, on a tous besoin d’un peu d’espoir, lui dis-je.
-Oui, me dit-elle et reprenant son stylo, je le note.
Plusieurs milliers de personnes sont présentes quand retentit le Requiem de Mozart, tout un peuple d’habitants de quartiers populaires. Quelques-uns sont restés à l’extérieur, appuyés aux grilles. Les Céhéresses les font reculer d’un mètre derrière un cordon rouge et blanc établi grâce à une rangée de platanes. Des politiciens et des autorités diverses s’installent sur la scène, rejoints par les représentants des cultes.
Hubert Wulfranc Maire de Saint-Etienne-du-Rouvray, Communiste, trouve les bons mots pour évoquer Jacques Hamel, son assassinat, le traumatisme vécu par les trois religieuses (qui sont présentes) et le couple de paroissiens (l’homme grièvement blessé est âgé de quatre-vingt-six ans). Il parle avec détermination, précision et émotion (je n’aime pas ce mot mais n’en ai pas d’autre), donne des pistes pour le futur, dans sa ville et au-delà. Il est très applaudi.
L’Archevêque de Rouen lui succède, mieux inspiré que lors de sa déclaration de Cracovie. Son propos n’étant pas uniquement tourné vers ceux qui croient, je peux me joindre aux applaudissements.
C’est ensuite la minute de silence puis retentit cette Marseillaise que je déteste et dont les paroles vont à l’encontre de ce qui a été dit précédemment.
-Courage. La cérémonie est terminée, déclare enfin Hubert Wulfranc.
J’imagine qu’il lui en faut à lui aussi, à lui surtout. Quelle vie doit être la sienne depuis ce mardi matin.
A la sortie, un homme en souhaite également à un Céhéresse qui lui répond d’un sourire. Muni de mon plan, je marche seul dans un quartier pavillonnaire, passe au bout de la rue Jacques Brel qui mène à un Centre Socioculturel Georges Brassens, longe des entreprises disséminées dans la forêt et au bout d’une demi-heure atteins la station de métro Technopôle, prochain départ dans quatre minutes.
*
« En ce moment, on a tous besoin d’un peu d’espoir. » (Michel, soixante-cinq ans)
L’ouverture des portes du parc étant prévue pour dix-sept heures, je choisis le bus de seize heures que j’attends au coin du pont Corneille. « Je suis le dernier à aller au parc Gagarine », me dit le chauffeur. Après, les bus seront détournés par le boulevard Industriel, loin de tout.
C’est la deuxième station mais les places assises sont déjà toutes occupées par un centre de loisirs. Je fais donc tout le voyage debout dans ce bus bientôt surchargé, non pas par des personnes allant au même endroit que moi mais par des usagers habituels dont plusieurs femmes à poussette.
Je m’en extrais à Gagarine et contourne le parc qui est cerné par les Céhéresses et des Policiers aux armes imposantes. A l’une des portes d’entrée du public, une dame me montre la rue qui me permettra à l’issue de rejoindre le lointain métro.
Ce sont les vigiles d’Universal Security, habitués des concerts, qui sont chargés du palpage, et ils le font jusqu’aux chaussettes. La scène est aussi celle des gros concerts en plein air. S’y trouvent des rangées de chaises, un micro et le portrait de Jacques Hamel sur un chevalet. Plutôt que de m’approcher, je choisis de rester en arrière contre un platane avec vue sur l’ensemble du site, dont la plate-forme où sont installées les caméras des télés. D’autres porteuses ou porteurs de caméras et micros se baladent dans la foule des arrivants, fondant sur l’une ou sur l’un, avec une petite préférence pour qui semble musulman.
Celle qui finit par m’aborder n’a ni caméra ni micro, mais un carnet et un stylo. Cette jeune personne travaille pour le site de la télé publique, si je comprends bien. Je lui dis que je n’ai rien d’original à lui dire mais que je veux bien lui parler quand même. Il lui faut mon prénom et mon âge. Je réponds à ses questions puis c’est elle qui me raconte ce qu’elle ressent. Elle était à Nice et là-bas l’atmosphère est irrespirable, rien à voir avec ici où des personnes de toutes les origines sont réunies paisiblement. Cela va lui faire du bien d’écrire sur cet hommage.
