Le Journal de Michel Perdrial

Le Journal de Michel Perdrial




Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.







Rss

24 décembre 2016


« Vous avez récemment publié quelque chose qui enfreint les règlements Facebook et n’êtes plus autorisé à utiliser cette fonctionnalité pour le moment. » m’écrit Mark Zuckerberg ce vendredi après-midi, m’interdisant pour vingt-quatre heures de publier, commenter ou même liker quoi que ce soit. « Si vous voulez ne plus être bloqué à l’avenir, assurez-vous d’avoir bien lu et compris les Standards de la communauté Facebook. », ajoute-il. Il me menace aussi d’exclusion définitive si je récidive.
Cela s’est passé en trois coups de cuiller à pot.
Acte un : Effe Bé me tape sur les doigts pour une photo publiée il y a plusieurs années montrant Angela Merkel nue avec ses copines dans un camp de vacances en Allemagne de l’Est du temps de sa jeunesse (l’une de ses copines était vraiment jolie).
Acte deux : Effe Bé me rappelle un souvenir d’il y a plusieurs années, une photo prise par Kate Barry, la fille suicidée de Jane Birkin, que j’avais publiée au moment de sa mort, montrant une jeune femme au joli mouvement de tête et à la poitrine dénudée, et me propose de la republier. Poussé au vice par celui-là même qui prétend m’en garantir, je ne me fais pas prier (comme on dit).
Acte trois : Effe Bé condamne cette nouvelle publication et me bannit provisoirement.
Il est probable qu’un logiciel dépisteur de photos de nu est à l’origine de mes ennuis. Possible aussi qu’un(e) de mes ami(e)s m’ait dénoncé.
Tandis que le carillonneur de la Cathédrale donne son concert de Noël (Chostakovitch et des traditionnels allemands, anglais et français), je supprime de ma liste quelques-un(e)s que je ne connais pas assez et/ou avec qui il n’y a aucune interaction depuis au moins un an.
 

23 décembre 2016


Ce mercredi, un train de sept heures vingt-huit peu fréquenté puis un bus Vingt me mènent place de la Bastille où le monument en travaux est désormais entouré d’une publicité Spotify. Au Café du Faubourg, les serveurs se demandent s’ils ne devraient pas s’arrêter de travailler à dix-sept heures vu que c’est le jour le plus court. Hivernale, la température l’est.
A dix heures, j’entre chez Book-Off. Carlos y est heureusement vite remplacé par Paolo Conte. Les livres y ont de moins en moins de place. Je m’en inquiète auprès d’une employée. Elle me répond qu’à peine mis en rayon, ils sont achetés. Cette explication me laisse dubitatif. Malgré le froid, je passe par le marché d’Aligre et suis content à midi de pouvoir me réchauffer Chez Céleste.
Madame Céleste porte un bonnet de Noël à lumières clignotantes. C’est elle qui m’apporte le foie de veau que j’ai commandé.
-Ce n’est pas des patates, me dit-elle en me montrant les légumes, c’est des topinambours. Est-ce que ça vous va ?
Je lui dis oui, bien que je n’aie pas le souvenir d’en avoir déjà mangé. Quant au foie de veau, cela fait des lustres que je n’en ai eu dans mon assiette. Tout cela me plaît bien.
Un groupe de six mange derrière moi dont je profite de la conversation sans savoir qui parle. Il est question d’un repas de Noël organisé par une association. Bénévoles, bénéficiaires, tout va bene. Il y aura des animateurs de table. J’imagine que ce sera festif, convivial et peut-être même participatif. A côté, un homme seul cherche topinambour sur son téléphone afin de savoir si ça vaut le coup d’en manger. En dessert, j’opte pour le moelleux au chocolat. Avec un quart d’excellent vin du pays, cela fait dix-neuf euros cinquante.
Je retourne à la Bastille par la rue Manuel-Valls. Cette fois, elle n’est plus gardée à chaque extrémité. Chez Lady Long Solo on doit se réjouir de n’avoir plus le véhicule bleu de la Gendarmerie Mobile garé devant la vitrine consacrée aux livres sur le haschisch. Un bus Vingt doit me rapprocher de l’Opéra Garnier mais les embouteillages sont si importants qu’à l’arrêt Grands Boulevards le chauffeur annonce qu’il n’ira pas plus loin. Tout le monde descend en grognant. Je continue à pied me glissant dans la foule hostile des touristes et acheteurs de Noël.
Trop de monde également dans le Book-Off de Quatre-Septembre où si les livres sont légèrement plus nombreux que dans l’autre, j’en trouve néanmoins peu qui m’intéressent.
Je rentre tôt, par le train de seize heures cinquante. Deux femmes chargées de sacs emplis des paquets enrubannés s’y assoient avec soulagement. L’une fait le point, énumérant les cadeaux et leurs destinataires.
-Et pour ton mari ? lui dit l’autre.
-Ah zut, je l’ai oublié.
                                                             *
En page de garde de l’exemplaire d’United Colors of Crime de Richard Morgiève vendu un euro chez Book-Off, une dédicace de l’auteur à Alain Kruger, producteur d’On ne parle pas la bouche pleine, l’émission culinaire de France Culture :
« Cher Alain Kruger
United Colors of Crime est mon film de mots, d’amour et de haine – Mon oncle mort à Monte-Cassino vient chercher le souvenir des coquelicots rouges dans les confins du Big Country. Bien à vous. »
Encore un cadeau qui n’a pas plu. Un livre de recettes aurait été plus approprié.
                                                            *
Un euro également Le voyage de La Bouille par mer et par terre, récit humoristique et pittoresque illustré par Jules Adeline, dans la réédition de Petit à Petit, simple reproduction de l’édition originale de mil huit cent soixante-dix-sept, un petit travail facile pour petit éditeur régional paresseux.
 

