Le Journal de Michel Perdrial
Le Journal de Michel Perdrial



Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.







Rss

Céline au Havre raconté par Lucette Destouches

26 avril 2018


Dans D’un Céline l’autre (Bouquins/Laffont), je retrouve l’entretien de Lucette Destouches avec Daniel Rondeau. Il parut dans Libération le vendredi vingt-cinq octobre mil neuf cent quatre-vingt-cinq. A cette époque, j’y étais abonné. Je le lisais pendant la récréation à l’école du Bec-Hellouin. La femme de l’écrivain y parle entre autre de leurs escapades havraises :
« J’ai vécu en courant derrière lui, toujours, je marchais dans son ombre. Il fallait toujours qu’il bouge. On allait souvent à Saint-Malo ou au Havre. On avait une chambre de bonne en permanence au Frescaty. Je m’amusais beaucoup. On était tout seul là-dedans. C’était comme un énorme bateau. Il allait là pour s’enfermer. Il avait le port. Il voyait les bateaux. Là, oui, on avait quelques plaisirs. On se baladait le soir pour regarder les abeilles. Les abeilles, ce sont les petits bateaux-moteurs, les remorqueurs qui vont chercher les gros qui arrivent. Ça le passionnait. Il restait à regarder ces va-et-vient, ces bateaux-moteurs qui étaient là comme des chiens, comme des grosses bêtes qui allaient chercher les paquebots. Il m’expliquait tout ce qui se passait. Il était plongé là-dedans. Il oubliait tout pour la mer, pour les bateaux, là, c’était fini. Il s’asseyait à la terrasse d’un bistrot. Sa grande distraction, c’était de prendre un café-crème avec des brioches, parce que le reste du temps, il ne mangeait pas beaucoup et c’est là qu’il avalait facilement dix brioches. On faisait un tour d’une demi-heure, puis il rentrait. (…) Où qu’il soit, il n’était jamais en vacances. Simplement là, à Saint-Malo ou au Havre, il respirait un peu mieux. »
                                                           *
Une note infrapaginale de cet épais recueil de témoignages offre un scoop au lecteur. Parmi les Français que Céline a soignés à Sigmaringen : Philippe Druillet.
Son père était responsable de la Milice dans le Gers. Sa mère en épousant son père était devenue une fasciste fanatique. Lui est né le vingt-huit juillet mil neuf cent quarante-quatre à Toulouse. Quelques jours plus tard, ses parents fuyaient en direction de l’Allemagne. Son père y rencontra Céline avec qui il sympathisa. Sa mère lui a raconté que Céline avait pris soin de lui alors qu’il n’était qu’un nourrisson.
                                                        *
Parmi les visiteurs du vingt-cinq ter route des Gardes à Meudon, le duo William Burroughs et Allen Ginsberg. C’était en mil neuf cent cinquante-huit. Le second en fera un poème, Ignu, publié dans le recueil intitulé Kaddish (Christian Bourgois), lequel commence ainsi :
Céline lui-même vieil ignu au-delà de la prose
Je l’ai vu à Paris sale vieux bonhomme au langage
          décousu
sa toux intellectuelle et trois chandails vermoulus autour
         de son cou
moisissures brunes sous ses ongles historiques
                                                        *
Lucette Destouches vit toujours à Meudon, cent cinq ans, cent six le vingt juillet prochain si tout va bien. La veuve de Céline doyenne des Français, ça aurait de la gueule.