-En ce moment, on a tous besoin d’un peu d’espoir, lui dis-je.
-Oui, me dit-elle et reprenant son stylo, je le note.
Plusieurs milliers de personnes sont présentes quand retentit le Requiem de Mozart, tout un peuple d’habitants de quartiers populaires. Quelques-uns sont restés à l’extérieur, appuyés aux grilles. Les Céhéresses les font reculer d’un mètre derrière un cordon rouge et blanc établi grâce à une rangée de platanes. Des politiciens et des autorités diverses s’installent sur la scène, rejoints par les représentants des cultes.
Hubert Wulfranc Maire de Saint-Etienne-du-Rouvray, Communiste, trouve les bons mots pour évoquer Jacques Hamel, son assassinat, le traumatisme vécu par les trois religieuses (qui sont présentes) et le couple de paroissiens (l’homme grièvement blessé est âgé de quatre-vingt-six ans). Il parle avec détermination, précision et émotion (je n’aime pas ce mot mais n’en ai pas d’autre), donne des pistes pour le futur, dans sa ville et au-delà. Il est très applaudi.
L’Archevêque de Rouen lui succède, mieux inspiré que lors de sa déclaration de Cracovie. Son propos n’étant pas uniquement tourné vers ceux qui croient, je peux me joindre aux applaudissements.
C’est ensuite la minute de silence puis retentit cette Marseillaise que je déteste et dont les paroles vont à l’encontre de ce qui a été dit précédemment.
-Courage. La cérémonie est terminée, déclare enfin Hubert Wulfranc.
J’imagine qu’il lui en faut à lui aussi, à lui surtout. Quelle vie doit être la sienne depuis ce mardi matin.
A la sortie, un homme en souhaite également à un Céhéresse qui lui répond d’un sourire. Muni de mon plan, je marche seul dans un quartier pavillonnaire, passe au bout de la rue Jacques Brel qui mène à un Centre Socioculturel Georges Brassens, longe des entreprises disséminées dans la forêt et au bout d’une demi-heure atteins la station de métro Technopôle, prochain départ dans quatre minutes.
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« En ce moment, on a tous besoin d’un peu d’espoir. » (Michel, soixante-cinq ans)
28 juillet 2016
En chemin pour Paris, dans un train au ralenti, pour mon habituelle escapade du mercredi, je me réjouis par avance d’y retrouver celle qui me tenait la main. Nous avons rendez-vous à onze heures dans le Book-Off de Ledru-Rollin.
Elle y arrive même avant, alors que je n’ai que quatre livres dans mon panier. Nous furetons encore un peu dans la librairie puis mettons le cap sur le marché d’Aligre où elle cherche aussi des livres pour elle, sans succès.
Après un café au Centreville, au bout d’une rue sous particulière protection policière, elle m’invite Chez Céleste.
Nous choisissons une table isolée, à l’intérieur, afin de pourvoir parler tranquillement tout en dégustant accras et petits boudins puis un poisson dont j’ai oublié le nom (pour elle) et des lasagnes de la maison (pour moi).
Le temps lui est compté, comme toujours. Elle a un rendez-vous de travail à quatorze heures. Je la raccompagne jusqu’à son vélo. « Demain sera plus dur », me dit-elle. Elle ira débrouiller une histoire de plafond écroulé dans une ville picarde où nous fûmes ensemble autrefois.
*
Dans le train du retour, je lis l’un des livres achetés chez Book-Off, dont le titre me fait songer à celle avec qui j’ai déjeuné : En bonne compagnie d’André Fraigneau (Le Dilettante). Sa bonne compagnie à lui est celle des écrivains et artistes qu’il a côtoyés dans ses fonctions de critique et de producteur d’émissions de radio. Les portraits qu’il en fait sont assez banals. Le seul chapitre un peu excitant est celui où il narre sa visite audacieuse aux trois veuves de David Herbert Lawrence à Taos au Nouveau-Mexique.
