Le Journal de Michel Perdrial

Le Journal de Michel Perdrial




Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.







Rss

20 juillet 2016


Il faut quand même que j’y aille, voir cette exposition Scènes de la vie impressionniste au Musée des Beaux-Arts de Rouen, et je choisis ce lundi. Un peu avant dix heures, je suis devant la porte en compagnie d’une dizaine de touristes. Fini le temps où pour l’opération fabiusienne Normandie Impressionniste des guichets étaient établis à l’extérieur du Musée dans l’espoir d’une foule de visiteurs. L’édition deux mille seize se fait discrète.
-Nous participons à la minute de silence à midi, si vous êtes encore là, m’informe la caissière à qui je paie onze euros.
Suivant ma pratique habituelle, je laisse les premières salles aux autres arrivants et me trouve seul dans les salles suivantes, constatant que les Monet, Manet, Morisot, Caillebotte, Vuillard montrés, ce sont surtout  des œuvres de second choix (pas mal de Renoir aussi dont je déteste le rose charcutier). Beaucoup de toiles sont ennuyeuses comme la bourgeoisie de l’époque. Elles sont peu représentatives des techniques impressionnistes sauf le Camille sur son lit de mort où Monet a peint la défunte comme une meule.
La seule peinture à vraiment sortir du lot est Berthe Morisot au bouquet de violettes d’Edouard Manet, déjà vue au Musée d’Orsay et qui sert d’affiche ici (comme elle était belle Berthe quand elle était jeune, et quel regard). Je sauve aussi un autoportrait de Gauguin jeune, le Portrait du fils de l’artiste par Cézanne (qui ressemble à un Gauguin) et l’étonnant Félix Pissarro en jupe (quelle bizarre idée a eu son père de le peindre habillé en mignonne petite fille à l’âge de huit ans, longs cheveux et regard de souffrance ; il mourra de tuberculose à vingt-trois ans).
Quant à la scénographie, elle est des plus banales, chaque salle étant consacrée à un thème : les artistes, leurs femmes ou muses, leurs enfants, leur vie sociale, leur intimité familiale (couture, coup d’œil à la fenêtre, un thé et au lit).
Julie, la fille de Berthe Morisot et Eugène Manet (frère de) qui posa pour plusieurs a droit à une salle « Jeune et Julie » (ah ah ah). Jolie, elle l’est beaucoup moins que sa mère sur ces toiles mais plus loin une photo anonyme montre que dans la réalité elle l’était fort.
Il est onze heures quand j’en ai fini. La grande et belle fille qui veille sur les bustes de la dernière salle me dit au revoir. C’est une façon de parler (comme on dit).
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Sur l’un des murs du Musée cet extrait d’une lettre de Vincent Van Gogh à son frère Theo ; « Ah peindre des figures comme Claude Monet peint les paysages. Voilà ce qui reste malgré tout à faire. » Il le fera, mais ce n’est pas visible à Rouen où seul un tableau de peu d’intérêt du peintre est montré.
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A l’entrée de l’exposition quelques caricatures que le jeune Monet, vingt ans, dessinait et vendait dans les rues du Havre. L’une est ainsi légendée : « Notaire à marier. Grande facilité de paiement. On pourra entrer en jouissance de suite. »
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Dans la série des dommages collatéraux de l’opération Normandie Impressionniste, une reproduction de la Suzanne à l'ombrelle de Monet va être constituée de dix mille petits carrés de laine, « une oeuvre collaborative des tricoteurs et tricoteuses normands ».
« Tous les points sont admis, sauf le jersey qui "s'enroule" et les côtes. » Une paire d’aiguilles et des pelotes de laine seraient arrivées au Conseil Constitutionnel.
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Après avoir dû capituler sur l’emplacement de la Saint Romain, les forains montrent qu’à nouveau ce sont eux qui commandent. Ce lundi après-midi, dès le rejet pour vice de forme du recours déposé contre l’abattage des platanes de la presqu’île de Wellington et sans se soucier de la pétition signée par huit mille personnes, les tronçonneuses d’Yvon Robert, Maire de Rouen, Socialiste, sont entrées en action protégées par la Police tenant les opposants présents à distance. Et tournez manèges !
 

