Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
4 septembre 2025
Le mercredi est un jour comme un autre pour les élèves de l’immense Collège Lycée La Providence Saint-Charles situé à l’autre bout de ma rue. A peine le jour levé qu’elles et eux passent devant mes vitres sans guère faire de bruit.
Il a encore plu cette nuit mais c’est au sec que je rejoins le Bistrot de la Poste en me procurant un pain au chocolat à la boulangerie contiguë pas vue hier où il est à un euro vingt. Dans les rues et sur les places voisines s’installe un courageux marché. Il est question de rafales de vent atteignant soixante-quinze kilomètres heure. « Moi, j’ai retiré la bâche hier », déclare mon voisin de table. Des averses ou des orages sont également annoncés. Cela va encore être pour moi une journée à ne pas faire grand-chose. A neuf heures et quart, tout à coup, grosse affluence, il repleut et pas qu’un peu. J’attends que ça cesse et rejoins la Cathédrale Saint-Etienne où cette fois j’entre.
Dans cette ville démunie de remparts, les premiers évêques bâtisseurs en ont fortifié la façade et le mur nord (contreforts, mâchicoulis, meurtrières, tour de guet). On y trouve une nef romane et un chœur de style anglo-normand. Réalisé en mil sept cent quarante-cinq par Yves Corlay, le retable de la chapelle est un chef-d’œuvre de style baroque en bois polychrome et doré à la feuille. L’orgue est de Cavaillé-Coll. Il est doté d’un très beau buffet dont certains panneaux viendraient d’Angleterre. Je fais une photo du gisant de pierre de Saint Guillaume. Cette Cathédrale a été restaurée en deux mille dix-huit mais n’est déjà plus étanche. De grosses gouttes tombent sur la table des imprimés à emporter.
Muni de mon parapluie, je retrouve aisément le chemin qui mène à La Cigale pour un nouveau café allongé verre d’eau puis la lecture des missives de Balzac à Madame Hanska. Je n’ai rien fait hier et j’ai bien peur de ne rien faire aujourd’hui. Bientôt, c’est le déluge au désespoir de deux clientes commerçantes : « T’as vu la flotte ? » Elles n’ont rien fait hier et ont bien peur de ne rien faire aujourd’hui.
Vers onze heures trente, en plus de la pluie, arrive le vent, plus question de parapluie. J’enfile mon imperméable, acheté un jour à Saint-Brieuc juste avant la tempête Alex, et descends jusqu’au marché où les ambulants sont dégoûtés. « Tu ranges déjà ? » « Bah, y a personne alors à quoi bon. »
Je choisis de déjeuner près du Bistrot de la Poste à la Brasserie du Père Tranquille qui propose un menu du jour à dix-huit euros quatre-vingt-dix affiché nulle part : crème d’avocat avec sa burrata et ses noix, sauté de veau riz basmati et panna cota au caramel. La musique est folk rock. Les nappes sont à carreaux. Les serveurs aimables et efficaces. J’apprécie surtout l’entrée. Chez le couple moules frites derrière moi la conversation vire au ressentiment. De son côté à lui, car elle l’a trompé avec une connaissance. « Je lui ai promis la mort au téléphone », dit-il. « Après ce que tu m’as fait, ajoute-t-il, je devrais même plus te parler, même plus te fréquenter » puis ils en reviennent à la taille des moules, un peu décevante.
Le temps étant un peu meilleur, je fais des courses chez U puis m’installe à une table ventée au soleil de la terrasse du Transat Kafé pour un café Balzac. J’ai toujours un peu de fièvre et un abattement à quitter la vie. Vers quatorze heures, je suis contraint de migrer sous la halle où sont d’autres tables. Je devrais être abrité mais les gouttes sont de style horizontal. Plus qu’à attendre la prochaine éclaircie et à rentrer avant une autre averse. « Bon, demain c’est bon », se réjouit un couple de touristes derrière moi. « C’est pas sûr, ça change tout le temps », les prévient la serveuse.
*
Jean-Pierre Bouyxou, homme de mauvais genre, est mort ce mardi à l’âge de soixante-dix-neuf ans. On lui doit notamment Satan bouche un coin court-métrage sorti le quatre mai mil neuf cent soixante-huit dont le sujet est Pierre Molinier, un film réédité sur le dévédé Thee Majesty Hommage à Pierre Molinier publié chez Sordide Sentimental par Jean-Pierre Turmel qui me l’a offert un jour. On peut écouter les deux Jean-Pierre sur France Culture dans l’émission Le Rendez-Vous du jeudi six décembre deux mille douze.
Il a encore plu cette nuit mais c’est au sec que je rejoins le Bistrot de la Poste en me procurant un pain au chocolat à la boulangerie contiguë pas vue hier où il est à un euro vingt. Dans les rues et sur les places voisines s’installe un courageux marché. Il est question de rafales de vent atteignant soixante-quinze kilomètres heure. « Moi, j’ai retiré la bâche hier », déclare mon voisin de table. Des averses ou des orages sont également annoncés. Cela va encore être pour moi une journée à ne pas faire grand-chose. A neuf heures et quart, tout à coup, grosse affluence, il repleut et pas qu’un peu. J’attends que ça cesse et rejoins la Cathédrale Saint-Etienne où cette fois j’entre.
Dans cette ville démunie de remparts, les premiers évêques bâtisseurs en ont fortifié la façade et le mur nord (contreforts, mâchicoulis, meurtrières, tour de guet). On y trouve une nef romane et un chœur de style anglo-normand. Réalisé en mil sept cent quarante-cinq par Yves Corlay, le retable de la chapelle est un chef-d’œuvre de style baroque en bois polychrome et doré à la feuille. L’orgue est de Cavaillé-Coll. Il est doté d’un très beau buffet dont certains panneaux viendraient d’Angleterre. Je fais une photo du gisant de pierre de Saint Guillaume. Cette Cathédrale a été restaurée en deux mille dix-huit mais n’est déjà plus étanche. De grosses gouttes tombent sur la table des imprimés à emporter.
Muni de mon parapluie, je retrouve aisément le chemin qui mène à La Cigale pour un nouveau café allongé verre d’eau puis la lecture des missives de Balzac à Madame Hanska. Je n’ai rien fait hier et j’ai bien peur de ne rien faire aujourd’hui. Bientôt, c’est le déluge au désespoir de deux clientes commerçantes : « T’as vu la flotte ? » Elles n’ont rien fait hier et ont bien peur de ne rien faire aujourd’hui.