*
Le concert final des Terrasses du Jeudi rouennaises maintenu mais sévèrement emmuré, ceux de la rive droite devant les cafés sont maintenant supprimés. Cela ôte à chacun(e) la possibilité de choisir d’y aller ou non. Ceux qui commandent nous infantilisent plus que jamais.
De même, la marche d’hommage au prêtre assassiné qui devait relier ce jeudi la Mairie à l’Eglise de Saint-Etienne-du-Rouvray est interdite. Un rassemblement organisé par la Mairie et l’Archevêché dans le parc omnisports Youri Gagarine la remplacera, où je compte aller néanmoins.
Elle y arrive même avant, alors que je n’ai que quatre livres dans mon panier. Nous furetons encore un peu dans la librairie puis mettons le cap sur le marché d’Aligre où elle cherche aussi des livres pour elle, sans succès.
Après un café au Centreville, au bout d’une rue sous particulière protection policière, elle m’invite Chez Céleste.
Nous choisissons une table isolée, à l’intérieur, afin de pourvoir parler tranquillement tout en dégustant accras et petits boudins puis un poisson dont j’ai oublié le nom (pour elle) et des lasagnes de la maison (pour moi).
Le temps lui est compté, comme toujours. Elle a un rendez-vous de travail à quatorze heures. Je la raccompagne jusqu’à son vélo. « Demain sera plus dur », me dit-elle. Elle ira débrouiller une histoire de plafond écroulé dans une ville picarde où nous fûmes ensemble autrefois.
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Dans le train du retour, je lis l’un des livres achetés chez Book-Off, dont le titre me fait songer à celle avec qui j’ai déjeuné : En bonne compagnie d’André Fraigneau (Le Dilettante). Sa bonne compagnie à lui est celle des écrivains et artistes qu’il a côtoyés dans ses fonctions de critique et de producteur d’émissions de radio. Les portraits qu’il en fait sont assez banals. Le seul chapitre un peu excitant est celui où il narre sa visite audacieuse aux trois veuves de David Herbert Lawrence à Taos au Nouveau-Mexique.
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Le concert final des Terrasses du Jeudi rouennaises maintenu mais sévèrement emmuré, ceux de la rive droite devant les cafés sont maintenant supprimés. Cela ôte à chacun(e) la possibilité de choisir d’y aller ou non. Ceux qui commandent nous infantilisent plus que jamais.
De même, la marche d’hommage au prêtre assassiné qui devait relier ce jeudi la Mairie à l’Eglise de Saint-Etienne-du-Rouvray est interdite. Un rassemblement organisé par la Mairie et l’Archevêché dans le parc omnisports Youri Gagarine la remplacera, où je compte aller néanmoins.
27 juillet 2016
« Avec tout ce qui s’passe », « Maintenant, c’est près de chez nous », « C’est même chez nous », tels sont les mots automatiquement prononcés par celles et ceux qui dans les rues de Rouen parlent de l’assassinat par égorgement de Jacques Hamel, le vieux prêtre de Saint-Etienne-du-Rouvray, commune de la banlieue, ce mardi. Il y a aussi ce qu’on ne dit pas, qui s’exprime dans le silence qui suit.
Suite à l’attaque au camion de Nice et avant qu’ait eu lieu ce nouvel acte de barbarie islamo fasciste, les organisateurs des Terrasses du Jeudi rouennaises communiquaient :
« En raison de l’état d’urgence, la sécurité sur la place des Emmurées sera renforcée ce jeudi 28 juillet pour le concert de clôture des Terrasses du Jeudi. Des palpations et fouilles auront lieu à l’entrée du site, prévoyez donc un délai en cas d’affluence. D’autre part, les bouteilles (verre, plastique) ne seront pas autorisées sur le lieu du concert, et le stationnement ainsi que la circulation seront limités aux abords de la place. »
La place des Emmurées va à nouveau mériter son nom. Je n’y serai pas, non par crainte mais parce que de telles mesures, pourtant justifiées, m’enlèvent l’envie d’aller écouter de la musique.
