Le Journal de Michel Perdrial
Le Journal de Michel Perdrial



Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.







Rss

En lisant le Journal d’Andy Warhol (dix)

11 février 2017


Suite des prélèvements effectués lors de ma lecture du Journal d’Andy Warhol (Grasset) :
Je ne comprends pas pourquoi je n’ai jamais touché un rond sur le premier disque du Velvet Underground. Ce disque se vend vraiment bien et c’est moi qui l’ai produit ! Est-ce que je n’ai pas droit à quelque chose ? Je n’ai droit à rien ? Et je n’arrive pas non plus à comprendre à quel moment j’ai cessé de plaire à Lou. Il est allé jusqu’à s’acheter deux teckels comme moi, et après ça il s’est mis à ne plus m’aimer, mais je ne sais pas exactement pourquoi ni quand. (Mercredi vingt-quatre avril mil neuf cent quatre-vingt-cinq)
Putain, quand je pense que Madonna était simple serveuse au Lucky Strike il y a un an. (Jeudi huit mai mil neuf cent quatre-vingt-cinq)
J’ai cassé un truc et je me suis rendu compte que je devais casser quelque chose une fois par semaine pour ne pas perdre de vue la fragilité de l’existence. (Mardi vingt-neuf octobre mil neuf cent quatre-vingt-cinq)
Tous ces types pleins aux as, chics, smoking, avec ces filles magnifiques. Moi, j’avais l’air de sortir d’une poubelle. Ils ont servi du caviar à pleins baquets. J’ai tout mangé parce que j’étais angoissé. (Lundi dix-huit novembre mil neuf cent quatre-vingt-cinq)
Je crois que j’ai oublié de parler de cette fille que j’ai vue au coin de la 57e et de Park : elle s’est complètement déshabillée et elle a pissé en pleine rue avant de se rhabiller et de repartir. Devant ce magasin de valises où je ne vois jamais personne. L’angle sud-ouest, tu sais ? Tout le monde a fait comme si de rien n’était. Elle portait des talons hauts. (Mardi vingt et un janvier mil neuf cent quatre-vingt-six)
Suis allé faire un tour chez Bernsohn et je n’ai pas été déçu du voyage. Il m’a serré dans ses bras et m’a demandé si quelqu’un m’avait déjà fait ça, j’ai dit que non. Mais je ne lui ai pas dit que je ne voulais pas qu’on me prenne dans ses bras. (Vendredi vingt-cinq avril mil neuf cent quatre-vingt-six)
Fred m’a raconté que le gâteau d’anniversaire des Thurn und Taxis était à l’ancienne mode, style années 70 –avec des centaines de bites dessus. Chacun a eu la sienne. (Dimanche quinze juin mil neuf cent quatre-vingt-six)
(…) et le directeur de tournée a bien aimé la mère de Paulina, la petite amie de Ric Ocasek, alors elle lui a donné son adresse. C’est un Indien. Paulina a dit : « Il faut qu’on s’arrange pour que ma mère se fasse mettre avant qu’elle quitte New York. » (Jeudi dix-sept juillet mil neuf cent quatre-vingt-six)
Là où j’ai vraiment compris que ça allait mal tourner, c’est quand j’ai offert de payer l’addition et que Steven Greenberg ne m’a pas arrêté dans mon élan. (dîner $300). (Mardi vingt-neuf juillet mil neuf cent quatre-vingt-six)
                                                                     *
Dans cette période, il y a aussi le mercredi trente octobre mil neuf cent quatre-vingt-cinq, le jour où mon pire cauchemar s’est réalisé. Un évènement qu’il ne peut raconter que le deux novembre à Pat Hackett, sa copiste.
Alors qu’il signait des exemplaires d’America dans la librairie Rizzoli à Soho, une fille tellement jolie et tellement bien habillée lui arrache sa perruque et l’envoie par-dessus la balustrade (un complice s’enfuit avec le butin) :
Je ne sais pas ce qui m’a retenu de la pousser par-dessus la balustrade.
Pat Hackett explique qu’Andy a continué à signer ses livres, protégé par la capuche de son manteau Calvin Klein.