Vers onze heures trente, en plus de la pluie, arrive le vent, plus question de parapluie. J’enfile mon imperméable, acheté un jour à Saint-Brieuc juste avant la tempête Alex, et descends jusqu’au marché où les ambulants sont dégoûtés. « Tu ranges déjà ? » « Bah, y a personne alors à quoi bon. »
Je choisis de déjeuner près du Bistrot de la Poste à la Brasserie du Père Tranquille qui propose un menu du jour à dix-huit euros quatre-vingt-dix affiché nulle part : crème d’avocat avec sa burrata et ses noix, sauté de veau riz basmati et panna cota au caramel. La musique est folk rock. Les nappes sont à carreaux. Les serveurs aimables et efficaces. J’apprécie surtout l’entrée. Chez le couple moules frites derrière moi la conversation vire au ressentiment. De son côté à lui, car elle l’a trompé avec une connaissance. « Je lui ai promis la mort au téléphone », dit-il. « Après ce que tu m’as fait, ajoute-t-il, je devrais même plus te parler, même plus te fréquenter » puis ils en reviennent à la taille des moules, un peu décevante.
Le temps étant un peu meilleur, je fais des courses chez U puis m’installe à une table ventée au soleil de la terrasse du Transat Kafé pour un café Balzac. J’ai toujours un peu de fièvre et un abattement à quitter la vie. Vers quatorze heures, je suis contraint de migrer sous la halle où sont d’autres tables. Je devrais être abrité mais les gouttes sont de style horizontal. Plus qu’à attendre la prochaine éclaircie et à rentrer avant une autre averse. « Bon, demain c’est bon », se réjouit un couple de touristes derrière moi. « C’est pas sûr, ça change tout le temps », les prévient la serveuse.
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Jean-Pierre Bouyxou, homme de mauvais genre, est mort ce mardi à l’âge de soixante-dix-neuf ans. On lui doit notamment Satan bouche un coin court-métrage sorti le quatre mai mil neuf cent soixante-huit dont le sujet est Pierre Molinier, un film réédité sur le dévédé Thee Majesty Hommage à Pierre Molinier publié chez Sordide Sentimental par Jean-Pierre Turmel qui me l’a offert un jour. On peut écouter les deux Jean-Pierre sur France Culture dans l’émission Le Rendez-Vous du jeudi six décembre deux mille douze.
3 septembre 2025
Mon petit logis Air Bibi étant situé au rez-de-chaussée, je dois faire ce que je n’aime pas : tirer les rideaux pour la nuit. Celle-ci est bonne, bien que durant mes périodes de réveil j’ai l’esprit occupé par la mort de Sylvain Amic sur son lieu de villégiature. Il s’est vu mourir puisqu’il a appelé le Samu et il devait être seul puisqu’il a téléphoné lui-même.
Au matin, alors qu’il a plu en fin de nuit, une accalmie me permet de rejoindre le centre de Saint-Brieuc sans ouvrir le parapluie. Je me procure un pain au chocolat (un euro trente) à la boulangerie Les Gallo’Pains (ah ah ah) puis m’installe à l’intérieur du Bistrot de la Poste où je commande un allongé verre d’eau (un euro soixante).
L’endroit est agréable. Un grand comptoir circulaire, une banquette et des tabourets usés par les fessiers, de la musique potable, une clientèle d’habitué(e)s qui discutent sur le thème « Ça y est, c’est reparti ». Je tente de lire Ouest-France mais les dimensions de ce journal sont rédhibitoires. « A partir de jeudi, il fera beau », dit une femme. Un homme se lève pour fermer la porte des toilettes restée ouverte, cela heurtait sa sensibilité. Tou(te)s ces Breton(ne)s donnent de la vie à ce café. Ce bruit, ajouté à la musique, m’empêcherait d’y lire. Aussi, je me propulse jusqu’à l’Office du Tourisme avec l’aide d’un aimable autochtone muni d’un smartphone.
Doté de plans supplémentaires, je retrouve le Cœur de Ville (comme ils disent) et la pluie qui fait une petite apparition sous forme d’averse. J’entre à La Cigale où la dame du comptoir est très souriante et l’allongé à un euro soixante. C’est là que je rouvre le deuxième volume de Lettres à Madame Hanska d’Honoré de Balzac laissé au repos depuis Colmar. Il m’en reste une bonne moitié à lire. Dès aujourd’hui, je vais me mettre à faire disparaître les 155 000 Fr. de dettes avec une rapidité de travail qui vous prouvera combien j’ai le cœur tout à vous. C’est beau comme du Bayrou. « C’était très bien, on avait les fumées du Portugal qui remontaient. Sinon on aurait eu quarante degrés », raconte la deuxième serveuse au cuisinier. La musique est un peu forte. On entend du bègue Beder soliloqué sur du son en béton: Ma génération est passée en un clin d’œil de l’inconséquence à la paranoïa.
Vers onze heures trente il est temps de se mettre en quête d’un restaurant. « Alors, vous avez trouvé quelque chose hier ? » m’interpelle depuis sa porte la patronne de La Cuisine du Marché où c’était complet. Je lui raconte mes malheurs. « Bah oui, le lundi c’est dur. » Je lui réserve une table pour midi.
Salade de gésiers, noix de jambon mariné au piment d’Espelette, c’est la formule du jour à seize euros de La Cuisine du Marché. Ce n’est pas complet ce mardi, et que des retraité(e)s. It’s All Right chante Ray Charles. C’est fort bon. Surprise dans les toilettes : deux planches de Reiser. L’une est intitulée Gros Caca. Sur l’autre, une fillette dit à sa mère « Papa s’est pendu dans le grenier ». La mère affolée y court. Rien. Elle redescend et la fillette l’achève d’un « Poisson d’avril ! C’est pas dans le grenier, c’est dans la cave ». Le dernier dessin montre le père verdâtre suspendu à la corde.
Le Transat Kafé, près de la Cathédrale, me permet de prendre un café à un euro soixante apporté par une jeune serveuse à anneau dans le nez, en terrasse, au soleil, avec Balzac et ses hémorroïdes … les mêmes souffrances ont reparu au même endroit, il va falloir si elles persistent recourir aux bains de siège et aux fomentations. Cette fois, il n’y a pas d’ambiguïtés sur les causes, c’est bien le café…
Au matin, alors qu’il a plu en fin de nuit, une accalmie me permet de rejoindre le centre de Saint-Brieuc sans ouvrir le parapluie. Je me procure un pain au chocolat (un euro trente) à la boulangerie Les Gallo’Pains (ah ah ah) puis m’installe à l’intérieur du Bistrot de la Poste où je commande un allongé verre d’eau (un euro soixante).