S’il ne pleut pas ce jeudi soir je serai dans le jardin et y poursuivrai la lecture de la biographie de Marcel Duchamp écrite par Bernard Marcadé pour Flammarion.
Calme jardin, on y entend le chant des oiseaux et une voisine qui s’exerce au piano.
*
« De Cracovie, j'apprends la tuerie advenue ce matin à l'église de Saint-Etienne-du-Rouvray. Elle fait trois victimes : le prêtre, le père Jacques Hamel, 84 ans, et les auteurs de l'assassinat. »
Hallucinante déclaration écrite de l'Archevêque de Rouen, Dominique Lebrun qui met sur le même plan (tous des victimes) l’assassiné et les tueurs.
*
« En raison de l’état d’urgence, la sécurité sur la place des Emmurées sera renforcée ».
Étrange formulation. C’est en raison des risques d’attentats islamiques.
Suite à l’attaque au camion de Nice et avant qu’ait eu lieu ce nouvel acte de barbarie islamo fasciste, les organisateurs des Terrasses du Jeudi rouennaises communiquaient :
« En raison de l’état d’urgence, la sécurité sur la place des Emmurées sera renforcée ce jeudi 28 juillet pour le concert de clôture des Terrasses du Jeudi. Des palpations et fouilles auront lieu à l’entrée du site, prévoyez donc un délai en cas d’affluence. D’autre part, les bouteilles (verre, plastique) ne seront pas autorisées sur le lieu du concert, et le stationnement ainsi que la circulation seront limités aux abords de la place. »
La place des Emmurées va à nouveau mériter son nom. Je n’y serai pas, non par crainte mais parce que de telles mesures, pourtant justifiées, m’enlèvent l’envie d’aller écouter de la musique.
S’il ne pleut pas ce jeudi soir je serai dans le jardin et y poursuivrai la lecture de la biographie de Marcel Duchamp écrite par Bernard Marcadé pour Flammarion.
Calme jardin, on y entend le chant des oiseaux et une voisine qui s’exerce au piano.
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« De Cracovie, j'apprends la tuerie advenue ce matin à l'église de Saint-Etienne-du-Rouvray. Elle fait trois victimes : le prêtre, le père Jacques Hamel, 84 ans, et les auteurs de l'assassinat. »
Hallucinante déclaration écrite de l'Archevêque de Rouen, Dominique Lebrun qui met sur le même plan (tous des victimes) l’assassiné et les tueurs.
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« En raison de l’état d’urgence, la sécurité sur la place des Emmurées sera renforcée ».
Étrange formulation. C’est en raison des risques d’attentats islamiques.
26 juillet 2016
Aguiché par une météo prévoyant un lundi au soleil, j’ai pris samedi un billet de train pour Dieppe et me voici au matin remontant la rue de la Jeanne sous un ciel gris et quelques gouttes après qu’il a plu dans la nuit.
Ce train pour Dieppe est caché voie huit. Il est tout neuf, muni d’écrans indiquant où l’on en est du trajet comme dans un avion. Un groupe de moutards étonnamment calmes me tient compagnie. A l’arrivée, le contrôleur dit au revoir à chacun comme à la descente d’un bateau.
Les bateaux sont là dans le port mais peu visibles car c’est marée basse. Je longe ceux des pêcheurs et, passant devant l’Office de Tourisme, y entre poser une question dont je connais par avance la réponse :
-Avez-vous une documentation sur Dieppe et les écrivains ?
C’est pourtant le seul endroit où Céline et Cioran étaient capables de venir en vacances, et nombreux sont ceux qui sont passés par ici, Faulkner y fut même arrêté pour vagabondage.
Après un café au Tout Va Bien et le temps s’améliorant, je vais voir la plage quasi déserte puis marche jusqu’au bout de la jetée, laquelle est colonisée par les pêcheurs. Une forte odeur d’urine justifie la pancarte « Défense d’uriner ». Là, je fais quelques photos des brise-lames de béton ajouré.