22 novembre 2016


Le meilleur trajet serait par le bus Effe Deux, à prendre en direction du Parc de la Vatine, arrêt « Maulévrier ». Ensuite à pied, suivre la rue du Tronquet puis traverser par la passerelle vers les Compagnons du Devoir - Centre de Loisirs, m’a écrit l’employée du Centre Dramatique de Normandie lorsque je lui ai demandé comment faire pour rejoindre sans voiture le Cirque Tsigane Romanès que David Bobée, Directeur, a eu la bonne idée d’inviter pour le spectacle Voleurs de poules !
Le renseignement est fiable et m’évite de me perdre dans un coin de Mont-Saint-Aignan que je ne connais pas ce mardi après-midi. Du haut de la passerelle qui enjambe une deux fois deux voies allant je ne sais où, j’aperçois le chapiteau blanc installé dans le parc Rosa Parks depuis dix jours. Il est jouxté de tentes d’accueil, d’un bar à vin chaud et d’une camionnette à manger.
Ce chapiteau est bien plus beau à l’intérieur où domine le rouge. Je m’assois en bout du banc au troisième rang. Beaucoup sont venus avec enfants ou petits-enfants. Il y a aussi des couples et des esseulés dont un bizarre qui se penche sur les petits-enfants à sa proximité, ce qui provoque plusieurs déplacements de grands-parents inquiets. Deux centres de loisirs sont là également et des handicapés en fauteuil au premier rang. Un peu après quatorze heures, bien serrés les uns contre les autres, nous sommes cinq cents.
Alexandre Romanès entre en piste muni d’un micro et fait quelques plaisanteries bien rodées.
-Vos téléphones portables ne nous dérangent absolument pas. Vous pouvez les laisser sonner. Vous pouvez appeler vos amis et leur dire : « Je suis au cirque Romanès. Il va peut être y avoir un spectacle. On ne sait jamais avec ces gens-là »
Hors micro, il va voir les moutards du centre de loisirs assis à ma gauche :
-Soyez sages les enfants. Ne faites pas le cirque dans le cirque. Ce serait trop.
Sort alors de derrière le rideau la famille Romanès dans son entier. En un apparent désordre qui cache une organisation rigoureuse, les numéros de jonglage, voltige, trapèze, contorsions, funambulisme s’enchaînent portés par une musique exubérante ou mélancolique et le chant envoûtant de Délia, la femme d’Alexandre. Celui-ci qui fut dompteur de lion intervient l’espace d’une parenthèse avec son chien savant. Le reste du temps, en arrière-plan, il veille sur la famille où les filles ont le beau rôle d’un œil de patriarche débonnaire. Quelques plumes de poule s’échappent des poches d’un jongleur.
Le plus spectaculaire est pour la fin avec un numéro d’acrobatie en grande hauteur et sans filet qui me fait frémir autant que lorsque j’étais enfant, suivi de celui d’une joueuse avec le feu qui n’est pas pour me tranquilliser.
Après les applaudissements copieux et les saluts dansés de toute la famille, Alexandre Romanès fait un peu de publicité pour ses trois livres « publiés chez Gallimard ». L’un contient des proverbes tziganes. Il nous en donne trois dont deux que je connaissais mais ignorais la provenance. Celui que je découvre est son préféré : « Ne te moque jamais des riches, ça pourrait t’arriver ».
                                                                           *
Les riches, le Cirque Tzigane Romanès les connaît bien, pour avoir son chapiteau parisien square Parodi dans le Seizième dont ils cherchent à l’expulser, laissant à d’autres le soin de les décourager par la manière forte: fenêtres de caravanes cassées, costumes volés, câbles coupés, projecteurs détruits.
« Il y a toujours eu des cirques square Parodi et ça ne posait jamais problème. Là, le souci, c'est le mot tsigane accolé à celui de cirque » commentait Alexandre Romanès pour France Info le douze novembre dernier, ajoutant : « Quand on est gitan, on ne porte pas plainte. »
                                                                         *
« Un mouvement d'extrême droite, le Siel (Souveraineté, identité et liberté), a même organisé une manifestation devant le chapiteau, bloquant toutes les sorties. « Ils m'ont dit : Nous sommes la droite de l'extrême droite. Je leur ai répondu : Attention, les gars, vous allez tomber dans le précipice ! » (Le Point, dix novembre deux mille seize)
 