L’endroit est agréable. Un grand comptoir circulaire, une banquette et des tabourets usés par les fessiers, de la musique potable, une clientèle d’habitué(e)s qui discutent sur le thème « Ça y est, c’est reparti ». Je tente de lire Ouest-France mais les dimensions de ce journal sont rédhibitoires. « A partir de jeudi, il fera beau », dit une femme. Un homme se lève pour fermer la porte des toilettes restée ouverte, cela heurtait sa sensibilité. Tou(te)s ces Breton(ne)s donnent de la vie à ce café. Ce bruit, ajouté à la musique, m’empêcherait d’y lire. Aussi, je me propulse jusqu’à l’Office du Tourisme avec l’aide d’un aimable autochtone muni d’un smartphone.
Doté de plans supplémentaires, je retrouve le Cœur de Ville (comme ils disent) et la pluie qui fait une petite apparition sous forme d’averse. J’entre à La Cigale où la dame du comptoir est très souriante et l’allongé à un euro soixante. C’est là que je rouvre le deuxième volume de Lettres à Madame Hanska d’Honoré de Balzac laissé au repos depuis Colmar. Il m’en reste une bonne moitié à lire. Dès aujourd’hui, je vais me mettre à faire disparaître les 155 000 Fr. de dettes avec une rapidité de travail qui vous prouvera combien j’ai le cœur tout à vous. C’est beau comme du Bayrou. « C’était très bien, on avait les fumées du Portugal qui remontaient. Sinon on aurait eu quarante degrés », raconte la deuxième serveuse au cuisinier. La musique est un peu forte. On entend du bègue Beder soliloqué sur du son en béton: Ma génération est passée en un clin d’œil de l’inconséquence à la paranoïa.
Vers onze heures trente il est temps de se mettre en quête d’un restaurant. « Alors, vous avez trouvé quelque chose hier ? » m’interpelle depuis sa porte la patronne de La Cuisine du Marché où c’était complet. Je lui raconte mes malheurs. « Bah oui, le lundi c’est dur. » Je lui réserve une table pour midi.
Salade de gésiers, noix de jambon mariné au piment d’Espelette, c’est la formule du jour à seize euros de La Cuisine du Marché. Ce n’est pas complet ce mardi, et que des retraité(e)s. It’s All Right chante Ray Charles. C’est fort bon. Surprise dans les toilettes : deux planches de Reiser. L’une est intitulée Gros Caca. Sur l’autre, une fillette dit à sa mère « Papa s’est pendu dans le grenier ». La mère affolée y court. Rien. Elle redescend et la fillette l’achève d’un « Poisson d’avril ! C’est pas dans le grenier, c’est dans la cave ». Le dernier dessin montre le père verdâtre suspendu à la corde.
Le Transat Kafé, près de la Cathédrale, me permet de prendre un café à un euro soixante apporté par une jeune serveuse à anneau dans le nez, en terrasse, au soleil, avec Balzac et ses hémorroïdes … les mêmes souffrances ont reparu au même endroit, il va falloir si elles persistent recourir aux bains de siège et aux fomentations. Cette fois, il n’y a pas d’ambiguïtés sur les causes, c’est bien le café…
2 septembre 2025
Pas un piéton, pas une voiture, Rouen est déserte quand, vers six heures ce lundi premier septembre, je rejoins la Gare. C’est le jour de la rentrée scolaire et je pars en vacances, ce qui n’a pas fini de me surprendre.
Dans la voiture Trois du six heures quinze pour Paris, je bénéficie d’une place libre à ma droite pour serrer mes bagages. Certains dorment. D’autres travaillent gratuitement sur leur ordinateur. Derrière moi, deux vacanciers découvrent que là où ils vont, il fait quarante degrés. « Oh la vache ! » Au passage à Asnières, j’ai une pensée particulière pour celle qui me tenait la main et qui doit retourner au collège.
Les gestionnaires des portes de la ligne Treize sont déjà à l’ouvrage mais dans la rame qui arrive je peux m’asseoir ce qui est vraiment rare.
A Montparnasse, je prends un café verre d’eau à L’Atlantique. « Bon d’accord, ils ont travaillé toute leur vie mais maintenant ils ne fichent rien », déblatère celui qui est derrière le comptoir. Il n’y a pourtant que des retraités dans son café. Leur argent va dans sa caisse. Trois euros vingt, en ce qui me concerne.
Mon Tégévé est celui de dix heures pour Brest. Il file jusqu’à Rennes. C’est là que descendront ceux qui doivent changer pour Saint-Malo car plus de train direct à cette heure. Ma voisine d’outre couloir s’en plaint, qui retourne à Dinard pour des raisons sentimentales, son compagnon n’étant plus de ce monde.
Il y a ceux qui descendent à Rennes. Il y aura ceux qui descendront à Brest. Entre les deux, il y a ceux qui descendent à Saint-Brieuc, dont moi-même. « La planète vous dit merci », me félicite l’écran. Arrivé comme prévu à douze heures quinze, je traverse la rue afin de déjeuner au Bistrot Gourmand mais il affiche les vacances de son cuisinier.
Je rejoins donc directement mon logis Air Bibi pas loin de la Gare où les clés doivent m’attendre dans leur boîte. Je le trouve ouvert et mon logeur à l’intérieur terminant de le préparer. Il m’apprend que la Brasserie Brei’z du Centre Commercial des Champs où je songeais aller est également fermée, par ordre de la Préfecture après un contrôle sanitaire. Il me conseille des restos près de la Cathédrale.
Las, à treize heures, c’est plein partout. Je tourne un moment puis reviens au Michelet. Une table s’est libérée. Il ne va pas falloir être impatient car le patron fait le service tout seul. Évidemment, il n’y a plus de plat du jour, vieille pratique de commerçant malhonnête. Je me rabats sur le fish and chips à douze euros cinquante. « Personne ne devrait être condamné à enseigner toute sa vie », déclare l’une des vieilles de la table voisine. Elle sait de quoi elle parle car elle l’a fait.
Remonté à la Gare, j’espère acheter au guichet ad hoc un abonnement mensuel aux bus de l’agglomération nommés Tub mais le préposé me dit qu’il y a un problème dû au changement de tarif et qu’il faut aller au siège de ce Tub.
Je marche donc assez loin pour découvrir une longue file d’attente sur le trottoir. Elle est si impressionnante qu’elle me fait rebrousser chemin. Adieu l’abonnement, retour à la Gare où l’homme du guichet me procure deux cartes de dix voyages, à plus cher évidemment. Je lui fais remarquer que Tub rime avec on vous entube et lui prends aussi des tickets pour les cars BreizhGo.
Tout cela est un peu décevant, il va falloir que Saint-Brieuc se rattrape.
*
Rentré, j’apprends le décès à La Roque-sur-Cèze de Sylvain Amic, autrefois Directeur du Musée des Beaux-Arts de Rouen, devenu Directeur des Musées d’Orsay et de l’Orangerie.
Cet ancien instituteur est mort d’une crise cardiaque la veille de la rentrée à l'âge de cinquante-huit ans.