A midi, délaissant les restaurants à touristes, je déjeune à L’Espérance d’un menu à dix euros soixante-dix : assiette de buffet, langue sauce provençale accompagnée de frites de la maison, creumebeule aux pommes, avec une demie de sauvignon à cinq cinquante et vue sur le port derrière les voitures. J’y côtoie quelques employés solitaires, deux uniformes des Affaires Maritimes et un trio père mère fille. C’est bien bon et le service est aimable.
Pour le café, le temps devenu beau et pas trop chaud, je vise Le Mieux Ici Qu’En Face du Pollet mais cette taverne est fermée. Je me rabats sur l’intérieur de la ville et le prends à la terrasse du Brazza, sur la place de l’église Saint-Rémy autour de laquelle s’activent des chasseurs de Pokémon dont deux montés sur roulettes électriques (« On devient de plus en plus dingos », commente la serveuse). J’y lis, publié par Solin/Actes Sud, Paris 1941, le journal de Felix Hartlaub (qui fut soldat d’occupation francophile et mourut à Berlin en mil neuf cent quarante-cinq).
Rejoignant la gare pour y prendre le train de seize heures, je croise le seul Dieppois que je connaisse, en élégante tenue estivale et avec sa compagne. Nous échangeons quelques mots (sa peinture, mes écritures, nos lieux de vie) et nous nous invitons réciproquement à passer à l’occasion.
*
Un garçon de café du Tout Va Bien : « Le soir Dieppe c’est comme une île déserte, il fait froid à partir de six heures, six heures et demie. »
*
Avant le départ du train pour Rouen :
Un moutard et sa tante se séparant, des « je t’aime » et des « tu vas me manquer » à n’en plus finir et à n’y pas croire.
Une femme à une autre restée sur le quai : « L’argent est toujours planqué dans le livre Tous les chiens, tous les chats. »
Ce train pour Dieppe est caché voie huit. Il est tout neuf, muni d’écrans indiquant où l’on en est du trajet comme dans un avion. Un groupe de moutards étonnamment calmes me tient compagnie. A l’arrivée, le contrôleur dit au revoir à chacun comme à la descente d’un bateau.
Les bateaux sont là dans le port mais peu visibles car c’est marée basse. Je longe ceux des pêcheurs et, passant devant l’Office de Tourisme, y entre poser une question dont je connais par avance la réponse :
-Avez-vous une documentation sur Dieppe et les écrivains ?
C’est pourtant le seul endroit où Céline et Cioran étaient capables de venir en vacances, et nombreux sont ceux qui sont passés par ici, Faulkner y fut même arrêté pour vagabondage.
Après un café au Tout Va Bien et le temps s’améliorant, je vais voir la plage quasi déserte puis marche jusqu’au bout de la jetée, laquelle est colonisée par les pêcheurs. Une forte odeur d’urine justifie la pancarte « Défense d’uriner ». Là, je fais quelques photos des brise-lames de béton ajouré.
A midi, délaissant les restaurants à touristes, je déjeune à L’Espérance d’un menu à dix euros soixante-dix : assiette de buffet, langue sauce provençale accompagnée de frites de la maison, creumebeule aux pommes, avec une demie de sauvignon à cinq cinquante et vue sur le port derrière les voitures. J’y côtoie quelques employés solitaires, deux uniformes des Affaires Maritimes et un trio père mère fille. C’est bien bon et le service est aimable.
Pour le café, le temps devenu beau et pas trop chaud, je vise Le Mieux Ici Qu’En Face du Pollet mais cette taverne est fermée. Je me rabats sur l’intérieur de la ville et le prends à la terrasse du Brazza, sur la place de l’église Saint-Rémy autour de laquelle s’activent des chasseurs de Pokémon dont deux montés sur roulettes électriques (« On devient de plus en plus dingos », commente la serveuse). J’y lis, publié par Solin/Actes Sud, Paris 1941, le journal de Felix Hartlaub (qui fut soldat d’occupation francophile et mourut à Berlin en mil neuf cent quarante-cinq).
Rejoignant la gare pour y prendre le train de seize heures, je croise le seul Dieppois que je connaisse, en élégante tenue estivale et avec sa compagne. Nous échangeons quelques mots (sa peinture, mes écritures, nos lieux de vie) et nous nous invitons réciproquement à passer à l’occasion.