21 décembre 2016


Un peu de sagesse antique ne peut faire de mal en cette période trouble. Voici quelques vérités et bons principes tirés des Lettres à Lucilius de Sénèque, une correspondance dont le destinataire est peut-être fictif et que j’ai lue dans la version publiée par Arléa sous le titre Apprendre à vivre:
Lettre un :
… l’essentiel de la vie s’écoule à mal faire, une bonne partie à ne rien faire, toute la vie à faire autre chose que ce qu’il faudrait faire.
On remet la vie à plus tard. Pendant ce temps, elle passe.
Lettre cinq :
A l’intérieur, dissidence totale ! A l’extérieur, faisons comme tout le monde !
Lettre sept :
Il n’y a aucune raison pour que, tout à la vanité de monter tes talents, tu te produises en public dans des lectures ou des conférences.
Lettre vingt-deux :
Tout le monde veille non à bien vivre mais à vivre longtemps, alors qu’en fait il est donné à tout le monde de bien vivre, mais de vivre longtemps, à personne.
Lettre vingt-quatre :
Qui peut, en effet, plaire au peuple tout en aimant la vertu ? C’est par des moyens détestables qu’on brigue les faveurs populaires. Il faut que tu te fasses semblable à lui.
Lettre trente-deux :
Celui qui nous retient nous cause déjà bien du tort : la vie est si brève ! Et nous l’abrégeons encore par notre manque de constance en la recommençant, recommençant sans cesse. Nous la hachons menu, nous la pulvérisons.
Lettre quarante-cinq :
Examine-les l’un après l’autre ou considère-les en bloc : pas un qui ne vive les yeux rivés au lendemain
Tu me demandes quel mal il y a ? Un mal infini : ils ne vivent pas, ils attendent de vivre.
Lettre cinquante :
Tu en es encore à souhaiter ce que souhaitèrent pour toi ta nourrice, ton précepteur ou ta mère ? Tu ne te rends pas compte de tout le mal qu’ils t’ont souhaité ? Ah ! comme les vœux de nos proches nous sont contraires ! Et d’autant plus contraires qu’ils ont été couronnés de succès. Je ne m’étonne plus maintenant de toutes les misères que nous traînons derrière nous depuis que nous sommes tout petits : nous avons grandi dans la malédiction des vœux de nos parents !
 

20 décembre 2016


Un horaire inhabituel pour le dernier concert de l’année à l’Opéra de Rouen, celui que la bourgeoisie bourgeoisante ne saurait manquer, quinze heures, cela parce qu’entracte compris l’interprétation de l’Oratorio de Noël de Johann Sebastian Bach par le chœur accentus et l’orchestre Le Poème Harmonique dirigés par Laurence Equilbey durera trois heures. Les places de première catégorie sont à soixante-huit euros.
Je suis dans les lieux dès quatorze heures quinze.
-Toujours là, me dit l’un de mes lecteurs appuyé sur sa canne.
-Oui, vous aussi.
-Plus pour longtemps.
-Mais si, mais si.
Initialement prévu pour être perché en haut du second balcon, j’ai pu obtenir mieux, au troisième rang du premier balcon d’où j’aurai bonne vue sur l’ensemble de la scène. J’attends donc le feu vert des placeurs et placeuses au bas de l’escalier. Un couple de sexagénaires se fait rattraper dans les premières marches.
-Pardon, messieurs dames, les étages ne sont pas encore ouverts.
-Et l’ascenseur est en panne, répond homme d’un ton hargneux tout en faisant demi-tour suivi de sa femme à qui il dit : « Maintenant, je ne laisse plus rien passer ».
Trois heures de musique religieuse vont lui faire du bien.
« Oh la la, trois heures », entends-je plusieurs fois quand on s’installe au balcon, le plus souvent dans la bouche d’un homme ayant suivi sa femme. Celui assis à ma gauche porte une chemise à carreaux et je sens qu’il aurait aimé avoir du temps pour couper du bois dans l’appentis de la maison de Saint-Martin-du-Vivier.
Cet oratorio de Bach a pour caractéristique de me plaire et de m’ennuyer à la fois. L’entracte a lieu dès que le nommé Jésus est né mais ensuite les Rois Mages mettent bien longtemps à trouver sa crèche.
Le succès est total pour l’orchestre, les choristes et les quatre solistes. En remerciement, Laurence Equilbey nous souhaite de joyeuses fêtes et nous offre un petit bis.
                                                             *
L’autre dimanche, à la Halle aux Toiles, c’était le Salon du Disque. J’en regarde une vidéo. Dans les allées, des hommes, des hommes et encore des hommes. Seules deux femmes sont visibles qui semblent suivre un mari. Le goût du vinyle, ce n’est pas seulement celui d’une musique qui serait de meilleure qualité.
 