L’image qui me revient de lui est celle d’un homme déjeunant seul et tardivement au Socrate.
Dans la voiture Trois du six heures quinze pour Paris, je bénéficie d’une place libre à ma droite pour serrer mes bagages. Certains dorment. D’autres travaillent gratuitement sur leur ordinateur. Derrière moi, deux vacanciers découvrent que là où ils vont, il fait quarante degrés. « Oh la vache ! » Au passage à Asnières, j’ai une pensée particulière pour celle qui me tenait la main et qui doit retourner au collège.
Les gestionnaires des portes de la ligne Treize sont déjà à l’ouvrage mais dans la rame qui arrive je peux m’asseoir ce qui est vraiment rare.
A Montparnasse, je prends un café verre d’eau à L’Atlantique. « Bon d’accord, ils ont travaillé toute leur vie mais maintenant ils ne fichent rien », déblatère celui qui est derrière le comptoir. Il n’y a pourtant que des retraités dans son café. Leur argent va dans sa caisse. Trois euros vingt, en ce qui me concerne.
Mon Tégévé est celui de dix heures pour Brest. Il file jusqu’à Rennes. C’est là que descendront ceux qui doivent changer pour Saint-Malo car plus de train direct à cette heure. Ma voisine d’outre couloir s’en plaint, qui retourne à Dinard pour des raisons sentimentales, son compagnon n’étant plus de ce monde.
Il y a ceux qui descendent à Rennes. Il y aura ceux qui descendront à Brest. Entre les deux, il y a ceux qui descendent à Saint-Brieuc, dont moi-même. « La planète vous dit merci », me félicite l’écran. Arrivé comme prévu à douze heures quinze, je traverse la rue afin de déjeuner au Bistrot Gourmand mais il affiche les vacances de son cuisinier.
Je rejoins donc directement mon logis Air Bibi pas loin de la Gare où les clés doivent m’attendre dans leur boîte. Je le trouve ouvert et mon logeur à l’intérieur terminant de le préparer. Il m’apprend que la Brasserie Brei’z du Centre Commercial des Champs où je songeais aller est également fermée, par ordre de la Préfecture après un contrôle sanitaire. Il me conseille des restos près de la Cathédrale.
Las, à treize heures, c’est plein partout. Je tourne un moment puis reviens au Michelet. Une table s’est libérée. Il ne va pas falloir être impatient car le patron fait le service tout seul. Évidemment, il n’y a plus de plat du jour, vieille pratique de commerçant malhonnête. Je me rabats sur le fish and chips à douze euros cinquante. « Personne ne devrait être condamné à enseigner toute sa vie », déclare l’une des vieilles de la table voisine. Elle sait de quoi elle parle car elle l’a fait.
Remonté à la Gare, j’espère acheter au guichet ad hoc un abonnement mensuel aux bus de l’agglomération nommés Tub mais le préposé me dit qu’il y a un problème dû au changement de tarif et qu’il faut aller au siège de ce Tub.
Je marche donc assez loin pour découvrir une longue file d’attente sur le trottoir. Elle est si impressionnante qu’elle me fait rebrousser chemin. Adieu l’abonnement, retour à la Gare où l’homme du guichet me procure deux cartes de dix voyages, à plus cher évidemment. Je lui fais remarquer que Tub rime avec on vous entube et lui prends aussi des tickets pour les cars BreizhGo.
Tout cela est un peu décevant, il va falloir que Saint-Brieuc se rattrape.
*
Rentré, j’apprends le décès à La Roque-sur-Cèze de Sylvain Amic, autrefois Directeur du Musée des Beaux-Arts de Rouen, devenu Directeur des Musées d’Orsay et de l’Orangerie.
Cet ancien instituteur est mort d’une crise cardiaque la veille de la rentrée à l'âge de cinquante-huit ans.
L’image qui me revient de lui est celle d’un homme déjeunant seul et tardivement au Socrate.
28 août 2025
Personne pour annoncer les trains ce mercredi matin en Gare de Rouen. Ils arrivent quand même. Je monte encore une fois dans le sept heures vingt-deux pour Paris. J’y poursuis la lecture de Lettres à sa fille Miriam de Groucho Marx.
Faute de métro Huit, j’opte pour le bus Vingt-Sept terminus Porte d’Ivry. Je suis le seul voyageur de ce véhicule à rallonge quand j’en descends à l’arrêt Les Ecoles.
Je prends un café à la Brasserie Les Patios, face à la Sorbonne et ses fontaines. A bâbord, la Librairie Philosophique Vrin. A tribord, au premier étage, les Editions Maisonneuve. Longtemps que je ne suis pas revenu dans ce quartier tellement parcouru des années Soixante-Dix à je ne sais quand. L’atmosphère est celle d’une place de village. Quelques passant(e)s. D’ici ou d’ailleurs. Je lis Groucho jusqu’à dix heures. « Alors, ça fera trois euros », me dit la gérante des Patios.
Le rayon Journaux et le rayon Correspondances sont toujours là chez Gibert, bien fournis, mais les ouvrages d’occasion qui m’intéressent sont à des prix exorbitants, quinze ou vingt euros. De quoi m’amener à penser que c’est ma dernière visite ici. Partant, que je ne mettrai plus le pied au Quartier Latin. Ce que je vois chez Boulinier un peu plus bas sur le boulevard Saint-Michel ne me fera pas changer d’avis.
Je traverse la Seine alors que la file d’attente des touristes s’allonge devant la Sainte Chapelle. Boulevard de Sébastopol, je prends à gauche au Duc des Lombards. Après avoir quand même jeté un œil (comme on dit) au Boulinier de la place Joachim-du-Bellay, je m’assois à l’ombre face à la Fontaine des Innocents et à la droite d’une fille qui lit. Un mal lavé, les yeux pleins d’alcool, une boîte de bière à la main, se glisse entre elle et moi en lui demandant « si ça la dérange pas ». Evidemment bientôt il l’entreprend en lui demandant ce qu’elle lit et elle a tort de lui répondre. Il poursuit en lui proposant de venir boire un verre avec lui. Elle s’en dépatouille en répondant que ses parents vont arriver. Ne sachant plus que faire, ce gros lourd se tourne vers moi. « Qu’est-ce que vous écrivez ? » « Ça me regarde. »
Chez au Diable des Lombards, je déjeune d’une quiche au jambon blanc et d’un confit de canard pommes sautées puis descends au sous-sol du Book-Off de Saint-Martin. C’est ma dernière opportunité pour un achat de livres. Il ne me déçoit pas totalement puisque je remonte avec quelques ouvrages à un euro : La Nuit d’Elie Wiesel (Minuit), Lettres luthériennes de Pier Paolo Pasolini (Points), Lettres vives petite anthologie littéraire (Parangon) et Cascadeur d’Hubert B., un étrange carnet à spirale où alternent dessins et textes manuscrits (Ripopée).