19 juillet 2016


Je ne sais pas précisément ce qu’est la Rouen Firing Line, cette compétition de planche à roulettes organisée quai de Béthencourt derrière le Cent Six mais comme il y a un concert gratuit à l’issue ce samedi soir et qu’il fait beau, que j’ai envie de sortir, je vais voir de quoi il retourne.
Pour ce faire, je passe par le nouvel espace vert de bord de Seine et découvre sitôt après que l’opération festiviste Rouen sur Mer a toujours lieu, en plus petit, plus loin, tournant résolument le dos au fleuve, les transats orientés vers la route. Derrière ce bac à sable, comme le prolongeant, sont installés les rampes à planchistes. S’y exercent des branlotins et une branlotine qui ne sont pas virtuoses.
A vingt heures, devant un public d’une centaine de personnes, Greyfell, un duo masculin, prend place sur la scène et envoie sa musique forte.
-Ce sont deux anciens des Beaux-Arts, me dit l’une de mes connaissances au pied plâtré, tu vois où ça mène.
-Oui, n’importe où.
Je recule de dix cases afin de protéger mes oreilles. Ça ne suffit pas. Je mets des bouchons d’oreilles et sais maintenant quel genre de musique j’écoute : de la musique assourdie. Parmi le public sont des porteurs de casquettes et de tatouages mais aussi des habitués des concerts de rock. Je n’y compte pas plus d’une fille pour neuf garçons. Toutes sont là parce qu’elles accompagnent des garçons.
Au bout d’une huitaine de morceaux, le duo en a fini. « On s’appelle Greyfell et on vient de Rouen », dit l’un des musiciens avant de descendre de scène (j’espère que le voyage n’a pas été trop difficile). Doit leur succéder un autre groupe masculin nommé Jessica93.
J’en reste là, n’ayant pas envie de passer toute la soirée avec les oreilles bouchées, et décide de rentrer en poursuivant le long du quai de la rive gauche puis en revenant par le quai de la rive droite. Ce n’est qu’arrivé au pied du pont Flaubert que je trouve une poubelle où jeter mes bouchons. Je traverse la Seine par ledit pont et longe les restaurants qui ne manquent pas de client(e)s. Passant à hauteur du Cent Six, j’entends parfaitement Jessica93. De là, avec le fleuve entre la musique et moi, ce n’est pas désagréable.
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Ce dimanche soir, dans le jardin de la copropriété, apéritif dînatoire débouchant sur le concours du rire le plus vulgaire.
Le troisième prix est remporté par l’une des habitantes. Le premier et le deuxième par deux des invitées. Les deux ou trois hommes présents ne sont que pâles figurants ne méritant même pas un prix de consolation.
Je n’aurais pas dû jeter mes bouchons d’oreilles, ils me seraient bien utiles.
 