19 décembre 2016


Ce dimanche à onze heures, c’est la dernière séance de La Fête du Court Métrage, opération gratuite qui dure quatre jours. Cet évènement s’appelait autrefois Le Jour Le Plus Court, fine allusion à l’hiver. Le festivisme ambiant a eu raison de cette subtilité et a transformé certaines séances en animations ridicules qui m’en ont tenu éloigné. Ainsi vendredi un jeu de piste conduisait les spectateurs dans l’ancienne école Victor Hugo et le lendemain ils regardaient les films dehors en mangeant de la soupe. Le cinéma semble ne plus pouvoir se suffire à lui-même.
En revanche, je serais allé à l’Omnia pour la première séance, Merry Xmas « sexe, comédie et tendresse », qui présentait trois films interdits aux moins de seize ans de Jean-Baptiste Saurel, La Bifle, Aquabike et Retrosexe, s’il n’y avait pas eu concert le même soir à l’Opéra de Rouen.
La dernière a pour nom La Meilleure Séance et sera suivie d’un bronche. Elle vise un public familial. Il y a donc quelques enfants dans la salle Trois de l’Omnia dont j’occupe le milieu du dernier rang. La porte grince, les fauteuils couinent, les spectateurs chuchotent jusqu’à ce qu’Hervé Aguillard, Directeur, et Jonathan Slimak de Jabran Production, responsable des festivités, disent quelques mots.
Les films montrés sont gentillets mais pas dénués d’intérêt. La plupart ne reposent que sur une idée (une seule). Le quiproquo est à l’honneur et donne à sourire. Il n’y en a qu’un qui me plaise vraiment : un dessin animé narrant la vie de fermiers dont la maison est posée en équilibre sur la pointe d’une montagne.
En fait de bronche, c’est café et croissants. À midi et demie ! Quand on est levé depuis six heures et qu’on doit affronter dans l’après-midi trois heures de Bach à l’Opéra ! Je préfère rentrer à la maison pour de plus substantielles nourritures.
                                                               *
Près de ma porte, trois sacs poubelles emplis de bouteilles vides. Déposés pendant cette Meilleure Séance. Je soupçonne qu’ils viennent d’en face, de l’appartement du dernier étage que sa propriétaire déserte. J’y ai vu un jeune barbu à la fenêtre samedi soir. Il n’était pas tout seul. Une location Air Bibi peut-être, à des malotrus sûrement.
                                                               *
On se plaint ce dimanche matin chez les commerçants du marché qui viennent boire et pisser au café Le Clos Saint-Marc :
-Les grandes surfaces sont ouvertes, les gens y z’en profitent pour faire leurs courses et y a personne au marché.
 