*
Un garçon de café du Tout Va Bien : « Le soir Dieppe c’est comme une île déserte, il fait froid à partir de six heures, six heures et demie. »
*
Avant le départ du train pour Rouen :
Un moutard et sa tante se séparant, des « je t’aime » et des « tu vas me manquer » à n’en plus finir et à n’y pas croire.
Une femme à une autre restée sur le quai : « L’argent est toujours planqué dans le livre Tous les chiens, tous les chats. »
25 juillet 2016
Voici ce samedi la porte de la copropriété en passe de devenir un véritable tableau d’affichage. Sous mon adresse au voisinage, « un début de réponse » signé « les voisines ». Je résume : attention danger, ce monsieur raconte toute la vie de la copropriété sur Internet, il pratique la diffamation et il a des problèmes avec tout le monde.
La technique n’est pas neuve de répondre à autre chose qu’à la question posée et de faire passer celui qui la pose pour l’emmerdeur de service avec qui tout le monde est fâché.
Je ne raconte pas toute la vie de la copropriété et je ne pratique pas la diffamation. J’évoque essentiellement ce que d’aucuns appellent des incivilités et chacun peut les constater comme moi. Par ailleurs, j’ai des rapports banalement ordinaires avec la très grande majorité de mes voisin(e)s.
Le meilleur est pour la fin où l’on indique avoir prévenu le syndic et ma propriétaire de mes agissements. Je suis dans les meilleurs termes avec cette dernière, il m’étonnerait qu’elle veuille me mettre à la porte. À ma connaissance, le règlement de copropriété n’interdit pas l’écriture.
Un autre mot apparaît sur la porte : celui d’un locataire confirmant mes propos, et dont il m’a envoyé copie par mail (c’est à lui que je dois mon titre du jour). Et je sais que d’autres sont également excédés par le bruit quotidien d’Aboyus (et de ses propriétaires) mais n’osent se plaindre ouvertement.
Il est aussi des locataires qui sont arrivés dans la copropriété après ce chien et qui, n’ayant connu que ça, ne peuvent pas imaginer le calme antérieur. Mon petit mot sur la porte leur aura peut-être ouvert les oreilles.
S’ils ont eu le temps de le lire car dans la nuit de samedi à dimanche une main (in)connue a tout arraché, rendant à la porte sa fonction de porte.
*
Rue Saint-Romain, samedi matin, à la place du vrai faux mendiant baratineur, qui du coup s’est réfugié à l’autre bout, un homme qui lui a l’air d’être vraiment dans le besoin. Sa sébile est entre les pattes d’un ours en peluche porteur d’un écriteau : « Seule la faim justifie ce moyen ». Je lui donne une pièce bien qu’il ait de mauvaises lectures (Musso).
La veille, autre quémandeur à la terrasse du Son du Cor, un poète à la Cyrano qui déroule son compliment à une demoiselle à casquette à l’envers la félicitant à la fin de sa tirade de la spontanéité avec laquelle sa main se dirige vers son porte-monnaie. Elle ne peut que donner.
La technique n’est pas neuve de répondre à autre chose qu’à la question posée et de faire passer celui qui la pose pour l’emmerdeur de service avec qui tout le monde est fâché.
Je ne raconte pas toute la vie de la copropriété et je ne pratique pas la diffamation. J’évoque essentiellement ce que d’aucuns appellent des incivilités et chacun peut les constater comme moi. Par ailleurs, j’ai des rapports banalement ordinaires avec la très grande majorité de mes voisin(e)s.
Le meilleur est pour la fin où l’on indique avoir prévenu le syndic et ma propriétaire de mes agissements. Je suis dans les meilleurs termes avec cette dernière, il m’étonnerait qu’elle veuille me mettre à la porte. À ma connaissance, le règlement de copropriété n’interdit pas l’écriture.
Un autre mot apparaît sur la porte : celui d’un locataire confirmant mes propos, et dont il m’a envoyé copie par mail (c’est à lui que je dois mon titre du jour). Et je sais que d’autres sont également excédés par le bruit quotidien d’Aboyus (et de ses propriétaires) mais n’osent se plaindre ouvertement.