18 juillet 2016


En milieu de semaine dernière, un je ne sais qui dépose nuitamment un tas de choses dont il se débarrasse sous le porche de la copropriété. Au petit matin, celles qui n’ont pas envie d’avoir ça sous les yeux les transportent dans la ruelle à l’aide d’un diable. Il y a là un vieil évier métallique, deux meubles de rangement abîmés, une télé à écran plat, un seau ayant servi à bricoler. A l’autre bout de la ruelle, venu d’ailleurs, stagne déjà un vieux canapé clic clac déglingué et l’égout est bouché depuis le dernier orage..
La nuit suivante sont ajoutés au tas sous ma fenêtre une paire de chaussures, un matelas d’une personne et une vieille glacière cradingue mais la télé et l’un des meubles sont récupérés par un nécessiteux. Disparaissent ensuite le vieil évier et l’autre meuble. A l’autre bout, des sacs poubelles jouxtent désormais le canapé.
Dans le même temps, les graffitis sur les murs et le sol sont de plus en plus nombreux. Ceux dégradant la porte d’entrée de la copropriété sont là depuis des mois, peut-être une année. Aucun(e) des copropriétaires résidant(e)s n’a jugé bon de demander au service municipal concerné de venir les effacer (les locataires ne sont pas autorisés à faire cette démarche).
Bref, la venelle où j’habite n’a jamais été aussi sale, un objet d’édification pour les visiteurs estivaux. Quand on y verra prospérer les rats le fantasme de la « rue du Moyen-Age » des guides touristiques sera devenu réalité.
                                                              *
Ce samedi matin, à six heures, alors que je me lève, j’ai l’oreille alertée par un bruit de conversation avinée sous ma fenêtre. Deux jeunes couples essaient d’entrer dans l’immeuble d’en face. Ils n’ont pas le code de la barrière métallique ou l’ont oublié. L’un des hommes la secoue violemment, sans effet. Il se recule et d’un grand coup de pied l’oblige à s’ouvrir.
Qui sont-ils ? Des invités d’un des habitants ? Des vacanciers sous-locataires ? Des cambrioleurs ? Dois-je appeler la Police ? Avant que je m’y décide, et aucune lumière ne s’étant allumée dans l’un des appartements qui semblent tous désertés par leurs habitant(e)s en titre, les deux femmes et l’un des hommes, porteur d’un sac poubelle, ressortent. « Allez François dépêche-toi, on y va. » L’autre les rejoint et ils disparaissent, la barrière restant ouverte.
                                                              *
« Moka, non ! » « Moka, viens-là ! » Tel est le texte un peu répétitif du jeune couple de voisins nouvellement à chien lorsqu’elle et lui sortent dans le jardin avec leur animal en cours de dressage.
Faut pas se moquer de Moka. L’aurait pu s’appeler Clafoutis, Tiramisu ou Apfelstrudel.
 

16 juillet 2016


Au temps du Minitel, début des années quatre-vingt-dix, j’ai eu pendant quelques mois une chaude correspondance épistolaire avec une jolie jeune femme niçoise mariée croisée sur une messagerie. Je devais lui écrire à une adresse qui n’était pas la sienne. J’ai toujours ses lettres ainsi qu’une photo d’elle bronzant nue sur le pont d’un bateau. Où était-elle ce soir de Quatorze Juillet tragique ?
Tout le monde va voir un feu d’artifice donc tout le monde peut être sur la liste des victimes. « Où aller en vacances ? On n'est plus à l’abri nulle part. », c’est ce que se disent certaines que je croise à Rouen, rue de l’Hôpital, ce vendredi.
-Ou alors à la montagne. Dans un petit coin où il n’y a personne, suggère l’une.
Il n’y a pas que les lieux de vacances à être devenus dangereux. Ce qui s’est passé sur la promenade des Anglais peut se reproduire un dimanche à Rouen. Ce n’est pas la barrière mise en travers de la rue Armand-Carrel qui arrêterait un dix-neuf tonnes fonçant sur le marché du Clos Saint-Marc.
Je me souviens m’être déjà inquiété de la chose, après ce qui avait eu lieu à Dijon, lors du dernier Marché de Noël sis devant la Cathédrale (et je pense même l’avoir écrit). Là aussi, rien n’aurait empêché une telle horreur, une voiture ou un camion pouvant surgir de la rue des Carmes.
                                                           *
Pour la première fois des enfants parmi les victimes, écrivais-je hier. Non, m’écrit l’un de mes lecteurs, il y avait déjà eu les trois enfants juifs assassinés par le tueur de Toulouse. Il a raison hélas. C’est qu’écrivant, je ne pensais qu'aux attentats de Paris (ceux du treize novembre), ayant trouvé à l’époque que ça tenait du miracle qu'il n'y ait pas eu d'enfants ou d'adolescents en terrasse à neuf heures du soir un vendredi.
 