Au Petit Opportun, après un café, je retrouve Groucho, sa fille Miriam, Ruth son ex-femme alcoolique, Kay sa deuxième femme à peine plus âgé que Miriam et leur bébé Melinda. Miriam plonge elle aussi dans l’alcoolisme. Kay le quitte pour un acteur minable qui la tabasse. Groucho se remarie avec une troisième, Eden, âgée de vingt ans, tandis que Miriam, âgée de vingt-sept ans, se fait soigner en hôpital psychiatrique.
Une lecture que je termine en attendant à Saint-Lazare le dix-sept heures quarante pour Rouen. A ma gauche, une chômeuse se monte le bourrichon au téléphone : « Tu sais qu’il y a un énorme mouvement social, le dix ? »
*
Une femme à l’un des employés de Book-Off : « Et sinon, vous n’avez pas une section particulière pour la dépression ? »
*
« Cascadeur est un carnet à l’état brut, débordant d’idées dérangées, où Hubert B. fait cohabiter schémas musicaux, sombres portraits, paroles de chanson jamais chantées et lettres d’excuses à ses voisins, le tout soutenu par son regard touchant et amusé sur le monde extérieur. Au fond du livre, dans un carton dort une cassette de son univers bruyant, bricolé en entier. »
C’est ce que j’apprends en rentrant. J’apprends aussi que je me suis fais avoir car à mon exemplaire manque la cassette.
Faute de métro Huit, j’opte pour le bus Vingt-Sept terminus Porte d’Ivry. Je suis le seul voyageur de ce véhicule à rallonge quand j’en descends à l’arrêt Les Ecoles.
Je prends un café à la Brasserie Les Patios, face à la Sorbonne et ses fontaines. A bâbord, la Librairie Philosophique Vrin. A tribord, au premier étage, les Editions Maisonneuve. Longtemps que je ne suis pas revenu dans ce quartier tellement parcouru des années Soixante-Dix à je ne sais quand. L’atmosphère est celle d’une place de village. Quelques passant(e)s. D’ici ou d’ailleurs. Je lis Groucho jusqu’à dix heures. « Alors, ça fera trois euros », me dit la gérante des Patios.
Le rayon Journaux et le rayon Correspondances sont toujours là chez Gibert, bien fournis, mais les ouvrages d’occasion qui m’intéressent sont à des prix exorbitants, quinze ou vingt euros. De quoi m’amener à penser que c’est ma dernière visite ici. Partant, que je ne mettrai plus le pied au Quartier Latin. Ce que je vois chez Boulinier un peu plus bas sur le boulevard Saint-Michel ne me fera pas changer d’avis.
Je traverse la Seine alors que la file d’attente des touristes s’allonge devant la Sainte Chapelle. Boulevard de Sébastopol, je prends à gauche au Duc des Lombards. Après avoir quand même jeté un œil (comme on dit) au Boulinier de la place Joachim-du-Bellay, je m’assois à l’ombre face à la Fontaine des Innocents et à la droite d’une fille qui lit. Un mal lavé, les yeux pleins d’alcool, une boîte de bière à la main, se glisse entre elle et moi en lui demandant « si ça la dérange pas ». Evidemment bientôt il l’entreprend en lui demandant ce qu’elle lit et elle a tort de lui répondre. Il poursuit en lui proposant de venir boire un verre avec lui. Elle s’en dépatouille en répondant que ses parents vont arriver. Ne sachant plus que faire, ce gros lourd se tourne vers moi. « Qu’est-ce que vous écrivez ? » « Ça me regarde. »
Chez au Diable des Lombards, je déjeune d’une quiche au jambon blanc et d’un confit de canard pommes sautées puis descends au sous-sol du Book-Off de Saint-Martin. C’est ma dernière opportunité pour un achat de livres. Il ne me déçoit pas totalement puisque je remonte avec quelques ouvrages à un euro : La Nuit d’Elie Wiesel (Minuit), Lettres luthériennes de Pier Paolo Pasolini (Points), Lettres vives petite anthologie littéraire (Parangon) et Cascadeur d’Hubert B., un étrange carnet à spirale où alternent dessins et textes manuscrits (Ripopée).
Au Petit Opportun, après un café, je retrouve Groucho, sa fille Miriam, Ruth son ex-femme alcoolique, Kay sa deuxième femme à peine plus âgé que Miriam et leur bébé Melinda. Miriam plonge elle aussi dans l’alcoolisme. Kay le quitte pour un acteur minable qui la tabasse. Groucho se remarie avec une troisième, Eden, âgée de vingt ans, tandis que Miriam, âgée de vingt-sept ans, se fait soigner en hôpital psychiatrique.
Une lecture que je termine en attendant à Saint-Lazare le dix-sept heures quarante pour Rouen. A ma gauche, une chômeuse se monte le bourrichon au téléphone : « Tu sais qu’il y a un énorme mouvement social, le dix ? »
*
Une femme à l’un des employés de Book-Off : « Et sinon, vous n’avez pas une section particulière pour la dépression ? »
*
« Cascadeur est un carnet à l’état brut, débordant d’idées dérangées, où Hubert B. fait cohabiter schémas musicaux, sombres portraits, paroles de chanson jamais chantées et lettres d’excuses à ses voisins, le tout soutenu par son regard touchant et amusé sur le monde extérieur. Au fond du livre, dans un carton dort une cassette de son univers bruyant, bricolé en entier. »
C’est ce que j’apprends en rentrant. J’apprends aussi que je me suis fais avoir car à mon exemplaire manque la cassette.