Il est aussi des locataires qui sont arrivés dans la copropriété après ce chien et qui, n’ayant connu que ça, ne peuvent pas imaginer le calme antérieur. Mon petit mot sur la porte leur aura peut-être ouvert les oreilles.
S’ils ont eu le temps de le lire car dans la nuit de samedi à dimanche une main (in)connue a tout arraché, rendant à la porte sa fonction de porte.
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Rue Saint-Romain, samedi matin, à la place du vrai faux mendiant baratineur, qui du coup s’est réfugié à l’autre bout, un homme qui lui a l’air d’être vraiment dans le besoin. Sa sébile est entre les pattes d’un ours en peluche porteur d’un écriteau : « Seule la faim justifie ce moyen ». Je lui donne une pièce bien qu’il ait de mauvaises lectures (Musso).
La veille, autre quémandeur à la terrasse du Son du Cor, un poète à la Cyrano qui déroule son compliment à une demoiselle à casquette à l’envers la félicitant à la fin de sa tirade de la spontanéité avec laquelle sa main se dirige vers son porte-monnaie. Elle ne peut que donner.
23 juillet 2016
Effet positif des vacances d’été, plus d’Aboyus depuis mercredi. Cela fait des vacances à ceux qui ne partent pas et mérite que j’affiche mon contentement :
« Cher(e)s voisin(e)s
Ce petit mot sur la porte n’a pas pour but de vous avertir d’une fête qui fera du bruit que l’on s’autorise en s’en excusant par avance.
Bien au contraire.
Quel calme au jardin depuis quelques jours, avez-vous remarqué ?
C’est que l’animal aboyeur est en vacances.
Profitez-en bien, cela ne va pas durer.
Au fait, saviez-vous que le règlement de copropriété interdit la possession d’un « animal criard » (étonnant non ?), mais nul n’a le pouvoir de faire qu’un(e) propriétaire le respecte.
Bon été à vous. »
Cela me vaut, quand je la croise dans la venelle, un regard noir de la voisine devenue amie avec les propriétaires de l’animal criard. La même qui il y a plusieurs années se plaignait des aboiements d’un chien dans la petite maison d’à côté, lequel faisait bien moins de bruit et beaucoup moins souvent qu’Aboyus.
*
Rouen, restaurant Sushi Tokyo, rue Verte, vendredi midi :
-Demain matin, papa y fait les travaux et puis l’après-midi, on jouera à Pokémon Go.
Il étudie la liste des fournitures scolaires de sa fille :
-Un stylo bleu. Un stylo rouge. Deux stylos verts. Pourquoi deux ?
Il porte un ticheurte David Bowie.
« Cher(e)s voisin(e)s
Ce petit mot sur la porte n’a pas pour but de vous avertir d’une fête qui fera du bruit que l’on s’autorise en s’en excusant par avance.
Bien au contraire.
Quel calme au jardin depuis quelques jours, avez-vous remarqué ?
C’est que l’animal aboyeur est en vacances.
Profitez-en bien, cela ne va pas durer.
Au fait, saviez-vous que le règlement de copropriété interdit la possession d’un « animal criard » (étonnant non ?), mais nul n’a le pouvoir de faire qu’un(e) propriétaire le respecte.
Bon été à vous. »
Cela me vaut, quand je la croise dans la venelle, un regard noir de la voisine devenue amie avec les propriétaires de l’animal criard. La même qui il y a plusieurs années se plaignait des aboiements d’un chien dans la petite maison d’à côté, lequel faisait bien moins de bruit et beaucoup moins souvent qu’Aboyus.
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Rouen, restaurant Sushi Tokyo, rue Verte, vendredi midi :
-Demain matin, papa y fait les travaux et puis l’après-midi, on jouera à Pokémon Go.
Il étudie la liste des fournitures scolaires de sa fille :
-Un stylo bleu. Un stylo rouge. Deux stylos verts. Pourquoi deux ?
Il porte un ticheurte David Bowie.
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