15 juillet 2016


Deuxième semaine de concerts gratuits à Rouen en ce jeudi qui est aussi le Quatorze Juillet, je choisis d’aller voir dans un premier temps Cabaret Contemporain place du Flo’s et du Socrate réunis. Ce groupe de cinq garçons joue de la musique électronique sans employer de machines, utilisant des instruments acoustiques préparés et bricolés (deux contrebasses, un clavier, une guitare et une batterie). A l’écoute, l’illusion est parfaite et de cette agréable musique au kilomètre, je prends de quoi parcourir un demi-heure.
Je me déplace ensuite de quelques dizaines de mètres jusqu’à la cour intérieure de l’Espace du Palais découvrant à cette occasion la nouvelle entrée qui permet de rejoindre les commerces du niveau inférieur et de ressortir dans la rue Saint-Lô, un raccourci que j’ajouterai à ceux que j’emploie lors de mes déplacements en ville. Là joue et chante un sympathique duo italien parlant le français Ilaria Graziano & Francesco Forni, de la musique folk plaisante à entendre.
Cela me suffisant, je rentre à la maison tandis que la fête continue et suis comme chaque année réveillé par le feu d’artifice.
Au matin, j’apprends ce qui s’est passé à Nice, au moins quatre-vingts morts par attentat islamo fasciste, le camion blanc fonçant dans la foule après le feu d’artifice, pour la première fois des enfants parmi les victimes, et Hollande Président qui fait la liste des mesures prises et qui seront prolongées, aucune d’elles ne permettant d’empêcher que se reproduise une telle horreur.
 

Des familles vacancières prennent place dans le train des travailleurs de sept heures vingt-huit pour Paris ce mercredi de mi-juillet. A cette heure matutinale les moutards se tiennent tranquilles, aussi le voyage est-il aussi paisible qu’à l’accoutumée. Je relis Une sécheresse à Paris d’Alain Chany (Points/Seuil) que j’ai vu évoquer en bien quelque part mais je n’en aime décidément pas l’écriture maniérée. Ce livre retournera dans le stock de ceux à revendre.
A l’arrivée, je monte dans un bus Vingt prêt à partir où j’obtiens la dernière place assise, tout au fond. Descendu à la Bastille, j’ai le temps de me livrer à mes occupations habituelles avant que le premier nuage noir n’arrive. Celui-ci envoie sa drache alors que je marche vers Beaubourg après avoir emprunté pour la première fois le vert passage privé mais ouvert en journée de la Cour Damoye entre le douze rue Daval et le douze place de la Bastille. Un peu mouillé malgré le parapluie, je me sèche chez New New où je déjeune chinois près d’ouvriers ravis de travailler le Quatorze Juillet, c’est payé double.
Ce qui m’amène dans le quartier est la fin annoncée de la Bouquinerie du Centre, boulevard de Sébastopol, pas loin de l’endroit où eut sa première chambre chez l’habitante l’une qui m’a tenu la main (j’y ai passé une nuit clandestine).
Ce sont des employés de cette bouquinerie qui récupéraient à très bas prix sur le trottoir d’en face les livres que refusait de racheter Joseph Gibert, une pratique pas suffisante pour sauver la boutique. Contrairement à ce que j'espérais, on n’y solde pas les livres, uniquement les cédés, et encore pas tous. J’achète le double album d’un concert de Christophe à l’Olympia en deux mille deux à six euros.
J’interroge le caissier sur le jour de la fermeture définitive. « Peut-être le premier septembre mais rien n’est sûr. », me répond-il. Je lui demande aussi si la seconde Bouquinerie du Centre, sise avenue de Clichy, que j’ai souvent fréquentée lorsque habitait à proximité, rue Dautancourt, l’une (pas la même) qui m’a tenu la main, va également fermer. « Non », me dit-il.
Je suis allé récemment rue Dautancourt (où j’ai passé de nombreuses nuits) revoir le marronnier du petit jardin, l’occasion d’en vouloir au temps qui passe et fait de soi quelqu'un que plus une jeune femme ne regarde.
                                                        *
Discussion de jardin intérieur, passage de la Main d’Or :
-En général, ils font attention vos enfants.
-Oui, je les surveille ;
-C’est pas comme les petits gamins du deuxième étage. Ceux-là, ils sont excités comme tout.
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« Je suis passé Chez Léon mais il n’y avait personne, juste un vieux qui lisait dans un coin. ».
Propos imaginaire d'une jeune femme, et lecture bien réelle en ce lieu de Brooklyn existe de James Agee (Titres/Christian Bourgois), un court carnet de route plutôt décevant. Ce livre trouvé chez Book-Off ce mercredi de mi-juillet rejoindra le stock de ceux à revendre.
 