26 août 2025
Plutôt que m’encombrer le cerveau avec le nouveau rebondissement de la vie politique française intitulé « Bye bye Bayrou ! », j’ouvre ce mardi matin Lettres à Guillaume Apollinaire de Louise de Coligny-Châtillon dite Lou, un petit livre qui fait pendant à celui des Lettres à Lou de Guillaume Apollinaire et dont voici l’une des premières, datée du vendredi cinq février mil neuf cent quinze :
Mon Gui, je suis malade d’excitation… et je t’aime à la folie… tes vers intitulés « Un rêve » où je suis le petit garçon que tu fouettes si bien !... ces vers me font trembler de désir et d’amour ! je n’en peux plus… j’écris vite avec la folle impatience d’être seule dans mon petit lit, lumière éteinte, et de t’aimer comme un fou en me faisant menotte toute la nuit… toute la nuit jusqu’à ce que je m’évanouisse…… Gui ! mon Gui ! je veux vivre toute cette scène avec toi… je veux être le petit garçon pas sage… je veux que tu fasses tomber mon petit pantalon, pour bien voir mes fesses roses… je veux que ton bras passe sous ma taille pressant très fort mon petit ventre dur qui jouit sous cette pression… pendant que de l’autre main tu me fouetteras si fort, si fort, m’obligeant à tenir mes fesses roses bien en l’air bien écartées… pendant que tu taperas si fort, si impitoyablement, n’écoutant ni mes pleurs ni mes cris, que mon petit derrière ayant passé par toutes les couleurs que tu décris si bien, deviendra tout ruisselant de sang…… je veux cela ! je veux que tu m’obliges à subir cela…… et je veux toute la scène décrite par toi, mon poète adoré…… je veux cette possession qui me fait si mal et si peur !... je veux que tu m’y forces… que tu m’attaches s’il le faut…… si je n’ai pas le courage d’être à toi de cette façon aussi prends de force ce que je te refuse… possède-moi toute entière, complètement, profondément…… je t’aime à la folie… et suis dans un tel état de désir et de passion, que si tu étais là ce soir, tu n’aurais pas besoin de prendre de force même cette caresse-là… je m’étendrais sur le ventre docilement, amoureusement… tu m’écarterais mes fesses trop sensibles, trop nerveuses, et tout doucement, avec douceur, mais avec fermeté, une fermeté que n’émotionneraient ni mes cris, ni mes supplications… tu pénétrerais voluptueusement, profondément… et je mourrais de douleur, de jouissance et d’amour sous cette caresse nouvelle… et nous nous évanouirions tous deux, mon amour, dans le spasme trop violent… Gui je n’en peux plus ce soir ! j’ai un besoin fou de ton amour ! de tes caresses… aussi de tes sévérités… fouette-moi… humilie-moi… je t’aime infiniment tu es mon maître adoré… je t’aime je t’aime… tout mon être t’appelle… je vais me tordre de désir toute la nuit… brise-moi ! fouette-moi au sang !... ah ! être près de toi, dans tes bras, dans ton amour sauvage et passionné… être tous deux tout seuls dans la petite chambre de Nîmes…et tout oublier… vivre en réalité merveilleuse les rêves les plus fous ! je t’adore !
*
Le poème Un rêve n’a pas été retrouvé, précise une note infrapaginale. Dommage. J’aurais aimé le lire pour savoir comment il a pu mettre cette jeune Lou dans un pareil état.
*
Elles et iel en terrasse au Son du Cor. L’une : « Est-ce que j’annonce à ma grand-mère que je me suis fait percer les tétons ? »
Mon Gui, je suis malade d’excitation… et je t’aime à la folie… tes vers intitulés « Un rêve » où je suis le petit garçon que tu fouettes si bien !... ces vers me font trembler de désir et d’amour ! je n’en peux plus… j’écris vite avec la folle impatience d’être seule dans mon petit lit, lumière éteinte, et de t’aimer comme un fou en me faisant menotte toute la nuit… toute la nuit jusqu’à ce que je m’évanouisse…… Gui ! mon Gui ! je veux vivre toute cette scène avec toi… je veux être le petit garçon pas sage… je veux que tu fasses tomber mon petit pantalon, pour bien voir mes fesses roses… je veux que ton bras passe sous ma taille pressant très fort mon petit ventre dur qui jouit sous cette pression… pendant que de l’autre main tu me fouetteras si fort, si fort, m’obligeant à tenir mes fesses roses bien en l’air bien écartées… pendant que tu taperas si fort, si impitoyablement, n’écoutant ni mes pleurs ni mes cris, que mon petit derrière ayant passé par toutes les couleurs que tu décris si bien, deviendra tout ruisselant de sang…… je veux cela ! je veux que tu m’obliges à subir cela…… et je veux toute la scène décrite par toi, mon poète adoré…… je veux cette possession qui me fait si mal et si peur !... je veux que tu m’y forces… que tu m’attaches s’il le faut…… si je n’ai pas le courage d’être à toi de cette façon aussi prends de force ce que je te refuse… possède-moi toute entière, complètement, profondément…… je t’aime à la folie… et suis dans un tel état de désir et de passion, que si tu étais là ce soir, tu n’aurais pas besoin de prendre de force même cette caresse-là… je m’étendrais sur le ventre docilement, amoureusement… tu m’écarterais mes fesses trop sensibles, trop nerveuses, et tout doucement, avec douceur, mais avec fermeté, une fermeté que n’émotionneraient ni mes cris, ni mes supplications… tu pénétrerais voluptueusement, profondément… et je mourrais de douleur, de jouissance et d’amour sous cette caresse nouvelle… et nous nous évanouirions tous deux, mon amour, dans le spasme trop violent… Gui je n’en peux plus ce soir ! j’ai un besoin fou de ton amour ! de tes caresses… aussi de tes sévérités… fouette-moi… humilie-moi… je t’aime infiniment tu es mon maître adoré… je t’aime je t’aime… tout mon être t’appelle… je vais me tordre de désir toute la nuit… brise-moi ! fouette-moi au sang !... ah ! être près de toi, dans tes bras, dans ton amour sauvage et passionné… être tous deux tout seuls dans la petite chambre de Nîmes…et tout oublier… vivre en réalité merveilleuse les rêves les plus fous ! je t’adore !
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Le poème Un rêve n’a pas été retrouvé, précise une note infrapaginale. Dommage. J’aurais aimé le lire pour savoir comment il a pu mettre cette jeune Lou dans un pareil état.
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Elles et iel en terrasse au Son du Cor. L’une : « Est-ce que j’annonce à ma grand-mère que je me suis fait percer les tétons ? »
25 août 2025
Soustraire un quart d’heure au soleil revenu, c’est ce que je fais ce dimanche après-midi en entrant au Musée National de l’Education, rue Eau-de-Robec. Il s’agit de voir l’exposition Dessins d’enfants (1936-1941).
La jeune personne à l’accueil du Munaé me demande mon code postal et je pénètre dans la petite salle du rez-de-chaussée où sont affichés dans une demi-pénombre des dessins réalisés entre mil neuf cent trente-six et mil neuf cent quarante et un par des « jeunes filles parisiennes de quatorze à seize ans » élèves de Cours Complémentaire.
Leur professeure, Adrienne Jouclard, également artiste peintre, permettait à ses élèves de dessiner leur vie quotidienne. Aux dessins de comptines, de jeux de récréation, de commémorations succèdent ceux des événements des premières années de la Deuxième Guerre Mondiale, la mobilisation générale, la « drôle de guerre », l’exode, le retour avec le passage de la ligne de démarcation, les files d’attente devant les magasins et les difficultés de ravitaillement auxquelles sont confrontées les mères de famille.