17 décembre 2016


Plus de prise de rendez-vous au laboratoire de biologie médicale dont je suis client, m’y apprend-on mardi dernier alors que je venais pour en prendre un, suite à ma visite annuelle chez le médecin, laquelle a été faite cette année avec six mois de retard. Il s’agit d’analyser tout ce que peut dire mon sang sur mon état de santé, particulièrement de savoir où en sont mes taux de Péhessa et de cholestérol.
L’échange est toujours succinct avec mon médecin. Il pense en grande partie selon ce que lui disent les fabricants de médicaments, comme la plupart de ses confrères. Il me demande si j’ai donné suite à la proposition de l’association Emma qui organise la détection systématique du cancer du colon (non), mais pas si je me suis fait vacciner contre la grippe (non).
L’ordonnance imprimée, il vérifie mon numéro de téléphone. « Je vous appelle s’il y a quelque chose d’anormal », me dit-il. « Je suppose que pour le cholestérol, ce n’est pas la peine », ajoute-t-il. Il a plusieurs fois essayé de me prescrire des statines. « Encore moins que les autres fois, lui dis-je, j’ai vu un documentaire sur Arte qui n’a fait qu’encourager ma méfiance, vous l’avez vu ? ». « Non, mais on ne cesse de recevoir des mises en garde de la Caisse, j’en suis un peu fatigué. »
Je me méfie tout autant de la pertinence de la vérification systématique du taux de Péhessa (Prostate-Specific Antigen). Ce vendredi matin, après avoir été me faire prélever à sept heures précises, je lis sur Slate.fr, qui choisit précisément ce jour pour republier un article de deux mille quatorze, de quoi me conforter dans cette méfiance. On y dit que ce dépistage conduit à un « sur-diagnostic » et donc à un « sur-traitement », lequel peut avoir comme conséquence impuissance et incontinence.
Un peu plus tard, celle qui travaille à Paris m’apprend qu’un septuagénaire de sa connaissance vient d’apprendre qu’il est atteint d’un cancer foudroyant de la prostate, inopérable en l’état.
Vers dix-sept heures, empruntant la Cathédrale par le travers pour éviter le Marché de Noël, je vais un peu inquiet chercher mes résultats.
Mon taux de Péhessa est redescendu dans les normes et, grosse surprise, il en est de même pour le cholestérol, ce qui n’était jamais le cas depuis une trentaine d’années, et alors que je ne me soucie de régime que de façon secondaire. Tout le reste est normal comme d’habitude.
Je devrais être rassuré mais, de même qu’un résultat anormal ne me semble pas suffisant pour indiquer que je suis malade, un résultat normal ne me semble pas une preuve de bonne santé.
                                                            *
Les vacances d’hiver, c’est fait aussi pour les chiens. Aboyus a eu envie de revoir sa Normandie. Le voisinage peut profiter à nouveau de son incontinence sonore.
 

16 décembre 2016


Je passe au large de l’abreuvoir à vin chaud du Marché de Noël, affronte la foule des acheteurs de dernière minute rue du Gros et commence à respirer une fois tourné à gauche dans la rue de la Champmeslé. Ce jeudi soir, je vais encore une fois à l’Opéra de Rouen. C’est pour de la musique de chambre, un concert qui bénéficie du décor de l’opéra The Rake’s Progress.
La première partie est consacrée à Franz Schubert avec le Trio à cordes numéro un en si bémol majeur, le Nocturno en mi bémol majeur pour piano, violon et violoncelle et Le Pâtre sur le rocher pour soprano, clarinette et piano, dernière œuvre du compositeur. La soprano, c’est Jenny Daviet, de retour dans la maison.
Des musicien(ne)s de l’Orchestre sont venu(e)s applaudir leurs camarades. Étonnant de voir ces hommes à l’entracte sans leur uniforme, habillés de façon bien différente les uns des autres, du strict manteau noir au blouson de cuir en passant par l’écharpe romantique jetée sur l’épaule. Chez les femmes on est plutôt classique (c’est le cas de le dire, comme on dit) et pantalon.
La deuxième partie est consacrée au Pierrot Lunaire, vingt et un poèmes du symboliste belge Albert Giraud dans leur traduction en allemand mis en musique par Arnold Schönberg. Ils sont parlés chantés par une Jenny Daviet un peu inquiétante transformée en clone de Liza Minnelli dans Cabaret puis en Pierrot avant de redevenir elle-même. Elle est moult applaudie et les musicien(ne)s itou.
Le Marché de Noël est cerné de barrières métalliques quand il est fermé. Un étroit passage entre celles-ci et le magasin Hache et Aime me permet néanmoins de rentrer chez moi.
                                                              *
L’association L’Abordage annonce la mort à trente-trois ans du festival Le Rock Dans Tous Ses Etats, Guy Lefrand, Maire d’Evreux, Droitiste, ayant décidé de ne plus la financer, l’accusant d’un considérable déficit. Je ne sais pas ce qu’il en est du fond de cette histoire mais Lefrand promet un autre festival. Je l’ai vu à la télévision remémorer la présence de Jimmy Hendrix à Evreux et promettre la venue d’un artiste aussi important « et vintage ». Fichtre.
                                                             *
Je ne suis allé qu’une fois au Rock Dans Tous Ses Etats, en deux mille quatre, pour Bashung.
 

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