13 juillet 2016


Mail tronqué, m’indique Yahoo ce lundi matin lorsque j’ouvre la livraison hebdomadaire du Ramble Tamble de Philippe Dumez. Il y raconte le début de l’enquête qu’il mène sur la vie de son défunt parrain. C’est le plus long mail que j’aie jamais reçu.
Il me revient à cette occasion la théorie faite par je ne sais qui : le choix qu’une femme fait en matière de parrainage masculin pour son enfant signifierait : « Voici l’homme avec qui j’aurais voulu faire cet enfant ».
Cela vaut surtout quand le parrain ne fait pas partie de la famille je suppose, quoique.
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Concert improvisé de l’orchestre de la Bablake School de Coventry sur le parvis de la Cathédrale. Certain(e)s musicien(ne)s sont assis(e)s sur des chaises d’emprunt, d’autres sur les marches de pierre. Un quinquagénaire fait des photos, s’agenouillant sur le pavé. Je le soupçonne de viser sous les jupes des petites Anglaises.
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Rue Saint-Romain, un camion benne se remplit de bureaux, de lampes de chevet, de tableaux muraux et d’écrans plats. L’Hôtel de la Cathédrale change le mobilier de ses chambres.
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Rue des Bonnetiers, sur le mur de l’Archevêché, tracé par un quidam à l’encre bleue : « Pétain, reviens, t’as oublié tes chiens ».
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Une femme en terrasse de L’Interlude lit À la recherche de son vrai soi.
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Embouteillage rue de la Jeanne, ce mardi matin. Des camions livrent des distributeurs de billets destinés à remplacer ceux détruits en avril et juin par les Révolutionnaires.
                                                        *
C’est quand même mieux d’avoir un papa antiquaire quand on est un Révolutionnaire. Après avoir défilé masqué et crié qu’il fallait tout péter, pouvoir se la couler douce dans la maison de bord de mer en été.
Ce garçon aura tôt fait de trouver son vrai soi.
 

12 juillet 2016


Lisant ce dimanche soir sur les réseaux sociaux quelques messages affolés de personnes rêvant d’un refuge à la campagne ou dans un blockhaus, je me dis que je ne suis pas le seul à redouter « le match ».
L’heure venue, je suis un peu rassuré sur ma tranquillité car tout le voisinage est en ville pour la finale de cet Euro de foute. Rien ne bouge ni ne se fait entendre dans la copropriété. Dès que je me mets au lit, je m’endors.
Je suis réveillé par des bruits de pétards. Rien de comparable au vacarme de jeudi dernier. J’en conclus qu’« on » a perdu et que ça ne se crie pas sur les toits.
Celui d’un bus rouennais a servi d’estrade à ceux qui criaient victoire l’autre jour près du O’Kallaghan's, raison pour laquelle aujourd’hui les bus et le métro ne roulent déjà plus.
Beaucoup parmi les dizaines de milliers de patriotes parqués dans la zone de fanitude de la presqu’île de Waddington, où cette pauvre Zazie a dû faire son concert à dix-neuf heures comme une débutante, vont rentrer à pied en faisant la tronche, à moins qu’ils ne préfèrent se jeter dans la Seine.
Et le drapeau tricolore, j’en fais quoi ? Mets-le dans ta culotte. Tu le ressortiras pour les Jihaux.
                                                                *
Loin heureusement, au Brésil, les prochains Jeux Olympiques, création de ce Pierre de Coubertin, qui, en mil neuf cent treize, écrivait dans ses Essais de psychologie sportive : « Les sports ont fait fleurir toutes les qualités qui servent à la guerre: insouciance, belle-humeur, accoutumance à l’imprévu, notion exacte de l’effort à faire sans dépenser des forces inutiles. »
 

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