Mères de famille qu’elles seraient bientôt. Car ce qui était promis à ces jeunes filles dans ce Cours Complémentaire où elles apprenaient la couture, la cuisine et l’obéissance, c’était le mariage, l’enfermement domestique et l’enfantement.
Il y avait encore un Cours Complémentaire dans une annexe du Collège Ferdinand Buisson à Louviers quand j’y étais élève. Ces filles ne sortaient pas en recréation aux mêmes heures que nous. Je me souviens bien d’elles. La classe de Troisième donnait sur la cour. Toutes ces filles s’offraient à nos regards en s’alignant le long du mur face à nos fenêtres du premier étage. Elles ouvraient leurs blouses pour nous montrer leurs jambes dévoilées par leurs minijupes. Une jolie rousse m’inspirait de coupables pensées.
La jeune personne à l’accueil du Munaé me demande mon code postal et je pénètre dans la petite salle du rez-de-chaussée où sont affichés dans une demi-pénombre des dessins réalisés entre mil neuf cent trente-six et mil neuf cent quarante et un par des « jeunes filles parisiennes de quatorze à seize ans » élèves de Cours Complémentaire.
Leur professeure, Adrienne Jouclard, également artiste peintre, permettait à ses élèves de dessiner leur vie quotidienne. Aux dessins de comptines, de jeux de récréation, de commémorations succèdent ceux des événements des premières années de la Deuxième Guerre Mondiale, la mobilisation générale, la « drôle de guerre », l’exode, le retour avec le passage de la ligne de démarcation, les files d’attente devant les magasins et les difficultés de ravitaillement auxquelles sont confrontées les mères de famille.
Mères de famille qu’elles seraient bientôt. Car ce qui était promis à ces jeunes filles dans ce Cours Complémentaire où elles apprenaient la couture, la cuisine et l’obéissance, c’était le mariage, l’enfermement domestique et l’enfantement.
Il y avait encore un Cours Complémentaire dans une annexe du Collège Ferdinand Buisson à Louviers quand j’y étais élève. Ces filles ne sortaient pas en recréation aux mêmes heures que nous. Je me souviens bien d’elles. La classe de Troisième donnait sur la cour. Toutes ces filles s’offraient à nos regards en s’alignant le long du mur face à nos fenêtres du premier étage. Elles ouvraient leurs blouses pour nous montrer leurs jambes dévoilées par leurs minijupes. Une jolie rousse m’inspirait de coupables pensées.
24 août 2025
Frisquet, ce samedi matin vingt-trois août. C’est le jour où il me faut remettre un pull pour aller au marché des pauvres, rive gauche, aux Emmurées, me procurer des fruits et légumes. Ce que désormais je fais avec le bus gratuit Effe Sept.
Rive droite, Rouen a cette atmosphère de fin de vacances et de pré-rentrée que je n’aime guère, les vacanciers réjouis côtoyant les étudiants stressés. Toutefois, je la supporte mieux qu’à l’époque devenue lointaine où je devais retourner chaque année à l’école.
Au Son du Cor, certains racontent leurs vacances tellement réussies et tellement merveilleuses. Le smartphone a remplacé le projecteur de diapositives pour ennuyer ses amis avec des photos.
Comme chaque année, certains promettent une rentrée sociale agitée. Cette fois, le dix septembre « Bloquons tout » ont lancé divers groupes de la mouvance d’extrême-droite. Un projet auquel se sont ralliés Mélenchon et Sud Rail, rejoints modérément par le Péhesse et les Ecolos.
Une qui reste prudente, c’est la cheffe de la Cégété, Sophie Binet. Elle trouve que pour l’instant « c’est encore totalement nébuleux ». J’adore cet adjectif que l’on rencontre rarement, notamment dans une bouche de syndicaliste. Je dois avouer que j’ai un faible pour cette jeune femme. Je la trouve fort séduisante. Je parle de son physique.
*
Toujours pas de Cosidime dans les officines, m’indique celui qui s’est occupé de moi le mois dernier à la Grande Pharmacie du Centre. Je lui demande pourquoi il ne m’a pas indiqué que ce médicament avait un générique, comme on me l’a appris à la Grande Pharmacie Bailly de Paris. Il me soutient qu’il me l’a dit puis revient sur ce mensonge en découvrant que ce générique ne figure pas sur son écran. C’est donc la faute du logiciel. Comment faire confiance à quelqu'un qui raconte n’importe quoi et n’a comme connaissance de son métier que ce que lui affiche son ordinateur ? Grâce à l'emballage que j'ai apporté, sa consœur me commande un flacon de ce générique que je récupère l’après-midi.
*
De trois endroits différents me sont parvenues de bonnes nouvelles de mes livres offerts en cadeau. Certains ont été lus. D’autres peuvent encore l’être. Aucun n’a été jeté dans une boîte à livres.
*
Un été de zonards à Rouen. Des affranchis déglingués. Présents place de la Calende, place de Vieux, devant Saint-Maclou, devant la Gare, dans les rues piétonnières. Des casse-pieds qu’il est difficile d’éviter. Jamais je n’en ai vu autant. On se croirait presque à Quimper.
Rive droite, Rouen a cette atmosphère de fin de vacances et de pré-rentrée que je n’aime guère, les vacanciers réjouis côtoyant les étudiants stressés. Toutefois, je la supporte mieux qu’à l’époque devenue lointaine où je devais retourner chaque année à l’école.
Au Son du Cor, certains racontent leurs vacances tellement réussies et tellement merveilleuses. Le smartphone a remplacé le projecteur de diapositives pour ennuyer ses amis avec des photos.
Comme chaque année, certains promettent une rentrée sociale agitée. Cette fois, le dix septembre « Bloquons tout » ont lancé divers groupes de la mouvance d’extrême-droite. Un projet auquel se sont ralliés Mélenchon et Sud Rail, rejoints modérément par le Péhesse et les Ecolos.
Une qui reste prudente, c’est la cheffe de la Cégété, Sophie Binet. Elle trouve que pour l’instant « c’est encore totalement nébuleux ». J’adore cet adjectif que l’on rencontre rarement, notamment dans une bouche de syndicaliste. Je dois avouer que j’ai un faible pour cette jeune femme. Je la trouve fort séduisante. Je parle de son physique.
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Toujours pas de Cosidime dans les officines, m’indique celui qui s’est occupé de moi le mois dernier à la Grande Pharmacie du Centre. Je lui demande pourquoi il ne m’a pas indiqué que ce médicament avait un générique, comme on me l’a appris à la Grande Pharmacie Bailly de Paris. Il me soutient qu’il me l’a dit puis revient sur ce mensonge en découvrant que ce générique ne figure pas sur son écran. C’est donc la faute du logiciel. Comment faire confiance à quelqu'un qui raconte n’importe quoi et n’a comme connaissance de son métier que ce que lui affiche son ordinateur ? Grâce à l'emballage que j'ai apporté, sa consœur me commande un flacon de ce générique que je récupère l’après-midi.
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De trois endroits différents me sont parvenues de bonnes nouvelles de mes livres offerts en cadeau. Certains ont été lus. D’autres peuvent encore l’être. Aucun n’a été jeté dans une boîte à livres.
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Un été de zonards à Rouen. Des affranchis déglingués. Présents place de la Calende, place de Vieux, devant Saint-Maclou, devant la Gare, dans les rues piétonnières. Des casse-pieds qu’il est difficile d’éviter. Jamais je n’en ai vu autant. On se croirait presque à Quimper.
21 août 2025
C’est au tour de la ligne Huit du métro parisien d’être en travaux. Et elle, jusqu’à la fin du mois. Impossible de rejoindre Ledru-Rollin. Je prends donc le bus Vingt-Neuf jusqu’à Bastille. Cela après avoir poursuivi la lecture de Lettres à sa fille Miriam de Groucho Marx dans un train de sept heures vingt-deux peu fréquenté dont quasiment toutes les toilettes étaient hors d’usage.
« Confondre ticket de métro et de bus peut vous coûter 120 € », titre Le Parisien que je lis au Camélia après être passé pour rien au Marché d’Aligre, Emile et Amin étant toujours absents. Ce sont les touristes qui sont victimes de la fourberie de Pécresse avec son ticket à deux euros pour le bus et deux euros cinquante pour le métro. Biper dans un bus avec un ticket de métro conduit à se faire sévèrement taxer en cas de contrôle.
Je quitte le Book-Off de Ledru-Rollin porteur de trois livres à un euro, Saint-Pétersbourg Histoire, Promenades, Anthologie et Dictionnaire sous la direction de Lorraine de Meaux (Bouquins Laffont), Mon cahier de dessin de Slawomir Mrozek (Noir sur Blanc) et Le Livre des regrets de Jacques Drillon (Actes Sud) puis j’attends en face, pendant un quart d’heure, le bus Soixante-Seize terminus Châtelet.
J’en descends à Hôtel-de-Ville et rejoins China, rue de la Verrerie, pour un menu à volonté. De là au sous-sol du Book-Off de Saint-Martin où tournent toujours les ventilateurs.
J’en remonte avec un choix hétéroclite de livres à un euro : Une enfance au château de Lord Berners (Les Cahiers Rouges Grasset), Post-scriptum le journal intime de Jane Birkin (Fayard), Personne n’est à l’intérieur de rien de Jean Dubuffet et Valère Novarina (L’Atelier Contemporain), Bourgeois & soldats (Novembre 1918) d’Alfred Döblin (Pandora) et Lexique des règles typographiques (Imprimerie Nationale). Ce dernier me permettra de vérifier qu’en ce domaine mes règles personnelles sont loin d’être orthodoxes.
Je m’installe à L’Opportun pour un long café verre d’eau lecture. C’est le moment où la pluie, modérée, commence à tomber.
Pour des raisons tarifaires, c’est avec le train Nomad de dix-sept heures quarante que je dois regagner Rouen. A Saint-Lazare, je fais recharger mes deux cartes Navigo Easy, une pour les bus, une pour le métro, à ne pas confondre. « Vous savez que vous pouvez mettre les deux sur la même », me dire l’aimable guichetier. Je sais mais je préfère en avoir deux. Ça m’oblige à réfléchir pour ne pas me faire avoir quand je monte dans un bus. Deux et pas au même endroit. En cas de perte ou de vol, mon préjudice serait divisé par deux.
*
Une jeune femme à béquille dans le Soixante-Seize : « Mon frère a eu un p’tit bout ». Un p’tit bout, c’est comme ça que certain(e)s appellent un nouvel exemplaire de Génération Cinquante qui va se prendre en pleine face la tourmente climatique, économique et politique. « C’est un bébé Evian, blond aux yeux bleus », ajoute-t-elle.
« Confondre ticket de métro et de bus peut vous coûter 120 € », titre Le Parisien que je lis au Camélia après être passé pour rien au Marché d’Aligre, Emile et Amin étant toujours absents. Ce sont les touristes qui sont victimes de la fourberie de Pécresse avec son ticket à deux euros pour le bus et deux euros cinquante pour le métro. Biper dans un bus avec un ticket de métro conduit à se faire sévèrement taxer en cas de contrôle.
Je quitte le Book-Off de Ledru-Rollin porteur de trois livres à un euro, Saint-Pétersbourg Histoire, Promenades, Anthologie et Dictionnaire sous la direction de Lorraine de Meaux (Bouquins Laffont), Mon cahier de dessin de Slawomir Mrozek (Noir sur Blanc) et Le Livre des regrets de Jacques Drillon (Actes Sud) puis j’attends en face, pendant un quart d’heure, le bus Soixante-Seize terminus Châtelet.
J’en descends à Hôtel-de-Ville et rejoins China, rue de la Verrerie, pour un menu à volonté. De là au sous-sol du Book-Off de Saint-Martin où tournent toujours les ventilateurs.
J’en remonte avec un choix hétéroclite de livres à un euro : Une enfance au château de Lord Berners (Les Cahiers Rouges Grasset), Post-scriptum le journal intime de Jane Birkin (Fayard), Personne n’est à l’intérieur de rien de Jean Dubuffet et Valère Novarina (L’Atelier Contemporain), Bourgeois & soldats (Novembre 1918) d’Alfred Döblin (Pandora) et Lexique des règles typographiques (Imprimerie Nationale). Ce dernier me permettra de vérifier qu’en ce domaine mes règles personnelles sont loin d’être orthodoxes.
Je m’installe à L’Opportun pour un long café verre d’eau lecture. C’est le moment où la pluie, modérée, commence à tomber.
Pour des raisons tarifaires, c’est avec le train Nomad de dix-sept heures quarante que je dois regagner Rouen. A Saint-Lazare, je fais recharger mes deux cartes Navigo Easy, une pour les bus, une pour le métro, à ne pas confondre. « Vous savez que vous pouvez mettre les deux sur la même », me dire l’aimable guichetier. Je sais mais je préfère en avoir deux. Ça m’oblige à réfléchir pour ne pas me faire avoir quand je monte dans un bus. Deux et pas au même endroit. En cas de perte ou de vol, mon préjudice serait divisé par deux.
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Une jeune femme à béquille dans le Soixante-Seize : « Mon frère a eu un p’tit bout ». Un p’tit bout, c’est comme ça que certain(e)s appellent un nouvel exemplaire de Génération Cinquante qui va se prendre en pleine face la tourmente climatique, économique et politique. « C’est un bébé Evian, blond aux yeux bleus », ajoute-t-elle.
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